Bienvenue sur ce blog !

Ce blog voudrait vous permettre de vivre un chemin spirituel au rythme de la liturgie de l'Eglise catholique.

Les méditations s'appuient soit sur les textes bibliques quotidiens, soit sur la prière de l'Eglise.

Puisque nous sommes tous responsables de la foi des autres, n'hésitez pas à laisser vos commentaires.

Nous pourrons ainsi nous enrichir de la réflexion des autres.







vendredi 30 septembre 2011

27ème dimanche ordinaire A - 02 octobre 2011

Ne soyez inquiets de rien !



Frères, ne soyez inquiets de rien ! Nous n’avons pas choisi cette page de Paul à cause de la situation économique actuelle. Cette page aux Philippiens a été lue parce qu’elle est attribuée à ce dimanche de l’année. Les circonstances internationales en font malgré tout un appel pressant à la confiance adressé aux chrétiens. Après avoir rappelé que notre foi repose sur le Christ Jésus, qui s’est abaissé jusqu’à la mort pour que nous ayons la vie, Paul va au bout de sa réflexion et invite chaque croyant à la prière. Comment autrement s’unir à ce Dieu qui a tant fait pour nous et qui continue d’agir pour nous ?

Frères, ne soyez inquiets de rien, mais en toutes circonstances, priez et suppliez pour faire connaître à Dieu vos demandes. La confiance que nous plaçons en ce Dieu qui a livré son Fils sur la croix, est enrichie de notre prière. Nous nous adressons à Dieu, et c’est particulièrement vrai dans les moments plus difficiles de notre existence, non pas par crainte, ni par couardise, mais bien parce que nous savons que Dieu peut justement encore quelque chose alors que nous semblons démunis. Se confier à Dieu dans la prière, lui confier nos proches ou bien telle situation particulière, c’est poser un acte de foi, c’est lui dire que nous avons besoin qu’il manifeste sa puissance. Le premier résultat de cette prière confiante, avant même le fait qu’elle soit exaucée, c’est la paix profonde qu’elle nous procure. Nous faisons bien de nous adresser à Dieu puisque nous retrouvons la paix que lui seul peut nous donner dans l’adversité. Désormais, ayant tout remis entre les mains de Dieu, il n’y a plus de crainte à avoir. Sans doute est-ce pour cela que Paul insère dans sa demande, dans l’action de grâce priez et suppliez ! Demandez tout en remerciant déjà ! Demandez avec la certitude d’avoir déjà reçu ! Demandez, remerciez et ne soyez inquiets de rien !

Cette attitude spirituelle qui consiste à se confier à Dieu, ce n’est pas se retirer du monde, ni se désintéresser de la suite. Ce n’est pas non plus se croiser les bras et attendre. Il nous faut aller au bout du passage entendu pour comprendre la logique de la pensée de Paul. Ne soyez inquiets de rien… dans l’action de grâce, priez et suppliez… enfin, mes frères, tout ce qui est vrai et noble, tout ce qui est juste et pur, tout ce qui est digne d’être aimé et honoré, tout ce qui s’appelle vertu et qui mérite des éloges, tout cela prenez-le à votre compte. Vous faites bien de ne pas vous inquiéter ; vous faites bien de vous confier à Dieu ; mais ne vous arrêtez pas là. Ne croyez pas que Dieu fera tout. Prenez votre part, vivez selon Dieu, vivez dans le vrai, vivez dans la justice et la pureté du cœur, vivez dans l’amour de tous, vivez selon les vertus communes. Dieu tiendra sa part ; à vous de vivre comme des sauvés ; à vous de vivre comme les fils et les filles adoptifs que vous êtes devenus en Christ.

N’être inquiet de rien c’est croire que rien de ce qui touche le monde n’est un obstacle à la foi au Christ : au contraire, c’est à travers leurs rapports aux autres et au monde que les chrétiens doivent vivre leur attachement au Christ. Il n’y a pas lieu de s’évader du monde, il n’y a surtout pas à déserter les lieux des combats pour plus d’humanité, plus de fraternité, plus de justice. Au contraire, fort de sa confiance en Dieu, le croyant doit agir avec Dieu pour transformer le monde. N’être inquiet de rien, c’est donc aussi déployer toutes les gammes de la vie chrétienne pour témoigner de ce Dieu en qui nous nous confions. N’être inquiet de rien, c’est être signe de ce Dieu qui sauve le monde. N’être inquiet de rien, c’est vivre de cette paix que Dieu nous offre et à la suite du Christ, devenir nous aussi artisan de la paix de Dieu pour un monde meilleur. Que la célébration de notre eucharistie en ce dimanche nous permette d’entrer dans cette paix que Dieu offre à profusion pour mieux pouvoir la transmettre et en vivre autour de nous. Amen.





(Dessin de Coolus, Blog du lapin bleu)

lundi 26 septembre 2011

26ème dimanche ordinaire A - 25 septembre 2011

Une foi à proclamer, une foi à vivre dans l’ordinaire d’une vie.

C’est l’histoire de deux fils à qui leur père fait une demande : « va travailler aujourd’hui à ma vigne ! » L’un répond « non » et le fait quand même. L’autre répond « Oui » et ne le fait pas. C’est l’histoire de l’humanité partagée entre ceux qui croient et qui ont du mal à vivre selon leur foi et ceux qui ne croient pas et qui sont quelquefois plus évangéliques que les croyants. C’est donc notre histoire que Jésus raconte ! L’histoire de nos vies, l’histoire de nos doutes, l’histoire de nos manquements, l’histoire de nos difficultés à vivre ce que nous croyons. C’est au final l’histoire de notre vie avec Dieu. Car il fait partie de cette histoire. C’est lui qui appelle, c’est lui qui attend.

Dieu appelle tout homme à vivre avec lui. C’est un principe élémentaire de notre foi. Nous l’avons tous appris. Nous savons aussi ce qu’il attend de nous : une vie conforme à l’Evangile. Paul le redit dans la deuxième lecture : s’il est vrai que dans le Christ on se réconforte les uns les autres, si l’on s’encourage dans l’amour, si l’on est en communion dans l’Esprit, si l’on a de la tendresse et de la pitié, alors, pour que ma joie soit complète, ayez les mêmes dispositions, le même amour, les mêmes sentiments ; recherchez l’unité. Il nous adresse un appel à vivre chaque jour, par nos actes, ce que nous proclamons dans la foi chaque dimanche.

Dans notre vie de foi, l’habitude aidant, il nous faut reconnaître que nous nous installons sans doute dans un quotidien routinier. Nous demandons les sacrements « parce que cela s’est toujours fait dans la famille », nous allons à l’église, nous partageons un peu avec les pauvres : on est chrétien, quoi ! Surtout le dimanche ! Et de toute manière, y’en a plein qui ne croient même pas, qu’on ne voit jamais le dimanche. Ce qu’on fait, c’est déjà pas mal ! C’est, je crois, une bonne interprétation de l’attitude du deuxième fils. Il sait ce que son père attend de lui, il y donne son accord, mais quelques fois, cela coince. Il pense qu’il suffit de dire « OUI » une fois, et ensuite tout est bon.

Il me fait penser à cet autre fils de la parabole de l’enfant prodigue : le fils aîné, celui dont on ne parle jamais. Celui qui pensait que l’obéissance et la soumission suffisaient, alors qu’il faut avant tout aimer et se sentir fils de ce père qui appelle. C’est là tout le drame de tant de croyants, le drame de chacun de nous à un moment de notre vie de foi : il nous faut découvrir que la vie de foi n’est pas d’abord obéissance servile à quelques préceptes moraux, mais d’abord amour accepté et amour donné. Dieu n’attend pas de nous que nous soyons des serpillières absorbant des principes de vie, mais des hommes et des femmes debouts, libres, aimés et aimant en retour.

La mise en parallèle de l’Evangile avec le passage du prophète Ezéchiel vient renforcer ma certitude. Le prophète annonce clairement que chaque homme sera jugé sur ses actes (ceux de toute une vie) et non sur une décision prise à un moment donné de sa vie. Ainsi « si le juste se détourne de sa justice, se pervertit, et meurt dans cet état, c’est à cause de sa perversité qu’il mourra. Mais si le méchant se détourne de sa méchanceté pour pratiquer le droit et la justice, il sauvera sa vie. »

Donc, si Dieu appelle chaque homme à la vie, si chaque homme est libre de sa réponse initiale, Dieu attend de l’homme qu’il se convertisse et l’homme est sans cesse libre et capable de modifier sa réponse initiale. Si la réponse initiale de l’homme est « Oui » au projet de Dieu, il lui faudra toute sa vie pour ratifier ce OUI par des actes qui vont dans le sens de plus de vie, plus de fraternité, plus de charité. Si la réponse initiale est « Non », il aura toujours la possibilité de se reprendre et de réorienter sa vie dans le sens de LA VIE et répondre ainsi au projet d’amour de Dieu pour lui. Magnifique patience de Dieu qui ne se résout pas à enfermer l’homme dans sa misère et son péché, mais qui lui offre toujours et encore de reprendre pied et de choisir la vie.

Paul appuie cette nécessité de cohérence sur l’exemple du Christ lui-même qui s’est abaissé par amour et qui est allé jusqu’au bout de son chemin de croix. Il ne s’est pas contenté de dire Oui au projet de Dieu au moment de l’incarnation, quand les anges chantaient la gloire de Dieu et que les nations se prosternaient devant lui ; il n’a pas seulement donné son accord au projet de Dieu quand, entrant dans Jérusalem, il est accueilli tel le Messie venu libérer son peuple. Il a aussi donné son Oui à Dieu lorsque le fouet lacérait son dos, lorsque les clous traversaient sa chair et que, pendu à la croix, son souffle l’abandonnait, l’entrainant dans la mort. Il s’est abaissé, et dans son obéissance, il est allé jusqu’à la mort, et la mort sur une croix. Jésus devient véritablement le Christ dans cet acte ultime, acte consacré par le Père au moment de la résurrection. Son Oui devient définitif sur la croix ; après cet acte inouï, plus aucun Oui ne saurait être approximatif ou passager.

Pour le croyant, rien n’est donc jamais acquis. Le baptême ne donne pas de droit au Royaume : il en ouvre le chemin et en rappelle les exigences. Il nous donne une responsabilité supplémentaire vis-à-vis de ceux qui ne sont pas baptisés : nous devons témoigner de notre foi, càd leur donner envie de découvrir à leur tour ce Dieu qui les appelle et les attend, leur donner envie de rejoindre cette communauté faite de frères et de sœurs à aimer parce qu’aimés de Dieu. Puissions-nous être suffisamment ouverts à l’Esprit Saint pour entendre l’appel de Dieu et trouver le chemin d’une conversion vraie, qui nous fera répondre, positivement et durablement, au projet d’amour qu’il a pour nous. Pour y parvenir, nous pouvons prier avec le psalmiste : Seigneur, fais-moi connaître tes chemins, enseigne-moi tes sentiers. Dirige-moi dans ta vérité : enseigne-moi, tu es le Dieu qui me sauve. AMEN.

samedi 17 septembre 2011

25ème dimanche ordinaire A - 18 septembre 2011

Pour moi, vivre c'est le Christ !




Pour moi, vivre, c’est le Christ et mourir est un avantage. Combien de temps faut-il à un homme pour arriver à pareille affirmation ? Peut-on seulement arriver à pareille affirmation ? Qu’est-ce que Paul veut nous faire comprendre ?

Pour moi, vivre, c’est le Christ. En transmettant ces mots à ces chers Philippiens, Paul dit son attachement au Christ. Celui qui s’est révélé à lui sur le chemin de Damas est devenu le cœur de sa vie. Non seulement il vit pour le Christ, pour l’annonce de sa Bonne Nouvelle, mais encore il vit par le Christ. Paul a cette prétention d’être véritablement attaché au Christ au point de n’être plus qu’un avec lui. Tout ce qu’il fait, il le fait pour le Christ ; tout ce qu’il fait, il le fait au nom du Christ. Ce qu’il nous livre ici, c’est sa profession de foi en Christ qui remplit et comble toute une vie. Paul n’a plus besoin d’autre chose puisqu’il a le Christ, puisqu’il est en Christ. L’affirmation de Paul devient pour tout croyant une invitation à se fondre en Christ, à prendre au sérieux notre foi et notre relation au Christ. Celui qui a authentiquement rencontré le Christ ne peut plus vivre comme avant. Toute sa vie est transformée, bouleversée, marquée par cette rencontre.

Pour moi, vivre, c’est le Christ signifie aussi qu’il n’est plus possible désormais à Paul, de vivre sans annoncer ce Christ. Celui qui est devenu le cœur de sa vie, il voudrait qu’il devienne le cœur de la vie de tous les hommes, pour que leur vie et leur monde même en soient transformés, pour le bien de tous. Le Christ est un trésor qui se doit d’être partagé. Ayant rencontré le Christ, l’ayant reconnu comme le cœur de sa vie, comment Paul pourrait-il ne pas vouloir l’annoncer aux autres, pour qu’ils bénéficient de la même expérience ? Paul ne pouvait plus, depuis Damas, être autre chose qu’Apôtre du Christ. Quiconque rencontre le Christ en vérité ne peut plus que devenir son Apôtre, chargé d’annoncer la Bonne Nouvelle. Puisque Paul est parvenu à une telle union avec le Christ, il peut nous apprendre à entrer dans une relation semblable.

Paul est tellement devenu Un avec le Christ que son seul désir, la seule chose qui lui manque, c’est d’être pour toujours Un avec lui, par delà la mort-même. Pour moi, vivre, c’est le Christ et la mort est un avantage. C’est bien ainsi qu’il nous faut comprendre la totalité de la phrase. Certes, dès ici bas, Paul a conscience d’être pleinement uni au Christ ; mais il attend comme une délivrance de le voir face à face dans la gloire du Royaume. Il est tellement uni au Christ qu’il a conscience que plus rien, pas même la mort, ne peut le tenir loin de lui. Il comprend sa propre mort comme l’union totale à celui qu’il a accueilli dans la foi. La mort lui est un avantage, parce que de ses yeux, il verra le salut. Vivant pour et avec le Christ, Paul ne craint plus rien, pas même la mort.

Pourtant, si Paul désire la mort pour être totalement en Christ, il ne la provoque pas, il ne la hâte pas, parce qu’il sait que Dieu a encore besoin de lui. Paul est partagé soudain entre son désir d’être face à son Sauveur et sa mission qui est d’annoncer justement le salut à tous. A cause de vous, demeurer en ce monde est encore plus nécessaire. Il ne craint pas de mourir, mais il ne provoque pas la mort parce que les Philippiens ont encore besoin d’entendre Paul, d’entendre sa prédication. Il est plus urgent, plus utile d’annoncer l’Evangile pour le salut du monde que de vouloir être en Christ, dans son Royaume. Entre son désir propre et sa mission, ce qui est premier, c’est sa mission, c’est le monde qui ne connaît pas encore le Christ, ou qui le connaît mal. Comment parviendrait-il, ce monde, à la connaissance du Christ, si tous ceux qui l’ont découvert n’ont qu’une hâte : lui être uni dans son Royaume ? L’Apôtre ne saurait être égoïste et ne penser qu’à son bonheur. Le souci de l’Apôtre, c’est de gagner le monde au Christ, comme lui-même a été gagné au Christ. En choisissant le bien de la communauté, Paul ne renonce pas à son désir, il ne renonce pas à ce qui, pour lui, est fondamental : être avec le Christ ! Il sera avec le Christ dans le service de ses frères. Il sera avec le Christ en menant une vie droite. Il peut alors interpeler cette communauté pour laquelle il diffère son désir propre en l’invitant à mener une vie conforme à la foi qu’elle a accueillie : quant à vous, menez une vie digne de l’Evangile du Christ.

Quand un chrétien est ainsi disposé, il comprend mieux alors la parabole du Christ au sujet des ouvriers de la dernière heure. Qu’importe le temps passé à la mission, qu’importent les conditions et la durée de la mission (dans la chaleur et le poids du jour ou seulement avant la tombée de la nuit), la récompense est la même : vivre avec Dieu pour toute éternité, le voir face à face dans la béatitude du Royaume où il nous attend. Qui peut prétendre vouloir plus parce qu’il aurait travaillé plus ? Nous ne sommes plus dans un système marchand, mais sous le régime de la grâce. Dieu offre le salut à ceux qui travaillent à sa vigne, à ceux qui se laissent gagner par le Christ. Peu importe le temps mis à l’ouvrage ; ce qui compte, c’est que notre cœur soit à jamais au Christ.

Pour moi, vivre, c’est le Christ. Saisis par le Christ au jour de notre baptême, devenu comme lui, nous voici invités à reconnaître sa présence et son œuvre au cœur de notre vie. Nous pouvons faire nôtre la profession de foi de Paul et son espérance : être un jour totalement uni au Christ Sauveur dans la gloire du Royaume. En attendant ce jour béni, gagnons au Christ nos frères et sœurs qui ne le connaissent pas encore par l’exemple de notre propre vie. Comme Paul, soyons Apôtre du Christ au milieu de nos frères. Prenons notre part de travail dans la vigne du Seigneur. Il n’est jamais trop tard. Amen.









(Photo La Transfiguration, Bible de Gustave DORE)

samedi 3 septembre 2011

23ème dimanche ordinaire A - 04 septembre 2011

La correction fraternelle passe par la prière.


Si ton frère, qui a commis un péché, refuse d'écouter l'Eglise, considère-le comme un païen et un publicain. Voilà une parole qui peut nous sembler bien sévère dans la bouche de Jésus, une parole qui sonne comme une condamnation alors même que nous tenons Jésus pour le chantre de l'amour de Dieu et du respect dû à tout homme. Comment comprendre cette affirmation ? Cette phrase est à relire d'abord à la lumière de tout l'enseignement de Jésus, à la lumière de sa vie même.

Jésus a brisé des tabous en mangeant avec des pécheurs ; il a annoncé le pardon de Dieu à tous ceux qu'il rencontrait. Il a rappelé l'immense tendresse du Père et sa patience sans limite envers l'homme pécheur. Il a annoncé un Dieu lent à la colère et plein d'amour. Sans jamais condamner, il a regardé les hommes et les femmes de son temps comme des êtres ayant besoin de l'amour de Dieu, comme des êtres de valeur quelle que soit leur vie. Il a toujours dissocié l'homme de ses actes. La correction fraternelle n'est pas là pour reprendre celui qui me déplait parce qu'il n'est pas comme moi, ou ne fait pas comme moi, mais pour reprendre celui qui a péché ! Ce qui est en cause, profondément, c'est la relation de l'homme à Dieu. C'était là la passion de Jésus. Pour Jésus, plus que pour tout autre, l'homme est créé à l'image et à la ressemblance de Dieu. Pour Jésus, plus que pour tout autre, l'homme est appelé à partager le bonheur que Dieu promet. Pour Jésus, plus que pour tout autre, l'homme a besoin du salut parce que l'homme est pécheur. Il ne s'agit pas d'enfermer, ni de condamner; il s'agit de guérir, de relever, de sauver, c'est-à-dire d'indiquer un chemin de vie, à la suite de Jésus, à la rencontre du Père de tous. Lorsqu'il nous appelle à traiter comme un païen l'homme qui ne se repend pas, il nous invite peut-être surtout à poser sur lui le regard de Dieu lui-même, un regard fait de patience, un regard fait d'amour, un regard fait de miséricorde. Et surtout, il nous invite à prier pour lui. Seul Dieu peut toucher le coeur des hommes ; seul Dieu peut bouleverser une vie. Le païen n'est pas seulement celui qui ne reconnaît pas Dieu ; il est aussi celui qui peut encore le découvrir et l'aimer pour peu qu'on en lui laisse le temps, pour peu qu'il rencontre dans sa vie des hommes et des femmes qui vivent déjà du Christ.

La phrase de Jésus est donc aussi à comprendre à la lumière des paroles du prophètes Ezéchiel que la liturgie nous a fait entendre en première lecture : Fils d'homme, je fais de toi un guetteur pour la maison d'Israël. Lorsque tu entendras une parole de ma bouche, tu les avertiras de ma part. Et voilà Ezéchiel promus gardien de ses fères. Sa propre vie et la vie des autres dépendent de son ardeur à redire cette parole, à transmettre les messages de Dieu. S'il ne dit rien, les méchants mourront, et lui avec. S'il prévient, lui vivra ; pour les autres, ce sera selon leur attitude face à la parole proclamée. De même qu'Ezéchiel était le gardien de son peuple, de même, Jésus, par cette affirmation sévère, fait de nous les gardiens de nos frères et soeurs en humanité. Cela ne signifie pas que nous avons à nous mèler de leur vie privée ; cela signifie qu'il nous faut avoir à coeur de nous sauver avec eux et non malgré eux ou contre eux.

Si ton frère a commis un péché, va le voir, parle-lui, seul à seul. Il faut beaucoup de tact et de courage, beaucoup d'humilité et de fraternité pour oser reprendre ainsi son frère. Il ne s'agit pas de le crier sur les toits, ni de l'humilier, encore moins de l'enfermer dans son péché. Il s'agit de lui rappeler que nous sommes invités à vivre à la suite du Christ, dans un amour et un respect réciproque.

Si tu n'arrives pas à le convaincre, prends avec toi deux ou trois frères ; si cela ne suffit toujours pas, dis-le à l'Eglise,
c'est-à-dire à la communauté des frères. Tout un processus pour permettre au frère pécheur de réaffirmer son appartenance à cette communauté de foi ; un processus long pour lui permettre de faire le point et de se situer en vérité non par rapport à ses frères, mais par rapport à Dieu et à son amour pour nous. S'il refuse, il sera considéré comme un païen, comme un publicain, comme quelqu'un qui n'a pas encore découvert l'immense amour de Dieu pour lui. Il se sera coupé lui-même de la communauté de foi, d'espérance et de charité que nous voulons vivre et construire.

L'invitation finale à la prière de demande commune n'est peut-être pas un hasard. Si deux d'entre vous sur la terre se mettent d'accord pour demander quelque chose, ils l'obtiendront de mon Père qui est aux cieux. La première des choses à demander ensemble, n'est-ce pas la conversion de celles et de ceux qui sont loin de l'amour de Dieu ? Si nous prions pour notre conversion commune, nos communautés n'en seront-elles pas plus fraternelles ?

Gardiens les uns des autres, invités à vivre de l'esprit même du Christ, nous devenons des serviteurs de la réconciliation. Aucun de nous ne peut se dire meilleur qu'un autre. Chacun de nous a besoin du pardon de Dieu. Chacun de nous a besoin de quelqu'un pour lui indiquer le chemin de retour vers le Père. Tous, nous avons besoin de la prière fraternelle pour progresser et accueillir la sainteté de Dieu en nos vies. Nous sommes tous gardiens de nos frères ; nous sommes tous païens pour nos frères. Avançons ensemble à la rencontre de notre Dieu, nous soutenant, nous supportant, nous encourageant sur ce chemin de pardon et d'espérance. Si nous le faisons au nom du Christ, il sera au milieu de nous, il marchera avec nous. Amen.

(Dessin de Coolus, Blog du lapin bleu)