Bienvenue sur ce blog !

Ce blog voudrait vous permettre de vivre un chemin spirituel au rythme de la liturgie de l'Eglise catholique.

Les méditations s'appuient soit sur les textes bibliques quotidiens, soit sur la prière de l'Eglise.

Puisque nous sommes tous responsables de la foi des autres, n'hésitez pas à laisser vos commentaires.

Nous pourrons ainsi nous enrichir de la réflexion des autres.







samedi 29 juin 2019

13ème dimanche ordinaire C - 30 juin 2019

Toute la Loi est accomplie dans l'amour.






Je ne sais pas si c’est l’âge qui m’y pousse ou une meilleure compréhension des évangiles que je commente depuis vingt-sept années maintenant, mais je suis de plus en plus convaincu de ce que Paul affirme, à la suite de Jésus, quand il dit : Toute la Loi est accomplie dans l’unique parole que voici : Tu aimeras ton prochain comme toi-même. Tout est là, tout est dit. Paul, après Jésus, n’est pas le seul à poser cette affirmation. L’évangéliste Jean la reprendra, à sa manière, dans sa formule désormais célèbre : Dieu est amour. Nous ne nous en sortirons pas si nous ne comprenons pas cette évidence. 


Une fois l’évidence posée, il me faut alors admettre qu’elle peut ne plus être simple à comprendre : entre ceux qui utilisent le nom de Dieu pour détruire et tuer, et ceux qui ont utilisé ce nom pour abuser d’un pouvoir qu’ils n’avaient pas, l’image même de Dieu se trouve gravement affaiblie. Ce qu’il faut des années à comprendre peut s’effondrer en un instant, quand éclate le scandale. Pourtant, plus que jamais il nous faut tenir cette affirmation. Dieu ne peut pas être autre chose qu’amour ; et vivre selon les principes de sa foi ne peut se faire que dans l’amour. Tout ce qui n’est pas amour, n’est pas Dieu. Tout ce qui n’apporte pas plus d’amour, ne vient pas de Dieu. Tout ce qui n’est pas marqué du sceau de l’amour est à refuser parce que contraire à Dieu. Il faudra bien que cela rentre dans nos têtes de mules. Paul est très clair à ce sujet, lui qui poursuit aussitôt en disant : Si vous vous mordez et vous dévorez les uns les autres, prenez garde : vous allez vous détruire les uns les autres. Les conflits, petits ou grands, viennent tous de là, d’un manque d’amour ! 


Quel remède propose alors Paul ? Parce que c’est une chose de poser un diagnostic, c’en est une autre de proposer le bon remède. En bon médecin des âmes, Paul répond : la vie sous la conduite de l’Esprit Saint ! C’est vite dit, sans doute, mais c’est vrai. L’Esprit Saint, faut-il le rappeler ici, nous l’avons tous reçu au jour de notre baptême. C’est la présence de Dieu à notre vie aujourd’hui. C’est la force de Dieu qui nous est donnée et qui nous rend capable de vivre selon notre foi. C’est Dieu avec nous. Une fois que nous avons goûté à l’amour de Dieu, une fois que nous avons compris que cet amour nous est offert pour que nous en vivions, l’Esprit nous donne d’en vivre. Comment, ayant goûté le meilleur (l’amour de Dieu pour nous, révélé en Jésus, mort et ressuscité), pourrions-nous nous contenter du médiocre (un ersatz d’amour qui ne pense qu’à profiter et à abuser) ? C’est juste impossible !


Pour profiter pleinement de ce remède, il nous faut comprendre aussi que vivre selon foi et vivre selon des règles morales, ce sont deux choses différentes. Vivre selon le Christ, c’est vivre de la liberté qu’il nous offre. La première liberté, c’est celle de ne pas se laisser conduire par ses pulsions. Les règles morales ne nous font pas vivre libres : elles enferment notre vie dans des catégories (le juste et l’injuste, le bien et le mal…), mais sans nous en libérer. Elles peuvent même exciter l’envie de transgression, juste pour voir. En un sens, elles nous sécurisent en nous indiquant ce qui est bon ou pas ; alors que Jésus, le Christ, par son invitation à aimer l’autre, déverrouille les portes qui nous séparent des autres ; il nous invite au risque de l’autre. Il nous invite à la confiance réciproque, à essayer et à ne pas désespérer, ni de nous, ni de l’autre, si l’essai n’est pas transformé. Aime, toujours et encore, comme tu t’aimes, comme tu voudrais être aimé. Aime et sois libre ! Là est la certitude que Dieu t’accompagne chaque jour, dans chacun de tes actes, dans chacune de tes décisions. 


Puisque nous sommes rassemblés pour célébrer l’eucharistie, nous devons nous rappeler que ce sacrement est le signe efficace de l’amour de Dieu pour nous. Là dans le pain et le vin partagés, il s’est donné lui-même, entièrement, par amour. Là est le signe de notre salut, c’est-à-dire le signe du désir de Dieu de nous savoir avec lui, toujours. Là, sur l’autel, sera la source même de l’amour que nous sommes invités à vivre en mémoire de Jésus qui nous a aimés jusqu’à la mort sur la croix. La juxtaposition, au soir du jeudi Saint, de l’institution de l’eucharistie et du lavement des pieds, nous redit avec force que vivre notre foi, ce n’est pas seulement prier et communier, mais aussi, en même temps, aimer tout homme comme un frère en Christ. C’est le même amour qui est à l’œuvre ; c’est le même amour qui est à vivre dans ces deux formes. 


Laissons-nous transformer par l’Esprit Saint, réellement : qu’il nous donne d’accueillir l’amour que Dieu nous porte ; qu’il nous rende capables de le rendre à Dieu à travers l’amour que nous saurons manifester à nos frères et sœurs en humanité. Par l’Esprit Saint, apprenons à aimer toujours mieux, pour vivre toujours mieux, pour être toujours plus libre. Amen.




samedi 22 juin 2019

Fête du Crops et du Sang du Christ C - 23 juin 2019

L'Eucharistie, source et sommet de notre foi et de notre vie.








Tout un dimanche pour fêter le sacrement de l’Eucharistie : voilà ce que nous offre cette fête du Corps et du Sang du Christ. Un dimanche pour approfondir notre foi, pour adorer le Christ présent réellement dans le Pain eucharistique, d’où les adorations et les processions qui renaissent un peu partout dans nos paroisses. Si nous en avions perdu le goût, peut-être nous faudra-t-il y réfléchir pour l’avenir et pas seulement nous contenter de courir les « fêtes – Dieu » allemandes et revenir en disant : ah que c’était beau ! Parce que la vocation première de ces manifestations festives autour de l’eucharistie n’est pas qu’elles soient belles et folkloriques. Leur raison d’être est peut-être d’abord de nous rappeler que l’eucharistie, selon la formule du Concile Vatican II, est la source et le sommet de la vie chrétienne, donc source et sommet de notre foi. 

Elle est la source de notre foi et de notre vie parce qu’elle nous renvoie au sacrifice de Jésus. Là naît notre attachement au Christ Sauveur et notre vie avec lui. Là naît pour les croyants au Christ la nécessité de s’unir à ce sacrifice par sa célébration rituelle. L’ordre donné par Jésus lui-même au soir du Jeudi Saint ne manque pas de clarté à ce sujet : Faites cela en mémoire de moi. Et nous avons entendu Paul redire aux chrétiens de Corinthe toute l’importance de ce sacrement : chaque fois que vous mangez ce pain et que vous buvez cette coupe, vous proclamez la mort du Seigneur, jusqu’à ce qu’il vienne. Chaque eucharistie célébrée est donc une commémoration de cet unique sacrifice du Christ, quand il s’offre sur la croix pour notre salut. Et l’Eglise ne saurait se priver de cette célébration, parce qu’elle se priverait de ce lien unique à Jésus qui se livre par amour pour nous. Célébrer l’eucharistie revient à sans cesse plonger au cœur de notre foi, pour puiser à cette source la nourriture nécessaire pour progresser et tenir bon en Christ, et en recevoir la force nécessaire pour vivre notre foi au quotidien. Parce que l’eucharistie est bien notre nourriture, donnée par Dieu, pour que nous ne manquions de rien. Nous ne saurions, sans risque majeur, nous en priver de manière continue. 

Si elle est la source de notre foi et de notre vie chrétienne, elle en est aussi le sommet parce qu’il n’y a rien de plus grand et de plus beau que de communier au Christ et l’accueillir ainsi au cœur même de notre vie. Ce morceau de pain partagé, c’est le corps du Christ, mort et ressuscité pour nous. L’eucharistie célébrée, c’est la rencontre avec Dieu Père, qui nous parle dans son Fils, qui se livre à nous dans la puissance de l’Esprit Saint. Elle est le sommet de notre foi et de notre vie parce qu’elle anticipe cette rencontre face à face que nous espérons dans le Royaume à venir. Elle est un avant-goût de la grande fête que Dieu lui-même nous prépare dans son Royaume, quand le Christ reviendra dans sa gloire. Elle est proclamation du pardon des péchés, écoute de la Parole de Dieu, union intime avec le Christ Sauveur. Elle est don gratuit et sans cesse renouvelé de la grâce de Dieu. Dieu ne saurait nous faire cadeau plus grand que celui-ci, qui nous unit intimement au Christ et à nos frères en Christ. En accueillant le pain rompu, j’accueille l’amour de Dieu pour moi, j’accueille la vie de Dieu en moi pour qu’ils me tournent vers mes frères en humanité. Il n’est plus question ici de savoir si j’aime ou pas les autres ; il est question d’accueillir la vie de Dieu pour la transmettre aux autres par mon témoignage de vie. Communier n’est pas un acte individuel ou égoïste ; c’est un acte hautement communautaire puisqu’il renforce l’unité entre les croyants qui communient au même Corps.

Oui, l’eucharistie est source et sommet de notre foi et de notre vie chrétienne parce qu’elle initie tout et qu’elle récapitule tout. D’où l’insistance de l’Eglise au sujet de l’obligation dominicale. Elle n’est pas à comprendre comme une obligation contrainte au sens où tu n’as pas d’autre choix, mais comme une obligation vitale au sens où sans l’eucharistie, la vie chrétienne s’affaiblit et finit par mourir. Elle devrait être pour nous cette obligation amoureuse qui nous fait surmonter tous les obstacles qui se dressent entre elle et nous, pour aller à la rencontre de l’être aimé. Nous devrions être convaincus que nous ne pourrons jamais connaître de joie plus grande que celle que procure la célébration de l’eucharistie. Ici tout est dit ; ici tout est offert ; ici tout est amour ; ici se trouve la plus grande proximité possible sur notre terre avec le Christ et avec chacun de ceux qu’il met sur notre route. Ici le ciel rejoint la terre ; ici les hommes chantent avec les anges. Ici le Dieu fait homme donne à l’homme de devenir Dieu ; ici l’homme et Dieu sont unis. Il n’y a rien de plus beau ; il n’y a rien de plus grand.

Quand nous comprenons que l’eucharistie est la source et le sommet de notre foi et de notre vie chrétienne, nous comprenons aussi la vacuité de l’expression « croyant non pratiquant ». Elle comporte en elle-même une erreur fondamentale puisque je ne puis être croyant pour moi. Je ne suis croyant que relié à l’Eglise, la communauté croyante rassemblée par Dieu. Si Jésus lui-même dans l’Evangile n’a pu renvoyer la foule, c’est parce qu’elle était un signe du Royaume : l’humanité rassemblée autour du Christ qui enseigne, guérit, nourrit et sauve. Se dire croyant non pratiquant, n’est-ce pas renvoyer la foule de notre vie et s’illusionner d’un lien solitaire avec le Christ venu pour tous les hommes ? 

Puisse cette fête du Corps et du Sang du Christ nous unir toujours plus aux autres, en Eglise, en nous unissant davantage au Christ, lui qui est le début et le terme de notre foi, l’Alpha et l’Omega de notre vie. Ainsi nous deviendrons ce que nous recevons dans notre communion : le Corps du Christ à jamais vivant. Amen.


(Dessin de M. Leiterer)

dimanche 16 juin 2019

Trinité C - 16 juin 2019

La Trinité, quand Dieu se fait relation.







Faut-il vraiment chercher à tout comprendre de la foi chrétienne ? Faut-il vraiment nous torturer l’esprit pour saisir comment ça fonctionne la Trinité, un Dieu Un (unique) en trois personnes ? Quand on sait les longues batailles théologiques qui ont divisé les chrétiens pour établir la foi catholique, je me dis qu’il y a des mystères auxquels il vaut mieux ne pas se frotter. Et la Trinité en fait partie. Si le temps pascal n’a pas suffi à approcher le mystère d’un Dieu qui se meurt d’amour pour l’homme, d’un Dieu plus fort que la mort et donc toujours vivant (Pâques), d’un Dieu qui ouvre le ciel à tous les hommes (Ascension), d’un Dieu qui laisse aux hommes son Esprit pour que reste vive en eux la présence de son Fils ressuscité (Pentecôte), que peut apporter de plus la solennité de ce jour ? 

Je crois d’abord qu’il faut renoncer à approcher ce mystère sous l’angle mathématique. N’essayons pas de réduire Dieu à une équation impossible à résoudre. 1 + 1 + 1, cela fera toujours trois, comme nous l’apprenons à l’école dès les petites classes. Dieu ne s’additionne pas ; au mieux, il se multiplie pour ne pas dire qu’il se coupe en quatre pour nous sauver. La réponse n’est décidément pas à chercher du côté des sciences mathématiques. Mais alors comment l’appréhender ?

Peut-être par notre expérience humaine. Puisque nous sommes à l’image de Dieu, qu’est-ce qui, en nous, nous permet d’approcher le mystère de Dieu ? Il y a forcément en nous quelque chose qui nous permet de le comprendre. Peut-être est-ce la nécessité pour l’homme de vivre en relation. Dès les premières pages de la Bible, nous voyons que Dieu crée l’Homme, mâle et femelle, semblables (voici l’os de mes os la chair de ma chair) et pourtant différents (homme et femme), non pas pour que l’un domine l’autre, ni pour que l’un frappe sur l’autre, mais pour qu’ils réalisent le projet de Dieu, chacun à sa place, chacun à sa manière, chacun avec ses spécificités, mais tous deux ensemble, dans cet élan d’amour de Dieu qui les a fait venir à l’existence. La Trinité nous rappelle peut-être surtout que Dieu est relation, en lui-même déjà, d’où ce besoin de relation avec cet homme qu’il a créé à son image et à sa ressemblance.  Le Dieu de la révélation biblique n’est pas un Dieu à poser au-dessus des nuages, mais à porter en nous, au fond de nos cœurs pour que nous puissions, hommes et Dieu, vivre ensemble. Ce que le Père vit avec son Fils par le lien de l’Esprit Saint, nous sommes appelés à le vivre avec le Père, puisque le baptême nous configure au Christ, nous fait fils de ce Dieu Père qui nous aime et nous sauve. Il n’y a pas de foi possible sans cette relation primordiale, constitutive de ce qu’est Dieu et de ce qu’est l’homme. 

Dire que la relation est fondamentale pour comprendre Dieu, c’est affirmer du même coup que Dieu ne saurait être juste une grande idée. Dire que je peux entrer en relation avec Dieu qui est relation en lui-même, c’est affirmer qu’il est quelqu’un et non quelque chose. Il est ce Père qui nous aime ; il est ce Fils qui nous sauve en étant pour les hommes l’expression parfaite de l’amour de Dieu pour chaque homme ; il est cet Esprit qui nous accompagne chaque jour, qui ancre en nous et la Parole du Fils et l’amour du Père. Si le Fils ne dit pas et ne fait pas autre chose que ce que son Père lui dit de faire et de dire, l’Esprit Saint ne fait pas comprendre autre chose que ce que le Fils a dit et fait dans l’obéissance au Père. S’ils sont chacun distincts (Père, Fils et Esprit Saint), ils sont en tout semblables au point de n’être qu’UN, une seule expression de l’amour unique de Dieu pour les hommes. Et si Dieu est en lui-même et avec nous relation, comme savent l’être un père et son fils dans la puissance d’un même esprit d’amour, peut-être que ce mystère de la Trinité, avant d’être un mystère à comprendre, est d’abord un mystère à vivre. A vivre d’abord avec Dieu, en entrant dans cette relation d’amour qu’il me propose de vivre ; à vivre ensuite avec mes frères vers qui son amour me renvoie nécessairement, l’amour de Dieu m’étant donné pour que je le partage. Le mystère de la Trinité devient alors ce qui m’empêche de me replier, de m’enfermer dans une relation où il n’y aurait que mon Dieu et moi. Dieu n’est pas mon papa chéri à moi tout seul ; Jésus n’est pas mon petit Jésus à moi tout seul ; l’Esprit Saint ne m’est pas donné pour que je le garde jalousement pour moi tout seul. Et l’Eglise devient alors le lieu où ce mystère se déploie, parce qu’elle est ce lieu rassemblé par l’Esprit Saint qui permet que chacun se reconnaisse fils du même Père et donc frère du Christ et frères de tous ceux qui reconnaissent le même Père. 

Que cette fête de la Trinité nous mette en relation avec Dieu et avec nos frères pour que le projet d’amour de Dieu s’étende à tous les hommes. Que notre vie et notre témoignage creusent en ceux qui ne connaissent pas encore le Dieu UN et Trine, le désir de le suivre, de l’aimer et de construire avec nous le Royaume qui vient. Amen.






samedi 8 juin 2019

Pentecôte C - 09 juin 2019

L'Esprit nous donne de vivre notre dignité baptismale.

(Messe du jour)







Dieu te marque de l’huile du salut afin que tu demeures dans le Christ pour la vie éternelle. Telle est la fin de la formule de l’onction avec le Saint Chrême lors d’un baptême d’enfant. Cette onction manifeste le don de l’Esprit qui est fait à tout croyant au commencement de sa vie chrétienne. Nous comprenons ainsi très vite que celui qui est appelé par Dieu à la vie, reçoit de lui l’Esprit Saint pour que le nouveau croyant demeure dans le Christ, vive avec Jésus pour toujours. L’articulation des trois est ainsi clairement exprimée : Dieu appelle, le Christ sauve, l’Esprit Saint permet de demeurer dans le Christ, autrement dit de vivre selon son enseignement. 

La fête de la Pentecôte que nous célébrons aujourd’hui vient donc admirablement clore le temps pascal. Le Christ est retourné chez son Père, partager sa gloire ; il envoie son Esprit, comme il l’avait promis aux siens. C’est cet Esprit qui permettra désormais aux fidèles du Christ de reconnaître sa présence, de mener leur vie en conformité avec leur foi. C’est bien ce qu’enseigne Paul aux chrétiens de Rome. Vous êtes [sous l’emprise de] l’Esprit, puisque l’Esprit de Dieu habite en vous. Et plus loin : Si le Christ est en vous (…) l’Esprit vous fait vivre. L’Esprit Saint n’est donc pas juste un truc en plus pour finir le temps pascal en beauté. Sa présence nous est aussi indispensable que le pain et le vin de l’Eucharistie ; son souffle nous est aussi indispensable que l’air que nous respirons ; sa lumière nous est indispensable pour approfondir toujours plus l’enseignement du Christ ; sa force nous est indispensable pour résister aux assauts du péché. Sans l’Esprit, nous ne serions rien ; sans l’Esprit, nous ne tiendrions pas longtemps dans la fidélité au Christ ; sans l’Esprit, nous serions livrés à nos passions charnelles. Notre vie en Christ, c’est à l’Esprit que nous la devons. Il nous fait vivre notre dignité baptismale. 

Paul le reconnaît quand il affirme : Tous ceux qui se laissent conduire par l’Esprit de Dieu, ceux-là sont fils de Dieu. Sans l’Esprit Saint, pas de filiation divine. Certes, quand Jésus a appris à ses disciples à prier, il leur a donné le Notre Père. Autrement dit, il nous demande de nous reconnaître fils quand nous nous adressons à Dieu. Mais, dit Paul, nous avons reçu un Esprit qui fait de nous des fils ; et c’est en lui que nous crions « Abba ! », c’est-à-dire : Père ! Jésus nous a donné le texte, les mots de la prière ; l’Esprit Saint nous donne la capacité de les dire. Mieux encore, l’Esprit Saint nous fait comprendre que nous ne nous trompons pas quand nous appelons Dieu, notre Père, puisque c’est l’Esprit Saint lui-même qui atteste à notre esprit que nous sommes enfants de Dieu. Il est finalement le garant de notre christianité, de notre fidélité au Christ et à son Evangile. 

Il nous faut entendre alors encore ce que Paul rappelle aux chrétiens de Rome. Puisque nous sommes ses enfants, nous sommes aussi ses héritiers : héritiers de Dieu, héritiers avec le Christ, si du moins nous souffrons avec lui pour être avec lui dans la gloire. Certains diront qu’il y a le meilleur et le pire dans cette affirmation. Le meilleur, c’est que nous héritons de Dieu, avec le Christ. Ce qui d’une part signifie que nous sommes frères du Christ (nous héritons avec lui), et d’autre part confirme que nous sommes fils de Dieu. Ne le serions-nous pas, nous n’hériterions pas ! Le pire, ce sera le passage par la souffrance, car enfin, aucun de nous n’aime souffrir. Que veut dire Paul ? Simplement qu’il nous faut, comme le Christ, passer la mort pour partager sa gloire ; autrement dit, suivre son chemin, ce chemin que Jésus lui-même a indiqué à ses disciples en disant : Celui qui veut être mon disciple, qu’il prenne sa croix et qu’il me suive. Ce qui devrait plutôt nous rassurer. Non pas que la croix soit une partie de plaisir, mais nous devons nous souvenir que le Christ a vaincu la croix, une fois pour toutes. Nos croix, nos souffrances, nous les vivons dans les siennes, nous les lui confions pour qu’il nous attire à lui dans sa gloire. Dieu ne permettra que ceux qui sont à lui, ceux qui vivent de son Esprit, soient noyés dans la souffrance. Il les fera venir auprès de lui, ils partageront sa gloire, la gloire du Christ, celui dont ils auront témoigné en tout, y compris au cœur de l’épreuve. 

La séquence de la Pentecôte que nous n’entendons plus guère, mais que je vous invite à relire dans vos missels en rentrant chez vous, nous rappelle alors le rôle protecteur et apaisant de l’Esprit Saint. Dans le labeur [sois] le repos ; dans la fièvre, la fraîcheur, dans les pleurs, le réconfort… Lave ce qui est souillé, baigne ce qui est aride, guéris ce qui est blessé. Assouplis ce qui est raide, réchauffe ce qui est froid, rends droits ce qui est faussé… donne le salut final, donne la joie éternelle. Que ceci devienne notre prière quotidienne pour une vie dans le Christ, sous la conduite de l’Esprit Saint, à la rencontre du Dieu qui nous appelle. Amen.

(Dessin de M. LEITERER)




Pentecôte C - 09 juin 2019

Un chrétien ne peut se passer de l'Esprit Saint.

(Messe de la veille au soir : première lecture extraite du prophète Ezéchiel)






Il faut faire un peu d’histoire biblique pour comprendre la première lecture entendue, sinon elle ne sera qu’une histoire un peu gore qui, au mieux ne nous dira pas grand-chose, au pire nous donnera des cauchemars. Bien comprendre ce passage nous permettra aussi de mieux comprendre pourquoi un chrétien ne saurait se passer de l’Esprit Saint que nous célébrons en cette fête de la Pentecôte.

Il nous faut remonter loin dans l’histoire de nos ancêtres. Nous sommes en 1030 avant Jésus Christ. Le peuple juif est établi en Terre promise depuis 190 ans et il va trouver le prophète Samuel pour lui demander un roi. Pourquoi soudainement veut-il un roi ? Parce que tous les autres peuples qui l’entourent en ont un. Ils veulent être comme les autres peuples. Samuel leur rappelle alors qu’ils ont déjà un roi, Dieu lui-même. Mais ils insistent. Alors, pour essayer de les décourager, il leur donne les inconvénients de la royauté. Ecoutez plutôt : Voici le droit du roi qui va régner sur vous. Il prendra vos fils et les affectera à ses chars et à ses chevaux et ils courront devant son char… il leur fera labourer ses terres, moissonner ses champs, fabriquer ses armes de guerre et les harnais de ses chars, il prendra vos filles comme parfumeuses, cuisinières et boulangères. Il prendra vos champs, vos vignes et vos oliveraies les meilleures pour les donner à ses officiers. Il prélèvera la dîme sur vos cultures et vos vignes… vos meilleurs serviteurs, vos meilleures servantes, vos meilleurs bœufs et vos meilleurs ânes, il les prendra pour lui et vous-mêmes vous deviendrez ses esclaves. Qu’auriez-vous fait devant un tel portrait ? Renoncer à votre idée d’avoir un roi pour être comme les autres ? Ce n’est pas ce qu’a fait le peuple jadis. Le peuple refusa d’écouter Samuel. 

Je vais accélérer la suite de l’histoire. Vous l’aurez deviné : ils auront leur roi. D’abord Saül, puis David, puis Salomon. Avec ces deux, le royaume sera grand, respecté. Mais dès la mort de Salomon, ses fils se déchirent et le royaume est coupé en deux. De décisions politiques imbéciles en décisions politiques désastreuses, les deux royaumes périclitent et finissent par tomber, chacun leur tour, sous le coup des ennemis. C’en est fini du Royaume d’Israël. Jérusalem est détruite, le Temple rasé ; Dieu lui-même semble défait. Le peuple est déporté à Babylone où il n’aura plus le droit de pratiquer sa religion. Il sera prisonnier, esclave. C’est dans ce contexte qu’apparaît le prophète Ezéchiel dont nous avons entendu une des visions. Parce que même si le peuple avait abandonné le Seigneur, Dieu, lui, n’a jamais abandonné son peuple. La vision des ossements desséchés vient rappeler que l’espérance est toujours possible, et que le Dieu qui avait jadis sorti son peuple de l’esclavage d’Egypte, fera retourner son peuple sur la terre d’Israël : Ainsi parle le Seigneur Dieu : Je vais ouvrir vos tombeaux et je vous en ferai remonter, ô mon peuple, et je vous ramènerai sur la terre d’Israël. Et comment Dieu fera-t-il cela ? Il le fera par son Esprit Saint : Prophétise, fils d’homme. Dis à l’esprit : Ainsi parle le Seigneur Dieu : Viens des quatre vents, esprit ! Souffle sur ces morts, et qu’ils vivent ! (…) Et un peu plus loin : Je mettrai en vous mon esprit, et vous vivrez (…) alors vous saurez que je suis le Seigneur Dieu.

Voilà à quoi sert l’Esprit Saint dont nous célébrons le don en cette fête de Pentecôte. Il est ce vent de liberté qui nous fait vivre vraiment. Il est la présence de Dieu en notre vie pour que celle-ci soit grande, qu’elle ait du souffle, qu’elle nous sorte de tous nos tombeaux dans lesquels nous nous enfermons quelquefois : tombeaux de nos haines, tombeaux de nos addictions, tombeaux de notre péché, tombeaux de nos séparations. L’Esprit Saint vient faire toute chose nouvelle dans notre vie. Il vient renouveler la terre comme le chantait le psaume. Alors peut-être que certains se disent : mais je suis vivant moi ! Qu’ai-je besoin de l’Esprit Saint ? Tu es vivant ? Tu respires certes, tu te déplaces aussi ; mais cela signifie-t-il que tu es vivant en vérité ? Être vivant en vérité, c’est vivre selon le cœur de Dieu ; c’est vivre en laissant battre notre cœur au rythme du cœur de Dieu. Et le rythme du cœur de Dieu, c’est l’amour. Tu es vraiment vivant quand tu aimes, et que tu aimes comme Dieu aime : d’un amour infini, d’un amour patient, d’un amour qui supporte tout, d’un amour sans préférence, d’un amour pour tous et chacun de ceux qu’il met sur ta route. Tu es vraiment vivant quand tu aimes d’un amour qui se donne totalement. Aimes-tu ainsi ? Alors tu auras encore besoin de l’Esprit pour qu’il te maintienne dans un tel amour, chaque jour que Dieu te donnera de vivre. 

Un chrétien ne peut pas se passer de l’Esprit Saint. Toujours il nous faut demander à Dieu de renouveler en nous ce don que nous recevons dès notre baptême et dont la plénitude nous est donnée par la confirmation. Toujours nous devons prier l’Esprit d’agir en nous, pour que tous nos choix, toutes nos décisions, toutes nos paroles, soient marqués de sa présence, marqués par l’amour-même de Dieu. Tu veux vivre vraiment ? Alors demande l’Esprit Saint. Tu veux vivre ta vie en grand ? Alors invoque l’Esprit Saint. Tu veux vivre selon la Parole de Dieu ? Alors prie l’Esprit Saint ? Tu veux rester fidèle à ton baptême ? Alors laisse l’Esprit Saint agir en toi. Il est ce fleuve d’eau vive qui emporte tout pour ne laisser que l’amour. Amen.




samedi 1 juin 2019

7ème dimanche de Pâques C - 02 juin 2019

La Bonne Nouvelle de l'Apocalypse.





Avec ce septième dimanche de Pâques, nous terminons la méditation du livre de l’Apocalypse. Nous en avons entendu les derniers versets nous annoncer le retour du Christ, commencement et fin de toutes choses. Il vient récapituler l’Histoire des hommes, la mener à son achèvement. 


Si vous avez pris le temps, durant ce temps de Pâques, de lire la totalité de ce livre, vous aurez compris que cet achèvement est en fait un commencement. Le commencement de la communion retrouvée entre l’homme et Dieu, le commencement de ce que l’histoire des hommes n’aurait jamais dû cesser d’être s’il n’y avait pas eu la chute d’Adam et d’Eve, nos premiers parents ; le commencement de ce que notre propre histoire personnelle avec Dieu aurait dû être depuis notre baptême, quand Dieu nous a rachetés à grand prix, nous faisant participer à la mort et à la résurrection du Christ. Le commencement d’une vie dans laquelle l’homme et Dieu partagent une même vision, le commencement d’une vie où projet de Dieu et projet de l’homme ne font qu’un. Ce livre nous rappelle alors que notre vie a un sens, qu’elle est orientée vers ce jour où, comme jadis au jardin de la Genèse, nous verrons Dieu face à face. Notre vie est destinée à être libre de toute entrave du Mal, libre de toute entrave de la Mort. Notre vie n’est vraiment la Vie, qu’ancrée en Dieu. 


Si vous avez été attentifs à cette lecture de l’Apocalypse, vous aurez remarqué que ce retour du Christ s’accompagne d’une béatitude : Heureux ceux qui lavent leurs vêtements [dans le sang de l’Agneau, comme le rapportait la vision entendue au quatrième dimanche de Pâques] : ils auront droit d’accès à l’arbre de la vie. Nous pourrions dire que la boucle est bouclée, pour peu que nous nous souvenions de la parole prononcée par Dieu au moment de la chute de nos premiers parents : Voilà que l’homme est devenu l’un de nous par la connaissance du bien et du mal ! Maintenant, ne permettons pas qu’il avance la main, qu’il ne cueille aussi le fruit de l’arbre de vie, qu’il en mange et vive éternellement. Ce qui était interdit à l’homme lui devient possible, pour peu qu’il ait passé la grande épreuve avec le Christ, pour peu qu’il ait passé avec lui la mort. L’homme, sauvé par le Christ, est fait pour la vie, pour la vie en plénitude. Voilà l’heureuse nouvelle dont les chrétiens sont dépositaires ; voilà l’heureuse nouvelle que nous devons découvrir par l’écoute de la Parole et transmettre au monde. Dans un monde secoué, en crise, il n’est rien de plus urgent à faire découvrir pour rendre aux hommes une espérance. Dans un monde en proie à la violence, il n’est rien de plus urgent à proclamer : l’homme n’est pas fait pour la mort, il est fait pour la vie avec Dieu. Il n’y a pas d’autre issue possible si nous ne voulons pas nous abimer dans des guerres sans fin. Il s’agit bien de retrouver le goût de la grandeur de l’homme ; il s’agit bien de retrouver le goût de la fraternité que Caïn avait supprimé en tuant son frère Abel ; il s’agit de retrouver le goût de l’éternité. 


Nous pouvons comprendre alors que le livre de l’Apocalypse n’était définitivement pas donné pour nous faire peur, mais pour réveiller notre conscience de ce que nous sommes réellement : nous sommes des hommes et des femmes désirés par Dieu, pour vivre avec lui. Oui, Dieu a voulu avoir besoin de nous ; Dieu nous a voulu, en sa bonté, comme partenaires d’une alliance éternelle, pour une vie de bonheur et de sainteté. Devant la connaissance d’un tel projet, nous pouvons entendre l’Esprit et l’Epouse (autrement dit l’Eglise) dire au Christ : Viens ! Et nous pouvons entendre la nécessité pour nous de dire pareillement au Christ : Viens ! Comment, devant la promesse d’un tel bonheur, ne pas vouloir qu’il s’accomplisse ? Comment, devant la promesse d’un tel bonheur, ne pas vouloir hâter cette venue en appelant du fond du cœur : Viens !? Pour que ce désir devienne réalité en nous, il nous faut nous ouvrir à l’Esprit Saint : c’est lui qui poussera avec nous ce cri de notre désir : Viens ! 


Nous mesurons bien alors la profondeur et la réalité du désir de Dieu que nous vivions avec lui, puisque non seulement il nous a envoyé son Fils et l’a livré pour notre salut ; mais maintenant que son Fils s’en est retourné partager la gloire de son Père, il nous donne l’Esprit Saint, celui qui nous fait tout comprendre, celui qui nous permet de dire à Dieu : Abba ! Père, celui qui, avec l’Eglise, dit au Christ : Viens ! Comment exprimer mieux que notre vie vient de Dieu, qu’elle est pour Dieu, qu’elle est en Dieu ? Saint Paul l’a rappelé jadis aux chrétiens de Rome : Quand les hommes aiment Dieu, lui-même fait tout contribuer à leur bien, puisqu’ils sont appelés selon le dessein de son amour. Quand les hommes aiment Dieu : aimes-tu suffisamment Dieu pour désir son retour ? Que cette semaine qui nous sépare de la Pentecôte soit pour nous l’occasion de demander une présence renouvelée de l’Esprit au cœur même de notre vie, pour que nous puissions dire en vérité : Viens, Seigneur Jésus ! Viens ! Amen.

(Icône de Armia El Katcha, St Jean à Patmos)