Bienvenue sur ce blog !

Ce blog voudrait vous permettre de vivre un chemin spirituel au rythme de la liturgie de l'Eglise catholique.

Les méditations s'appuient soit sur les textes bibliques quotidiens, soit sur la prière de l'Eglise.

Puisque nous sommes tous responsables de la foi des autres, n'hésitez pas à laisser vos commentaires.

Nous pourrons ainsi nous enrichir de la réflexion des autres.







vendredi 31 août 2012

22ème dimanche ordinaire B - 02 septembre 2012

La Parole de Dieu !


Promettez-vous de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité ? Si comme moi, vous aimez les films policiers, vous aurez reconnu la phrase qui nous est servi dans tous les scénarii, dès lors qu’un témoin est interrogé par le président du tribunal. Cette question témoigne du désir profond de connaître ce qui est essentiel pour décider de la vie de quelqu’un. Elle repose sur une confiance réciproque : celui qui interroge fait confiance à celui qui répond en accordant à ce qu’il dit le caractère de vérité. Celui qui répond fait confiance à celui qui interroge, en se sachant écouté, respecté : ce qu’il dit ne sera pas déformé par l’autre.

Promettez-vous de vivre la Parole, toute la Parole, et rien que la Parole ? C’est en ces termes que l’on peut résumer le discours que Moïse fait à son peuple avant que celui-ci n’entre en Terre promise. Le peuple a cheminé de longues années sur des terres étrangères, attendant avec impatience l’arrivée en terre de liberté. Il a eu maintes fois l’occasion de découvrir la bonté et la patience de Dieu. Il s’est souvent détourné de lui. Plusieurs fois, Dieu a voulu recommencer l’œuvre de libération entreprise avec un nouveau peuple, tant celui qui a été sorti d’Egypte avait la nuque raide et le cœur endurci. Et pourtant, toujours Dieu est revenu de sa grande fureur et a poursuivi l’œuvre entreprise lors de la sortie d’Egypte. Il a pris soin de son peuple en lui donnant de l’eau, en assurant sa nourriture, en lui offrant une Loi. Cette loi, signe de l’alliance entre Dieu et son peuple, garantit à chaque partenaire des droits. YHWH est reconnu comme le seul Dieu en Israël ; le peuple est assuré de la présence et de l’assistance de YHWH à chaque étape de sa vie. A travers cette loi, Dieu offre à son peuple un cadre pour vivre libre et heureux ; à travers cette loi, Dieu donne au peuple les moyens de réussir la vie qui va commencer en Terre promise. Elle est le mode d’emploi de ce pays que Dieu offre aujourd’hui. Elle est l’unique nécessaire pour que tous puissent vivre une vraie fraternité, dans une pleine liberté.

Vous n’y ajouterez rien, vous n’y enlèverez rien !
La Parole de Dieu est ainsi affirmée comme l’unique nécessaire pour réussir sa vie. Toute la Parole de Dieu, mais rien que la Parole de Dieu. Elle seule pénètre le cœur de l’homme ; elle seule est capable de le transformer en profondeur ; elle seule permet de discerner le bien du mal. La Parole doit être inscrite au cœur de chacun pour que chacun puisse connaître Dieu de manière personnelle. C’est le prophète Jérémie qui l’affirmera le plus clairement. Mais déjà Moïse avait pressenti cela : « Ecoute les commandements et les décrets que je vous enseigne pour que vous les mettiez en pratique. Ainsi vous vivrez ! … Ils seront votre sagesse et votre intelligence aux yeux de tous les peuples. »

Nous ne pouvons rien y enlever parce que la Parole est une. Elle est un seul bloc. On ne peut rien y enlever car on ne négocie rien avec la Parole. Elle est tout entière parole de vie ; elle est tout entière chemin vers le bonheur ; elle est tout entière révélation du Père. En enlever quelque chose serait enlever quelque chose à Dieu, modifier la révélation qu’il nous fait. Personne ne peut dire : « je prends ceci, je laisse cela ». Toute la Parole est à découvrir ; toute la Parole est à vivre.

Mais nous ne pouvons pas non plus y ajouter quelque chose. Qui aurait l’audace de dire que sa Parole est plus grande que la Parole de Dieu ? En Jésus, ultime Parole de Dieu, Dieu a tout dit de lui et de la relation qu’il veut établir avec chacun de nous. Dieu a tout dit, et tous les commentaires que nous pouvons faire ne sont que des approches de cette unique parole. Toujours il nous faut revenir à cette seule parole. Les lois, les règles ajoutées sont sujettes à changement en fonction des époques et de l’évolution de l’humanité ; la Parole, elle, reste unique et universelle parce qu’elle ne cherche qu’une chose : permettre à l’homme de vivre heureux et libre. Si l’homme change, si le monde évolue, le chemin vers le bonheur reste identique : il s’appelle respect, amour, liberté, fraternité. C’est ce chemin que le Christ nous a montré ; c’est ce chemin que Dieu nous révèle dans les Ecritures. C’est ce chemin que nous sommes appelés à suivre, à vivre. A nous donc de redécouvrir toute la saveur de cette Parole que Dieu donne au monde. A nous d’y découvrir l’unique nécessaire et d’en vivre. Sans rien y enlever. Sans rien y ajouter. AMEN.

(Photo de l'auteur, Ambon et Evangéliaire de la paroisse St Laurent de Holtzheim)

vendredi 24 août 2012

21ème dimanche ordinaire B - 26 août 2012

Voulez-vous partir, vous aussi ?


Il ne suffit pas de s’appeler Jésus, ni même d’être Fils de Dieu, reconnu comme Christ et Messie, pour que tout vous réussisse dans la vie. La fin du chapitre 6 de l’Evangile de Jean que nous lisons aujourd’hui, nous le rappelle, hélas. Certes, ce n’est pas la première fois que des gens s’éloignent de Jésus. Il a, depuis un moment déjà, de fervents et farouches opposants. N’a-t-il pas reconnu lui-même que personne ne peut venir à lui, si le Père qui l’a envoyé ne l’attire vers lui ? Mais voilà, jusqu’à maintenant, il s’agissant d’opposants, ou d’anonymes qui trouvaient Jésus trop radical peut-être. Maintenant, ce n’est plus vrai !

Saint Jean, dans le passage que nous venons d’entendre, le dit sobrement : Jésus avait dit dans la synagogue de Capharnaüm : « Celui qui mange ma chair et boit mon sang à la vie éternelle. » Beaucoup de ses disciples, qui avaient entendu, s’écrièrent : « Ce qu’il dit là est intolérable, on ne peut pas continuer à l’écouter ! » Beaucoup de ses disciples ! Il ne s’agit plus d’inconnus, il ne s’agit pas davantage d’opposants ; non, la contestation gagne ses partisans. Nous avons souvent tort de croire que ceux qui suivent Jésus se limitent aux Douze. Or, nous savons par les évangélistes, que des foules nombreuses l’ont suivi, pas uniquement parce qu’il aurait été beau gosse ou beau parleur. Je crois que certains s’étaient vraiment attachés à lui comme à un maître à penser. Ils ont aimé ce qu’il disait, ce qu’il faisait, la manière dont il parlait de Dieu. Mais là, nous dit saint Jean, c’en est trop ! C’était la phrase à ne pas dire. A partir de ce moment, beaucoup de ses disciples s’éloignèrent et cessèrent d’aller avec lui. Ils vont être bien moins nombreux à le suivre, jusqu’à se réduire à n’être plus que trois au pied de la croix ! En même temps, l’opposition va grandir et se renforcer. C’est le début de la fin. Il a suffit pour cela que Jésus précise qui il est et ce qu’il entend être pour ceux qui le suivent. Bref, il lui a suffit de dire la vérité !

Il y a quelque chose de pathétique dans ce passage lorsque saint Jean précise encore que Jésus savait depuis le commencement qui étaient ceux qui ne croyaient pas, et celui qui le livrerait. Et si la liturgie nous avait fait lire le dernier verset du chapitre 6, les choses auraient été encore plus claires. En effet, Jésus répond à la question de Pierre (à qui irions-nous, Seigneur ?) : « N’est-ce pas moi qui vous ai choisis, vous les Douze ? Et l’un d’entre vous est un diable. » Il parlait de Judas, fils de Simon Iscariote ; c’est lui, en effet, qui devait le livrer, lui, l’un des Douze. Nous sommes bien à un point de non retour. Nous ne connaissons pas, dès ce moment, les pensées secrètes de Judas, mais peut-être a-t-il été, comme tant d’autres, choqué par les paroles de Jésus ; peut-être que, dès maintenant, sa déception grandit jusqu’à devenir, un jour, trahison. Il en faut si peu à l’homme pour retourner sa veste, et de brebis pacifique se faire loup menaçant.

Nous comprenons dès lors la question de Jésus : Voulez-vous partir, vous aussi ? Elle traduit sans doute une vraie interrogation pour lui : a-t-il donc totalement échoué ? N’a-t-il donc pas même réussi à en convaincre Douze ? Essayez un instant de vous mettre à sa place ; essayez de comprendre ses sentiments, et vous comprendrez mieux la force de caractère qu’il lui a fallu pour poursuivre malgré tout. La réponse de Pierre peut alors être comprise comme une consolation : A qui irions-nous, Seigneur ? Tu as les paroles de la vie éternelle. Même s’il ne mesure sans doute pas toute la portée de ses mots, voilà Pierre entrain de faire une bien belle profession de foi. Il va plus loin encore en affirmant : nous croyons et nous affirmons que tu es le Saint, le Saint de Dieu. Dans cette première grande crise que traverse Jésus, il peut compter sur Pierre et sur les autres apôtres qu’il s’est choisi. Du moins pour le moment ! Cela aide bien à repartir ! On comprend alors pourquoi la liturgie a choisi de taire, pour l’instant, le dernier verset du chapitre. Cela nous permet de finir sur une note d’espoir !

De plus, finir sur la profession de foi de Pierre, et non sur l’annonce de la trahison de Judas, permet à l’Eglise de nous interroger, aujourd’hui, nous qui suivons le Christ des siècles après ces événements. Ayant entendu durant quelques semaines l’enseignement de Jésus tel qu’il est donné dans le chapitre 6 de saint Jean, ayant nécessairement entendu des prêtres parler du sacrement de l’Eucharistie et sur sa portée dans notre vie, qu’avons-nous à répondre à Jésus qui nous interroge chacun : veux-tu toi aussi partir comme ceux-là ? Avons-nous le courage de la fidélité avec Pierre, malgré un enseignement difficile à saisir, malgré l’opposition qui grandit, malgré les défections nombreuses ? Dans l’enseignement de Jésus, qu’est-ce qui nous paraît intolérable ? Et surtout comment nous en sortons-nous ? Quittons-nous l’Eglise sur la pointe des pieds ? Ou plutôt avec pertes et fracas ? Préférons-nous trahir le visage du Christ en sélectionnant dans son enseignement, dans la Parole de Dieu, ce qui est convenable de ce qui ne l’est pas ? Ce que nous pouvons et voulons entendre de ce que nous ne voulons pas ? Nous faisons-nous un Christ à notre image, à notre taille, un petit Christ bien sympathique, un vrai pote, quoi ? Ou l’acceptons-nous tel qu’il se révèle à nous ?

Nous n’aurons jamais finis de répondre à ces questions ; toujours elles retentiront et se résumerons ainsi : Voulez-vous partir, vous aussi ! Et je reconnais que la réponse n’est pas simple dans une Eglise qui traverse un monde en crise. Mais ce que Pierre affirmait jadis peut nous guider dans notre propre réflexion : Jésus n’est pas n’importe qui, et ce qui importe, c’est ce que m’apporte mon compagnonnage avec lui ; ce qui importe, c’est qui il est réellement pour moi et comment je compte répondre à son invitation à le suivre. Nous avons du temps pour préciser tout cela, pour trouver nos propres réponses, vérifier la qualité de notre lien à Jésus. Mais un jour, viendra le temps de la réponse ; et ce jour là, nous serons au pied de la croix. Ou pas. Amen.

(Dessin de Coolus, Blog du lapin bleu)

samedi 18 août 2012

20ème dimanche ordinaire B - 19 août 2012

Les effets de l'Eucharistie.



Si vous avez manqué la messe du dimanche au cours des 4 dernières semaines, vous risquez d’être un peu perdu. En effet, nous avions commencé la lecture continue du chapitre 6 de l’Evangile de Saint Jean. Il s’ouvre par la multiplication des pains (17ème dimanche) et se prolonge par un enseignement de Jésus. Le signe lui-même peut déjà être considéré comme un enseignement, puisque Jésus se révèle comme celui que Dieu envoie pour veiller sur son peuple et lui donner la nourriture en temps voulu. Mais voilà, parce que l’interprétation du signe peut être pervertie, Jésus lui-même explique : il lève les incompréhensions qui peuvent exister du côté de la foule qui ne voit en lui qu’un boulanger de Dieu. Il nous a donné du pain ; qu’il continue et nous serons contents ! (18ème dimanche). Jésus se révèle, non comme celui qui donne le pain, mais comme le seul Pain, vivant et vrai, qui apaise toutes nos faims. Voilà que la foule, plutôt ravie, se met à murmurer. Pour Jésus, ce n’est pas une catastrophe en soi : seuls ceux que le Père appelle, peuvent entrer dans une juste compréhension de qui est Jésus (19ème dimanche). Et nous voilà donc avec le passage que je viens de proclamer, dans lequel Jésus précise encore son enseignement. Il nous révèle les secrets de cette communion au Pain vivant. J’en relève deux principaux.

Premier secret que Jésus nous révèle : Celui qui mange de ce pain, vivra, éternellement. Il a le mérite d’être clair. Tu veux vivre pour toujours ? Mange de ce pain que je te donne, dit Jésus, mange-moi ! Cela peut sembler un peu cru, mais c’est bien l’enseignement de Jésus. Il n’y a pas de part à la vie éternelle sans communion au Pain eucharistique, sans communion au Christ. Ce pain de l’Eucharistie que nous rompons et partageons, dimanche après dimanche, signe notre désir de vivre pour toujours avec Dieu. Il signe notre désir de participer à cette éternité de vie que Dieu promet à celles et ceux qui suivent Jésus, mort et ressuscité pour nous sauver. La communion au Corps et au Sang du Christ est déjà une participation à cette vie que Jésus nous obtient par sa Pâque : Celui qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle ; et moi, je le ressusciterai au dernier jour. Nous ne nous constituons pas une réserve pour l’avenir, lorsque nous communions ; nous ne validons pas un passeport pour plus tard, quand viendra le moment de notre passage. En communiant, nous participons déjà à la vie de Dieu, cette vie marquée du sceau de l’éternité. En participant pleinement à la messe, le dimanche, nous manifestons que nous vivons, ici et maintenant, de la vie du Christ ressuscité, et que nous voulons participer à cette vie pour toujours. Jésus est celui qui nous ouvre cette vie par sa mort et sa résurrection, et il nous y fait participer par la communion à ce pain devenu son corps. C’est bien Jésus, mort et ressuscité, que nous accueillons au plus intime de nous-mêmes lorsque nous communions au pain consacré. C’est bien Jésus qui devient ainsi notre nourriture ; c’est bien lui qui apaise toutes nos faims, et pas seulement nos faims de pain de boulangerie. Celui qui veut vivre de la vie même de Dieu n’a besoin que de Jésus, qui toujours s’offre à celles et à ceux qui veulent entrer dans l’intimité de Dieu.

Le deuxième secret que Jésus énonce ainsi : Celui que mange ma chair et boit mon sang demeure en moi, et moi en lui, vient ainsi renforcer et préciser encore le premier. La communion reçue nous fait entrer dans la vie éternelle parce qu’elle nous fait demeurer en Jésus et fait demeurer Jésus en nous. Il est non seulement notre co-pain, c’est-à-dire celui qui partage le pain avec nous ; il est aussi celui chez qui nous allons habiter. Par la communion, nous sommes à demeure chez lui. A Noël, Dieu plante sa tente au milieu de son peuple pour que son Fils unique puisse vivre au milieu de nous ; par le sacrement de l’Eucharistie, le Christ nous prépare une tente dans le monde de Dieu. Le mystère de l’Incarnation atteint sa plénitude dans le mystère de l’Eucharistie, puisque le Dieu qui s’est fait homme permet à l’homme de devenir Dieu en consommant sa chair et son sang. Nous sommes loin du repas du club des amis de Jésus ; nous sommes bien dans un repas de communion où nous ne faisons plus qu’un avec celui qui nous offre tout : son corps, son sang, sa vie, pour que nous puissions vivre, comme lui, entièrement donné à Dieu. Nous comprenons ainsi mieux, et l’importance que revêt pour l’Eglise ce sacrement, et le pourquoi de son insistance quant à notre participation à l’Eucharistie dominicale. Il s’agit bien d’une question de vie ou de mort ! Il s’agit bien de notre salut ! Comment l’Eglise pourrait-elle se résoudre à voir un seul de ses enfants se perdre parce qu’elle n’aurait pas été assez clair au sujet de ce sacrement et de ses effets dans notre vie ? Nous ne pourrons jamais accuser l’Eglise d’en faire trop ; nous ne pourrons jamais assez la remercier pour les efforts qu’elle fait pour rendre ce sacrement accessible.

A ceux qui en doutaient, Jésus rappelle qu’on ne vient pas chez lui simplement parce qu’on a vu de la lumière, ou parce qu’on n’avait rien de mieux à faire. On vient à Jésus parce qu’il est celui qui est notre vie. Et si nous pouvons fort bien le prier chez nous, et bâtir une relation avec lui à la maison, il n’y a qu’ici, à l’église, au moment de l’Eucharistie dominicale, que nous pouvons accueillir sa vie et communier à son Corps et à son Sang. La communion ne peut donc pas être une option, si j’ai le temps ; ni une question liée à mon humeur (j’ai envie ou pas) ; elle est et restera le signe le plus grave et le plus profond de mon désir de Dieu, de mon désir de vivre avec lui. Ici et maintenant, et pour toujours. Amen.

(Image, La Sainte Cène, Hortus Deliciarum)

lundi 13 août 2012

Assomption - 15 août 2012

Célébrons les merveilles de Dieu pour nous !



Au cœur de notre été, une espérance jaillit, née de cette certitude : Dieu veut notre bonheur. Au cœur de notre été, notre foi est revigorée par la célébration de l’Assomption, signe de notre propre destinée : nous sommes faits pour vivre avec Dieu. Au cœur de notre été, tournons-nous vers Dieu, source de tout bien : c’est lui qui fait grande merveille pour nous aujourd’hui.

 
Oui, en ce jour de fête mariale, c’est vers Dieu que nous sommes invités à regarder. Et c’est Marie elle-même qui tourne ainsi notre cœur vers celui qu’elle chante dans le Magnificat. Elle égrène toutes les merveilles que Dieu fait pour son peuple ; elle invite à contempler déjà ce monde nouveau qu’il construit pour l’humanité. Un monde où les petits seront respectés, protégés, rassasiés ; un monde qui verra la réalisation de toutes les promesses divines faites à travers le temps à Abraham et à ses successeurs, un monde définitivement délivré du Mal.
 
La Bible étant muette sur la fin terrestre de Marie, la liturgie nous fait revivre les commencements de l’histoire, lorsque Marie, ayant acceptée d’être la Mère du Sauveur, s’en va se mettre au service de sa cousine, bien plus âgée, et enceinte elle-aussi, par la grâce de Dieu. L’Evangile de notre fête nous présente ainsi l’arrivée de Marie chez son ainée et ce dialogue entre ces deux femmes qui se savent choisies par Dieu pour une histoire qui les dépasse : la plus âgée pour être la mère du Précurseur, la plus jeune, la Mère du Sauveur. En ces deux femmes, la première et la nouvelle alliance se rencontrent, et le lien est établi entre le peuple que Dieu s’est donné depuis les origines et ce peuple qu’il veut reconstruire en Jésus, son Fils, offert pour le salut de tous. Cette nouvelle création est marquée par la joie d’accueillir Dieu lui-même au cœur de la vie des hommes : comment ai-je ce bonheur que la Mère de mon Seigneur vienne jusqu’à moi ? En Marie qu’elle accueille, Elisabeth a conscience d’accueillir bien plus grand encore et déjà l’enfant qu’elle porte en son sein tressaille d’allégresse ! Ce monde nouveau est tout juste annoncé, que déjà les hommes peuvent se réjouir : rien ne s’opposera plus à la réalisation du projet de salut que Dieu porte pour nous, puisque Marie a choisi de le suivre en s’offrant à Dieu pour qu’il puisse prendre corps. Nous pouvons en être convaincus : voici maintenant le salut, la puissance et la royauté de notre Dieu, et le pouvoir de son Christ.
 
Ce jour, Dieu l’a préparé de longue date puisque, selon notre foi, il a préservé Marie du péché des origines. Ainsi, depuis son premier jour, elle était tout entière tournée vers celui qui l’a appelée pour être la Mère de son Fils. Comment dès lors ne pas croire que, ayant préservé Marie au commencement de sa vie, il ne la protège encore au terme de sa vie ? Celle qui n’a pas été dégradée par le péché, ne sera pas davantage dégradée par la mort. Puisqu’elle n’a été que oui à Dieu, puisqu’elle a suivi son Fils en toute chose, jusqu'au pied de la croix, elle le suivra désormais dans sa gloire. Elle annonce ainsi à tous les hommes quel est leur destin. A tous ceux qui suivront son Fils, à tous ceux qui embrasseront l’Evangile pour en vivre, sont assurées la victoire sur le Mal et la gloire d’une vie en Dieu pour toute éternité. Le Christ est ressuscité des morts pour être parmi les morts le premier ressuscité. C’est là notre foi. A la suite de Marie, entrée dans la gloire de son Fils à cause de son obéissance à Dieu, nous est montré le chemin à suivre pour parvenir à notre tour à la gloire du ciel. C’est là notre espérance. Ce chemin, c’est le chemin de la charité, le chemin de l’abandon entre les mains du Père.
 
En cette fête de l’Assomption, rendons grâce à Dieu pour les merveilles qu’il a faites en Marie. Mais célébrons aussi les merveilles qu’il ne cesse de faire pour nous. Il ne nous laisse pas seul face au péché, au Mal et la Mort. Par le don renouvelé de son Fils en chaque eucharistie, il nous en libère et nous appelle toujours à le suivre, pour être là où il sera. Il nous propose de vivre le oui de Marie pour construire avec lui un monde plus humain. Abandonnons-nous joyeusement entre les mains du Père ; il nous recueillera en son Royaume pour toute éternité. Amen.

(Photo de l'auteur - Eglise de Desesti - Roumanie)

samedi 11 août 2012

19ème dimanche ordinaire B - 12 août 2012

A l’exemple de Laurent, laissons-nous mener par Dieu.
(Homélie donnée en l'église St Laurent de Dahlunden, à l'occasion de la fête patronale)



Personne ne peut venir à moi, si le Père qui m’a envoyé ne l’attire vers moi. Voilà exprimée en peu de mots la conviction du Christ lui-même au sujet de la foi, au sujet des mouvements de foules que Jésus provoque partout où il passe. Et il fait ce constat au moment même où cette foule, étonnée des signes qu’il pose, cherchant Jésus dès qu’il s’éloigne un peu, récrimine contre sa dernière parole. Pour qui se prend-t-il ? Nous le connaissons bien : comment peut-il parler ainsi ?

C’est le propre d’une foule d’être versatile. Elle ne fonctionne qu’à l’air du temps, au sensationnel. Il n’y a pas de différence entre cette foule qui suivait Jésus et les journaux à sensation d’aujourd’hui. A partir du moment où vous êtes connus, vous êtes scrutés, passés au microscope d’une soi-disant bonne société, et au moindre écart, vous qui étiez encensés hier êtes aussitôt crucifiés. La foule dit connaître Jésus parce qu’elle connaît ses parents. Mais est-ce suffisant ? Ne s’est-elle pas fabriqué une image de Jésus sur des critères humains ? Il nous amuse, il nous surprend, il nous intéresse, il nous guérit, il nous donne à manger. Mais est-ce suffisant pour suivre Jésus ? Est-ce suffisant pour croire en lui ? La réponse de Jésus est claire : celui qui vient à moi, c’est grâce à mon Père. Voilà le secret de la foi : elle est un don que Dieu fait à ceux qu’il appelle. Elle n’est pas une œuvre humaine ; elle n’est pas à confondre avec la connaissance humaine de Jésus. Pour comprendre les paroles et les gestes de Jésus, il ne faut pas le connaître humainement ; il faut avoir été choisi par Dieu, appelé par lui à entrer dans l’intimité de ce Fils qu’il a envoyé aux hommes pour les sauver. Lorsque la foule s’en tient à une connaissance humaine de Jésus, à la moindre parole difficile, c’est le clash ! La foule murmure de désapprobation et se retire. Par contre, celui qui est de Dieu, celui qui a mis Dieu au cœur de sa vie peut comprendre le sens véritable des paroles du Fils unique. Oui, le Christ se donne en nourriture véritable. Oui, il est celui qui nous donne la vraie vie, celle qui est marquée du sceau de l’éternité et que même la mort ne peut abattre. Nous vivrons éternellement si nous mangeons le Christ, si nous l’assimilons comme la nourriture quotidienne. C’est là l’œuvre de Dieu en nous.

Celui qui est appelé par Dieu lui-même à entrer dans l’intimité du Christ peut alors, selon la parole de Paul, chercher à imiter Dieu ! En effet, appelés par Dieu à connaître le Fils, nous sommes appelés à vivre comme Dieu lui-même, puisque, en ce Fils Jésus, il fait de nous ses enfants. Devenus par appel de Dieu membres de sa famille, nous devons tenir notre rang et notre place dans cette famille et vivre dans l’obéissance au Père. Paul décrit sommairement cette vie : une vie sans mal, sans colère, sans emportement d’aucune sorte ; une vie faite de tendresse, de générosité, de pardon. Voilà à quoi sont appelés ceux que le Père attire vers son Fils. Comprenant l’œuvre et les paroles du Fils unique, nous comprenons aussi qu’elles sont porteuses de vie et que notre vie dépend de cet art de vivre. Tout nous est donné par Dieu : la foi au Fils unique, la manière de vivre pour être vraiment fils et fille de Dieu, et l’Esprit qui nous permet d’accorder notre être à la volonté de Dieu, l’Esprit qui nous permet d’ajuster notre vie à la vie du Christ.

Lorsqu’un croyant entre ainsi dans la compréhension de Dieu, du Christ sous la conduite de l’Esprit, ce même Esprit peut le conduire jusqu’au témoignage ultime, à l’exemple de Laurent, diacre de l’Eglise, que nous célébrons aujourd’hui. Il n’est pas devenu martyr par sa volonté propre, mais parce que Dieu lui a permis de témoigner jusqu’à l’ultime de la puissance de Dieu, comme l’avait fait le Christ ! Il n’a pas imité le Christ comme un petit singe ; il a été conformé au Christ, par grâce, afin que son témoignage nourrisse la foi des fidèles à travers le temps et l’histoire, et qu’à travers son témoignage, les hommes puissent découvrir la puissance d’amour qui est en Dieu et la puissance d’amour que le Christ communique à ceux et celles qui croient en Lui. Appelé par Dieu à entrer dans l’intimité du Christ Serviteur des pauvres, Laurent a été jusqu’au don de sa vie pour témoigner que Dieu n’abandonne pas ceux qui croient en lui, et surtout pas les pauvres qui sont les préférés de Dieu et à qui Laurent a consacré son ministère. Comme le Christ s’est livré pour nous en offrant à Dieu le sacrifice qui pouvait lui plaire pour que nous soyons sauvés, de même Laurent s’est-il offert en sacrifice pour ne pas faire de tort à ces pauvres, seule richesse de l’Eglise. Il s’est offert parce que telle était sa vocation !

A nous qui rendons grâce à Dieu pour l’œuvre de son Fils, l’exemple de Laurent est laissé pour que nous comprenions bien que notre vie est en Jésus, notre unique nécessaire, notre unique nourriture. Lui faire confiance comme le Père nous le demande, c’est trouver le chemin de la vie qui ne finit pas. A l’exemple de Laurent, répondons à l’appel de Dieu et suivons le Christ là où lui-même veut nous conduire, sûrs qu’au bout du chemin il y a notre vie et notre joie. Amen.


(Détail d'une bannière de procession représentant St Laurent, Diacre et Martyr, église de Holtzheim - 67)

vendredi 3 août 2012

18ème dimanche ordinaire B - 05 août 2012

Bien comprendre Jésus pour mieux  comprendre l’Eucharistie.


Depuis dimanche et pendant trois semaines encore, nous méditons le chapitre 6 de l’évangile de saint Jean. Un chapitre tout entier eucharistique. De sa première à sa dernière ligne, il nous parle du Pain vivant et vrai. Et nous constatons, dès le début, qu’il y a une formidable incompréhension entre Jésus et le peuple. Ceux qui voient les signes que Jésus pose, ne savent pas les déchiffrer. Ils s’arrêtent à l’aspect extérieur des choses, sans chercher même à comprendre davantage, sans chercher derrière le signe sa signification profonde. Le passage d’Evangile que je viens de proclamer le montre fort bien.

Jésus vient de multiplier les pains. Il s’est retiré et la foule le cherche, car elle veut encore de ce pain. Elle a mangé à sa faim ; pourquoi les choses ne continueraient-elles pas ainsi ? La foule ne voit en Jésus que celui qui a comblé une attente, un désir immédiat. Ce qu’il a fait une fois, il peut donc le refaire et tout le monde sera content. Seulement voilà : le Christ n’est pas venu organiser de grands pique-niques. Il ne vient pas combler les désirs terrestres. Sa mission, c’est d’entraîner les hommes sur le chemin de Dieu. Il vient combler une attente spirituelle. Il vient rassasier la faim spirituelle. Mais les hommes ont-ils vraiment faim de Dieu ?

Le dialogue entre Jésus et la foule est révélateur de cette incompréhension. Là où Jésus parle de pain qui comble toutes les faims de l’homme, la foule n’entend que faim terrestre, pain de boulangerie. Ce qu’elle veut, c’est quelqu’un qui mette fin à son manque, sans que cela ne lui coûte quelque chose. Pourquoi ne pas avoir tous les jours de ce pain, comme jadis les pères ont eu la manne au désert ? Pourquoi Jésus ne referait-il pas pour eux ce que fit Moïse jadis ? Leur questionnement trahit une double incompréhension : d’une part, la foule montre ainsi qu’elle n’a pas compris qui est vraiment Jésus ; et d’autre part, elle montre aussi qu’elle n’a pas compris le geste de Moïse au désert. Il faut que Jésus leur rappelle que, derrière le don de la manne, il n’y a pas Moïse, mais Dieu et sa prodigalité. Tout comme derrière la multiplication des pains, il n’y a pas la révélation de Jésus comme grand mathématicien qui sait diviser et multiplier, mais la révélation de Jésus comme celui que Dieu envoie vers les hommes pour leur indiquer un chemin de vie. La foule se trompe sur le sens du miracle ; elle se trompe sur la personne même de Jésus.

A la demande de la foule d’avoir toujours de ce pain, Jésus répond en levant le voile sur son identité et sa mission. Moi, je suis le pain de la vie. Celui qui vient à moi n’aura plus jamais faim ; celui qui croit en moi n’aura plus jamais soif. Jésus se pose ainsi clairement comme celui qui, à l’image de Dieu même, donne la vie, celui qui permet à l’homme de vivre. Et c’est dans l’attachement à sa personne, dans la foi en lui, que se trouve pour l’homme la vie, la vie éternelle promise par Dieu. Voilà qu’il ne faut plus suivre une Loi mais s’attacher à quelqu’un, communier à lui.

Ce que le Christ propose, l’Eglise le réalise dans le sacrement de l’Eucharistie. Lorsque le prêtre consacre le pain et le vin, c’est le Christ vivant qui se rend présent, et le pain et le vin eucharistique deviennent le corps et le sang du Christ, sacrement de sa présence réelle et éternelle au monde des hommes. C’est le plus grand trésor que nous ayons. C’est le plus grand don que Dieu puisse nous faire. Ne nous méprenons pas sur le sens de ce sacrement. Il n’est pas un repas de l’amitié, une espèce de repas de fête auquel tous peuvent prendre part, sans y réfléchir. Il est le repas où Dieu lui-même se donne en nourriture. A cause de cela, ce repas nécessite la foi. Sans la foi, il n’y a pas de possibilité d’y communier. Sans la foi, pleine et entière, telle que la proclame notre Eglise, il n’est pas possible d’y participer. Aux origines de l’Eglise, les catéchumènes (ceux qui se préparaient au baptême) devaient quitter l’assemblée dominicale avant que ne s’ouvrent les rites proprement eucharistiques. Cela signifiait bien qu’il fallait avoir été initié pour s’approcher de l’Eucharistie, et ne pas se tromper sur ce qui se joue à ce moment-là. Lorsque je préside une assemblée particulière, comme un mariage ou des funérailles, je rappelle toujours que seuls ceux qui partagent la totalité de notre foi en la présence réelle du Christ, peuvent s’approcher pour communier. Cette monition rappelle à sa manière l’importance que revêt pour nous, catholiques, le sacrement de l’Eucharistie. Si je ne partage pas la totalité de la foi d’une Eglise, je ne communie pas au repas du Seigneur que cette Eglise propose. Parce que communier signifie plus que simplement manger un morceau de pain. Cela signifie plus que simplement dire : je suis d’accord avec ce qui a été dit au cours de cette messe. Communier, c’est adhérer en totalité au Christ, et à la foi au Christ telle que la proclame l’Eglise qui célèbre. N’y voir qu’un repas amical, ou un geste fraternel, serait se méprendre gravement et sur le Christ et sur l’Eucharistie. Nous serions, face au sacrement, comme la foule face à Jésus : incapables de comprendre vraiment la portée du don de Dieu.

Lorsque nous nous approcherons tout à l’heure pour communier, que Dieu lui-même nous accorde la grâce de discerner le Christ vivant ; que notre AMEN soit notre reconnaissance du Christ Sauveur, celui qui s’offre à nous dans le pain et le vin partagés, pour que nous ayons la vie, la vie même de Dieu, maintenant et toujours. AMEN.


(Dessin de Jean-François KIEFFER, in Mille images d'Evangile, éd. Les Presses d'Ile de France)