Nous terminons notre parcours pascal
avec la fête de la Pentecôte ; une dernière occasion pour approfondir ce
que signifie vivre dans la dynamique de Jésus, mort et ressuscité pour nous ;
une dernière occasion pour découvrir un sens à ce passage fondamental de la
mort à la vie. Il s’agit du passage de la peur au témoignage. Nous vivons ce
passage à la suite du Ressuscité, dans la puissance de son souffle.
L’Evangile de Jean que nous venons d’entendre
nous montre en effet que Pâques et Pentecôte sont liées. C’est le soir de Pâques
que le Christ apparaît à ses disciples alors que les portes du lieu où [ils]
se trouvaient étaient verrouillées par crainte des Juifs. Et un peu plus
loin, l’évangéliste Jean témoigne : Ayant ainsi parlé, il souffla sur
eux et il leur dit : « Recevez l’Esprit Saint… ». Le souffle
de Dieu est transmis aux disciples par le Verbe de Dieu, ressuscité d’entre les
morts. C’est dans bien dans la dynamique de Pâques qu’est donné l’Esprit Saint.
Le Christ va s’effacer, rejoindre son Père et envoyer son souffle, ce souffle
créateur dont parle la Genèse au commencement, ce souffle de vie dont parle le
prophète Ezéchiel dans la vision des ossements desséchés. Le don de l’Esprit
Saint est fait à ceux qui passent de la mort à la vie à la suite du Ressuscité :
c’est ce qui se joue au moment de notre baptême. Ce lien est indissoluble. Et nous
avons vu, dans notre lecture continue des Actes des Apôtres, que lorsque l’Esprit
Saint est donné d’abord, le baptême au nom de Jésus Christ, qui signifie le
passage de la mort à la vie, est donné immédiatement. C’est ce qui est arrivé
lors de la venue de Pierre chez le Centurion Corneille. Le passage de la mort à
la vie se fait dans la puissance du souffle de Dieu.
La première lecture, extraite du
livre des Actes justement, nous montre l’événement même de la Pentecôte, tel
que l’ont vécu les Apôtres. Au-delà du coup de vent et des langues de feu, je
voudrais retenir aujourd’hui ce que ce don déclenche chez ceux qui ont reçu l’Esprit
Saint. Et le constat est simple : ceux qui ont reçu l’Esprit se mettent à
témoigner. La peur, qui avait saisi la jeune communauté au moment de la mort du
Christ, les a abandonnés. La foule, rassemblée à Jérusalem pour la fête de la
Pentecôte Juive, les entend témoigner des merveilles de Dieu, la plus
grande étant justement d’avoir rendu à la vie celui que les hommes avaient
crucifié. Il n’y a plus de trace de peur dans la vie de ces hommes ; tout
le livre des Actes en témoigne. Ce souffle de Dieu donne un nouveau souffle à
cette jeune communauté. L’Evangile est annoncé à tous, en commençant par
Jérusalem, puis à toute la Judée, la Galilée et la Samarie, en attendant de s’étendre
au monde entier par les missions de Paul. Vivre dans la dynamique de Pâques,
vivre de ce souffle de Dieu, c’est fondamentalement témoigner de ce Dieu qui
sans cesse nous appelle à passer de la mort à la vie, c’est fondamentalement
vivre de la vie même du Ressuscité qui s’est livré pour nous. Il n’y a pas à
opposer Jésus Christ et l’Esprit Saint ; il faut les tenir ensemble, le
premier nous donnant le second, et le second nous faisant comprendre ce que
nous disait le premier, par ses paroles, par ses actes, par sa mort et sa
résurrection.
La puissance de vie du Christ est en
nous depuis notre baptême ; le souffle de Dieu nous a été donné à ce
moment-là déjà et il a été confirmé par l’Eglise au moment de notre confirmation.
C’est par toute notre vie que nous devons maintenant confirmer que nous voulons
vivre du Ressuscité, dans la puissance de son souffle. Cela commence par notre
témoignage de vie d’abord ; et pour ceux à qui est donné le don d’une
parole sage, le témoignage passe aussi par l’enseignement de Jésus Christ, par
la catéchèse et la prédication. Mais chaque croyant peut dire à sa manière ce
que cela change pour lui de vivre dans ce souffle de vie reçu du Ressuscité. Les
petits cénacles qui se sont mis en place durant la neuvaine de la Pentecôte en
sont bien l’illustration. Aujourd’hui, avec cette fête, le temps pascal s’achève ;
mais il n’achève pas le temps du témoignage. Bien au contraire, il l’inaugure. Ayant
célébré aujourd’hui ce don perpétuel de Dieu aux hommes, nous ne saurions ni nous
taire, ni nous effacer, ni confiner encore notre foi. Nous n’avons d’autre
option que le témoignage, dans la confiance de la présence du Ressuscité, Verbe
de Dieu fait chair. Dans ce corps du Christ que nous formons parce que
baptisés, incorporés au Christ, nous avons à tenir notre place particulière. L’Esprit
Saint nous aidera à la trouver et à accomplir ce à quoi Dieu nous appelle. Il nous
appelle et nous rend capable de vivre ce qu’il attend de nous.
Si vous aviez dit à Pierre, la
veille de la Pentecôte, que le lendemain, il se trouverait sur la place
publique à parler de Dieu et de Jésus, sans doute vous aurait-il pris pour un
fou. Quand il a accueilli l’Esprit Saint, il s’est senti pousser à témoigner. Vous
pouvez bien me prendre pour un fou, mais quand vous aurez accueilli l’Esprit
Saint, quand vous lui aurez laissé le gouvernail de votre vie, vous le verrez
vous mener là où vous ne pensiez pas aller. En ce jour de la Pentecôte,
demandons le don renouvelé de la présence de ce souffle divin en nous et acceptons
qu’il nous conduise là où Dieu nous attend, pour le bien de tous. Car à
chacun est donnée la manifestation de l’Esprit en vue du bien. Amen.
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