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Ce blog voudrait vous permettre de vivre un chemin spirituel au rythme de la liturgie de l'Eglise catholique.

Les méditations s'appuient soit sur les textes bibliques quotidiens, soit sur la prière de l'Eglise.

Puisque nous sommes tous responsables de la foi des autres, n'hésitez pas à laisser vos commentaires.

Nous pourrons ainsi nous enrichir de la réflexion des autres.







samedi 30 septembre 2017

26ème dimanche ordinaire A - 01er septembre 2017

La conduite du Seigneur n'est pas la bonne ?




La conduite du Seigneur n’est pas la bonne. C’est bien, selon Dieu lui-même, le reproche qui lui est fait par les hommes, selon ce que nous rapporte le prophète Ezéchiel dans la première lecture de ce dimanche. C’est la première fois que nous entendons cette parole ainsi. En effet, il y a trois ans, nous lisions encore ce passage dans l’ancienne traduction liturgique. Et elle nous disait ceci : la conduite du Seigneur est étrange. Une modification d’accent qui traduit une différence d’attitude spirituelle. 
 
La conduite du Seigneur est étrange, disait donc l’ancienne traduction. Nous pouvons comprendre ce mot étrange de trois manières. Il y a d’abord étrange au sens d’étranger. Autrement dit, l’homme reconnaît que Dieu n’agit pas comme lui. C’est une manière de dire que, chez les hommes, on ne fait pas comme ça, mais sans connotation morale. Mais qui a bien pu dire, ou seulement penser, que Dieu devait faire comme nous ? Est-ce cela que nous attendons de Dieu ? Qu’il soit juste comme nous ? Un tel Dieu ne nous serait d’aucune utilité ; il ne nous entrainerait pas bien loin ; il ne nous permettrait pas de prendre de la hauteur. Il serait à notre image ! 
 
Nous pouvons ensuite entendre ce mot étrange au sens de curieux, au sens où la conduite de Dieu nous étonne parce qu’on ne la comprend pas de suite. Elle pique notre curiosité et nous oblige à réfléchir, à décrypter pour mieux comprendre. J’avoue que cela me convenait plutôt bien. C’était le signe que l’homme devait se mettre en route, en recherche : Dieu était quelqu’un à comprendre, quelqu’un qui me sortait de mon ordinaire, poussait ma réflexion dans ses derniers retranchements. Ma curiosité au sujet de Dieu, je me devais de l’assouvir. Je devenais un chercheur de Dieu, un archéologue de sa volonté. 
 
Enfin, nous pouvions comprendre étrange au sens de bizarre. Cela ne se fait pas d’agir ainsi, au sens où ce n’est vraiment pas bien. Il y a là un jugement porté sur l’agir de Dieu, et un jugement plutôt négatif. L’homme se place au-dessus de Dieu, il est convaincu de faire mieux que lui ; il considère surtout que Dieu a tort de faire ainsi. Cette dernière compréhension du mot étrange nous rapproche de la nouvelle traduction. Là où nous avions le choix, elle oriente clairement ce que l’homme dit et pense de Dieu. 
 
La conduite du Seigneur n’est pas la bonne. Il n’y a aucune autre interprétation possible. Vérification faite dans différentes traductions de la Bible, elle se rapproche de celle qui est retenue par la Bible de Jérusalem (la conduite du Seigneur n’est pas juste), comme de celle de la TOB (la conduite du Seigneur n’est pas correcte). L’homme porte donc bien sur Dieu un regard moralisateur ! L’homme fait la morale à Dieu quand Dieu lui s’abstient de le faire pour lui proposer plutôt une alliance, un chemin de vie supérieur. Non seulement l’homme reconnaît que Dieu n’agit pas comme lui, mais en plus il dit que ce n’est pas bon de faire ainsi. Et que reproche l’homme à Dieu exactement dans sa conduite ? Il lui reproche sa miséricorde ! Elle s’exprime ainsi : Si le méchant se détourne de sa méchanceté pour pratiquer le droit et la justice, il sauvera sa vie. Dieu laisse toujours une chance à l’homme de se convertir, de revenir vers plus de justice, de pratiquer le droit, même après avoir pratiqué longtemps le Mal. Cette miséricorde a une exigence : celle de rester dans le bien retrouvé. En effet dit Dieu, Si le juste se détourne de sa justice, commet le mal, et meurt dans cet état, c’est à cause de son mal qu’il mourra. Sans doute est-ce cela qui choque l’homme. On veut bien accepter que le méchant puisse être sauvé s’il a bien manifesté son retour à la justice (après tout, ça pourrait être nous, et nous aimons bien l’idée d’un pardon s’il est pour nous. Pour les autres, ça se discute, n’est-ce pas). Mais qu’un homme juste durant toute sa vie, et qui vient à mourir après avoir commis un seul acte mauvais, soit définitivement perdu, voilà qui n’est pas possible. Ça pourrait être nous aussi. Nous aurions perdu toute une vie à faire le bien ! Proprement inadmissible, sauf si cela concerne le voisin que l’on n’aime définitivement pas. Il l’aura bien mérité, non ? 
 
La conduite du Seigneur n’est pas la bonne. Mais qui est l’homme pour parler ainsi ? Qui est l’homme pour juger ainsi l’agir de Dieu ? Qui est l’homme pour fixer les règles de la justice ? Juger Dieu ainsi, n’est-ce pas déjà l’exclure de notre vie ? Juger Dieu ainsi, n’est-ce pas vouloir se prendre pour Dieu ? Mais alors, si l’homme se prend pour Dieu dont il dit qu’il n’est pas juste, le jugement de l’homme sur Dieu est-il juste ? Ou son jugement rejoint-il l’injustice supposée et déclarée de Dieu ? 
 
Heureusement, Dieu n’agit pas comme l’homme ! Heureusement, Dieu ne pense pas comme l’homme ! Heureusement, la justice de Dieu dépasse celle des hommes ! Heureusement, sinon pauvres de nous ! Si Dieu était comme nous, nous serions jugés sur nos propres principes qui visent plus à exclure qu’à pardonner. Si Dieu était comme nous, nous serions jugés sur des critères de ressemblance : il est bon parce qu’il est comme moi ; il n’est pas bon parce que différent de moi. Si Dieu était comme nous, il aurait sur nous un jugement définitif dès le départ de notre vie. Or Dieu ne juge pas ainsi. Dieu est patient avec nous ; il nous invite sans cesse à la conversion ; il nous laisse le temps du repentir ; il se réjouit de nous voir revenir, même et surtout après une longue absence, même et surtout après un long temps loin de lui. 
 
La conduite du Seigneur n’est pas la bonne. Est-ce si sûr ? Personnellement je n’en vois pas de meilleure et je prie Dieu de convertir le cœur des hommes à sa manière de les voir, à sa manière de les juger, à sa manière d’être patient avec tous. Comme notre monde serait bon, si nous portions sur lui le regard que Dieu porte sur nous. Comme notre monde serait bon si nous agissions avec tous comme Dieu agit avec nous. Oui, il est droit, il est bon le Seigneur ; qu’il nous enseigne ses voies. Amen.


(Dessin de M. Leiterer)

samedi 23 septembre 2017

25ème dimanche ordinaire A - 24 septembre 2017

Chercher ou se laisser chercher ?






Après avoir entendu les lectures de ce dimanche, on peut être perplexe quant à la direction à suivre : faut-il chercher Dieu ou se laisser chercher par lui ? En effet, le prophète Isaïe nous commande de chercher le Seigneur tant qu’il se laisse trouver, alors que dans l’évangile Jésus raconte la parabole d’un maître qui va chercher des ouvriers pour sa vigne. Alors, chercher ou se laisser chercher ? Les deux, mon général ! 
 
Chercher le Seigneur : n’est-ce pas le travail de tout croyant ? Sans cesse mieux connaître ce Dieu auquel il accorde sa foi. Oser se tourner vers lui malgré le mal que l’homme est capable de faire. Revenir vers lui quand l’homme s’est éloigné. Chercher le Seigneur, ce n’est pas l’œuvre d’un moment, c’est l’œuvre de toute une vie, que l’on soit bon ou méchant. En effet, si le passage entendu du prophète Isaïe insiste surtout la nécessaire conversion à faire par l’homme qui s’est éloigné de Dieu, combien plus la recherche de Dieu doit-elle être permanente une fois la conversion effectuée, pour saisir toujours mieux les pensées de Dieu et pouvoir suivre ses chemins. Chercher le Seigneur revient alors à s’attacher toujours à lui, à rester fidèle à son enseignement et à éviter le Mal. C’est chaque jour qu’il nous faut chercher le Seigneur et nous souvenir que nous sommes à lui par le baptême. C’est Martin Luther qui, chaque matin, écrivait sur son bureau : Je suis baptisé. Quelle meilleur formule pourrions-nous trouver que celle qui nous rappelle que si nous avons cherché Dieu, il est celui qui nous a appelé à la vie, celui qui sans cesse nous donne la vie. 
 
Dieu cherche l’homme : voilà une attitude attestée dès le livre de la Genèse. Quand Adam et Eve ont goûté le fruit de l’arbre de la connaissance du Bien et du Mal et qu’ils se rendent compte qu’ils sont nus, ils se cachent devant Dieu, si bien que celui-ci ne les croise pas selon l’habitude lorsqu’il se promène dans le Jardin de la Genèse. Et Dieu de se mettre en recherche de l’homme : Où es-tu ? Vous pouvez relire alors toute la Bible avec cette lunette particulière. Alliance après alliance, c’est bien Dieu qui se met en recherche de l’homme. N’est-ce pas encore Dieu qui cherche l’homme lorsqu’il envoie son fils Jésus à la rencontre des hommes ? Je comprends alors la persistance de ce maître de la vigne qui sort toute la journée et qui sans cesse ramène des ouvriers pour travailler pour lui. Il y a une véritable urgence pour Dieu à chercher l’homme ; il y a une vraie urgence à se laisser chercher et ramener par lui. C’est une question de vie pour l’homme.
 
Chercher Dieu, se laisser chercher par lui : Paul n’est-il pas une belle synthèse de ce double mouvement qui doit être au cœur de toute vie spirituelle ? Formé à l’école de Gamaliel, il a cherché à connaître Dieu. Et quand il se rend à Damas et que le Christ ressuscité vient à sa rencontre, il se laisse trouver dans la nuit dans laquelle il est plongé. La rencontre a lieu, et désormais les chemins de Paul seront les chemins du Christ. Si bien que Paul peut écrire : pour moi, vivre c’est le Christ. Chacune de ses lettres est une invitation à chercher Dieu toujours mieux par l’approfondissement la foi qu’elle provoque ; chaque lettre de Paul, par sa profondeur, est le signe que Dieu cherche l’homme et qu’il veut sa conversion, sa vie. Paul ne ménage pas sa peine pour que Dieu et l’homme se rencontrent. 
 
Chercher Dieu, c’est le signe que l’homme a compris que Dieu est à sa recherche ; c’est le signe que le désir de Dieu et le désir de l’homme convergent. Le salut, c’est connaître Dieu ; le salut, c’est avoir un comportement digne de l’Evangile du Christ. Le salut, c’est vivre du Christ. Cherchons-le chaque jour puisque lui nous cherche toujours. Amen.

(Dessin de M. Leiterer)

dimanche 17 septembre 2017

24ème dimanche ordinaire A - 17 septembre 2017

Et pourtant, il faudra bien lui pardonner si nous voulons être pardonnés !






Franchement, y a-t-il quelqu’un pour l’aimer, cet homme à qui un roi remet une fortune seulement parce qu’il aura supplié un peu ? Enfin pourquoi est-ce à lui que cela arrive et pas à nous ? Vraiment, nous ne l’aimons définitivement pas. D’ailleurs, nous pensons tous qu’il l’aura bien cherché et l’aura bien mérité sa punition lorsque Jésus arrive à la fin de sa parabole. C’est justice qu’il soit livré au bourreau jusqu’à ce qu’il ait tout remboursé. Où irions-nous si des hommes comme lui n’étaient jamais punis ? Cela lui apprendra à ne pas faire bénéficier les autres d’un peu de la chance qu’il aura eu. Non mais ! 
 
Il est juste, ce roi qui condamne : c’est ce que nous pensons tous lorsque Jésus termine sa parabole. Dans un monde dur, il se préoccupe du petit, de celui qui est exploité. Il remet un peu d’équité et un peu d’éthique dans un monde de brut. C’est si rare dans le monde des grands. Et on se met à rêver : nous en voudrions un, fait dans le même moule, pour nous gouverner et remettre un peu de bon sens dans un monde qui s’affole. Mais est-il vraiment juste ce roi ? Au début de la parabole, il veut régler ses comptes avec ses serviteurs (pas très engageant) ; puis il ordonne que cet homme soit vendu avec sa femme et ses enfants et tous ces biens (pas très catholique comme comportement), avant de finalement de se reprendre et de remettre la dette (c’est mieux). Mais au final, c’est la colère qui revient et il règle ses comptes avec cet homme avec sévérité. Sommes-nous sûrs de vouloir d’une girouette qui commence par remettre une dette et qui revient ensuite sur sa parole ? Bon, dans la parabole, cela semblait évident qu’il fallait agir ainsi, mais que serait notre monde si ceux qui le gouvernent se laissent aller à la colère et remettent sans cesse en cause leur décision ? Non, cela ne fait pas très sérieux ; cela semble même dangereux. Il faut quelqu’un qui soit sûr de lui, qui décide et qui se tienne à ce qu’il a décidé. Pas quelqu’un qui se laisse gouverner par ses sentiments ! Non mais ! 
 
Maintenant que la parabole est démontée, que reste-t-il ? Qu’en tirons-nous ? Car enfin, quand Jésus raconte une parabole, c’est toujours pour nous édifier. Et là, j’avoue qu’il m’inquiète davantage qu’il ne m’édifie. Ai-je envie que Dieu soit comme ce roi ? Oui, si je suis le petit exploité, celui que personne n’écoute. Non, si je me rends compte que je pourrais quelquefois être comme cet homme qui a du mal à remettre les dettes aux autres. Je sais qu’il y a des personnes que je n’aime pas et que j’ai donc du mal à pardonner. Je connais mes limites. J’ai beau savoir l’immense amour de Dieu pour moi, j’ai beau savoir sa miséricorde sans limite, je sais que je ne suis pas toujours à la hauteur ni de cet amour, ni de cette miséricorde. Suis-je donc d’avance condamné ? 
 
La parabole a été racontée par Jésus en réponse à une question sur le pardon : Lorsque mon frère commettra des fautes contre moi, combien de fois dois-je lui pardonner ? La réponse de Jésus est sans appel : il faut toujours pardonner sous peine d’être traité par Dieu comme cet homme à qui une grande somme a été remise et qui se montre incapable de remettre une peccadille. La justice de Dieu est proportionnelle à notre propre justice. Nous aurons toujours plus à nous faire pardonner par Dieu que ce que les hommes auraient à se faire pardonner par nous. Si nous voulons être pardonnés, nous devons pardonner. Dieu nous pardonne parce qu’il nous aime ; nous devons pardonner, non parce que nous aimons, mais parce que nous sommes aimés infiniment. L’amour que Dieu nous porte doit rejaillir en pardon pour les autres ou il n’y aura pas de place pour nous dans le Royaume. La miséricorde que Dieu nous accorde doit rejaillir sur les autres ou il n’y aura pas de place pour nous dans le Royaume. Rappelons-nous les paroles du Sage de la Première Alliance : Si un homme nourrit de la colère contre un autre homme, comment peut-il demander à Dieu la guérison ? S’il n’a pas de pitié pour un homme, son semblable, comment peut-il supplier pour ses péchés à lui ? 
 
Entendant Ben Sirac le Sage, il me vient alors une question : cet homme de la parabole que nous n’aimons pas beaucoup, faudra-t-il lui pardonner aussi ? La sentence prononcée laisse entrevoir une espérance : le maître le livra au bourreau jusqu’à ce qu’il eût remboursé tout ce qu’il devait. Cela laisse entendre, me semble-t-il, qu’une fois la chose faite et l’argent remboursé, il faudra bien lui pardonner. La justice n’annule pas le besoin de pardon. Et le pardon ne suppose pas qu’il faille aimer la personne d’abord. Mais le pardon donné peut entraîner l’amour à sa suite. N’attendons pas d’aimer pour pardonner, mais pardonnons pour apprendre à aimer. Si nous vivons de l’amour que Dieu nous porte, nous apprendrons de lui le pardon. Le psalmiste nous l’a fait chanter : le Seigneur n’est pas pour toujours en procès, [il]ne maintient pas sans fin ses reproches, car il est tendresse et pitié, lent à la colère et plein d’amour. Apprenons cela de lui, pour vivre avec lui pour toute éternité. Amen.

samedi 9 septembre 2017

23ème dimanche ordinaire A - 10 septembre 2017

Tu es le gardien de ton frère !






Il est une question posée dans la Bible, dès l’origine, qui la traverse, qui donne sens à notre vie, à nos relations, et qui reçoit des textes que nous venons d’entendre un nouvel éclairage. C’est la question posée par Caïn, au chapitre quatre de la Genèse, après le meurtre d’Abel son frère : Est-ce que je suis, moi, le gardien de mon frère ? C’est une question fondamentale pour moi dans une vie spirituelle. Elle reste incontournable et il nous faudra y répondre. 
 
            Est-ce que je suis, moi, le gardien de mon frère ? Oui, répond Dieu au prophète Ezéchiel lorsqu’il l’institue guetteur pour la maison d’Israël. Il en fait le gardien de tous ses frères, avec une mission claire : avertir, toujours et encore, afin que le peuple se détourne du Mal et se convertisse à Dieu. S’il se dérobait à sa mission, s’il refusait d’avertir le méchant, il serait responsable de sa perte et Dieu lui demanderait compte de son sang. Ni le prophète jadis, ni nous aujourd’hui, ne pouvons vivre notre vie spirituelle ans le désintérêt des autres. Nous devons avoir le souci de nos frères, nous devons encourager, avertir, inviter à la conversion. Ce n’est pas une mission réservée au prophète, aujourd’hui à ceux qui annoncent la Parole. C’est une mission pour chacun. Comment un croyant peut-il regarder son semblable aller à sa perte sans intervenir, sans avertir, sans inviter à changer ? Ce n’est pas du voyeurisme, ni de l’ingérence dans une vie privée ; c’est se sentir responsable de la vie éternelle d’autrui ; c’est croire surtout que personne n’est perdu définitivement, que chacun a la possibilité de devenir meilleur. Mais comment le pourrait-il si personne ne lui indique qu’il est sur une fausse route ? Dans un monde en perte de repères, il est nécessaire que le croyant rappelle l’horizon, ouvre à la vérité, invite aux changements nécessaires pour que chacun connaisse une vie meilleure. Il ne s’agit pas d’imposer Dieu, mais de combattre le Mal, d’oser le nommer et d’inviter à le rejeter. 
 
            Est-ce que je suis, moi, le gardien de mon frère ? Oui, répond Paul aux chrétiens de Rome lorsqu’il rappelle que le chrétien a une dette envers chacun, celle de l’amour mutuel. Il donne ainsi le cadre de l’avertissement à adresser à celui qui commet le Mal. Il ne s’agit pas de le juger en le prenant de haut ; il ne s’agit de se montrer supérieur à lui ; il ne s’agit pas davantage de jouer les pères la morale. Il s’agit d’aimer suffisamment l’autre, même celui qui commet le Mal, pour désirer sa vie, pour désirer son salut. Paul résume le tout en citant le commandement du Christ qui résume tout : Tu aimeras ton prochain comme toi-même. Si l’horizon de tous les hommes est le salut, la mission du croyant est d’entraîner ses frères vers ce but. Il ne peut faire la route tout seul, il ne peut se sauver tout seul en laissant les autres au bord du chemin. 
 
            Est-ce que je suis, moi, le gardien de mon frère ? Oui, oui, trois fois oui répond Jésus lorsqu’il donne les indications pour une vraie correction fraternelle. Ton frère t’a fait du Mal (commis un péché contre toi), va le lui dire seul à seul ; s’il faut insister, retourne vers lui accompagné d’une ou deux personnes ; et s’il faut insister plus encore, dis-le à l’assemblée de l’Eglise. Non seulement tu dois te préoccuper de ton frère, mais tu dois en plus insister, ne pas te décourager et l’inviter, toujours et encore, à la conversion. Ce n’est qu’au bout de tout ce processus que tu seras dégagé de toute responsabilité envers ton frère ! L’avertissement que Dieu recommandait au prophète Ezéchiel devient tout un processus en vue de la conversion, en vue du changement radical de vie. Parce que quelquefois il faut plus qu’un avertissement pour que l’homme reconnaisse le Mal dans lequel il est pris, nous ne pourrons jamais nous arrêter de dénoncer le Mal pour que l’homme s’en libère et vive. 
 
            Est-ce que je suis, moi, le gardien de mon frère ? Cette question essentielle a reçu une réponse de l’ensemble de la Parole de Dieu : Prophète, Evangile, Lettre apostolique. Elle est la même tout au long des alliances. Tu es responsable de ton frère, tu es le gardien de ton frère. Ton salut passe par le sien. Avec lui, écoute encore le psalmiste te chanter : Aujourd’hui, ne fermez pas votre cœur, mais écoutez la voix du Seigneur ! Le salut du bon comme du méchant dépend de cette écoute. Ecoutons donc la Parole, et vivons-là, en toute chose. Amen.

(Dessin de Mr Leiterer)

samedi 2 septembre 2017

22ème dimanche ordinaire A - 03 septembre 2017

Jésus commença à montrer à ses disciples qu'il fallait partir pour Jérusalem.





Nous étions bien dimanche dernier, disciples autour de Jésus, entendant qu’il était le Christ, le Fils du Dieu vivant. Enfin la certitude de n’avoir pas misé sur le mauvais cheval et que notre Maître, ce n’était pas n’importe qui. Il y avait là de quoi alimenter toute la semaine, se sentir forts, motivés pour parler de Jésus à qui voudrait bien nous entendre. Et nous sommes revenus, ce matin, forts de cette confiance, retrouver ce même Jésus pour l’entendre encore nous transmettre la Bonne Nouvelle. Seulement voilà, la Bonne Nouvelle de ce dimanche, c’est qu’il fallait partir pour Jérusalem, souffrir beaucoup de la part des anciens, des grands prêtres et des scribes, être tué, et le troisième jour ressusciter. Comment ? Aurais-je raté un épisode ? Que s’est-il passé pour que tout semble retomber comme un soufflé mal cuit ? il ne s’est rien passé du tout ; c’est juste l’affirmation de la stricte vérité sur Jésus, et comment il entend être Fils de Dieu. 
 
Je comprends la réaction de Pierre : Dieu t’en garde, Seigneur ! cela ne t’arrivera pas. Moi, vivant, jamais tu n’auras à souffrir tout cela ! Enfin, Seigneur, soyons sérieux deux minutes. Tu as dû te tromper, mal comprendre ce qui était attendu de toi. Enfin ! tu es le Christ, quoi ! Ce que tu dis, ce n’est juste pas possible. Qui d’entre nous n’aurait pas réagi de la même manière ? Qui aurait pu alors croire que l’avenir de Jésus, c’était cela : mourir à Jérusalem ? Il n’y a pas d’avenir à mourir, fût-ce à Jérusalem ! Oui, la première fois que Jésus annonçait à ses disciples sa Passion prochaine, nous aurions sans doute été d’accord avec Pierre : tu oublies cela, tout de suite ! Et nous aurions reçu le même avertissement que lui : Passe derrière moi, Satan ! Tu es pour moi une occasion de chute : tes pensées ne sont pas celles de Dieu, mais celles des hommes. Ben oui, mais Pierre après tout n’est qu’un homme, avec des pensées humaines. Il lui faudra encore un peu de temps pour entrer dans le projet d’amour de Dieu pour tous les hommes ; il lui faudra encore un peu de temps pour comprendre qu’il n’est pas seul sur terre et que Jésus n’est pas venu juste pour être son ami à lui, pour l’appeler lui et le sauver lui. La mission de Jésus concerne tous les hommes, et pas seulement ceux qui vivaient à son époque. Jésus commence à parler de sa Passion et même pour ses disciples, cela passe mal. Selon les évangiles, il y aura en tout trois annonces de la Passion, et pourtant, cela ne passe pas. A lire un évangile en entier, nous pouvons avoir l’impression que les disciples n’impriment pas cette donnée ; cela ne rentre pas, ni dans leur tête, ni dans leurs catégories de pensée. 
 
Jésus commença à parler à ses disciples de sa Passion. Nous pouvons comprendre aussi que cela ne serait pas simple pour lui. Comment faire comprendre l’incompréhensible à ses amis ? Comment faire comprendre que leur vie passe par sa mort ? Jésus aussi préfèrerait éviter cela : tu es pour moi une occasion de chute. Autrement dit, si je t’écoutais, je dirais comme toi, je ferais comme tu dis !  Entrer dans le projet de Dieu, ce n’est pas seulement le combat des disciples, c’est aussi le combat de Jésus. Il se retrouve là confronté à son Adversaire de toujours, celui qu’il avait déjà affronté au désert, après son baptême : Passe derrière moi, Satan ! Cela nous montre bien que ce n’est pas seulement difficile à entendre pour les disciples, c’est aussi difficile à envisager pour Jésus. Nous retrouverons cela au Jardin des Oliviers, lors de la prière de Jésus : Mon Père, s’il est possible, que cette coupe passe loin de moi ! Cependant, non pas comme moi, je veux, mais comme toi, tu veux. En Jésus, comme en chacun de nous, la part divine doit prendre le dessus ; la confiance en Dieu doit s’affirmer aux moments décisifs. Il s’agit bien de donner à Dieu les clés de notre vie ; il s’agit bien, pour gagner le combat spirituel, de laisser la manœuvre à Dieu et à lui seul. Ce n’est qu’avec lui que nous pourrons vaincre l’Adversaire ; ce n’est qu’avec lui que Satan sera détruit, une fois pour toutes. 
 
C’est pour cela que l’enseignement de Jésus sur sa Passion se poursuit par cet enseignement sur l’art et la manière de le suivre. Si quelqu’un veut marcher à ma suite, qu’il renonce à lui-même, qu’il prenne sa croix et qu’il me suive. Il n’y a pas d’autre chemin possible que celui-là. C’est vrai pour Jésus, c’est vrai pour nous. La vie de disciple n’est pas un long fleuve tranquille. La vie de disciple consiste à lutter contre le Mal, chaque jour. Notre attachement à Jésus, c’est chaque jour qu’il nous faut le redire. Notre choix de suivre Jésus, c’est chaque matin qu’il nous faut le refaire. Notre croix, c’est chaque jour que nous devons la porter. Les Pères du désert nous apprennent même que plus nous nous attacherons à Jésus, plus l’Adversaire sera virulent, parce que notre attachement à Jésus lui est insupportable. Et il se sert de tout et de tous pour nous faire chuter, y compris de nos amis.  Il nous faut être vigilants ensemble, résister ensemble et ne jamais nous fatiguer de combattre. Certains pourraient penser que le démon se déchainant plus dans notre vie quand nous affirmons notre attachement à Jésus, il suffirait, pour avoir la paix, de mettre Jésus hors de nos vies. Mais quelle erreur que de croire cela ! Ce serait pire encore, parce que l’Adversaire s’installerait dans notre vie et elle serait vouée à la Mort éternelle. Le combat spirituel, dans lequel nous sommes engagés depuis notre baptême, ne se gagne qu’avec Jésus, avec Jésus crucifié, mort et ressuscité pour nous. Le combat spirituel ne se gagne qu’en prenant notre part à la croix du Christ. Ce n’est pas la peine de vouloir tergiverser ; il n’y a pas d’autre alternative. 
 
Avec Pierre, acceptons donc d’entrer dans les pensées de Dieu. Avec tous les disciples du Christ, prenons notre croix, chaque jour, et marchons à sa suite. De Jésus, accueillons l’enseignement et avec lui, passons la mort et parvenons à la vie éternelle. Amen.

(Dessin de Mr Leiterer)