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Ce blog voudrait vous permettre de vivre un chemin spirituel au rythme de la liturgie de l'Eglise catholique.

Les méditations s'appuient soit sur les textes bibliques quotidiens, soit sur la prière de l'Eglise.

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Nous pourrons ainsi nous enrichir de la réflexion des autres.







vendredi 24 juillet 2015

17ème dimanche ordinaire B - 26 juillet 2015

Quand Jésus s'occupe de la foule...





Nous avons changé d’évangéliste, parcourant pendant les cinq semaines à venir l’évangile de Jean, mais nous n’avons pas changé de décor. Nous sommes bien après la première mission des disciples ; à leur retour, Jésus les a invités à l’écart, mais la foule les a devancés sur l’autre rive. Jésus a enseigné la foule et vient le temps où les estomacs crient famine. Cela devait bien arriver : la foule ne fait que suivre Jésus ; cela fait un moment que les gens sont partis de chez eux ; nous sommes dans un endroit désert. Forcément il fait faim ! Que va faire Jésus ? 
 
La solution la plus raisonnable serait sans nul doute de renvoyer les gens chez eux. C’est bien de suivre Jésus ; mais initialement, il voulait quand même offrir un temps de repos à ses disciples. Et sans doute lui-aussi pourrait-il souhaiter quelques temps plus tranquille. C’est bien la foule, mais il y a des limites ! Oui, Jésus pourrait renvoyer chacun à sa maison, en rappelant au passage que, la prochaine fois, ce serait bien de penser au casse-croûte ! Je ne sais pas pour vous, mais moi, c’est ce que j’aurais fait. 
 
Mais voilà, Jésus n’est pas raisonnable à notre manière. Ces gens n’ont rien, ils sont comme des brebis sans berger. Il ne peut pas les renvoyer. Le problème, c’est que les disciples n’ont pas davantage de quoi nourrir toute cette foule. Souvenez-vous, ils reviennent de mission, ils voulaient se reposer un peu ! Il semble même qu’en traversant le lac, ils n’aient même pas pensé à jeter les filets ! Ils auraient au moins eu un peu de poisson. Mais là, rien ; même pas un quignon de pain rassis. La question de Jésus à Philippe oblige à ouvrir les yeux : Où pourrions-nous acheter du pain pour qu’ils aient à manger ? André, sans doute un peu plus dégourdi, a rapidement fait le tour des popotes : il n’a trouvé que cinq pains d’orge et deux poissons qu’un jeune garçon a pensé à prendre ; à moins que ce ne soit sa maman qui ait pensé que son garçon aurait certainement faim à un moment de la journée. Mais qu’est-ce que cela pour tant de monde ? Même pas de quoi boucher une dent creuse pour chacun des cinq mille hommes présents. Et pourtant, chacun va manger à sa faim et il y aura même des restes : douze paniers sont remplis à la fin du repas. Comment cela a-t-il pu se faire ? 
 
Cela a pu se faire parce que Jésus était là, parce qu’il avait le souci de cette foule qu’il  a d’abord longuement enseigné. Comment aurait-il pu la renvoyer alors qu’elle vient à lui, reconnaissant en lui celui qui peut quelque chose pour elle ? Il ne la nourrit pas pour se mettre en avant, ni pour briller devant les hommes. Il nourrit cette foule parce que cette foule pourrait aller à sa perte s’il ne s’en occupait pas personnellement. Il nourrit cette foule pour lui faire découvrir qu’il y a un pain plus important encore qui peut nourrir les hommes à volonté et pour toujours : le pain de la Parole de Dieu. Il nourrit cette foule pour rappeler que Dieu s’occupe toujours de son peuple ; il l’a fait jadis du temps d’Elisée ; il le refait aujourd’hui par Jésus. Il le fait pour nous au cours de chaque eucharistie que nous célébrons. Avec Jésus, nous ne manquons de rien. Quand Jésus donne, il donne largement ; un jour, il donnera sa vie pour tous. C’est cela qui est annoncé par ce signe des pains multipliés : l’immense amour de Dieu pour nous et sa prévenance pour tant d’hommes et de femmes qui cherchent un sens à leur vie. Cet amour de Dieu pour les hommes conduira Jésus sur la croix ; il sera alors pour  tous, et pour toujours, le pain rompu et partagé, donné pour la vie de tous les hommes jusqu’au jour où Dieu les recevra tous à sa table. Avec cette première multiplication des pains, Jésus nous invite déjà à la table de son Père, et Dieu lui-même sert aux hommes le pain qui donne la vie. La foule était comme des brebis sans berger ? Elle a trouvé en Jésus un pasteur qui prend soin d’elle, qui nourrit son esprit, qui nourrit son corps. L’amour de Dieu pour les hommes manifesté en Jésus nous fait vivre, tout simplement. Ces cinq pains et ces deux poissons partagés nous montrent ce que peut faire l’amour de Dieu pour nous ; il nous faut juste y consentir, comme ce jeune garçon a consenti à livrer ces pains et poissons à Jésus pour qu'il les distribue à tous. Et nous découvrons que, si Dieu nous aime, nous devons consentir à son amour pour que le miracle puisse avoir lieu. 
 
Quand Jésus s’occupe de la foule, elle ne manque de rien. Quand Jésus s’occupe de la foule, il lui dit l’immense amour de Dieu pour tous les hommes. Quand Jésus s’occupe de la foule, les cœurs sont bouleversés au point qu’un jeune garçon accepte de partager le peu qu’il a. Quand Jésus s’occupe de la foule, il rassasie avec bonté tout ce qui vit. Quand Jésus s’occupe de la foule et que les hommes consentent à le laisser faire, alors des merveilles sont possibles. C’était vrai hier ; c’est toujours vrai aujourd’hui. A nous d’ouvrir les yeux ; à nous de consentir à Dieu. Amen.


(Dessin de Jean-François KIEFFER, in Mille images d'évangile, éd. Les Presses d'Ile de France)

samedi 18 juillet 2015

16ème dimanche ordinaire B - 19 juillet 2015

Quand les disciples rentrent de mission...






Dimanche dernier, on a vu Jésus les envoyer en mission ; aujourd’hui, les voici qui reviennent. Nous pouvons imaginer la joie des retrouvailles, les échanges entre groupes de disciples et Jésus sur ce qu’ils ont vécu. Il y a surtout l’attention toute paternelle de Jésus envers ceux qu’il a envoyé. Ses disciples sont de retour, visiblement fatigués ; il les invite à l’écart, au repos. Quand on sait que Jésus passe ses nuits à prier Dieu, je vous laisse deviner ce à quoi il invite ses disciples : à se reposer en Dieu. Car si cette première mission est terminée, LA mission est loin d’être achevée. De fait, ceux qui arrivaient et ceux qui partaient étaient nombreux et l’on n’avait même pas le temps de manger. A travers cette foule nombreuse qui se presse autour de Jésus et de ses disciples, nous pouvons comprendre pourquoi, des siècles plus tard encore, l’antienne de psaume la plus connue est très certainement celle que nous avons chantée en réponse à la première lecture : Le Seigneur est mon berger, rien ne saurait me manquer. 
 
En invitant ses disciples au repos, c’est bien vers Dieu lui-même qu’il les tourne. Quand on travaille dans la vigne du Seigneur, on peut quelquefois en oublier de prendre ce repos tant nécessaire. Non pour ne plus rien faire, mais pour retrouver, auprès de Dieu, les forces nécessaires à la poursuite du travail. Il n’y a rien de pire qu’un missionnaire fatigué ou un témoin épuisé. Ce besoin de ressourcement est vital. Que l’on soit prêtre, religieux ou religieuse, laïc engagé dans la mission paroissiale ou simple fidèle du Christ, il est nécessaire de prévoir ce temps de repos auprès de Dieu, auprès du bon berger qui veille sur ses brebis. Ceux qu’il envoie en mission font toujours partie de ses brebis ; il continue donc de veiller sur eux ; il fait en sorte que rien ne leur manque. Certes, nous pouvons considérer que l’eucharistie dominicale fait partie de ce repos auprès de Dieu ; il n’empêche, prendre un temps plus conséquent, chaque année, n’est pas inutile. De nombreuses retraites ou recollections sont proposées durant le temps de l’été : pourquoi ne pas profiter de l’occasion de ces vacances pour y prendre part ? Nous pouvons expérimenter de manière très concrète ce que dit le psaume 22 : Sur des prés d’herbe fraîche, il me fait reposer. Il me mène vers les eaux tranquilles et me fait revivre. 
 
En-dehors de ce temps de repos, ce qui frappe encore le lecteur d’évangile que je suis, c’est que bien que les disciples aient été envoyés en mission pendant un temps, cela ne diminue pas la foule nombreuse qui se presse autour de Jésus, au contraire. J’aime à croire que c’est même le résultat de la mission des disciples. Ils ont tellement bien fait leur travail que les foules veulent rencontrer celui qui les a envoyés. A peine Jésus et ses disciples se sont-ils éloignés en barque, que la foule, les ayant aperçus, court à l’endroit supposé de leur destination, et y arrive avant eux. Si cela n’est pas la manifestation d’un grand désir de rencontrer Jésus, je ne sais pas ce que c’est ! Ceux qui auraient pu penser dimanche dernier que Jésus envoie ses disciples en mission pour être tranquille, en sont pour leurs frais. Le but de la mission, ce n’est de faire connaître l’envoyé, mais bien l’envoyeur. Le but de la mission était bien de donner le goût de Jésus et de sa Bonne Nouvelle. Ce désir de Dieu, les disciples l’ont bien creusé dans le cœur des gens. En débarquant, Jésus vit une grande foule. Il fut saisi de compassion envers eux, parce qu’ils étaient comme des brebis sans berger. Ce goût de Jésus est contagieux et inextinguible. Quand vous y avez goûté, vous en voulez encore, et toujours plus. Si tel n’est pas le cas, c’est qu’on vous a présenté un Jésus frelaté, un Jésus de second ordre, tout juste bon à éblouir, mais pas à nourrir. La rencontre vraie avec Jésus donne faim et soif de lui, et jamais l’homme ne s’en trouve totalement rassasié. Si vous avez goûté à Jésus, en vérité, vous y revenez, nécessairement. Car avec Jésus, grâce et bonheur [vous] accompagnent tous les jours de [votre] vie, et vous désirerez habiter la maison du Seigneur pour la durée de [vos] jours. A moins d’être totalement hermétique à la vraie vie et au vrai bonheur ! 
 
Voilà ce qui se passe quand les disciples rentrent de mission. Ils ne se glorifient pas ; ils se reposent en Dieu, à l’écart, pour mieux retrouver cette foule qui a faim et soif de Jésus, faim et soif de vraie vie, faim et soif de vrai bonheur, faim et soif de vraies rencontres. Depuis cette première mission, et jusqu’à aujourd’hui, et pour de longs siècles encore, un lien s’est noué avec cette foule sans berger. La Bonne Nouvelle annoncée a creusé un désir de Dieu dans le cœur des hommes. Nous ne pourrons jamais considérer que la mission est terminée parce que l’Eglise est présente aujourd’hui sur tous les continents. La mission entraine la conversion ; la conversion entraine le désir de vivre toujours plus selon l’esprit du Christ. Il en sera ainsi jusqu’au jour où le Christ reviendra dans sa gloire. Ce jour-là, nous nous reposerons tous auprès de lui, définitivement rassasié. Amen.
 
(Dessin de Jean-François KIEFFER, in Mille images d'Evangile, éd. Les Presses d'Ile de France)

samedi 11 juillet 2015

15ème dimanche ordinaire B - 12 juillet 2015

Quand Jésus envoie en mission...






Est-ce le contrecoup de son échec à Nazareth ? Sommes-nous témoins d’un moment de déprime ou de découragement de la part de Jésus ? Lorsque nous le retrouvons avec ses disciples en ce dimanche, c’est pour assister à un événement étrange : Jésus envoie ses disciples en mission. 
 
C’est étrange, parce que nous sommes bien toujours avant Pâques. Ils ne savent pas encore que Jésus est plus fort que la mort ; ils ne savent pas encore qu’il est près de son Père ; ils n’ont pas encore reçu la force de l'Esprit Saint. Et pourtant, sans autre formation que ces quelques temps de compagnonnage avec Jésus et des recommandations plutôt austères, les voici envoyés en mission, pour faire ce que Jésus seul a fait jusqu’ici : proclamer qu’il fallait se convertir, expulser beaucoup de démons, faire des onctions d’huile à de nombreux malades et les guérir ! En clair, c’est Jésus à la puissance Douze ! Un petit stage de formation en somme, pendant que Jésus fait on ne sait trop quoi ! 
 
Il les envoie deux par deux. Pour une première fois, c’est plutôt rassurant. Les disciples ne sont pas livrés à eux-mêmes ; ils auront un compagnon de route. Se sont-ils choisis ou est-ce Jésus qui a fait les équipes ? Ce n’est pas dit. Nous savons juste qu’ils sont par deux. Cela permet de se soutenir, de ne pas se décourager, d’avoir quelqu’un sur qui s’appuyer. Etre deux oblige aussi à un vrai témoignage : les voilà en somme forcés de vivre entre eux ce qu’ils prêchent ; quel groupe, quel couple n’expérimente pas cette obligation de conversion au quotidien. Celui qui est seul fait ce qu’il veut ; ceux qui vivent ensemble ou travaillent ensemble, doivent s’entendre pour réussir. Ce n’est donc pas innocent si Jésus les envoie deux par deux. Pour réussir, ils doivent déjà se supporter ! 
 
Il les envoie comme des pauvres sur les routes de son pays. Ils ne peuvent prendre qu’un bâton ; pas de pain, pas de sac, pas de pièces de monnaie dans leur ceinture. Pas même de linge de rechange ! Pauvres de tout, les disciples ne seront riches que de la parole qu’ils auront à transmettre. Il n’y a rien qui pourra les distraire de leur mission. Il n’y aura rien non plus pour faciliter la conversion : pas de bling-bling, juste une parole que les personnes rencontrées accueilleront ou pas. Aucun artifice, aucun moyen de pression. Les hommes ne doivent pas se convertir parce que les Apôtres seraient riches, ou bien habillés, ou utilisant les dernières technologies à la mode pour convertir : non, rien qu’une parole et des signes posés. 
 
La seule concession, c’est le bâton. Ils ont l’air de petits Moïse, jetés sur les routes, un bâton à la main. A moins qu’ils ne ressemblent au peuple de l’Exode, qui a quitté l’Egypte en hâte, la ceinture aux reins, le bâton à la main, pour aller là où Dieu lui-même les guiderait. Le bâton, c’est le symbole de la marche nécessaire et jamais achevée pour aller à la rencontre de Dieu. Les disciples de Jésus, à l’exemple du peuple dont ils sont issus, sont des hommes en marche, en pèlerinage sur la terre des vivants.  Le bâton facilite la marche sur les routes escarpées et permet d’écarter le danger. Nous ne savons pas combien de temps ils sont partis ; nous savons juste qu’ils ont accompli ce que Jésus leur a demandé ; et ils semblent avoir plutôt réussi.
 
Il y a encore une recommandation : la précision donnée par Jésus sur la conduite à tenir selon qu’ils sont accueillis ou pas. Les disciples ne doivent s’arrêter que là où ils sont accueillis ! Si, dans une localité, on refuse de vous accueillir et de vous écouter, partez et secouez la poussière de vos pieds. Les disciples ne doivent pas se fatiguer à évangéliser ceux qui ne veulent pas les recevoir. On ne discute même pas semble-t-il ! On va vers les périphéries tant que les périphéries veulent vous entendre. Si la parole des disciples ne trouve pas d’écho, il faut partir ailleurs. Comprenons cela comme le signe d’un respect envers ceux qui ne veulent pas se bouger. L’appel à la conversion est adressé à tous, mais il n’est accueilli que par quelques-uns. Cela devrait nous décomplexer aujourd’hui et nous enseigner surtout quand il nous semble que nous prêchons trop souvent dans le désert. N’est-ce pas aujourd’hui, les gens ne veulent plus de Jésus ; cela ne les intéresse plus. Et alors ? Ils ont le droit, le droit de refuser Jésus, le droit de ne pas répondre à son appel, le droit d’aller vers leur perte. Même Jésus ne sauvera pas tout le monde ; pourquoi voudrions-nous réussir mieux que lui ? Le salut est certes offert à tous ; mais tous ont-ils le désir d’être sauvé ? Jésus, par sa recommandation aux disciples, semble dire : essayez partout, mais ne vous mettez pas la rate au court-bouillon si vous n’êtes pas entendus ! Restez chez ceux qui vous accueillent ; quittez ceux qui ne veulent pas de vous ! Et laissez-leur même la poussière qui s’est collée à vos pieds en allant chez eux. En agissant ainsi, dans les deux cas, vous respecterez vos auditeurs. 
 
A l’heure où tous les diocèses mettent au point des stratégies missionnaires, renforcées par des outils d’évangélisation, l’évangile de ce dimanche semble nous dire qu’il faut juste se mettre en route au nom du Christ, redire son message, poser des gestes de fraternité et respecter celui que nous rencontrons. Oserons-nous miser sur cette simplicité ? Oserons-nous nous encombrer de rien si ce n’est le Christ pour aller à la rencontre de nos frères ? Si cela a fonctionné pour les disciples, pourquoi cela ne serait-il plus efficace aujourd’hui ? Osons la simplicité évangélique ; risquons une parole d’éternité et laissons l’Esprit faire le reste. Il ne nous revient pas de convertir, mais seulement d’annoncer, de témoigner et de vivre. Amen. 

(Dessin de Jean-François KIEFFER, in Mille images d'Evangile, éd. Les Presses d'Ile de France)

samedi 4 juillet 2015

14ème dimanche ordinaire B - 05 juillet 2015

Un échec, c'est grave docteur ?





Parce que Jésus est le Messie, le Sauveur, le Fils de Dieu, on a souvent tendance à penser que tout est facile pour lui ; même le chemin de croix n’aurait été pour lui qu’une promenade de santé. Après tout, il ne craignait pas grand-chose puisqu’il avait lui-même annoncé sa mort et sa résurrection. La croix ne serait donc qu’un mauvais moment à passer, si peu en comparaison de la gloire qui était sienne. Vraiment, pour certains, tout réussit à Jésus ; l’échec, il ne connaît pas. Et pourtant ! 
 
Pourtant, c’est bien à un échec de Jésus que nous assistons dans l’évangile de ce dimanche. Un échec d’autant plus retentissant qu’il a lieu chez lui, là où tout aurait dû bien se passer. Jésus se rendit dans son lieu d’origine… et là il ne pouvait accomplir aucun miracle. Et pour cause, ils en sont tous à s’interroger et sans doute à le jalouser un peu : D’où cela lui vient-il ? Quelle est cette sagesse qui lui a été donnée, et ces miracles qui se réalisent par ses mains ? N’est-il pas le charpentier, le fils de Marie, et le frère de Jacques, de José, de Jude et de Simon ? Ses sœurs ne sont-elles pas ici chez nous ? Ceux qui parlent ainsi sont incapables de se réjouir du fait qu’avec Jésus, Dieu commence quelque chose de neuf pour tout un peuple ! Ils ne voient en lui que l’enfant du village qui ferait mieux de rester à sa place. Avec raison, Jésus s’étonne de leur manque de foi qui paralyse toute son action : là, il ne pouvait accomplir aucun miracle.
 
N’est-ce pas là une expérience que nous faisons tous un jour ou l’autre dans notre vie quand nous donnons du temps au service de l’Eglise ? Nous réussissons bien, nous travaillons pour le bien-être des autres, et ceux-là même qui devraient se réjouir avec nous sont ceux qui nous enfoncent ou se dressent contre nous. Il est bien vrai le proverbe : Seigneur, préservez-moi de mes amis ; mes ennemis, je m’en charge ! On n’est jamais trahi que par les siens ! Est-ce grave, docteur ? Faut-il se révolter ? Faut-il réagir violemment, leur donner une bonne leçon ? A regarder Jésus, il suffit de tourner les talons et d’aller ailleurs, là où l’on est attendu, là où nos talents seront accueillis. Jésus s’étonne tout juste, mais ne se révolte pas et ne se décourage pas pour autant : sa mission, il la poursuit dans les villages d’alentour. Je pense même qu’il est plutôt triste pour les gens de chez lui. 
 
Cette page d’évangile est bienvenue parce que nous sommes tous confrontés, un jour ou l’autre, à l’échec, en famille, au travail, dans nos relations sociales… La jalousie des autres peut être un frein à nos actions les meilleures. Nous n’y pouvons rien, c’est ainsi. Saint Paul lui-même constate qu’il y a quelque chose dans sa vie qui n’est pas totalement ajusté. Il parle de cette écharde dans sa chair qui est là pour empêcher qu’il se surestime. Ce n’est pas avec les autres qu’il ne réussit pas totalement ; c’est dans sa propre vie que quelque chose n’est pas comme cela devrait être. Il a même prié le Seigneur de l’en débarrasser, mais en vain. Ma grâce te suffit, car ma puissance donne toute sa mesure dans la faiblesse, s’entend-t-il répondre ! L’échec dans l’accomplissement de l’œuvre de Dieu n’est donc pas de l’ordre du péché, mais de l’épreuve qui nous purifie, qui nous rend humbles face à Dieu, face aux autres. Jésus, Paul et chacun de nous, nous ne sommes que des instruments au service du projet de Dieu. Nous servons ce projet du mieux que nous pouvons, mais la réussite du projet ne dépend pas de nous. Nous ne sommes pas tout-puissants. Nous sommes invités, en toutes choses, à nous en remettre à Dieu et à sa puissance. Nous sommes invités à mettre nos pas dans les pas du Christ : l’évangile nous montre qu’il ne réussit pas toujours ; cet échec ne sera pas son seul échec. Je pense, entre autre, à sa rencontre avec le jeune homme riche. 
 
Avec Jésus, avec Paul, acceptons d’être faillibles pour que la puissance de Dieu puisse être manifestée dans notre vie. Avec Jésus, avec Paul, poursuivons là où nous sommes attendus et prions pour ceux qui ne sont pas prêts à s’ouvrir à la grâce ; Dieu seul pourra ouvrir leur cœur, aujourd’hui peut-être, et sinon demain…
 
(Dessin de Jean-François KIEFFER, in Mille images d'évangile, éd. Les presses d'Ile de France)