Crainte ou espérance ?
Pour qui est un tant soit peu attentif, il est facile de repérer la fin de l’année liturgique, parce qu’elle est précédée de ces textes aux couleurs d’apocalypse : grande détresse, soleil s’obscurcissant, lune sans éclat, étoiles tombant du ciel, et j’en passe. Qu’ils viennent du Premier ou du Nouveau Testament, ils sont faits à l’identique et peuvent déclencher en nous crainte ou espérance.
De nombreux mouvements, qu’ils soient politiques ou religieux jouent sans vergogne sur ce sentiment de crainte. La récente campagne électorale aux Etats-Unis nous a montré ce que la crainte engendre : des affirmations à l’emporte-pièce jamais vérifiées, la désignation de boucs émissaires, des mesures drastiques annoncées pour conjurer le mauvais sort (il a quand même été question de déportation !), pour finir par la victoire de l’irrationnel, du mensonge, et une société profondément divisée. Il n’est pas besoin de regarder de l’autre côté de l’Atlantique ; nous possédons les mêmes en tout, en Europe et en France. La crainte a encore de beaux jours devant elle, et ceux qui aiment jouer à se faire peur peuvent avoir la certitude de quelques belles soirées dignes d’Halloween.
Se pose alors la question suivante : chrétiens, pouvons-nous nous contenter de regarder et de trembler ? Pouvons-nous rejoindre ceux qui crient au loup, pour ajouter encore de la peur à la peur ? Les textes bibliques entendus aujourd’hui, d’ordre apocalyptique, ne sont pas lus pour nous faire peur, mais pour ouvrir notre espérance, et nous mettre en attitude de veille. De même, vous aussi, lorsque vous verrez arriver cela, sachez que le Fils de l’homme est proche, à votre porte. Voilà que nous est rappelé que notre histoire a un sens, et que nous sommes tendus vers son accomplissement. Et le sentiment qui doit prédominer en nous, ce n’est pas la crainte, mais l’espérance. Ce jour du retour du Christ, nous l’attendons, comme les enfants attendent Noël : fébriles mais sans crainte, tout à la joie de ce qu’annonce cet événement. Le retour du Christ, quel qu’en soit le moment, marquera le jour de notre récompense, le jour du jugement de notre vie par celui qui est la source de tout amour. Avons-nous à craindre l’amour ? Bien sûr que non ! L’amour ne fait rien de mauvais ; l’amour espère tout ! Comme il l’a fait au moment de son Incarnation, il frappera à notre porte. Nos pourrons alors faire comme les aubergistes jadis, et dire qu’il n’y a pas de place ; ou nous pourrons lui ouvrir notre vie et il viendra prendre son repas avec nous. C’est ce que nous rappelle justement le Livre de l’Apocalypse au chapitre 3, 20 : Voici que je me tiens à la porte, et je frappe. Si quelqu’un entend ma voix et ouvre la porte, j’entrerai chez lui ; je prendrai mon repas avec lui, et lui avec moi. Il n’y a rien à craindre de celui qui frappe à la porte de notre vie et qui demande à entrer. Au contraire, il y a tout à espérer. Ecoutons la suite de ce passage de l’Ecriture (Ap 3, 21) : Le vainqueur, je lui donnerai de siéger avec moi sur mon Trône, comme moi-même, après ma victoire, j’ai siégé avec mon Père sur son Trône.
Dans quelques semaines, le pape François ouvrira une année jubilaire qu’il a voulu consacrer à l’espérance. Dans notre monde froid et triste, la petite lumière de l’espérance nous attend. Elle vient nous redire que le meilleur est possible et que chacun est capable du meilleur. Nous ne sommes pas faits pour les ténèbres ; nous ne sommes pas faits pour la mort ; nous ne sommes pas faits pour la désespérance. Dieu nous veut dans sa lumière, Dieu nous veut vivant, Dieu nous veut pleins d’espérance. Il envoie son Fils pour nous le redire. Sa venue est comparable à l’été qui revient. Sachons lire les signes des temps, repérer le figuier qui refleurit. Il porte en lui la vie que Dieu nous communique. Si cela n’est pas source d’espérance, je ne sais pas ce qu’il nous faut. Laissons là notre pessimisme et entrons dans l’espérance du jour de Dieu. Amen.