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Ce blog voudrait vous permettre de vivre un chemin spirituel au rythme de la liturgie de l'Eglise catholique.

Les méditations s'appuient soit sur les textes bibliques quotidiens, soit sur la prière de l'Eglise.

Puisque nous sommes tous responsables de la foi des autres, n'hésitez pas à laisser vos commentaires.

Nous pourrons ainsi nous enrichir de la réflexion des autres.







samedi 30 mai 2015

Sainte Trinité B - 31 mai 2015

La Trinité : Obstacle ou fondement de la foi ?




Régulièrement, il est demandé à l’Eglise de revoir son vocabulaire. Certaines expressions seraient un obstacle à la foi, si ce n’est carrément responsable de la désaffection de nombreux croyants. Il faudrait donc simplifier les mots, éviter les expressions difficiles à comprendre. La Trinité fait partie de ces concepts que certains jugent trop compliqués à saisir. Comment faire admettre à un esprit cartésien, nourri de mathématique, qu’en religion : 1 + 1 + 1 = toujours 1 ? Le Père, le Fils et le Saint Esprit, trois personnes différentes mais qui ne sont qu’un seul Dieu ! La Trinité, obstacle ou fondement de la foi chrétienne : tout l’enjeu de la fête est là. 
 
Que peut bien signifier un Dieu unique en trois personnes ? Et surtout comment être un quand on est trois ? Il y a de quoi y perdre ses mathématiques, après avoir déjà perdu son latin ! Pourtant, cette réalité est tout à fait essentielle à la foi chrétienne. Croire en la Trinité, c’est croire que le Dieu unique auquel nous accordons confiance n’est pas un Dieu solitaire, mais un Dieu de relation, un Dieu d’alliance. Le Père, le Fils et le Saint Esprit sont unis entre eux par un lien d’amour irrévocable. Le Dieu Trinité est fondamentalement Dieu d’amour puisque c’est la réalité qu’il vit en lui-même. Le Père aime le Fils qui aime le Père dans l'Esprit Saint. Et c’est parce que Dieu vit en lui un tel amour qu’il peut nous le transmettre et nous en faire vivre. Ce n’est pas un amour narcissique, refermé sur lui-même, mais un amour partagé, ouvert aux autres que Dieu vit et qu’il nous invite à vivre. Dieu ne pourrait réellement nous aimer s’il était tout seul, solitaire.
 
De là découle alors pour nous l’importance de l’Eglise, famille des croyants. Voilà le lieu où circule l’amour du Père ; voilà le lieu de notre unité profonde, au-delà de nos différences d’âge, de sexe, de culture… L’Eglise, dans la diversité de ses membres, se comprend comme un corps unique dont le Christ est la tête. Puisque Dieu est un en trois, nous pouvons n’être qu’un corps en des milliards de membres. L’amour qui unit les Trois de la Trinité, unit la totalité des hommes qui croient au Christ. Nous ne faisons plus qu’un en Jésus. Nous sommes fils de Dieu par Jésus, et dans l’Esprit nous pouvons crier vers Dieu : Abba ! Père ! Supprimez la Trinité, et il n’y a plus de filiation pour nous ! Supprimez la Trinité et il n’y aura plus personne pour crier en nous vers Dieu le Père. Supprimez la Trinité, et vous n’aurez plus qu’un vieillard solitaire qui n’a besoin que d’individus en relation privée avec lui, mais qui n’a pas besoin d’un peuple à qui manifester son amour.
 
Nous pouvons encore faire un pas de plus et comprendre que, puisque Dieu est amour en lui-même, puisque l’Eglise est le lieu où cet amour est partagé largement, il devient indispensable, pour l’Eglise, de répandre cette Bonne Nouvelle. Parce que Dieu est Trinité, amour partagé en lui-même, nous ne pouvons pas le garder précieusement pour nous. Nous devons l’annoncer, nous devons le partager : allez, de toutes les nations faites des disciples : baptisez-les au nom du Père, et du Fils, et du Saint Esprit. Ce n’est pas une option ; ce n’est pas quelque chose à faire si j’ai du temps en trop ! C’est une exigence de notre foi qui découle du mystère de la Trinité. Non seulement Dieu n’est pas solitaire, mais il ne supporterait pas d’être solitaire. Il a autant besoin du Fils et de l'Esprit Saint qu’il a besoin des hommes pour que l’amour dont il est la source circule et inonde le monde. Nul, pas même Dieu, ne saurait connaître l’amour et partager l’amour, en restant seul ! Sans l’autre, aucun amour n’est possible ! 
 
Nous comprenons bien qu’il est impossible de se passer de la Trinité, à moins de vouloir vider notre foi de ce qui fait sa force : l’amour reçu de Dieu le Père, vécu en plénitude par le Fils et révélé sans cesse au monde par l'Esprit Saint. Plutôt que de vouloir simplifier les mots de la foi, simplifions-en les attitudes, et commençons par aimer, comme Dieu seul aime. Nous appréhenderons mieux la totalité de la foi, telle que le Christ l’a vécu, dans l’obéissance à son Père et la force de son Esprit. Amen.

samedi 23 mai 2015

Pentecôte B - 24 mai 2015

Avec les Apôtres, apprendre à vivre de l'Esprit Saint.




Aujourd’hui se réalise pour l’Eglise la promesse faite par Jésus : celui qu’il a promis d’envoyer d’auprès du Père quand il serait retourné chez lui, l'Esprit Saint, est donné en abondance. Mais il ne suffit qu’un don soit fait ; il faut encore que ce don soit accueilli. Avec les Apôtres, apprenons donc à vivre de l'Esprit Saint. 
 
Les évangélistes Jean et Luc s’entendent sur ce point : vivre de l'Esprit Saint, c’est témoigner du Christ. Nous l’avons entendu chez Jean : Quand il viendra le Défenseur, que je vous enverrai d’auprès du Père, lui, l’Esprit de vérité qui procède du Père, il rendra témoignage en ma faveur. Et vous aussi, vous allez rendre témoignage. Et Luc nous a montré les Apôtres qui se mirent à parler en d’autres langues, et chacun s’exprimait selon le don de l’Esprit, au point que les auditeurs s’étonnaient : tous nous les entendons parler dans nos langues des merveilles de Dieu. L'Esprit Saint que nous recevons à notre baptême et qui fait de nous des fils, fait de nous des fils parlant, témoignant de Dieu et non des muets par soucis de discrétion ou de bien-pensante laïcité. Ce don qui nous est fait est un trésor à partager, et non à garder jalousement pour nous. Un chrétien qui ne témoigne pas de sa foi est un chrétien qui a oublié l'Esprit Saint. 
 
Ce besoin de témoigner provient de l’effet premier que provoque l'Esprit Saint : il nous rend libre. Quand l’Esprit fond sur eux, les Apôtres sortent du lieu où ils étaient, ils vont parler : ils sont libres. Ils ne sont plus ces hommes et ces femmes qui s’enfermaient par peur, comme nous les voyions au jour de Pâques, tremblants et terrifiés. Malgré la foule, malgré les nations rassemblées à Jérusalem en ce jour de fête juive, ils sortent, ils parlent, ils vont au contact des autres. Vivre de l'Esprit Saint, c’est vivre libre. La peur s’efface quand l’Esprit, le Défenseur, est accueilli dans une vie. Le témoignage devant les hommes et la liberté reçue sont indissociablement liés : en témoignant du Christ et de sa puissance de vie, je deviens libre ; en accueillant cette liberté que donne la puissance de l'Esprit Saint, je me sens poussé à témoigner. Comment pourrais-je ne pas partager et cette liberté retrouvée et celui qui me procure cette liberté ? 
 
Ceci étant posé, nous pouvons alors faire un pas de plus avec saint Paul. L’extrait de la lettre aux Galates ne laisse planer aucune ambiguïté. Nous pouvons vérifier très concrètement que nous vivons de l'Esprit Saint aux fruits que produit notre vie. Là où il y a amour, joie, paix, patience, bonté, bienveillance, fidélité, douceur et maîtrise de soi, l’Esprit est présent, l’Esprit est à l’œuvre. Il n’est pas un esprit belliqueux. Il est donné pour un mieux vivre, pour un mieux-être. Ce n’est peut-être pas un hasard si le symbole liturgique de l'Esprit Saint est de l’huile parfumée : de l’huile pour permettre aux rouages de nos vies de tourner sans trop grincer, du parfum pour rappeler le côté agréable de la vie en Dieu. 
 
A tous ceux qui pensent aujourd’hui encore qu’il faut libérer enfin l’humanité de toute trace de la présence de Dieu parce qu’il opprimerait l’homme, parce qu’il l’enfermerait dans un infantilisme mortifère, la fête de la Pentecôte est donnée en remède. Elle nous rappelle que Dieu nous veut libre de toute peur, heureux de vivre les uns avec les autres dans la concorde et la paix, avec un horizon plus large que nos simples désirs. En apprenant avec les Apôtres à vivre de la présence de l'Esprit Saint, nous apprenons à vivre en grand, nous apprenons à réaliser pleinement notre humanité au bénéfice de tous. Voilà une bonne nouvelle à transmettre et à vivre. Pouvons-nous espérer mieux ? Amen.
 
(Dessin de Jean-François KIEFFER, in Mille images d'évangile, éd. Les Presses l'Ile de France)

samedi 16 mai 2015

07ème dimanche de Pâques B - 17 mai 2015

Avec les Apôtres, apprendre à organiser l'Eglise.




C’est une donnée commune à tous nos groupes sociaux : quand un groupe veut s’inscrire dans la durée, il doit s’organiser. La jeune communauté croyante n’échappe pas à cette règle. Très tôt, le livre des Actes des Apôtres s’en fait le témoin aujourd’hui, elle s’organise et fixe les règles du jeu communautaire. Aujourd’hui, nous avons entendu comment les Onze ont entrepris de redevenir Douze, selon le projet initial de Jésus lui-même. Des Apôtres, nous pouvons apprendre à organiser l'Eglise. 
 
C’est Pierre qui entreprend d’aborder la question : Frères, il fallait que l’Ecriture s’accomplisse. En effet, par la bouche de David, l'Esprit Saint avait d’avance parlé de Judas, qui en est venu à servir de guide aux gens qui ont arrêté Jésus : ce Judas était l’un de nous et avait reçu sa part de notre ministère. Il est écrit au livre des Psaumes : « Qu’un autre prenne sa charge ». Remarquez la délicatesse de Pierre. On ne sent nulle condamnation, nulle charge de procureur contre Judas. Si tel était le cas, les Apôtres auraient simplement pu ne pas le remplacer, considérant cette place comme maudite. Au contraire, il inscrit Judas dans le plan de Dieu : il fallait que l’Ecriture s’accomplisse. Peut-être aussi une manière de dire que cela aurait pu être un autre que Judas ! Peut-être Pierre se souvient-il même qu’il a lui-même renié Jésus ! Ce n’est guère plus glorieux ! Pierre manifeste aussi qu’il y a une différence entre une charge (celle d’Apôtre) et la personne qui remplit la charge. La charge est immuable : il faut quelqu’un pour la remplir. La personne peut changer. Et voici la communauté en recherche de celui qui pourra remplir la charge d’Apôtre à la place de Judas qui, par sa trahison et surtout son suicide, a manifesté qu’il n’en voulait plus. 
 
Remarquez ensuite la procédure : on en présenta deux qui répondaient aux critères fixés par Pierre, à savoir des hommes qui nous ont accompagnés durant tout le temps où le Seigneur Jésus a vécu parmi nous, depuis le commencement, lors du baptême donné par Jean, jusqu’au jour où il fut enlevé d’auprès de nous. En clair, quelqu’un qui a connu Jésus et qui l’a suivi depuis le début. Quelqu’un qui a tout lâché, comme les Onze autres, pour apprendre de Jésus, pour connaître Jésus, pour aimer Jésus. C’est indispensable puisque la mission de celui qui sera choisi ne sera pas tant de gouverner ou régenter les autres, mais être, avec les Onze, témoin de la résurrection de Jésus. Voilà définit clairement ce qu’est un Apôtre et son lien étroit avec Jésus, le Christ. Hors de ce rapport au Christ, il n’y a pas d’apôtre. Hors de ce souci permanent d’être un témoin de la résurrection, il n’y a pas d’apôtre. Et c’est la communauté tout entière qui suscite ce témoin, qui le cherche et donc le reconnaît. 
 
La suite est tout aussi surprenante : il n’y a pas de campagne électorale, pas de débat contradictoire entre les deux, pas de programme pastoral à présenter. Il y a la remise entre les mains de Dieu du choix ultime. On fit cette prière : « Toi, Seigneur, qui connais tous les cœurs, désigne lequel des deux tu as choisi pour qu’il prenne, dans le ministère apostolique, la place que Judas a désertée en allant à la place qui est désormais la sienne. On tira au sort entre eux, et le sort tomba sur Matthias, qui fut donc associé par suffrage aux onze Apôtres. La communauté se met à l’écoute de ce que Dieu veut. C’est lui, in fine, qui choisit. 
 
Dans le temps qui est le nôtre, beaucoup réclament des changements dans l’Eglise parce que l’Eglise ne serait plus dans l’air du temps. Il faudrait la réformer pour qu’elle plaise à nouveau aux hommes ! Or, les Apôtres nous montrent qu’elle doit d’abord plaire à Dieu. La mesure des réformes ne peut être l’esprit des hommes ; ce ne peut être que l'Esprit Saint. C’est lui qu’il faut invoquer pour nous indiquer les changements nécessaires pour que l’annonce de la résurrection de Jésus soit communiquée au plus grand nombre. Dans le réaménagement pastoral effectué dans notre diocèse, était-ce bien la mesure qui a servi à nos redécoupages ? Avons-nous tenté, ou tentons-nous encore, de plaire aux hommes ou sommes-nous bien à l’écoute de l'Esprit Saint qui nous souffle les changements nécessaires pour que toujours il y ait des témoins de la résurrection ? Si notre seul désir est de répartir les prêtres qui plaisent, quitte à les surcharger de missions, il y a fort à parier que très vite, il faudra reprendre les choses. Si notre seul désir est de remplacer les prêtres par des laïcs parce que l’Eglise, avec raison, ne se comprend pas comme une caste sacerdotale mais comme un peuple, il y a fort à parier que nous irons droit dans le mur. On ne ferait que remplacer un cléricalisme sacerdotal par un cléricalisme « laïcal » : on en voit ça et là, depuis un moment, les limites et les travers. 
 
En ce temps qui nous sépare de la Pentecôte, osons demander au Christ d’envoyer toujours son Esprit Saint afin qu’il éclaire ceux qui ont à décider de l’avenir de l’Eglise. Qu’il suscite aussi au milieu de nous les témoins nécessaires de la résurrection, prêts à engager leur vie au service de tous. Amen.

mercredi 13 mai 2015

Ascension B - 14 mai 2015

Avec les Apôtres, apprendre à vivre le départ de Jésus.





Un même événement, deux présentations différentes : celle de Luc dans les Actes des Apôtres et celle de Marc dans l’Evangile. Un même événement, deux présentations, deux enseignements ? A voir. 
 
Commençons par l’Evangile. Jésus fait un dernier discours à ses Apôtres, les invitant à être ses témoins dans le monde entier. Il leur redit l’efficacité de la Parole qu’ils ont à proclamer et les signes qui accompagnent cette Parole : ils traduisent tous la libération du Mal que procure le baptême. Une fois Jésus enlevé au ciel, les Apôtres s’en allèrent proclamer partout l’Evangile. Le Seigneur travaillait avec eux et confirmait la Parole par les signes qui l’accompagnaient. Ce que Jésus leur a dit, se réalise très concrètement. 
 
De ce premier témoignage, nous pouvons comprendre que Jésus, bien qu’assis à la droite de Dieu, n’abandonne pas ses disciples : il travaillait avec eux. L’absence physique n’est pas absence totale. Jésus reste mystérieusement présent dans la vie et l’œuvre de ses disciples, quand ceux-ci accomplissent la mission qu’il leur a confiée. La présence de Jésus au monde se fait désormais par la communauté de ceux qui croient en lui, l’Eglise. Jésus en est bien le chef, puisque c’est toujours lui qui agit à travers ses disciples. Apprendre, avec les Apôtres, à vivre le départ de Jésus, c’est apprendre à prendre notre place dans cette communauté, à prendre notre part dans le travail de tout croyant : faire connaître Jésus, faire connaître sa Bonne Nouvelle. La faire connaître partout. Il n’y a pas un domaine de la vie des hommes, il n’y a pas un lieu sur terre, où cette Bonne Nouvelle n’a pas à se faire entendre. Tout l’homme et tous les hommes sont concernés par elle, parce que tout l’homme et tous les hommes sont sauvés par Jésus, Christ et Seigneur. 
 
Nous pouvons alors relire les Actes et noter les différences dans l’événement rapporté. Il y a toujours un discours un Jésus, sur la venue de l'Esprit Saint et le baptême que les disciples doivent recevoir de lui. La manière de Luc de dire que Jésus ne laisse pas ses Apôtres orphelins. Il ne sera plus là physiquement, mais son Esprit les accompagnera. Quand Jésus est élevé, les disciples restent là à regarder le ciel. Nous pouvons comprendre cela : ce départ creuse un vide et les Apôtres veulent comme prolonger ce moment. Mais là n’est pas leur mission. Quand Jésus part, on ne reste pas là, bouche-bée. Deux hommes les renvoient à la réalité : pour quoi restez-vous là à regarder le ciel ? Ce Jésus qui a été enlevé au ciel d’auprès de vous, viendra de la même manière que vous l’avez vu s’en aller vers le ciel. De là, nous pouvons comprendre que ce départ n’est pas définitif. Jésus reviendra. Entre ce départ vécu et le retour annoncé, il y a le temps de l’Eglise, le temps des disciples. Et ce temps n’est pas conçu pour scruter le ciel. Jésus le leur a dit avant de partir : vous serez mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu’aux extrémités de la terre. Il y a bien une mission à remplir ; il y a bien un travail à faire en attendant le retour de Jésus. 
 
Un même événement, deux témoignages, un même enseignement : Jésus s’en va, mais il veut continuer à vivre et à agir pour le bien des hommes à travers nous. C’est à nous qu’il revient désormais de vivre et faire vivre l’Evangile. S’il est bon de nous rassembler aujourd’hui pour célébrer le départ de Jésus vers son Père, il nous sera tout aussi bon de ne pas rester là et de repartir dans notre quotidien, forts de tout ce que nous avons appris de lui. Il sera bon pour nous de revenir ici, à la source de l’Eucharistie pour y puiser la force de témoigner toujours et encore de celui qui nous fait vivre. Amen.
 
(Dessin de Coolus, Blog du Lapin Bleu)

samedi 9 mai 2015

06ème dimanche de Pâques B - 10 mai 2015

Avec les Apôtres, apprendre à demeurer dans l'amour.





Suffit-il que quelqu’un, fût-ce Jésus, dise quelque chose pour qu’aussitôt nous y accordions du crédit ? Suffit-il que quelqu’un, fût-ce Jésus, dise des paroles profondes pour qu’aussitôt nous changions notre manière de vivre, notre manière d’être ? Si tel était le cas, nous serions tous des piliers d’Evangile, solidement enracinés en Jésus. Si tel était le cas, ce serait le paradis sur terre. Puisque tel n’est pas le cas, apprenons des Apôtres à demeurer dans l’amour. 
 
Le discours de Jésus à ses Apôtres, au soir de sa mort, est limpide : il leur demande de demeurer dans son amour, et d’aimer vraiment, à leur tour, comme ils sont aimés de lui. Remarquez bien qu’il dit ceci à quelques heures de son procès et de sa mort. Cet appel à l’amour peut donc aussi s’entendre comme un appel à ne pas chercher à le venger, à ne pas détester les adversaires de Jésus. Si tel était le cas, comment ses disciples pourraient-ils accomplir leur mission et témoigner de lui, après sa résurrection, devant ceux-là même qui l’ont mis à mort ? C’est bien cet amour que Jésus leur porte qui va leur donner la force d’affronter leurs opposants et d’annoncer clairement la Bonne Nouvelle de Jésus ressuscité. 
 
Remarquons aussi le verbe que Jésus emploie pour parler de l’amour. Il invite ses disciples à demeurer dans son amour. En français, nous pouvons le rapprocher du verbe « habiter ». Ce passage d’évangile nous renvoie alors immanquablement au prologue de l’évangile de Jean : le Verbe s’est fait chair et il a habité parmi nous. De même qu’avec l’incarnation, Dieu a planté sa tente au milieu de son peuple pour demeurer avec lui, de même avec la rédemption, l’homme est invité à demeurer en Dieu et en son amour. L’homme et Dieu sont partenaires d’une alliance scellée dans l’amour du Fils unique. L’homme n’est plus le serviteur de Dieu, et devient son ami : je ne vous appelle plus serviteurs, car le serviteur ne sait pas ce que fait son maître ; je vous appelle mes amis, car tout ce que j’ai entendu de mon Père, je vous l’ai fait connaître. En accueillant l’amour du Christ, en vivant de cet amour, nous vivons dans l’intimité du Père, connaissant les projets de son amour. 
 
Dans la jeune communauté croyante, cela se traduit de manière très concrète. Nous avons entendu, en première lecture, la rencontre de Pierre et du Centurion Corneille, et comment Pierre reconnaît que l'Esprit Saint précède l’œuvre de prédication évangélique. Et Pierre va donner le baptême à Corneille et à toute sa maisonnée. L’acte qu’il pose est révolutionnaire ! Corneille est non seulement païen, mais encore ennemi : il est officier dans l’armée d’occupation ! Comment croire que lui aussi est appelé au salut ? Même pour Pierre cela n’a pas été évident. Il suffit de lire dans les Actes le passage qui précède celui que nous avons entendu. Il nous montre le combat que l’Apôtre mène avec lui-même dans la vision qui se présente à lui. Pendant qu’on lui préparait à manger, [Pierre] tomba en extase. Il contemplait le ciel ouvert et un objet qui descendait : on aurait dit une grande toile tenue aux quatre coins, et qui se posait sur la terre. Il y avait dedans tous les quadrupèdes, tous les reptiles de la terre et tous les oiseaux du ciel. Et une voix s’adressa à lui : « Debout, Pierre, offre-les en sacrifice, et mange ! » Pierre dit : « Certainement pas, Seigneur ! Je n’ai jamais pris d’aliment interdit et impur ! » À nouveau, pour la deuxième fois, la voix s’adressa à lui : « Ce que Dieu a déclaré pur, toi, ne le déclare pas interdit. » Cette vision a préparé Pierre à poser cette affirmation : En vérité, je le comprends, Dieu est impartial : il accueille, quelle que soit la nation, celui qui le craint et dont les œuvres sont justes. Quand nous reconnaissons l’amour de Dieu qui demeure chez quelqu’un, l’ennemi devient ami, le païen devient croyant. Voilà ce que fait l’amour de Dieu ! 
 
L’Apôtre Jean va encore plus loin, en affirmant dans sa première lettre que l’amour est le signe que l’homme connaît Dieu et qu’il est à Dieu : Celui qui aime est né de Dieu et connaît Dieu. Celui qui n’aime pas n’a pas connu Dieu, car Dieu est amour. Nous ne couperons donc pas à la nécessité d’aimer si nous nous disons disciples du Christ. C’est un caractère de reconnaissance et de cohérence. L’Apôtre affirme ceci, plus loin dans le même chapitre de cette épître : Si quelqu’un dit : « J’aime Dieu », alors qu’il a de la haine contre son frère, c’est un menteur. En effet, celui qui n’aime pas son frère, qu’il voit, est incapable d’aimer Dieu, qu’il ne voit pas. Et voici le commandement que nous tenons de lui : celui qui aime Dieu, qu’il aime aussi son frère. Il n’y a donc pas deux manières d’aimer : ou tu aimes, et tu aimes tout le monde (Dieu et les hommes), ou tu n’aimes personne ! C’est radical, mais efficace ! 
 
Avec l’Apôtre Jean, nous découvrons la radicalité de l’amour et nous apprenons à demeurer dans cet amour, à nous laisser habiter par lui. Avec l’Apôtre Pierre, nous comprenons ce que cela signifie dans un cas très concret. En rentrant chez vous, je vous invite à reprendre la lecture des Actes des Apôtres avec cette clé que nous livre la liturgie de ce dimanche : avec les Apôtres, vous apprendrez à demeurer dans l’amour et vous verrez votre vie changer en mieux. N’est-ce pas le but de toute prédication ? N’est-ce pas le désir de tout croyant ? Amen.
 
(Dessin de Jean-François KIEFFER, in Mille images d'évangile, éd. Les presses d'Ile de France)

samedi 2 mai 2015

05ème dimanche de Pâques - 03 mai 2015

Avec les Apôtres, passons de la peur à la confiance.





Mettons-nous en situation : un fanatique religieux poursuit ceux de votre communauté. Il les met en prison ; certains y trouvent la mort. Et voilà que ce sinistre personnage veut faire partie de votre groupe, de vos proches en disant qu’il s’est converti. L’accueillez-vous aussitôt à bras ouverts ? N’êtes-vous pas un peu méfiants ? Après tout, qui vous garantit que ce n’est pas une ruse pour avoir des noms de personnes à arrêter encore ? 
 
C’est la situation dans laquelle se trouvent les Apôtres à Jérusalem, lorsque Saul, le persécuteur converti se présente devant eux. Tous avaient peur de lui et ils ne croyaient pas que lui aussi était un disciple. Pas très difficile à comprendre ou à admettre. Il n’a pas vraiment été un tendre, ce Saul de Tarse. C’est lui qui est allé solliciter de la part du grand conseil les lettres nécessaires à sa campagne d’arrestation. Il n’est pas un simple rouage pris dans une entreprise de destruction qui le dépasse. Non, il est bien celui qui en est à l’origine et qui va chercher les disciples du Seigneur, même à Damas ! Alors oui, nous pouvons comprendre que les autres en aient peur. Même converti, il faut que Saul prenne le temps de se faire connaître, et de faire confirmer sa conversion par la communauté. C’est Barnabé qui va être l’intermédiaire, celui qui témoignera de l’œuvre de Dieu en Saul. C’est lui qui raconte aux Apôtres la conversion de Paul, ainsi que les premières prédications à Damas. Alors seulement la communauté des disciples l’accueille ; alors seulement il peut aller et venir dans Jérusalem avec eux, s’exprimant avec assurance au nom du Seigneur. C’est alors seulement qu’il peut bénéficier de la protection de la communauté quand les Juifs de langue grecque cherchaient à le supprimer. La jeune communauté chrétienne a grandi très vite. De la peur des débuts à la proclamation décomplexée de la mort et de la résurrection de Jésus, les Apôtres ont augmenté le nombre des disciples et ont appris à réagir aux rumeurs les concernant. Saul est en danger : les frères l’accompagnèrent jusqu’à Césarée et le firent partir pour Tarse. De la peur, ils sont passés à la confiance. Confiance en Dieu, confiance en soi, mais aussi confiance les uns dans les autres. 
 
Ce passage de la peur à la confiance est une nécessité pour la jeune communauté. D’abord parce qu’elle ne peut s’enfermer sur elle-même ; ce serait contraire à l’ordre donné par le Christ d’annoncer la Bonne Nouvelle à toutes les nations. Ensuite parce que cette confiance traduit sa foi en la présence agissante et protectrice de celui qu’elle confesse comme Christ et Seigneur. Il ne s’agit pas de naïveté ; il s’agit de savoir lire les signes que le Seigneur réalise encore en sa faveur. La conversion de Saul sur le chemin de Damas en est un. Ce passage de la peur à la confiance est possible à cause de l’amour qui les unit. Ce n’est pas un amour qui se paie de mots ; c’est un amour qui se traduit par des actes et en vérité, comme nous y invite saint Jean dans l’épître que nous avons entendue. Seul cet amour véritable, à l’image de l’amour que le Christ nous porte, peut nous entraîner à reconnaître les signes de Dieu. Que voulez-vous : seul l’amour reconnaît l’amour à l’œuvre. Seul l’amour nous donne de l’assurance devant Dieu. 
 
Nous pouvons comprendre alors l’importance du discours de Jésus à ses disciples sur la vigne et les sarments. Si quelqu’un n’est pas vraiment attaché au Christ, comme un sarment est attaché à son pied de vigne, il ne peut vraiment faire confiance et reconnaître les signes de Dieu, ni davantage aimer comme le Christ nous demande d’aimer. En lisant bien la page d’évangile, nous comprenons même qu’il ne suffit pas d’être attaché au Christ : il y a des sarments qui sont attachés à la vigne mais qui ne portent pas de fruits. Il faut encore se laisser irriguer par la sève de son amour. Cette sève, c’est la Parole de Dieu. Si vous demeurez en moi, et que mes paroles demeurent en vous, demandez ce que vous voulez, et cela se réalisera. Il faut que la Parole de Dieu demeure en nous. Pour cela, nous devons l’accueillir comme Saul a accueilli la parole de Jésus sur la route de Damas. Il faut la laisser agir en nous pour qu’elle puisse convertir en nous ce qui lui est contraire, comme Saul a su le faire à Damas, lorsque pendant trois jours, il restait en prière. 
 
Attachés au Christ, attentifs à sa Parole, ouverts aux signes de sa présence, nous pouvons nous enraciner dans cette confiance absolue que rien ne peut nous atteindre. Le Christ ressuscité a promis qu’il serait avec nous, jusqu’à la fin des temps. Sa présence à notre monde permet de retourner le cœur des adversaires et faire grandir la foi en son nom. Avec les Apôtres, ne craignons plus et vivons avec confiance dans un monde qui peut sembler plus hostile et opposé à la foi en ces temps qui sont les nôtres. Sans peur, sans honte et sans agressivité, vivons ce que nous croyons.  Amen.
 
(Dessin de Coolus, Le  Blog du Lapin Bleu)