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Ce blog voudrait vous permettre de vivre un chemin spirituel au rythme de la liturgie de l'Eglise catholique.

Les méditations s'appuient soit sur les textes bibliques quotidiens, soit sur la prière de l'Eglise.

Puisque nous sommes tous responsables de la foi des autres, n'hésitez pas à laisser vos commentaires.

Nous pourrons ainsi nous enrichir de la réflexion des autres.







samedi 27 mars 2021

Dimanche des Rameaux B - 28 mars 2021

 Un petit âne suffit pour rendre une vie plus belle ! 



(Reproduction d'une Icône byzantine représentant l'entrée de Jésus à Jérusalem, Collection personnelle)




            Voici donc venu le temps de la grande semaine qui nous mènera à Pâques. Une semaine comme une autre, avec le même nombre de jour, mais une semaine particulière, une Semaine Sainte, qui nous donnera de vivre avec le Christ ses derniers moments de vie terrestre. Une semaine intense, riche en célébrations uniques ; et même si cette année encore la pandémie nous empêche de déployer tous les rites prévus, nous essayerons de la vivre au mieux, nous souvenant que l’an passé, nous en étions privés totalement. 

            Cette semaine si particulière nous invite encore à comprendre comment rendre notre vie plus belle. Et en ce dimanche des rameaux, je voudrais répondre à cette question à partir d’un personnage tout à fait secondaire pour beaucoup d’entre nous, mais qui est pourtant essentiel à mes yeux, car sans lui, l’entrée de Jésus à Jérusalem n’aurait pas eu le même panache. Je veux parler du petit âne dont nous parlait l’évangéliste Marc. Souvenez-vous : Jésus envoie deux de ses disciples et leur dit : « Allez au village qui est en face de vous. Dès que vous y entrerez, vous trouverez un petit âne attaché sur lequel personne ne s’est encore assis. Détachez-le et amenez-le. Si l’on vous dit : ‘Que faites-vous là ? ‘, répondez : ‘Le Seigneur en a besoin, mais il vous le renverra aussitôt.’ »  Cela n’a l’air de rien, mais je trouve que cet épisode du petit âne est fort utile pour notre vie spirituelle. 

            Voyez-vous, il s’agit bien d’un ânon, que personne n’avait encore monté. Il ne sait rien encore de la vie qui l’attend, et pourtant le Seigneur a déjà besoin de lui. Il ne sait encore rien de la vie qui l’attend, mais il est disponible. Ce n’est pas lui qui objecte quand les disciples le détachent ; ce sont les gens autour de lui. Lui se laisse faire et laisse même Jésus être le premier à s’asseoir sur son dos. Sans doute comprend-t-il que Jésus ne lui veut aucun mal. Son premier travail n’est pas un fardeau à déplacer, mais un Dieu à porter. L’ânon est disponible au Seigneur, il est utile au Seigneur. Ne devrions-nous pas être comme lui, éternellement jeune aux yeux du Seigneur, éternellement disponibles pour Lui ? Cet ânon nous invite à nous laisser faire par Jésus, pour que nous puissions porter Jésus aux autres, pour que nous puissions permettre à d’autres d’acclamer celui que nous reconnaissons comme Maître et Seigneur. 

            Je peux même imaginer l’échange qu’il a pu avoir à son retour, avec ses congénères. « Alors, qu’est-ce qu’ils te voulaient ces étrangers ? Rien de particulier. Ils ont mis leurs manteaux sur mon dos et un homme s’est assis dessus. Vous auriez dû voir et entendre la foule. Ils l’ont acclamé comme un roi. Ah, je n’étais pas peu fier ! Les acclamations qui lui ont été adressées ont rendu mon fardeau léger, léger. C’est comme si ces gens m’acclamaient aussi un peu. En acceptant de le laisser me monter, j’ai rendu des gens heureux ! » Oui, sœurs et frères, on peut n’être qu’un petit âne et rendre des gens heureux ! On peut n’être qu’un petit âne, et porter le Christ aux hommes sans même le savoir ! Comme je voudrais être ce petit âne, choisi par Jésus parmi tous les petits ânes de la région, pour le porter sur mon dos. Comme je voudrais être ce petit âne, disponible à Jésus, utile à Jésus, ne serait-ce qu’un seul jour de ma vie. 

            Ce petit âne nous apprend qu’il faut peu de choses pour rendre notre vie plus belle. Juste être disponible et accepter que Jésus entre dans notre vie. Pouvons-nous mieux commencer la Semaine Sainte qu’en nous rendant utiles à Dieu et aux autres qui, à travers nous, peuvent reconnaître en Jésus Celui qui vient au nom du Seigneur ? Je veux bien être comme ce petit âne dont Dieu a besoin pour aller à la rencontre des hommes ; je veux bien être comme ce petit âne pour que Dieu puisse rendre la vie des autres plus belle. Les joies simples font les grands bonheurs. Et notre grand bonheur sera d’être appelé justement pour être pour toujours avec le Seigneur. Si un petit âne y a réussi, pourquoi pas nous ? Amen.

samedi 20 mars 2021

5ème dimanche de Carême B - 21 mars 2021

 Comment accéder à cette vie plus belle ?




               Nous sommes presque au bout du chemin de Pâques. Dimanche prochain, nous entrerons dans la Grande Semaine, la Semaine Sainte qui nous conduira aux fêtes pascales. Cette vie plus belle que Dieu nous promet deviendra notre réalité. Pour achever notre préparation, la liturgie de la Parole nous révèle comment y accéder. Trois pistes nous sont données. 

            Commençons par Jérémie. Dans ce qui est sans doute mon texte préféré de la Première Alliance, le prophète annonce une nouvelle alliance, plus solide que toutes les alliances anciennes. Jérémie fait partie de ces prophètes qui ont averti du danger de rester éloigné de la Loi de Dieu. Il a pressenti le drame de l’exil ; il a cherché à l’éviter, en vain. C’est quand tout est perdu qu’il a cette extraordinaire parole d’espérance : Voici venir des jours – oracle du Seigneur – où je conclurai avec la maison d’Israël et avec la maison de Juda une alliance nouvelle. Cette terrible épreuve de l’exil ne sera pas le dernier mot de l’histoire du peuple choisi par Dieu. si l’offense doit être réparée, les conditions de cette réparation ne seront pas l’extermination totale du peuple. Quelque chose de neuf est déjà annoncé. L’espérance n’est pas morte, et ne mourra pas en terre étrangère. Une vie plus belle est déjà annoncée. Et sa réalisation future doit donner courage à ceux qui connaissent l’exil. Cette espérance, c’est une alliance nouvelle donc. Plus forte que l’alliance avec Moïse parce que plus intérieure. L’alliance avec Moïse était inscrite sur des tables de pierre ; la nouvelle alliance sera inscrite au fond des cœurs. Elle aura un caractère intime, personnelle. Chacun aura directement accès à cette Loi de Dieu puisqu’il la portera en lui. Je mettrai ma Loi au plus profond d’eux-mêmes ; je l’inscrirai sur leur cœur. Il n’y aura plus à consulter une table de pierre pour connaître la Loi de Dieu ; chacun la portera en lui. Il n’y aura plus besoin d’apprendre à connaître Dieu ; il fera partie de la vie de chaque membre du peuple élu : Tous me connaîtront, des plus petits jusqu’aux plus grands. C’est le Nouveau Testament inscrit dans le Premier Testament. Comment un chrétien ne peut-il pas lire ici ce que le Christ réalisera dans sa propre vie, à savoir Dieu et l’homme parfaitement uni, parfaitement intime ? Comment un chrétien ne peut-il pas entendre en ces mots ce à quoi il est appelé depuis son baptême, à savoir devenir un autre Christ, un autre homme parfaitement accordé à Dieu ? Comment accéder à cette vie plus belle ? Deviens un autre Christ, accueille en toi Dieu lui-même qui veut établir sa demeure en ton cœur. 

            Jésus, dans son enseignement rapporté par l’évangéliste Jean, nous indique une autre piste pour parvenir à cette vie plus belle : accepter de mourir. Si le grain de blé tombé en terre ne meurt pas, il reste seul ; mais s’il meurt, il porte beaucoup de fruits. Si ces mots s’adresse d’abord à Jésus et à son œuvre à venir (le don de sa vie sur la croix), comment ne pas les comprendre aussi pour nous ? Si nous n’acceptons pas de livrer notre vie pour nos frères, nous resterons seul. Si nous nous replions sur nous-mêmes, nous resterons seul. Si nous ne suivons pas la voie du Christ, nous ne parviendrons pas à cette vie plus belle. Comme Jésus accepte de livrer sa vie pour notre vie, nous devons nous-aussi accepter de livrer notre vie pour nos frères et sœurs en humanité. Il n’est pas besoin de dresser ici la liste de toutes ces morts personnelles auxquelles il nous faut consentir. Chacun trouvera aisément ce qu’il doit laisser de sa vie pour devenir serviteur de ses frères. Chacun sait ce qu’il devrait changer dans sa vie pour que la vie des autres soit plus belle, et partant de là, la sienne aussi. Renoncer à quelque chose pour le bien de tous, ce n’est pas perdre quelque chose, mais c’est gagner ensemble. Qui aime sa vie la perdra ; qui s’en détache en ce monde la gardera pour la vie éternelle. 

La dernière piste nous est donnée par l’auteur de la Lettre aux Hébreux. Dans sa grande méditation de l’œuvre du Christ, il nous montre bien que la deuxième piste que nous venons de découvrir est le chemin suivi par Jésus : Bien qu’il soit le Fils, il apprit par ses souffrances l’obéissance et, conduit à sa perfection, il est devenu pour tous ceux qui lui obéissent la cause du salut éternel. Mais vous aurez noté au passage ce détail qui nous révèle la troisième piste : conduit à sa perfection, et non conduit à la perfection. Une lettre qui change tout pour nous. Nous ne devons pas atteindre une perfection générale, la même pour tous, mais notre propre perfection, celle dont Dieu nous rend capable. Ceci nous empêche d’une part de prendre la place du Christ, bien que devenu autre Christ par le baptême ; et d’autre part de courir après une perfection qui serait la même pour tous, certains ayant plus de chance au départ que d’autres. Chacun doit atteindre sa propre perfection, là où Dieu l’attend ! N’est-ce pas une perspective libératrice ? Je dois vivre ma vie, et non celle de mon voisin, ou pire, celle de Jésus ! Mais dans la vie qui est la mienne, je dois accueillir au mieux la vie et l’enseignement de Jésus pour qu’Il puisse transformer ma vie et la mener à sa perfection. 

Accueillir Dieu au plus intime de nous, nous détacher de notre vie et atteindre notre propre perfection : voici trois pistes pour vivre cette vie plus belle. A moins qu’elles ne forment trois étapes d’un unique cheminement. C’est parce que nous accueillons Dieu au plus intime de notre vie que nous pouvons nous détacher d’elle et atteindre ainsi notre propre perfection. Tout ne serait que grâce ; tout n’est que don offert par Dieu à celui qui lui ouvre sa vie. La vie plus belle, c’est la vie sous le regard de Dieu, en permanence. Amen.

04ème dimanche de Carême B - 14 mars 2021

 Retrouver une vie belle quand le péché domine ?




(Tableau d'Edouard Bendemann, Les Juifs endeuillés en exil, 1832, source internet, illustration du psaume 136)




          Toute l’histoire biblique, donc l’histoire des hommes, ressemble à une inlassable suite d’alliances scellées par Dieu avec les humains, bafouées par les hommes et leurs péchés, et restaurées par Dieu et sa grâce. Nous en avons fait l’expérience durant les trois premiers dimanches de ce carême avec l’histoire de Noé, d’Abraham et de Moïse. Le livre des chroniques, dont nous avons entendu un extrait en première lecture, nous en fait une nouvelle démonstration à l’époque de la royauté.

            Tout le temps de la royauté est une saga mouvementée. Sur les quarante deux rois dont le règne est rapporté dans la Bible, seuls sept ont droit à l’affirmation : Il fit ce qui plut au Seigneur. Le constat dressé par l’auteur du livre est réalité : tous les chefs des prêtres et du peuple multipliaient les infidélités, en imitant toutes les abominations des nations païennes. L’alliance scellée jadis avec Moïse n’est plus qu’un lointain souvenir, la Loi a été oubliée. Dieu n’est plus Dieu chez lui, nom de Dieu ! Malgré les prophètes qui n’eurent de cesse de dénoncer le péché et d’appeler à la conversion, rien ne change. C’est le temps de l’exil annoncé par le prophète Jérémie : La terre sera dévastée et elle se reposera durant soixante-dix ans. La vie belle qui était la perspective offerte par l’Alliance devient une vie de cauchemar : Nabuchodonosor déporta à Babylone ceux qui avaient échappé au massacre ; ils devinrent les esclaves du roi et de ses fils. Comment retrouver la vie d’avant le péché ? Comment revenir à cette vie belle promise par Dieu ? En retrouvant le chemin de la Loi de Dieu, en étant fidèle au souvenir de son Alliance. De lui-même, l’homme ne pourra pas restaurer ce qu’il a détruit. Le salut viendra de Dieu. 

            Pour nous, chrétiens, la source nouvelle de cette vie belle, c’est Jésus Christ, livré pour nos péchés. Dieu est riche en miséricorde, écrit Paul aux Ephésiens ; à cause du grand amour dont il nous a aimés, nous qui étions des morts par suite de nos fautes, il nous a donné la vie avec le Christ : c’est bien par grâce que vous êtes sauvés. Cette vie belle à laquelle l’homme aspire, c’est un don de Dieu, un cadeau gratuit de Dieu à notre humanité. Enfin cadeau gratuit pour nous, le Christ en ayant payé le prix par son offrande sur la croix. Il nous faut pleinement mesurer le prix de ce signe dressé dans nos églises. Il nous faut pleinement mesurer le prix de ces croix que nous portons au cou. Ce n’est pas le prix des métaux ou des bois précieux dans lesquels elles sont faites, c’est le prix du sang d’un innocent, qui a accepté de mourir pour nos péchés. C’est le prix de l’amour absolu et illimité de Dieu pour nous, qui n’a pas refusé son propre Fils, mais qui l’a livré pour nous. Le sacrifice du Christ sur la croix ne nous coûte rien, et pourtant il nous sauve. Le sacrifice du Christ sur la croix ne nous coûte rien, et pourtant il nous rachète à grand prix. C’est ce mystère qui fait le cœur de notre foi ; c’est ce mystère qui signe l’amour de Dieu pour nous, pécheurs. Là où le péché a abondé, la grâce de Dieu a surabondé (Rm 5, 20). L’amour de Dieu pour nous est tel qu’il ne peut se résoudre à laisser un seul d’entre nous aller vers la mort éternelle. C’est bien par la grâce que vous êtes sauvés, et par le moyen de la foi. Devant tant d’amour, comment ne pas être reconnaissant ? Devant tant d’amour, comment ne pas s’abandonner à la foi ? Devant la croix, pouvons-nous honnêtement douter de l’amour de Dieu pour nous ? Devant la croix, pouvons-nous honnêtement dire à Dieu : ton amour, je n’en veux pas ? Dieu a tellement aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne se perde pas, mais obtienne la vie éternelle. C’est cela la vie belle qui nous est promise. Et elle commence dès maintenant, par la foi accordée au Christ, source du Salut. La foi rend notre vie belle dès ici-bas, non en nous évitant les épreuves et les obstacles, mais en nous permettant de les affronter et de les vaincre dans la force du Christ, mort et ressuscité pour nous. 

            Nous avons passé cette semaine, la moitié du chemin de carême. Nous comprenons de mieux en mieux, je l’espère, la beauté d’une vie gagnée par le Christ. Malgré notre péché, une vie belle est toujours possible dès lors que nous devenons disciples de Jésus, lui qui marche vers sa mort pour nous obtenir notre vie. Nous pouvons reprendre alors les mots de la prière qui ouvrait cette eucharistie et demander à Dieu d’augmenter encore la foi du peuple chrétien, notre foi, pour que nous nous hâtions avec amour au-devant des fêtes pascales qui approchent. Elles sont le but de notre route ; elles sont la source de cette vie belle que Dieu veut pour nous. Amen.

samedi 6 mars 2021

3ème dimanche de Carême B - 07 mars 2021

 Dieu donne un cadre pour rendre notre vie plus belle.





(©️Tableau de Sieger KÖDER, Le don de la Loi au Sinaï

publié dans Die Bilder der Bibel von Sieger KÖDER, éd. Schwabenverlag)


            Rendre notre vie plus belle : c’est l’invitation que je vous adressais pour ce Carême. Nous sommes partis avec comme seul bagage l’aumône, la prière et le jeûne, toutes choses recommandées par le Christ lui-même pour que nous puissions vivre une vie aux dimensions de la vie de Dieu. Puis nous avons contemplé comment Dieu, le premier, a embelli sa vie et celles des hommes en renonçant à la colère dévastatrice et en établissant une nouvelle Alliance avec Noé. Dimanche dernier, la liturgie nous rappelait que Dieu lui-même se chargeait de rendre notre vie plus belle et nous faisait entrevoir déjà la beauté future de notre vie quand nous le verrons face-à-face. Aujourd’hui, Dieu nous fait faire un pas de plus en offrant un cadre précis qui nous permettra toujours de garder notre vie belle. Ce cadre, c’est la Loi qu’il nous offre. 

            Il y a toujours des esprits chagrins pour considérer la Loi, toute loi, comme quelque chose de contraignant : elle empêcherait les hommes de faire tout ce qu’ils voudraient faire, en plaçant des balises, des frontières à ne pas franchir. Ils oublient un peu vite que si la loi, de fait, interdit certaines choses, elles rend aussi toutes les autres choses possibles. Et la première chose que la Loi, toute loi, doit rendre possible, c’est le vivre ensemble. La Loi que Dieu donne, nous l’avons entendu en première lecture, commence par rappeler le fondement de cette Loi, qui n’est pas arbitraire, mais qui est la personne même de Dieu, et Dieu en tant que celui qui a fait sortir [son peuple] du pays d’Egypte, de la maison d’esclavage. Autrement dit, cette Loi nous tourne d’abord vers Dieu, source de notre vie, source de notre liberté. En ce sens, nous pouvons dire que Dieu nous donne sa Loi non pour nous restreindre, mais pour nous garder dans cette liberté qu’il nous a lui-même acquise. Cette Loi affirme que nous sommes libres tant que nous restons du côté de ce Dieu qui nous libère et tant que nous respectons ceux qui nous ont donné la vie (nos parents) et ceux que Dieu met sur notre route (notre prochain). Ce que la Loi de Dieu interdit, c’est de regarder l’autre comme quelqu’un dont je peux me servir ou que je peux asservir, que ce quelqu’un soit Dieu lui-même ou qu’il soit un humain.  Elle définit ainsi le cadre de notre relation à Dieu et de nos relations interpersonnelles.

            Sans doute est-ce parce que ce cadre n’est plus respecté, que nous voyons, dans l’Evangile, Jésus entrer en colère comme jamais, allant jusqu’à utiliser un fouet pour faire place nette dans le Temple du Seigneur. J’imagine assez bien ce qui a pu se passer. La fête de la Pâque juive (qui rappelle justement la libération d’Egypte) approchait. Il devait y avoir à Jérusalem plus de monde que d’habitude. Il fallait pouvoir fournir plus d’animaux pour les sacrifices, et certains ont dû s’étendre un peu, au-delà des espaces réservés. Peut-être aussi, certains ont-ils augmenté un peu les prix des animaux vendus (la bonne vieille loi du marché) rendant ainsi l’offrande des plus pauvres plus difficile. Comme le dit Jésus, le Temple ressemblait moins à une maison de prière, et davantage à un centre commercial. Quand Dieu n’est plus respecté, l’homme ne l’est plus non plus. C’est ainsi que je comprends l’attitude de Jésus. Puisqu’en lui, Dieu et l’homme sont liés, puisqu’il identifie son propre corps au sanctuaire où Dieu réside, il fait de chacun de nous un sanctuaire un Dieu réside. Profaner le Temple de Dieu, c’est profaner la dignité de l’homme qui porte en lui l’image de Dieu ; et profaner l’homme et sa dignité, c’est donc aussi profaner Dieu. Ce que la Loi de Dieu offrait, à savoir une vie dans le respect de Dieu et dans une vraie fraternité, n’est plus possible. La colère de Jésus est légitime et nous invite à retrouver le sens de Dieu pour retrouver le sens de la fraternité entre les hommes. 

            Notre vie est belle, est plus belle, dès lors que nous reconnaissons sa source, Dieu, et que nous reconnaissons tous ceux que cette source nous donne de rencontrer comme des frères. Notre vie devient plus belle lorsque nous sommes capables de communion avec Dieu et avec tous nos frères et sœurs en humanité. C’est ce que le pape François nous rappelle dans sa lettre encyclique Fratelli tutti que je ne peux que vous inviter à lire durant ce temps de carême. Elle nous permet de comprendre très concrètement comment rendre notre vie et la vie du monde plus belle. Elle nous rappelle que la fraternité n’est pas une option, mais la condition sine qua non pour une vie plus belle pour tous. La fraternité est la condition sine qua non de notre salut. La fraternité est la condition sine qua non de la paix, comme nous le rappelle encore le voyage que le pape effectue en ce moment en Irak. Il nous faut développer cette conscience qu’aujourd’hui ou bien nous nous sauvons tous ou bien personne ne se sauve, écrit le pape François dans son encyclique. 

Voici donc une nouvelle piste pour rendre notre vie plus belle au moment où nous allons à la rencontre du Seigneur qui livre sa vie pour nous. Vivre en frères parce que Dieu nous fait frères par le sacrifice de Jésus ; voilà le cadre de la nouvelle Loi, de la nouvelle Alliance qui nous est proposée. Vivre en frères, même avec ceux qui ne croient pas comme nous, même avec ceux qui ne croient pas du tout, pour rendre le monde plus humain, pour rendre notre vie plus belle, par la grâce de Dieu. Nous n’avons rien à perdre à essayer, mais tout à gagner : des frères, la paix et le salut du monde. Amen.