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Ce blog voudrait vous permettre de vivre un chemin spirituel au rythme de la liturgie de l'Eglise catholique.

Les méditations s'appuient soit sur les textes bibliques quotidiens, soit sur la prière de l'Eglise.

Puisque nous sommes tous responsables de la foi des autres, n'hésitez pas à laisser vos commentaires.

Nous pourrons ainsi nous enrichir de la réflexion des autres.







samedi 28 décembre 2024

Saint Famille de Jésus, Marie et Joseph - 29 décembre 2024

 C'est quoi une "sainte famille" ?




(Tableau d'Arcabas, Jésus au milieu des docteurs de la Loi)




Il y a des chiffres qui font chaud au cœur. Celui que j’ai trouvé en préparant l’homélie de ce dimanche en fait partie. Il concerne la famille, il date de 2023. Il est publié par l’Union Nationale des Associations Familiales. A la question « Qu’est-ce qui est important dans la vie ? », 97% de la population estime que la famille est « très importante » ou « importante » dans la vie. Cette part ne varie pratiquement pas depuis au moins trois décennies. La famille est plébiscitée à tout âge : en France, 90 % des 16-24 ans jugent la famille "importante dans la vie" (et 76 % "très importante"). En ce jour où nous célébrons la Sainte Famille, il me semblait important de vous partager cette bonne nouvelle. La famille, qu’elle soit sainte ou pas, a encore un bel avenir devant elle. Et c’est plutôt rassurant au vu des familles que la liturgie nous présente aujourd’hui. Parce que je trouve quand même paradoxale que, pour célébrer la Sainte Famille, on ne présente pas une seule famille que certains jugeraient « normale » aujourd’hui. 

Regarder la famille d’Elcana et d’Anne. Déjà, Elcana a deux épouses : Anne et Peninna. Alors qu’Anne est stérile, Peninna avait donné des enfants à Elcana et elle profitait sa situation pour humilier Anne, la préférée d’Elcana. Après une énième humiliation, Anne va donc au temple de Silo prier Dieu de lui accorder un enfant. Elle disait : Seigneur de l’univers ! Si tu veux bien regarder l’humiliation de ta servante, te souvenir de moi, ne pas m’oublier, et me donner un fils, je le donnerai au Seigneur pour toute sa vie, et le rasoir ne passera pas sur sa tête. Vous aurez compris à la première lecture de ce dimanche que sa prière a été exaucée. Le petit Samuel est né. Ce qui me surprend, c’est l’écart entre son désir d’enfant, réel, et son attitude quand l’enfant est sevré. Lorsque Samuel fut sevré, Anne, sa mère, le conduisit à la Maison du Seigneur, à Silo ; l’enfant était encore tout jeune. Anne avait pris avec elle un taureau de trois ans, un sac de farine et une outre de vin. On offrit le taureau en sacrifice, et on amena l’enfant au prêtre Éli. Anne lui dit alors : « Écoute-moi, mon seigneur, je t’en prie ! Aussi vrai que tu es vivant, je suis cette femme qui se tenait ici près de toi pour prier le Seigneur. C’est pour obtenir cet enfant que je priais, et le Seigneur me l’a donné en réponse à ma demande. À mon tour je le donne au Seigneur pour qu’il en dispose. Il demeurera à la disposition du Seigneur tous les jours de sa vie. » Alors ils se prosternèrent devant le Seigneur. Vous comprenez mon embarras ? Elle le voulait tellement, elle en a pleuré toutes les larmes de son corps, et voilà qu’à peine sevré, elle le rend au Seigneur, elle l’abandonne au temple de Silo. C’est une famille normale pour vous ? Certes, Anne lui apportera chaque année un petit manteau lors du pèlerinage annuel ; mais quand même, est-ce suffisant ? 

La deuxième famille du jour est celle que nous célébrons. C’est la famille de Jésus, Marie et Joseph. Je ne m’attarderai pas sur les circonstances de la naissance de l’enfant. Jésus est le Fils de Dieu fait homme, et il est clair que pour la première partie de ce titre, Joseph ne pouvait pas prétendre l’accomplir. Il entrera dans le projet de Dieu en accueillant l’enfant qui n’est pas le fruit de son union à Marie. Lorsque nous les croisons douze ans plus tard, lors de leur pèlerinage annuel au Temple de Jérusalem, voilà que l’enfant disparaît, trois jours durant. Et lorsqu’enfin ses parents, morts d’inquiétude le retrouvent au Temple, assis au milieu des docteurs de la Loi, il les rembarre en disant : Comment se fait-il que vous m’ayez cherché ? Ne saviez-vous pas qu’il me faut être chez mon Père ? Alors certes, c’est Jésus ; alors certes, il ne ment pas : Dieu est son Père. Mais était-ce vraiment utile de mettre ses parents dans l’inquiétude aussi longtemps et de leur parler ainsi ? Si Luc finit par nous donner le sentiment de Marie (elle gardait dans son cœur tous ces événements), il ne dit rien des sentiments de Joseph. Comment a-t-il pris l’interpellation de ce fils adoptif ? 

Il est question d’une troisième famille dans les textes de ce jour. C’est celle évoquée par Jean dans sa première lettre : l’Eglise. C’est ainsi que je comprends l’affirmation répétée par Jean : nous sommes (appelés) enfants de Dieu ! Si nous sommes tous enfants de Dieu, c’est que nous sommes tous frères et sœurs, membres de cette unique famille qu’est l’Eglise, la communauté des croyants. Et pourtant, il n’y a rien de plus divisé que l’Eglise. Elle est divisée en différentes confessions ; ces différentes confessions sont elles-mêmes divisées en différentes chapelles, des plus libérales aux plus conservatrices. Et il arrive qu’elles se chamaillent allègrement, pour utiliser un doux euphémisme. Le travail œcuménique est toujours à faire, avec les autres Eglises et à l’intérieur de nos propres divisions. On ne peut pas vraiment dire que l’Eglise soit une famille normale. A moins que la normalité de la famille ne soit pas à placer là où nous la plaçons d’habitude (c'est-à-dire sa composition) et que Dieu lui-même a quelque chose à nous dire à ce sujet. 

Pour beaucoup de croyants, une famille normale, c’est un papa, une maman et des enfants. Pour l’enquête dont je parlais au début, sont considérés comme famille, les couples sans enfant, les couples avec enfants et les familles monoparentales. Et si je regarde de près les trois familles proposées à notre méditation, leur normalité vient plutôt du fait qu’elles sont toutes référées à Dieu, toutes en lien avec lui. C’est vrai d’Elcana, Anne et Samuel ; c’est vrai de Jésus, Marie et Joseph ; c’est vrai de la grande famille des croyants au Christ. Peut-être qu’il nous faut envisager que le critère de normalité d’une famille, c’est, malgré les soubresauts que l’idée de famille peut connaître, d’être capable d’entrer dans le grand projet de Dieu qui est de faire de toute l’humanité une famille unie autour de lui. Plutôt que de nous déchirer sur le format familial idéal, il serait peut-être plus judicieux de comprendre comment Dieu attend de nous, de nos familles, qu’elles entrent dans son projet à lui, et de les aider dans ce sens. Comment chaque famille, dans sa singularité, peut-elle répondre à l’appel de Dieu à quelque chose qui la dépasse ? Pour Anne et Elcana, c’était accepter de laisser le jeune Samuel, à peine sevré, au temple de Silo pour qu’il reçoive l’éducation qui fera de lui le prophète que l’on connaît. Pour Marie et Joseph, c’était d’accepter que Jésus voit plus grand, plus loin, et qu’il se consacre à sa véritable mission, celle pour laquelle il est entré dans le monde : révéler son Père et sa miséricorde. Pour l’Eglise, c’est peut-être d’entrer toujours plus dans la mission que Dieu lui a confiée : faire connaître la Bonne Nouvelle du Salut afin que les hommes se convertissent et vivent une véritable fraternité. 

A défaut de nous entendre tous sur une définition unique de la famille, nous pourrions nous entendre sur les différentes voies qui mèneront nos familles, quelles qu’elles soient, à vivre quelque chose de la sainteté attendue. La Sainte Famille n’est pas sainte parce qu’elle est idéale et pure ; elle est sainte parce que chacun de ses membres a répondu à ce que Dieu attendait de lui. Marie en acceptant de porter Jésus ; Joseph en renonçant à son projet de renvoyer Marie et en la prenant chez lui, comme épouse ; Jésus, en allant jusqu’à la croix pour dire aux hommes combien ils étaient aimés de Dieu. L’Eglise, ainsi que nos familles qui en sont une cellule, ne seront saintes, qu’à cette condition-là : entrer, avec joie, confiance et espérance, dans ce que Dieu attend d’elles et de chacun de nous, et de chercher à l'accomplir du mieux possible. Amen. 


mercredi 25 décembre 2024

Messe du jour de Noël - 25 décembre 2024

 Quatre messes pour entrer dans le mystère de l'incarnation.




(Jean RESTOUT, L'adoration des bergers, 1761, Cathédrale St Louis de Versailles, Source L'Adoration des bergers - une douce Nativité à voir à Versailles - Diocèse de Versailles)




Quelqu’un a-t-il déjà pris le temps de lire tous les évangiles proposés pour la célébration de Noël ? Les habitués de Noël connaissent l’évangile de Luc, proclamé lors de la messe de la nuit, vous savez, l’histoire de Marie et Joseph, jetés sur les routes de Galilée et de Judée à la faveur d’un recensement. Marie est enceinte ; arrivent les jours où elle doit enfanter et ils ne trouvent de place nulle part. L’histoire se poursuit avec l’annonce faites aux bergers de cette naissance, par des anges qui chantent la gloire de Dieu. Les plus attentifs connaitront encore l’évangile du jour de Noël que je viens de proclamer : le prologue de l’Evangile de Jean. Un texte philosophique et spirituel qui nous parle du Verbe de Dieu, c'est-à-dire de sa Parole faite chair en Jésus. Mais il y a encore deux autres évangiles possibles.

En fait, la liturgie prévoit une première messe, dite de la veille au soir, célébrée en principe le 24 décembre. L’Eglise nous fait entendre le commencement de l’Evangile de Matthieu. Il comprend la longue généalogie de Jésus et l’annonce faite à Joseph, que tout le monde semblait avoir oublié, jusqu’à ce qu’il décide de la renvoyer en secret. Avec cette généalogie, Matthieu nous dit que Jésus, le Fils unique de Dieu, ne joue pas à l’homme. Il se fait réellement homme, assumant cette longue histoire de Dieu avec les hommes qui trouvent son origine dans la foi d’Abraham. Cette longue histoire, trois fois quatorze générations, n’a pas toujours été une histoire sainte. Matthieu ne cache rien des périodes sombres, des meurtres, des rivalités, des drames qui la traversent. Mais il nous fait comprendre qu’avec Jésus, quelque chose de neuf commence et qui amènera le monde à la perfection voulue par Dieu, à l’origine. La naissance de Jésus marque la fin de la troisième série de quatorze générations. Mais la fin de quelque chose est toujours le commencement de quelque chose d’autre. En entrant dans le monde, Jésus inaugure quelque chose de neuf, dont le point culminant sera la Nouvelle Alliance scellée par le sang de la croix. C’est cette Nouvelle Alliance que nous célébrons en chaque eucharistie et qui nous procure le Salut. Joseph, qui va entrer à son tour dans le projet de Dieu, est le comme le signe que ce monde nouveau est possible dès lors que l’homme accepte de changer de perspective et d’entrer dans la manière de voir et de faire de Dieu. 

Vient alors la messe de la nuit dont j’ai déjà rappelé l’évangile. Ce qui est marquant, c’est la parole des anges aux bergers : Ne craignez pas !  N’ayez pas peur de Dieu ; il vient à votre rencontre, il vient vous sauver. Ce qui est demandé aux hommes, c’est un acte de confiance. Dieu n’est pas l’empêcheur de vivre, toujours à surveiller, à comptabiliser surtout nos actions mauvaises pour nous les rappeler un jour. Non, Dieu est celui qui nous offre son Fils, le Sauveur. Il nous appartient de le découvrir et de le suivre, certes, mais tout nous est offert en Jésus : l’amour immense de Dieu pour chacun, sa miséricorde sans limite, sa patience à toute épreuve, et sa joie réelle quand un pécheur se convertit. Noël est aussi une invitation à changer de regard sur Dieu, à ne plus nous tromper sur Dieu. Et pour nous montrer que nous n’avons pas à avoir peur de lui, il se fait enfant. Qui a réellement peur d’un nouveau-né ?

Suit alors la messe la plus oubliée sans doute, la messe dite de l’aurore, du lever du jour. Elle nous fait entendre la suite de l’évangile de Luc, c'est-à-dire à la visite des bergers à la crèche. La nouvelle des anges les a bouleversés et ils décident d’aller voir la réalité du message. Et déjà, devant Marie et Joseph sans doute un peu étonnés, ils racontent ce qu’ils ont vu et entendu. Et ils le disent à tous ceux qu’ils rencontrent si bien que tous ceux qui les entendirent s’étonnaient de ce que racontaient les bergers. La nouvelle de la naissance du Fils de Dieu est et doit rester un sujet d’étonnement, sans quoi elle risque bien de se transformer en fable et faribole. Et cette naissance doit nous mener, comme les bergers, à glorifier et louer Dieu. Comment ne pas être reconnaissant pour ce Salut offert ? Comment ne pas être reconnaissant pour tout ce que Jésus va faire pour nous ?

La série des messes de Noël s’achève avec la messe du jour et ce prologue de Jean. Nous avons définitivement quitté le côté merveilleux de la naissance de Jésus. Jean nous fait prendre de la hauteur en nous invitant à comprendre que Jésus est la Parole même (le Verbe) de Dieu. Écouter Jésus, c’est écouter Dieu ! quand le Tout-Autre, l’Au-delà de tout, se fait tout proche à travers un enfant, c’est sa Parole qui parvient jusqu’à nous, en toute simplicité, oserais-je dire ! Tu veux savoir ce que Dieu dit aux hommes ? Ecoute Jésus ! Tu veux comprendre ce que Dieu attend de toi ? Ecoute Jésus ! Tu veux y voir clair dans ta vie ? Ecoute Jésus ! Il est la vraie Lumière qui éclaire tout homme en venant dans le monde. Ce que ce prologue nous rappelle aussi, c’est que certains ont bien compris le message des anges quand ils disaient aux bergers : Ne craignez pas !  Ils n’ont tellement pas peur de Dieu, qu’ils ne l’écoutent pas et ne l’accueillent pas ! Il est venu chez lui, et les siens ne l’ont pas reçu. Cela peut nous sembler triste, mais c’est ainsi. Dieu ne s’impose pas ; il se propose à nous en Jésus, sa Parole vivante. Et ceux qui le reçoivent, il leur a donné de pouvoir devenir enfants de Dieu, eux qui croient en son nom. Comme le précise Jean, ils sont nés de Dieu.  Nous sommes nés de Dieu ! Mesurons-nous bien ce qu’affirme ainsi ce prologue ? Nous sommes nés de Dieu ; nous sommes comme Jésus, nous sommes les frères et sœurs de cette Parole vivante ; et nous sommes en Jésus, fils et filles du Dieu vivant qui a envoyé son Fils pour nous sauver. Merveille de l’incarnation ! Dieu se fait homme pour que l’homme puisse devenir Dieu ! Dieu se fait homme pour que l’homme puisse retrouver l’image et la ressemblance de Dieu, selon lesquelles il a été créé, au commencement du monde. 

Vous mesurez le chemin parcouru en quatre messes, toutes différentes, toutes importantes pour nous faire entrer peu à peu dans ce grand mystère qui est scandale pour les uns, folie pour d’autres, mais réalité pour nous qui avons fait le choix de suivre et d’écouter Jésus. Que les célébrations de Noël ravivent notre foi et notre conscience d’être, dès maintenant, fils et filles de Dieu, en Jésus, Verbe de Dieu fait chair. Amen. 


Messe de la nuit de Noël - 25 décembre 2024

 Ne craignez pas ! 



(Botticelli, Nativité, source Wikimedia Commons)




De toutes les paroles prononcées par les anges, nous ne retenons souvent que le chant du Gloire à Dieu au plus haut des cieux, et paix sur la terre aux hommes qu’Il aime. Et pour cause : la liturgie nous en a fait jeûner durant des quatre dimanches de l’Avent. En entendant ce chant des anges, nous savons que c’est Noël, que Dieu vient établir la paix en envoyant son Fils dans le monde. D’où, autrefois, la trêve de Noël entre des nations belligérantes. On en vient à rêver que, ce soir, entre les nations en guerre, la paix se fasse, ou à tout le moins que les armes se taisent pour honorer celui qui fait de nous tous des fils, Dieu le Père, et celui qui fait de nous tous des frères, Jésus, venu en notre monde.

Pourtant, il est une autre parole qui touche mon cœur ce soir. C’est la première parole des anges aux bergers : Ne craignez pas. Quand on se met à la place des bergers qui assistent en direct à ce tapage nocturne, il y a de quoi être inquiet. Les armées et les chœurs célestes n’ont pas l’habitude de sortir ainsi et d’aller à la rencontre des hommes, en grand nombre. Les Ecritures nous avaient plutôt habitués à plus de discrétion. Ainsi, c’est Raphaël seul qui est envoyé vers Tobie ; ou Gabriel, seul encore, vers Zacharie ou la Vierge Marie, pour annoncer à l’un la naissance de Jean le Baptiste et à l’autre, la naissance de Jésus. Une cohorte d’anges, c’est exceptionnel ! Et l’on comprend pourquoi : c’est la première fois que Dieu envoie son Fils dans le monde pour le sauver ; c’est le sens même du nom de Jésus. En ce soir, nous n’avons pas à craindre la sortie quelque peu bruyante des anges du Seigneur ! Ils se réjouissent comme nous devrions nous réjouir de cette naissance humble et cachée, de celui qui passera du bois de la crèche au bois de la croix, témoignant de l’unique et puissant amour de Dieu pour nous.

Ne craignez pas ! C’est aussi ce que nous dit Dieu ce soir. Ne craignez pas de m’accueillir dans votre vie à travers mon Fils. Ne me craignez pas : cette naissance vous dit tout l’amour que je vous porte. Ne craignez pas ; je viens faire toute chose nouvelle en Jésus mon Fils. Réjouissez-vous car ce soir se réalise la prophétie d’Isaïe : le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu se lever une grande lumière ; et sur les habitants du pays de l’ombre, une lumière a resplendi. Dans la nuit de nos peurs, Dieu fait lever l’espérance. Dans la nuit de nos doutes, Dieu fait lever la foi. Dans la nuit de nos péchés, Dieu fait lever sa lumière, non pour nous juger, mais pour nous appeler à voir clair à nouveau et à le suivre sur le chemin de la Bonne Nouvelle du Salut. Aujourd’hui, dans la ville de David, vous est né un Sauveur, qui est le Christ, le Seigneur. Et voici le signe qui vous est donné : vous trouverez un nouveau-né emmailloté et couché dans une mangeoire. Dieu se fait enfant, impuissant, pour que nous apprenions à l’aimer plutôt qu’à le craindre ! Dieu se fait enfant, impuissant, pour que nous apprenions la force de la tendresse, plus forte que la force des armes. Dieu se fait enfant, impuissant, pour que nous apprenions à le reconnaître présent dans le faible, dans ce celui qu’il faut protéger, dans celui qu’il faut servir. Vraiment, qui pourrait avoir peur d’un nouveau-né ?

Ne craignez pas ! Puisse cette invitation à la confiance nous faire découvrir le visage véritable de Dieu et la grandeur infinie de son amour pour nous. Ne craignons pas ; allons à lui et avec les bergers, adorons-le ! En cet Enfant nouveau-né, Dieu nous sourit. En cet Enfant nouveau-né, Dieu fait alliance nouvelle avec nous, aujourd’hui et pour toujours. Amen.   


samedi 21 décembre 2024

4ème dimanche de l'Avent C - 22 décembre 2024

 Empressement et joie.




(Arcabas, Visitation)




        Voilà, encore trois dodos et nous fêterons Noël, la venue en notre chair du Rédempteur que Dieu a promis. Les bredele sont prêts, les cadeaux emballés, le sapin dressé et décoré. Avons-nous tout prévu ? A ceux qui s’interrogent, l’évangile indique encore deux ingrédients pour une fête de la Nativité réussie : l’empressement et la joie. 

        L’empressement, comme celui de Marie qui se met en route pour visiter sa cousine Elisabeth, la femme âgée tombée enceinte après une vie à espérer un enfant. La plus jeune, Marie, va se mettre au service de la plus âgée. Sans doute n’y a-t-il là rien d’extraordinaire, mais il se trouve que Marie est enceinte elle-aussi. L’ange Gabriel est venu lui annoncer qu’elle serait la mère du Sauveur. Cet empressement de Marie doit devenir nôtre. Il traduit notre volonté de faire connaître la nouvelle : la naissance de Jésus n’est pas juste pour nous. Il traduit notre désir de mieux servir les autres en les soulageant, en les aidant. Pas demain ; pas quand j’aurai le temps ; pas quand je n’aurai plus rien d’autre à faire. Non, l’esprit de service est nécessairement empressé ; le service n’attend pas ! En lisant ou en entendant cette page d’évangile, nous sentons bien que l’empressement de Marie n’est pas contraint et forcé ; elle fait le choix d’aller sans délai se mettre au service de sa cousine dont elle a appris qu’elle en était à son sixième mois. Sommes-nous empressés à porter le Sauveur au monde ? Sommes-nous empressés à servir ? 

        La joie. C’est l’esprit même de Noël, une fête joyeuse autour de l’Enfant nouveau-né. Pas une joie superficielle qui s’évanouira quand les sapins seront démontés et rangés. Non, une vraie joie profonde, ancrée en nous, qui nous donne de l’espérance dans un monde difficile et sombre. Une joie qui n’est pas forcée, mais réelle, parce que nous saurons, au soir de Noël, que la joie de la naissance de cet Enfant Dieu changera le monde à jamais. Une joie qui nous ouvre à l’avenir et nous entraîne à changer le monde, notre petit monde, pour que le grand monde puisse devenir meilleur. C’est la joie de Marie qu’elle exprimera dans le Magnificat ; c’est la joie d’Elisabeth et de son enfant à naître, Jean le Baptiste, qui a tressailli d’allégresse dans le sein de sa mère. Le vieux monde, qui a tant attendu le Messie, se réjouit de voir son espérance récompensée. Celui qui était attendu, est venu en Jésus. Il n’est pas encore né que déjà le monde se réjouit. Suis-je heureux de cette naissance, ou mon Noël ne sera-t-il qu’une tradition transmise en famille ? Suis-je heureux de cette naissance, où mon Noël ne sera-t-il qu’une évocation d’un passé dépassé, sans réelle prise sur ma vie ? La joie de Noël, ce n’est pas un « youpi, tout va bien, je vais bien ! », mais une joie qui me permet de tenir dans les moments difficiles, une joie qui transcende les épreuves de ma vie et me permet de tenir ferme dans la foi. Quoi qu’il m’arrive, je sais que désormais Dieu est avec moi en Jésus son Fils. C’est cette joie qu’exprime le prophète Michée quand il annonce que de Bethléem Ephrata, le plus petit des clans de Juda, sortira celui qui doit gouverner Israël. C’est la joie, comme dit Michée, de se savoir en sécurité, car désormais il sera grand jusqu’aux lointains de la terre, et lui-même, il sera la paix ! 

       Encore un peu de temps, et nous accueillerons celui que Michée annonce. Encore un peu de temps, et nous verrons de nos yeux celui qui fait, par avance, tressaillir Jean le Baptiste dans le sein de sa mère. Encore un peu de temps, et nos ciels lourds s’éclaireront d’une lumière nouvelle. Avec empressement, préparons-nous à cette naissance ; avec empressement, préparons-nous à cette joie que nul ne pourra nous ravir. Le Seigneur vient ; il l’a promis. Tout est en place, les temps sont favorables ; il ne manque que notre empressement et notre joie à l’accueillir pour que notre monde puisse commencer à devenir meilleur. Puissent ces quelques jours nous permettre d’entrer vraiment dans la joie et la paix de Noël. Amen. 


samedi 14 décembre 2024

3ème dimanche de l'Avent C - 15 décembre 2024

 Que devons-nous faire ?



(Pieter Brueghel le Jeune, La prédication de Jean le Baptiste, Musée des Beaux-Arts, Valenciennes, Source internet : d'après d'Enfer Brueghel Pieter Brueghel, le Jeune | Prédication de saint Jean-Baptiste | Images d’Art)



Ils sont surprenants, tous ces gens qui viennent à Jean le Baptiste, comme vers un sage avec cette question unique : Que devons-nous faire ? Que ce soit la foule, ou les publicains ou des soldats : tous sont habités par la même inquiétude : que dois-je faire ? Est-ce que dans ce que je vis il m’est possible d’aller à la rencontre de Celui qui vient ? Parce que c’est bien cela le message de Jean le Baptiste, nous l’avons entendu la semaine dernière : Préparez le chemin du Seigneur ?

S’ils me semblent inquiets pour eux-mêmes, je les trouve plutôt rassurants avec leur question. Rassurants, parce qu’ils nous montrent qu’ils attendent le Seigneur et qu’ils veulent être prêts à l’accueillir, prêts à aller à sa rencontre. Leur question traduit leur envie de bien préparer le chemin du Seigneur. Ils nous montrent par là que la prédication de Jean le Baptiste, même si elle est faite dans le désert, ne reste pas lettre morte, ni ne se perd dans les sables. Jean le Baptiste est entendu ; Jean le Baptiste est consulté. Sa prédication rejoint le cœur des hommes et des femmes de son temps ; elle interroge les cœurs ; elle provoque à la réflexion ; elle entraîne à la conversion. Que devons-nous faire ?

Nous pourrions dire que les réponses de Jean le Baptiste correspondent au catéchisme classique : partage avec celui qui a moins que toi ; ne prends pas plus que ce qui est dû ; ne sois pas violent, même si tu exerces le métier des armes. Toutes ces réponses se résument à celle-ci : sois attentif à ceux qui sont autour de toi et ne leur fais pas de tort. Au contraire, quand tu le peux, fais-leur du bien. Respecte-les, parce qu’ils sont humains comme toi ! Le pauvre ne vaut pas moins que toi ; il n’est pas moins humain que toi. Quand tu peux partager, fais-là ! C’est la réponse de Jean le Baptiste à la foule. Aux collecteurs d’impôts, il rappelle de ne pas être plus gourmand que l’Etat qu’ils servent : n’encaisse que ce qui est juste, pas plus ! Aux soldats, ne profitez pas de votre force, n’abusez pas de l’autorité que vous confère votre tenue. Quand on voit aujourd’hui encore comment se comportent certains hommes en arme en Ukraine, dans la bande de Gaza, en Afghanistan, aux Etats-Unis, et même quelquefois dans nos quartiers sensibles, on se dit que Jean le Baptiste devrait rugir à nouveau pour imposer le respect de cette consigne. 

Que devons-nous faire ? Nous ne pourrons jamais nous soustraire à cette question. Elle vaut pour chacun de nous, comme elle valait pour ceux qui venaient vers Jean en son temps. Elle ne sera jamais passée de mode, comme ne seront jamais passées de mode les indications qu’il donne. Avec une pauvreté qui augmente, même chez nous, le partage est toujours d’actualité. Si les collecteurs d’impôts aujourd’hui ne peuvent plus prélever plus que ce qui est dû, la question de l’impôt s’inverse peut-être. Ne fraude pas, prends ta part à l’effort commun, de manière juste. A ceux qui ont choisi le métier de armes, il est bon de redire qu’ils ne sont ni gros bras, ni cow-boy, que l’usage de la force doit rester raisonné et que l’uniforme quel qu’il soit, n’est pas une autorisation à toute sorte d’abus ; le respect légitime qui est dû à ceux qui nous protègent, suppose un respect plus grand encore envers ceux qu’ils protègent. La remarque vaut pour tous ceux et celles qui, à un moment ou à un autre, sont en position d’autorité. Le seul fait d’occuper un poste qui donne autorité, ne donne pas le respect, si celui-ci n’est pas d’abord manifesté envers ceux sur qui l’autorité s’exerce. 

Que devons-nous faire ? Je me demande si le principe de notre liturgie qui affirme que chacun doit faire seulement mais totalement ce qui lui revient ne serait pas une bonne ligne de conduite pour toute vie humaine. En faisant seulement ce qui me revient, je ne marche sur les plates-bandes de personnes ; en faisant totalement ce qui me revient, je ne me repose pas sur les autres pour faire ce que je n’ai pas envie de faire. Il fut un temps où nous parlions volontiers de devoir d’état. Eh bien, c’est un devoir d’état pour tous de veiller sur ceux qui ont moins ; c’est un devoir d’état pour tous, de participer au bien commun ; c’est un devoir d’état pour tous de ne jamais abuser ou profiter de la situation qui est la sienne dans la société, et ce quelle que soit la position qui est sienne. Ce serait une bonne nouvelle pour le monde si chacun s’y tenait, si chacun s’y mettait. Amen. 


samedi 7 décembre 2024

2ème dimanche de l'Avent C - 8 décembre 2024

 Chiche, on essaie ?









Où sont les géomètres ? Où sont vos pelles et vos pioches ? N’avez-vous pas entendu Jean le Baptiste ? N’avez-vous pas lu les prophéties d’Isaïe ? Préparez le chemin du Seigneur, rendez droits ses sentiers. Tout ravin sera comblé, toute montagne et toute colline seront abaissées ; les passages tortueux deviendront droits, les chemins rocailleux seront aplanis. Allez, allez, au travail. Noël, c’est dans 18 (17, dimanche) dodos. Qu’attendez-vous ? 

Je crains que cela ne soit pas aussi simple. S’il suffisait d’une pelle et d’une pioche et d’un bon géomètre pour nous dire si tout est bien droit et plat, cela se saurait. Le chemin à aplanir, le ravin à combler, la montagne ou la colline à abaisser ne se trouvent pas dans la nature. Ces travaux à faire, c’est en nous, en nos cœurs qu’il faut les entreprendre. Dans les déserts de nos cœurs, dans les méandres de nos pensées, dans tout ce qui fait notre vie, il faut préparer un chemin pour le Seigneur. Dans les voies tortueuses de notre cœur, il nous faut laisser une place à la miséricorde de Dieu pour nous. Dans nos haines et nos inimitiés, il nous faut ouvrir une voie à l’amour de Dieu. Et voilà que toutes ces prophéties ne semblent pas indiquées pour nous. Vous comprenez, c’est l’autre qui a commencé. C’est l’autre qui ne veut pas ; c’est l’autre qui est toujours le méchant de l’histoire. Pourquoi serait-ce encore à moi de commencer ? Je ne sais pas, dit Dieu, mais peut-être que si tu commences à faire un pas, l’autre en fera un aussi. Peut-être que si tu ne commences pas, jamais personne jamais ne commencera. Et alors, on fera quoi ? 

Ecoutez Paul dans sa lettre aux Philippiens : dans ma prière, je demande que votre amour vous fasse progresser de plus en plus dans la pleine connaissance et en toute clairvoyance pour discerner ce qui est important. Vivre en paix pour toi, c’est important ? Si oui, alors commence et ne t’arrête jamais d’être artisan de paix, même envers celui qui cherche la guerre avec toi. Vivre dans l’amour pour toi, c’est important ? Si oui, alors commence et ne t’arrête jamais d’aimer, même celui qui t’insupporte. Croyant en Dieu qui t’aime tel que tu es, avec tes qualités et tes défauts, tu te dois d’aimer comme tu es aimé. Tu te dois de vivre comme tu voudrais que les autres vivent. N’attends pas que les autres commencent. N’attends pas qu’il soit trop tard. Le Seigneur veut passer par toi pour atteindre les autres. Que ton cœur ne soit pas un obstacle à son amour. Que ta rancœur ne soit pas un obstacle à sa miséricorde. Nous pourrions encore le formuler ainsi : ce que tu veux que Dieu fasse pour toi, fais-le-toi pour les autres. Ne deviens pas leur montagne infranchissable. Ne deviens pas leur chemin escarpé. Le monde nouveau que Dieu vient inaugurer, c’est avec toi qu’il peut commencer. Parce que tu crois en Dieu, parce que tu reconnais Jésus comme ton Sauveur, tu dois être de ceux qui commencent à faire mieux, à faire autrement. Un croyant en Dieu ne peut pas rester devant une montagne de haine et dire : il n’y a rien à faire ; je n’y peux rien ! Un disciple de Jésus ne peut pas dire : ce chemin est trop difficile, j’abandonne. Un monde de paix, un monde d’amour ne sera possible que si tu commences, que si tu essaies. 

Aucun d’entre nous ne pourra jamais dire qu’il a trop aimé, trop fait le premier pas… Dieu seul, du haut de la croix, pourrait dire : je les ai trop aimés ! Mais non, il nous dira toujours : je vous ai aimés et je vous aime encore jusque-là pour que vous appreniez à aimer, vous aussi, jusque-là. Celui qui aime jusqu’au don de sa vie, n’aime pas trop ; il aime juste, il aime vraiment. Pour que se réalise la prophétie d’Isaïe, commence, comme Jean le Baptiste a commencé à son époque. Et le monde changera, les chemins deviendront droits, les montagnes et les collines s’abaisseront, les ravins se combleront. Chiche, on essaie ?