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samedi 27 février 2016

03ème dimanche de Carême C - 28 février 2016

Acte 3 de la miséricorde : porter sur le monde le regard même de Dieu.




Suffit-il d’avoir un grand cœur pour être capable de miséricorde ?  Rien n’est moins sûr ! L’étymologie de ce mot « miséricorde » ne doit pas nous induire en erreur. Le cœur a quelque chose à voir avec notre capacité à être miséricordieux, mais avant il nous faut une autre qualité, celle de savoir regarder avec justesse. 
 
Reprenons l’extrait du livre de l’Exode que nous avons eu en première lecture. C’est un épisode bien connu de tous, celui du buisson ardent, signe par lequel Dieu se révèle à Moïse et lui confie une mission. Comme souvent avec les textes trop bien connus, nous risquons de ne l’écouter que d’une oreille, tellement nous sommes sûrs de tout connaître. Il serait dommage de passer à côté de ce dialogue entre Moïse et Dieu. Il ne se limite pas à l’appel de Moïse, à l’identification de Dieu, à l’envoi en mission et à la révélation du nom divin. Il y a, au cœur de cet échange, cette certitude proclamée par Dieu lui-même qu’il prend soin de son peuple, que ce qui arrive à ce peuple ne lui est pas étranger. Pour moi, ce qui est le plus important dans ce texte ce n’est pas que Dieu appelle Moïse : il en a appelé d’autre avant et en appellera d’autre après. Ce n’est pas davantage que Dieu confie une mission à Moïse : il en a confié à d’autres avant et en confiera encore après Moïse. Pour moi, il y a deux éléments clé dans ce dialogue. Ils nous disent tous deux cette proximité de Dieu avec son peuple et le souci qu’il a et qu’il aura toujours pour lui. La première phrase clé est la suivante : J’ai vu, oui, j’ai vu la misère de mon peuple qui est en Egypte ; et la seconde : Je suis qui je suis. Dieu ne va pas intervenir parce qu’il a bon cœur simplement ; il ne va pas intervenir parce qu’il n’a rien d’autre à faire ; il va intervenir parce qu’il a vu une situation intolérable et qu’il est temps que quelqu’un y mette fin. Chez les Egyptiens, il y avait certainement des gens de grand cœur. Pourtant, aucun d’eux n’a levé le petit doigt pour intervenir en faveur de ce peuple réduit en esclavage. Ils ont vu ce qui arrivait à ce peuple, mais ils n’ont vu qu’avec le regard des hommes. Ce ramassis de gens, ce n’étaient que des étrangers qui allaient nous pourrir la vie, qui risquaient de prendre plus de place et plus d’importance que les Egyptiens de souche. Il fallait les contenir ; il fallait limiter leur extension. C’est comme si la présence de trop d’étrangers anéantissaient toute miséricorde, toute charité. En faire des travailleurs utiles pour qu’on puisse jouir de la vie ; voilà une bonne solution : l’esclavage un mal nécessaire. Mais Dieu ne voit pas les choses ainsi. Il voit la misère de ce peuple réfugié en Egypte au temps de la grande famine. Il entend les cris des opprimés. C’est parce qu’il voit, c’est parce qu’il entend, qu’il prend souci de ce peuple, qu’il va intervenir en faveur de ce peuple par son serviteur Moïse. Il porte un autre regard sur ce que vivent les hommes. C’est ce qui déclenche l’œuvre de libération et la miséricorde dont bénéficiera ce peuple de la part de ce Dieu vers lequel il a crié sa misère. Si Dieu avait porté sur ce peuple le regard des Egyptiens, rien ne se serait produit ; pas de libération, pas de Moïse pour mener les opérations sur le terrain. Si les Egyptiens avaient portés sur ce peuple le regard de Dieu, il n’y aurait pas eu d’esclavage, il n’y aurait pas eu de misère ; il n’y aurait eu que des peuples différents qui vivent en bonne intelligence et en paix, côte à côte. Oui, beaucoup de chose, pour ne pas dire toute chose, dépendent du regard que l’on porte sur elles.  
 
La révélation du nom de Dieu (Je suis qui je suis) n’est alors qu’une invitation faite au peuple à porter un juste regard sur Dieu lui-même. Il n’y a pas d’autre discours à avoir sur Dieu que celui qui consiste à dire que Dieu est Dieu. Il est celui dont l’homme a besoin, fondamentalement. Il est celui en qui l’homme peut espérer. Il est celui qui accompagne l’homme toujours et qui porte le souci de lui. Je suis qui je suis peut tout aussi bien se traduire par Je suis qui je serai. Autrement dit : je suis celui que tu as besoin que je sois à toutes les étapes de ta vie. Je suis le même et unique Dieu qui se révèle aux hommes selon leurs besoins. L’homme n’a pas à craindre d’être abandonné de Dieu ; il a à craindre de ne pas porter sur lui le bon regard, et finalement à craindre d’oublier Dieu parce que incapable de le reconnaître. 
 
Cette histoire de juste regard, nous la retrouvons dans l’évangile. Jésus invite ses auditeurs à ne pas se tromper sur Dieu lorsqu’il les invite à porter sur les événements tragiques de leur histoire un juste regard. Ce qui est arrivé aux Galiléens massacrés par Pilate, ou ce qui est arrivé aux victimes de la chute de la tour de Siloé n’est pas le résultat d’un grand péché. Il n’y a pas à mêler Dieu aux affaires des hommes. Mais il y faut porter sur la vie des hommes, et donc sur notre propre vie, un juste regard. Ce regard qui nous permettra de nous convertir ; ce regard qui nous fera prendre patience et voir tous les possibles. La parabole du figuier ne dit pas autre chose. Le maître de la vigne et le vigneron voient la même chose : un figuier qui ne donne pas de fruits. Mais là où le maître ne voit plus qu’un arbre stérile, le vigneron voit encore un arbre capable de donner quelque chose de bon avec un peu de travail et un peu de patience. C’est là le regard de Dieu sur chacun de nous. Lorsque Dieu nous regarde, il ne voit pas d’abord nos péchés, il voit nos possibles, il voit les progrès que nous pouvons encore faire. D’où la manifestation de son amour pour nous sans cesse renouvelée. Dieu nous fait miséricorde pour que nous puissions encore progresser dans son amour, grandir en sainteté et porter les fruits qu’il attend de nous. A son image, nous devons porter sur nos frères le regard même de Dieu et ne pas désespérer des autres, mais croire qu’avec un peu de patience et un peu d’amour de notre part, ils pourront encore progresser. Nous ne ferons véritablement miséricorde aux autres que si nous portons sur eux le regard même de Dieu, le regard le plus juste qui soit. 
 
Il n’est pas faux de dire qu’en matière de miséricorde tout est une histoire d’amour. Mais il est plus juste de dire d’abord qu’en matière de miséricorde, tout est une histoire de regard. Si je n’apprends pas à regarder comme Dieu regarde, je ferme bien des avenirs sur ceux et celles qu’il met sur ma route. Si je ne me regarde pas avec le regard même de Dieu, je me ferme mon propre avenir. Ouvrons les yeux sur le monde, sur les hommes et sur nous-mêmes. Si Dieu est celui qu’il est, les hommes eux-aussi sont ce qu’ils sont : toujours meilleur que ce que je crois, souvent moins pire que ce que j’imagine. Puisse ce temps du carême vécu sous le signe de la miséricorde nous aider à porter sur tous le juste regard, le regard même de Dieu qui entraine le cœur à la miséricorde. Amen.
 
(Dessin extrait de la revue  L'image de notre paroisse, n° 207, mars 2004, éditions Marguerite)

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