Bienvenue sur ce blog !

Ce blog voudrait vous permettre de vivre un chemin spirituel au rythme de la liturgie de l'Eglise catholique.

Les méditations s'appuient soit sur les textes bibliques quotidiens, soit sur la prière de l'Eglise.

Puisque nous sommes tous responsables de la foi des autres, n'hésitez pas à laisser vos commentaires.

Nous pourrons ainsi nous enrichir de la réflexion des autres.







vendredi 27 septembre 2013

26ème dimanche ordinaire C - 29 septembre 2013

Eucharistie et charité.



Être authentiquement croyant : tel est le sens de l’enseignement de Jésus  à ses disciples et aux foules qui l’entourent. Cet enseignement se poursuit aujourd’hui avec un appel à une authentique charité. Un mot qui peut sembler vieillot, ringard ou connoté plutôt négativement.  Pourtant, la « Caritas » est la marque propre de l’homme qui a découvert le Dieu de Jésus Christ, le Dieu qui s’est incarné, rendu présent au monde des hommes par amour, pour délivrer l’humanité du péché et de la mort. 
 
La parabole que Jésus raconte n’est pas une parabole sur le bien et le mal ; elle n’oppose pas le méchant riche au gentil Lazare. La parabole que Jésus nous offre vient nous inviter à une attention à l’autre qui ne soit pas curiosité malsaine, mais bien élan d’amour envers un frère qui pourrait avoir besoin de moi. Le riche n’est pas condamné parce qu’il aurait refusé quelque chose à Lazare, ni parce qu’il serait mauvais : il n’est pas si mauvais puisqu’il a le souci de ses frères. Ce qui vaut la condamnation du riche c’est son inattention à celui qui est devant sa porte. S’il s’était soucié de Lazare comme il se soucie ensuite, un peu  tard, de ses frères, il n’en serait pas là. Le riche n’a pas voulu ou n’a pas su voir que Lazare avait besoin de lui. Le riche est resté riche toute sa vie ; Lazare est resté pauvre toute sa vie. L’indifférence de l’un vaut la vie à l’autre quand vient le moment de la rencontre avec Dieu. 
 
En entendant cette parabole, faut-il s’étonner que le seul commandement que Jésus ait laissé à ses disciples soit justement celui de l’attention à l’autre, celui de l’amour de l’autre : aimez-vous les uns les autres ? C’est la seule urgence qui vaille. C’est le seul critère qui authentifie le véritable disciple : c’est à l’amour que vous aurez les uns pour les autres que le monde saura que vous êtes mes amis. Nous ne pouvons donc pas faire l’impasse sur cette charité qui nous tourne vers l’autre, vers celui qui m’est différent, mais non indifférent, celui qui n’a pas la même chance que moi. 
 
Cette parabole ne s’adresse pas à des futurs croyants qui doivent encore se convertir : cette parabole s’adresse à tous ceux qui veulent suivre ou qui suivent déjà Jésus. Nul n’est dispensé de cette attention aux plus petits. Benoît XVI, dans son exhortation apostolique Sacramentum caritatis donnée en 2007, développe à juste titre dans sa dernière partie les implications sociales de l’eucharistie. Il rappelle aux croyants que nous sommes que l’Eucharistie que nous célébrons en ce dimanche nous ouvre à une nouveauté dans les rapports sociaux. En effet, l’union au Christ est en même temps union avec tous ceux auxquels il se donne. Je ne peux avoir le Christ pour moi tout seul ; je ne peux lui appartenir qu’en union avec tous ceux qui sont devenus ou qui deviendront sien. Plus loin, Benoît XVI poursuit : Nous ne pouvons rester sans rien faire devant certains processus de mondialisation qui font souvent grandir démesurément, au niveau mondial, l’écart entre riches et pauvres. Nous devons dénoncer ceux qui dilapident les richesses de la terre, provoquant des inégalités qui crient vers le ciel. … Le Seigneur Jésus, Pain de vie éternelle, nous pousse à être attentifs aux situations de misère dans lesquelles se trouve encore une grande partie de l’humanité : ce sont des situations dont la cause implique souvent une responsabilité claire et inquiétante des hommes. … Benoît XVI rappelle enfin le lien entre l’eucharistie et l’attention aux pauvres, au cas où nous aurions oublié que le sacrement qui nous rassemble aujourd’hui est un puissant moyen de conversion personnelle, et un puissant levier pour nous engager dans ce combat contre la misère. Il écrit : la nourriture de la vérité nous pousse à dénoncer les situations indignes de l’homme, dans lesquelles on meurt par manque de nourriture en raison de l’injustice et de l’exploitation, et elle nous donne des forces et un courage renouvelés pour travailler sans répit à l’édification de la civilisation de l’amour. Depuis les origines, les chrétiens se sont préoccupés de partager leurs biens et d’aider les pauvres. La quête qui est recueillie dans les assemblées liturgiques en est un souvenir vivant, mais elle est aussi une nécessité très actuelle. Les institutions ecclésiales de bienfaisance, en particulier la Caritas à divers niveaux, réalisent le précieux service d’aider les personnes dans le besoin, surtout les plus pauvres. Tirant leur inspiration de l’Eucharistie, qui est le sacrement de la charité, elles en deviennent l’expression concrète. 
 
L’acte de communier devient un acte quasi contestataire s’il est vécu comme ce moment qui m’engage à transformer le monde et à ouvrir les yeux sur tous les Lazare qui frappent à ma porte. La prière que Jésus nous a lui-même enseigné et que nous reprendrons tout à l’heure, nous invite à faire tout notre possible pour que cesse ou au moins diminue dans le monde le scandale de la faim. Donne-nous aujourd’hui notre pain de ce jour est à la fois une demande pour moi – que je reçoive de Dieu ce qui m’est nécessaire –  mais aussi une prière pour les autres : que par moi, Dieu lui-même puisse donner à d’autres ce pain nécessaire. A ceux qui pensent qu’un changement de pape vaut un changement de doctrine, je rappelle juste que le pape François lui-même rappelle depuis son élection que notre foi est révolutionnaire : elle doit permettre de changer le monde, de le rendre meilleur pour tous ou elle ne sert à rien. Et aucun chrétien ne saurait s’y soustraire ! 
 
Au moment où je prends congé de vous, je voudrais vous inviter tous à approfondir le sens de la liturgie, à mieux comprendre ce que l’Eglise vous demande lorsqu’elle vous invite à célébrer les sacrements, et en particulier le sacrement de l’amour, l’Eucharistie. Comprenant mieux ce que vous venez faire chaque dimanche, vous comprendrez mieux, j’ose le croire, ce qui vous est demandé pour faire de notre monde un monde plus juste et fraternel. Célébrant mieux votre foi, vous la vivrez mieux. Vivant mieux votre foi, vous permettrez à d’autres de vivre mieux, de vivre plus humainement et de découvrir ainsi par vous ce Dieu qui nous veut tous frères en son Christ. Voilà assurément un beau projet. Que Dieu lui-même vous aide à le vivre. Amen.
 
 
Note pour les lecteurs du blog : je déménage seulement, mais le blog continue ! Le "Je prends congé de vous" est adressé aux membres des paroisses de mon lieu de résidence. Je n'ai toujours pas de paroisse territoriale. Je travaille depuis un an auprès de l'équipe diocésaine de l'Enseignement Catholique.

vendredi 20 septembre 2013

25ème dimanche ordinaire C - 22 septembre 2013

Priez pour les chefs d'Etat et pour ceux qui exercent des responsabilités.




Sans vouloir faire beaucoup de politique, permettez que j’aborde aujourd’hui la question induite par Paul  dans sa première lettre à Philémon : pourquoi faut-il prier pour les chefs d’Etat et tous ceux qui ont des responsabilités ? Si Paul donne une première réponse (que nous puissions mener notre vie dans le calme et la sécurité), il me semble pourtant que, dans un état qui met en place des chartes pour la laïcité, la question se pose à frais nouveaux et mérite notre attention. Je voudrais vous indiquer trois raisons qui me semblent justifier cette demande de Paul.
Il nous faut prier pour les responsables publics, non pas parce qu’ils seraient à convertir, mais pour qu’ils soient conscients d’être responsables du bien commun. Le bien commun, c’est ce qui nous permet de vivre tous ensemble, sans stigmatiser un groupe, sans en exalter un autre. Le responsable politique, s’il est porté par un parti ou une idéologie, une fois élu, devient l’élu de tous. Il n’est plus d’un parti, d’une religion ou d’une idéologie : il doit veiller à ce que tous puissent vivre ensemble, dans le respect et la concorde. Nous savons tous que cela n’est jamais facile, ni évident : le voisin est supportable tant qu’il est d’accord avec moi. Mais s’il sort de la bonne pensée, il est à écraser, à éliminer. Prier pour nos responsables publics devient une obligation pour nous qui devons avoir à cœur  de construire dès ici-bas des conditions de vie aussi proches que possible du Royaume dont nous attendons la venue. Même s’ils ne sont pas de mon Eglise, de ma religion, de mon parti, je peux avoir à cœur de les porter devant Dieu afin que celui-ci leur révèle quelle est sa volonté, comment servir au mieux le bien de tous ceux dont ils ont la charge. L’histoire du peuple que Dieu s’est choisi dans la première alliance nous montre bien que chaque fois que son peuple était fidèle au projet de Dieu, il connaissait la paix ; chaque fois qu’il s’en éloignait, ce n’était plus que ruine et désolation.
Il nous faut encore prier pour les responsables publics, non pas parce qu’ils seraient naturellement, voire ontologiquement pervertis ou corrompus, mais pour qu’ils aient toujours conscience qu’ils sont au service d’hommes et de femmes concrets. L’homme politique n’est pas élu pour lui-même ; il est élu pour nous, pour nous conduire, nous inviter à aller de l’avant, pour nous donner un nouvel élan. Si nous avons besoin d’eux, ils ont besoin de nous, pas seulement au moment des campagnes électorales, mais tous les jours. Si je vois mal ce que peut donner un peuple sans dirigeant, je ne vois pas du tout à quoi sert un dirigeant sans peuple à guider ! Il aura beau manier de belles idées : si elles ne permettent pas à notre humanité de grandir, elles ne servent à rien. L’humain n’est pas un concept à manier ; l’humain, c’est toujours des hommes, des femmes, des enfants très concrets, avec une vie très réelle, qu’il faut améliorer quelquefois, soutenir toujours, pour que cette vie soit belle et épanouissante. Qui, mieux que Dieu, qui est le Maître du temps et de l’Histoire, peut le mieux nous indiquer comment rendre notre histoire personnelle et notre histoire commune plus belles pour tous ? N’est-il pas entré en alliance avec nous pour nous sauver et nous inviter à la vraie joie ? Son projet n’est-il pas que nous soyons vraiment heureux et libres, dès cette vie ?
Il nous faut enfin prier pour les responsables publics parce que c’est nous qui les choisissons. Je sais bien que nous serions tous de meilleurs maires, conseiller généraux ou régionaux, députés ou sénateurs, voire président que ceux qui sont en place tout au long des jours, sauf quand il s’agit d’y aller et de mouiller sa chemise. La politique de salon est tellement mieux que la politique réelle. Prier  pour eux, c’est aussi une manière de prier pour nous. Nous avons les hommes et les femmes politiques que nous méritons. Si nous votons par défi, par sanction, ou en nous posant en donneur de leçon, ne nous étonnons pas du résultat ! Nous ne pouvons pas nous plaindre que des lois quelquefois contraires au bon sens soient votées, si nous-mêmes ne faisons pas preuve de bon sens au moment de choisir nos élus. Prier pour nos responsables publics, c’est aussi prier Dieu afin qu’il nous éclaire, quand nous entrons dans l’isoloir pour donner notre voix à un avenir commun. Nous aussi, nous avons besoin de l’aide de Dieu et de la clarté de son Esprit pour faire le choix le meilleur pour nous et pour tous. 
Au cours de cette année pastorale, nous serons sollicités par des hommes et des femmes qui portent un projet d’avenir pour nous. Ils nous inviteront à les écouter et à poser un choix, le moment venu. Prenons bien le temps du discernement et de la prière afin que nous n’ayons pas à regretter plus tard le chemin pris ensemble. Redoublons de prière pour eux et pour nous afin que Dieu manifeste à notre esprit quel est le chemin à suivre pour un meilleur vivre ensemble, dans la justice et la paix. Amen.
 
(Image de Jean-Yves Decottignies, in Mille dimanches et fêtes, Année C, éd. Les Presses d'Ile de France)


samedi 14 septembre 2013

24ème dimanche ordinaire C - 15 septembre 2013

Le Seigneur renonça au mal qu'il avait voulu faire à son peuple.




Tout ça pour ça ! A croire qu’il ne sait pas ce qu’il veut, le bon Dieu. Une bonne colère, une sainte colère, ce n’est quand même pas la mer à boire. Bien sûr, il y a le souvenir du déluge, grosse colère divine, qui avait tout ravagé et la promesse de Dieu de se retenir à l’avenir. Mais sans en arriver à cette extrémité, une bonne punition semblait s’imposer. Que nenni ! 

Tout avait pourtant bien commencé. Le peuple sauvé d’Egypte, s’ennuyant probablement de l’absence de Moïse parti sur sa montagne pour converser avec Dieu, a fondu tout l’or qu’il possédait pour se faire un dieu qu’il peut voir et toucher, lui qui avait si longtemps vu en terre d’esclavage les représentations des dieux égyptiens. N’est-ce pas, c’est plutôt rassurant d’avoir une image, une statue que l’on peut voir : une chose qu’on voit est une chose qui existe. Car ce Dieu qu’on ne voit pas, existe-t-il seulement ? Ils fondent donc tout leur or et se font… un veau ! Si c’est ça l’image qu’ils se font de leur Dieu, je comprends que celui-ci se mette en colère ! Enfin, un veau, quoi ! Le petit de la vache qui tète encore sa mère ; c’est peut-être mignon, mais ça s’arrête là ! C’est ça le Dieu fort qui les a sauvés d’Egypte ? Quel manque d’imagination, vraiment. Quel manque de foi, surtout ! Moïse absent un peu plus longtemps que prévu, et déjà c’est panique à bord. Fabrique-nous un dieu qui marche devant nous, car nous ne savons pas ce qui est arrivé à Moïse, l’homme qui nous a fait sortir d’Egypte. Comme si Moïse y était pour quelque chose, dans cette libération ! Le peuple semble n’avoir pas compris que c’est Dieu qui mène la danse, c’est lui qui conduit l’histoire. Que Moïse soit présent ou pas, c’est Dieu qui reste le personnage important ; et on ne le remplace pas par n’importe quoi ! Et on ne le représente pas n’importe comment ! 

Nous pouvons nous interroger alors sur la figure choisie pour représenter Dieu.  Pourquoi un veau ? Pourquoi pas un animal plus fort, plus assuré, plus protecteur ? Le veau, c’est l’animal qu’il faut élever, dont il faut prendre soin, dont l’homme reste le maître finalement. N’y a-t-il pas, derrière cette figure, le désir du peuple de rester maître de lui et maître de Dieu ? N’exprime-t-il pas, par ce choix, son désir de contrôler Dieu, plutôt que de lui confier sa vie ? Le choix du veau n’exprime-t-il pas le manque de foi, le manque de confiance en Dieu qui seul est Maître du temps et de l’histoire ? Même si le peuple est prêt à se prosterner devant un veau, il n’en reste pas moins prêt à le dévorer, ce veau. C’est si pratique, un Dieu qu’on peut garder sous la main, un Dieu qu’on commande, un Dieu à notre mesure, qui n’effraie personne, qui peut même être mignon, mais qui ne change rien finalement à notre existence. A force de se faire un Dieu à sa mesure, le peuple exprime bien son désir de n’avoir aucun vrai maître. Ils ont fondu l’or pour en faire un veau ; ils pourront fondre le veau pour en faire des bijoux quand ils se seront lassés de ce ruminant. Des siècles après, n’avons-nous pas la même tentation, celle de nous faire un Dieu à notre image plutôt que d’accepter d’être une humanité à l’image de Dieu ? Ne fondons-nous pas encore quelque veau d’or dans le secret de nos existences pour avoir un Dieu à notre mesure, un Dieu que nous contrôlons, un Dieu que nous maîtrisons ? 

La colère de Dieu se comprend donc. Mais alors pourquoi ne va-t-il pas au bout de cette colère ? Parce qu’il n’est pas un veau, justement, il n’est pas un animal qui suit le troupeau. Le Dieu que le peuple a refusé de voir est le Dieu qui se laisse fléchir par Moïse. Ce dernier rappelle à Dieu toute son œuvre de salut et la promesse faite aux Pères dans la foi. Comment Dieu pourrait-il se renier ? Ce n’est pas parce que le peuple s’est fondu un veau que Dieu doit se conduire comme en animal en furie. Moïse reste solidaire de ce peuple qu’il a conduit, au nom de Dieu, dans ce désert, en route vers la Terre promise jadis à Abraham. Il demande à Dieu de rester fidèle à ce peuple qu’il est venu sauver. Peut-être que le sauver d’Egypte n’était pas suffisant. Peut-être faut-il encore que Dieu sauve ce peuple de lui-même, de son inconstance, de sa nuque raide. Peut-être que Dieu doit encore gagner ce peuple à sa cause, à son amour, à son pardon. Le Seigneur renonça donc au mal qu’il avait voulu faire à son peuple. Là où un homme aurait frappé de colère, Dieu pardonne par amour. Il exercera sa justice, mais ne se vengera pas. N’en est-il pas encore ainsi aujourd’hui pour nous ? Malgré notre faiblesse, malgré notre péché, Dieu ne nous détruit pas : il reste fidèle à sa promesse, il reste fidèle à son dessein de salut : l’homme est fait pour vivre, pour vivre libre. Dieu y veille, toujours et encore. Et chacune de nos eucharisties est action de grâce pour l’œuvre de Dieu en notre faveur. Même si quelquefois nous doutons de sa présence et lui préférons des veaux d’or modernes, Dieu reste fidèle à l’humanité qu’il a créée. 

En agissant ainsi, Dieu se révèle à l’homme différent de toutes les représentations que l’homme pourrait faire de lui. Si notre Dieu ne se voit pas, il se laisse pourtant chercher ; si notre Dieu ne se touche pas, il se révèle pourtant proche de l’homme, intervenant en sa faveur, pour qu’il vive. Il est comme ce berger qui prend soin de toutes ses brebis et qui n’hésite pas à chercher celle qui s’est égarée. Il est comme cette femme qui ne ménage pas sa peine pour retrouver la pièce perdue et qui se réjouit avec son entourage quand elle l’a retrouvée. Il est comme ce père qui veille au balcon de sa maison et qui guette le retour de ce fils qui a voulu vivre sa vie, dans une liberté mal comprise et mal utilisée, et qui fait la fête lorsque le prodigue revient ! Avec un tel Dieu, là où le péché a abondé, la grâce surabonde ! Ne craignons pas un tel Dieu, mais venons à lui avec confiance et espérance : le Seigneur renonce au mal et nous prépare une fête qui jamais ne finira. A lui, honneur et gloire pour les siècles des siècles. Amen.

(Tableau de Nicolas POUSSIN, Le veau d'or)

samedi 7 septembre 2013

23ème dimanche ordinaire C - 08 septembre 2013

Qui peut comprendre les volontés du Seigneur ?



Qui peut comprendre les volontés du Seigneur ? Cette interrogation de l’auteur du Livre de la Sagesse est à la base de tout chemin spirituel. Elle est au commencement d’une démarche de foi. Elle est comme un fil rouge parcourant toute notre existence. Comprendre ce que Dieu veut est, en effet, le but même de la vie du croyant et, pour le chrétien, le chemin sûr et vrai qui mène à la sainteté. Nous ne pouvons donc pas évacuer cette question sans l’affronter vraiment !

 Qui peut comprendre les volontés du Seigneur ? Il nous faut d’emblée préciser que la volonté du Seigneur ne se lit ni dans le marc de café, ni dans les horoscopes, ni dans les cartes. Elle n’est pas non plus ce que certains appellent le « destin ». Lorsque nous parlons de la volonté de Dieu, nous ne parlons pas magie, spiritisme ou quelques langages ésotériques. Non, parler de la volonté de Dieu, c’est parler de son projet : son projet pour le monde, son projet pour l’homme, son projet pour l’avenir de l’homme. Ce projet, le Christ Jésus l’a réalisé dans l’acte même de sa mort et de sa résurrection, puisqu’il a offert sa vie par amour pour les hommes, afin que le monde soit sauvé. Le projet de Dieu est un projet de salut, donc un projet de vie ! Nous pouvons donc déclarer que tout ce qui s’oppose au salut de l’homme, tout ce qui s’oppose à la vie de l’homme est contraire au projet de Dieu. Tout ce qui s’oppose ainsi au salut et à la vie n’a rien à voir avec Dieu ! Il nous faudrait ici relire l’essentiel des textes bibliques pour nous en convaincre. De la création à l’Apocalypse, toute la Bible ne parle que du projet de salut que Dieu formule pour nous et auquel, quelquefois, nous avons du mal à répondre.

Qui peut comprendre les volontés du Seigneur ? Il nous faut alors préciser que cette volonté de Dieu n’est pas inatteignable. Elle n’est pas cachée ; elle se laisse deviner par celui ou celle qui veut vraiment aller à la rencontre de Dieu. D’ailleurs tout est là, dans ce verbe vouloir ! A celui qui veut marcher à la suite de Dieu, la volonté divine est révélée. Il n’y a pas d’autre effort à faire, si ce n’est celui d’écouter Dieu. Déjà l’auteur du livre de la Sagesse l’affirmait : Qui aurait connu ta volonté, si tu n’avais pas donné la Sagesse et envoyé d’en haut ton Esprit Saint ?  Découvrir la volonté de Dieu n’est pas un pouvoir de clerc ou de très bon croyant : c’est un don que Dieu fait à celui ou celle qui marche à sa rencontre. C’est Dieu qui révèle à l’humanité ce qu’il attend d’elle ; c’est Dieu qui fait comprendre à l’humanité comment aller à sa rencontre ; c’est Dieu lui-même qui commence à se révéler à ceux qui veulent sincèrement le trouver. En Jésus, il s’est même donné entièrement, donnant en son Fils, sa Parole ultime sur le monde, sur l’humanité et sur nos rapports avec lui. En écoutant Jésus, nous pouvons découvrir cette volonté de Dieu pour nous, aujourd’hui.

Qui peut comprendre les volontés du Seigneur ? Paul, dans l’épître à Philémon, nous fait comprendre que cette volonté de Dieu pour nous se traduit dans une attitude quotidienne entièrement pétrie d’Evangile. Le jeune Onésime, dont parle Paul dans sa lettre, est un esclave qui appartient à Philémon. Nous ne savons pas trop s’il est en fuite, ou s’il a été prêté à Paul. Toujours est-il que Paul l’a baptisé et maintenant, il le renvoie à son maître. Dans l’extrait que nous avons entendu, Paul invite son ami à recevoir son esclave comme s’il recevait Paul lui-même. Il lui fait comprendre qu’à cause de son baptême, Onésime est devenu  pour lui, et pour chaque croyant, un frère. Recevoir Onésime comme un frère, c’est entrer dans le projet de salut de Dieu, c’est traduire en acte concret cette volonté de salut que le Christ nous a offert. Accueillir cet esclave comme un frère, comme un homme désormais libre, c’est manifester, par un acte public et social, ce que le baptême avait déjà réalisé pour Onésime. En Christ, il est devenu un homme libre puisque, en Christ, il n’y a plus, selon Paul lui-même « ni Juif ni Grecs, ni esclave ni homme libre, ni homme ni femme, parce que tous, en Christ, nous ne faisons qu’un ». Le Seigneur a manifesté sa volonté pour Onésime par le baptême : il reste aux hommes à traduire cette volonté dans ce qui sera le quotidien de cet esclave.

Qui peut comprendre les volontés du Seigneur ? Saint Luc, dans la page d’Evangile entendue, indique quelques pistes pour comprendre et approcher cette volonté de Dieu. Elles sont au nombre de trois et se situent toutes en rapport avec Jésus. En effet, faire la volonté de Dieu, c’est devenir vraiment disciples du Christ.

1ère piste : ne rien préférer au Christ. Une terrible exigence, sans doute, mais qui nous permettra de toujours accorder plus d’importance à sa Parole plutôt qu’à une parole humaine. Père, mère, frère et sœur peuvent, quelques fois intentionnellement, nous éloigner de ce que Dieu attend de nous. Mettre le Christ au cœur de sa vie, c’est se garantir une totale liberté pour accomplir en tout ce que Dieu attend de celui qui se fait son disciple. C’est vrai des religieux, religieuses et prêtres ; c’est vrai aussi de ceux qui s’engagent dans la vie matrimoniale. Le sacrement du mariage manifeste bien que les nouveaux époux se reçoivent de Dieu, pour réaliser ensemble, par toute leur vie commune, ce que Dieu attend d’eux.

2ème piste : accepter de prendre sa croix. Voilà qui nous rappelle que la volonté de Dieu peut nous entraîner sur des chemins difficiles. Non pas que Dieu aime que l’homme souffre, mais simplement parce que faire le choix du Christ peut être mal reçu par d’autres et entraîner des ruptures, voire des conflits. Il n’a jamais été facile d’être chrétien : ni à l’origine – les martyrs sont là pour nous le rappeler – ni aujourd’hui – où l’air du temps semble tellement loin des pratiques évangéliques. Prendre sa croix, c’est refuser alors cet air du temps, et tenir bon dans les épreuves qui nous sont imposés par d’autres, à cause de notre foi.

 3ème piste : prendre le temps de s’asseoir. Dans le monde  trépidant que nous connaissons, alors même que nous courons constamment après le temps, Jésus nous invite à nous asseoir, à réfléchir. Il nous invite à faire ce que lui-même fait si souvent dans l’Evangile avant tous les grands instants de sa vie : il se retire au désert, il prie, il se met en intimité avec Dieu. S’asseoir, prendre du temps auprès du divin Maître pour mieux repartir, pour mieux découvrir ce que Dieu attend : étape nécessaire pour être sûr de ne pas se tromper, de ne pas se laisser entraîner par ses propres passions ou illusions. S’asseoir pour mieux repartir avec le Christ à la rencontre du Dieu vivant et vrai.

 Qui peut comprendre les volontés du Seigneur ? Je dirai tout simplement le vrai disciple, celui qui marche avec le Christ, quelles que soient les difficultés, celui qui se laisse façonner par son Esprit Saint, celui qui se fait humble et attend finalement de Dieu la révélation de son projet d’amour. Puisse notre fréquentation de l’Eucharistie nous permettre d’entrer dans cette intimité où Dieu se révèle à nous pour nous rendre vraiment libres et vraiment vivants. Amen.

(Oeuvre de Richard HOLTERBACH, Chapelle du Prado)