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Ce blog voudrait vous permettre de vivre un chemin spirituel au rythme de la liturgie de l'Eglise catholique.

Les méditations s'appuient soit sur les textes bibliques quotidiens, soit sur la prière de l'Eglise.

Puisque nous sommes tous responsables de la foi des autres, n'hésitez pas à laisser vos commentaires.

Nous pourrons ainsi nous enrichir de la réflexion des autres.







samedi 26 décembre 2020

Sainte Famille - 27 décembre 2020

 Le père et la mère de l'enfant s'étonnaient de ce qui était dit de lui.


(Présentation de Jésus au Temple, Source internet)


Le père et la mère de l’enfant s’étonnaient de ce qui était dit de lui. Vraiment ? Comment cela est-il possible ? Enfin, ils savent tous les deux les conditions de la naissance de l’enfant. Ils ont bénéficié tous deux d’une intervention de l’ange Gabriel avant sa naissance, et ils s’étonnent encore de ce que l’on dit lui ! Ben oui, d’après l’évangile de Luc que nous venons d’entendre. Marie et Joseph arrivent encore à être étonnés par cet enfant, par ce que disent de lui ceux qui croisent sa route. Et cela, alors même qu’il n’est encore qu’un bébé. Imaginez ce que cela sera quand il sera grand ! Si le fait qu’ils s’étonnent encore peut sembler curieux, ce n’en est pas moins essentiel et nécessaire qu’ils s’étonnent, et ce pour deux raisons. 

La première raison, c’est que l’ange Gabriel, à l’annonce de la naissance de l’enfant, ne leur a pas tout dit. A Marie, il a annoncé qu’elle allait avoir un fils, qu’elle lui donnera le nom de Jésus, qu’il sera grand, appelé Fils du Très-Haut, qu’il recevra le trône de David son père, qu’il règnera pour toujours sur la maison de Jacob et que son règne n’aura pas de fin. Mais rien sur l’avenir immédiat de l’enfant, rien sur les choix qu’il posera, rien sur sa mort. De même à Joseph, il n’a été dit que les choses suivantes : l’enfant qui est engendré en elle vient de l’Esprit Saint, Joseph lui donnera le nom de Jésus (c'est-à-dire le Seigneur sauve, car c’est lui qui sauvera son peuple de ses péchés. Rien n’est dit sur la manière dont Jésus réalisera ce projet, rien n’est dit sur le sacrifice nécessaire pour l’accomplissement de ce projet. En fait, l’enfant leur est confié sans mode d’emploi, comme à n’importe quel parent. Quand Dieu se fait enfant, il le fait comme tous les autres et ses parents terrestres n’en savent pas beaucoup plus que les autres. Ils sont juste débarrassés de la question du sexe de l’enfant (ce sera un fils) et de la question du choix du prénom (il s’appellera Jésus). Pour tout le reste, ils apprendront sur le tas, au jour le jour, comme n’importe quelle famille. Nous voyons bien là que Dieu ne joue pas à l’enfant, il ne fait pas l’enfant, il se fait enfant, se confiant à la garde des parents qu’il a choisis. Cela nous montre aussi quelle confiance Dieu fait à l’homme quand il lui confie la réalisation de son projet de salut. Il fait de Marie et de Joseph de vrais parents, avec leurs questions, leurs doutes aussi. Ils auront à accompagner cet enfant comme n’importe quelle famille. Quand Dieu devient humain, il se confie à des humains qui le feront grandir dans son humanité. Il vivra cette humanité parfaitement au point qu’il pourra inviter les hommes à le suivre et à vivre de même pleinement leur humanité. Dieu fait comme nous, mais parfaitement, pour que nous puissions faire comme lui. Nous retrouvons le fameux « Mach’s wie Gott, werde Mensch ! ». 

La deuxième raison de l’étonnement des parents, c’est qu’ils ne se considèrent pas comme les propriétaires de l’enfant. Ils en ont reçu la garde, ils savent qu’il aura une mission à accomplir. Le reste ne dépend pas d’eux. Puisque l’ange n’a pas tout dit, ils ne savent pas tout. D’autres ont reçus des bouts de vérité au sujet de leur enfant. Ils acceptent ce fait et accueillent ces bouts de vérité qui sont autant de signe qu’ils n’ont pas rêvé leur mission. Puisque que Dieu a révélé à d’autres des choses au sujet de cet enfant, tout ce qui a été dit à Marie et à Joseph avant la naissance va donc se réaliser, bien au-delà de la seule naissance de Jésus. Et c’est bien ainsi. Marie et Joseph devront apprendre à accompagner leur enfant, comme tout parent est censé le faire. Quand l’enfant est accepté pour ce qu’il est, un être en devenir, un être qui devra faire ses propres choix, alors l’enfant peut grandir et se fortifier. Quand les adultes ne cherchent pas à s’imposer à l’enfant, ni à imposer à l’enfant leur propre vue, alors la grâce de Dieu peut être sur lui. Alors surtout il peut être ouvert à cette grâce et se laisser guider par elle. Même après la parole mystérieuse du vieux Syméon sur l’avenir de l’enfant, Marie n’emballe pas Jésus dans du papier de soie pour le protéger. Nous ne savons pas grand-chose d’autre sur l’éducation reçu par Jésus, mais nous pouvons déduire de sa vie qu’il aura appris auprès de ses parents comment vivre quand on est membre du peuple que Dieu s’est choisi. Joseph lui aura sans doute appris à être juste devant Dieu et devant les hommes, comme il l’était lui-même ; Marie lui aura appris à accueillir les grâces que Dieu accorde comme elle-même avait accueilli la grâce d’être choisi pour être la mère de Jésus. Marie et Joseph auront donné à Jésus le meilleur d’eux pour qu’il puisse donner un jour le meilleur de lui. 

En célébrant cette fête de la Sainte Famille, nous reconnaissons nous aussi que nous ne savons pas tout de Jésus et que nous devons nous-aussi nous laisser surprendre toujours et encore sur ce que les hommes disent à son sujet. Nous devons accueillir Jésus dans notre vie, reconnaître en lui le salut que Dieu prépare et nous laisser éclairer de sa lumière. Avec Syméon et Anne, puissions-nous bénir Dieu à cause de Jésus ; avec Marie et Joseph, puissions-nous rentrer chez nous avec Jésus, confiant en l’avenir ; avec Jésus, laissons la grâce de Dieu reposer sur nous et nous pourrons à notre tour accomplir ce que Dieu attend de nous. Amen.   

jeudi 24 décembre 2020

Noël - 25 décembre 2020

 Fais comme Dieu, deviens humain !



(Tableau d'Arcabas, Source internet)



Après quatre dimanches de préparation, voici donc le temps de Noël que nous inaugurons (nous avons inauguré[1]) cette nuit. Les quatre messes de Noël, dont les formulaires sont utilisés en fonction de l’heure à laquelle la communauté célèbre, nous font entendre quantité de textes bibliques différents. Je ne peux que vous encourager à prendre le temps de les lire tous durant ces jours. Ils éclairent ce mystère de Noël chacun à leur manière. 

Si nous ne prenons que les évangiles par exemple, nous lirons (avons lu), dans l’ordre des messes de cette solennité, la généalogie de Jésus telle que l’a établie Matthieu (première messe de Noël) nous rappelant la grande famille de ses ancêtres, de nos ancêtres dans la foi et indiquant par-là que Jésus s’inscrit bien dans ce peuple de l’Alliance que Dieu rassemble depuis qu’il a appelé Abraham ; la naissance de Jésus bien sûr (messe de minuit) telle que la rapporte saint Luc dans son Evangile, avec ce côté merveilleux qui nous met relation presque instantanément avec la puissance de Dieu, tout en soulignant le contraste entre Dieu qui vient dans le monde alors même que les hommes ne sont pas prêts à le recevoir ; la visite des bergers à la crèche selon Luc (messe de l’aurore) avec le témoignage qu’ils rendent au sujet de cet Enfant et leur louange à Dieu ; et enfin le prologue de l’Evangile de Jean (messe du jour) qui nous fait sortir du merveilleux pour nous plonger dans une vue plus théologique. Ce dernier nous rappelle aussi que la naissance de cet Enfant a une conséquence inouïe pour ceux qui le reçoivent : ils deviennent enfants de Dieu. Cette succession de textes a provoqué en moi une question que je vous livre : Dieu fait-il quelque chose d’extraordinaire en se faisant enfant ? 

Certains diront : ben oui, ce n’est quand même pas courant ; la preuve, ce n’est arrivé qu’une seule fois selon la foi des chrétiens. C’est vrai ; cela n’est arrivé qu’une fois, comme pour nous. Nous aussi, nous sommes entrés dans ce monde enfant, et nous ne le faisons qu’une seule fois. Parce que mis à part l’étrange histoire de Benjamin Button que nous a raconté David Fincher, le cours normal de toute vie commence par l’enfance et finit par la vieillesse. Encore une fois, il n’y a là rien d’extraordinaire. Ni pour nous, ni pour Dieu. Par contre de toutes les divinités que se partagent les hommes à cette époque, je n’en connais pas d’autre qui ait fait ce choix audacieux de devenir humain, non pour se jouer des hommes, mais pour vivre leur vie, avec tout ce qu’elle a d’ordinaire, avec tout ce qu’elle peut comporter d’épreuves, de trahisons, de souffrances, allant jusqu’à la mort même. Et pas n’importe laquelle puisque nous savons que cet Enfant, né sur le bois d’une mangeoire mourra sur le bois d’une croix. Ce qui est audacieux aussi, me semble-t-il, de la part de Dieu, c’est de prendre ce chemin d’humanité pour nous sauver et nous inviter à le suivre sur ce chemin qu’il a pris.  En fait, pour nous sauver, Dieu nous invite à l’humanité. Puisqu’il s’est fait humain, nous devons nous faire humains à notre tour, nous devons nous humaniser. C’est ce que nous invite à faire un évêque allemand, Mgr Franz KAMPHAUS qui a donné comme titre à l’un de ses ouvrages : Mach’s wie Gott, werde Mensch ! Fais comme Dieu, deviens humain ! 

Nous qui cherchions le chemin de la sainteté en essayant d’être parfait comme Dieu, voici qu’à Noël Dieu vient nous dire que notre chemin de sainteté, c’est notre humanité. Et donc que plus nous deviendrons humains, plus nous serons comme Dieu. Plus nous deviendrons humains, plus nous serons saints. Il n’y a pas à chercher hors de nous la trace de Dieu dans notre vie ; en se faisant humain, Dieu nous dit de le chercher au plus profond de nous, de le chercher là où nous ne penserions pas le trouver. Or Dieu est bien en nous, avec nous. Ne croyons-nous pas que nous accueillons Dieu en nous lorsque nous partageons le Pain de l’Eucharistie ? Cet Enfant nouveau-né, couché dans une mangeoire, tout Dieu qu’il est, prend le chemin ordinaire des humains pour se faire proche d’eux. Le plus grand miracle de Jésus, c’est peut-être d’avoir fait preuve d’humanité en toutes circonstances. Quelqu’un de malade venait à lui le jour du sabbat ? Il se trouvait guéri, sans attendre, parce que le salut n’attend pas ; parce que Dieu n’attend pas et ne nous fait pas attendre. Le discours programmatique de Jésus que nous connaissons sous le nom de béatitude n’exprime-t-il pas ce que devrait être notre humanité ? Tous les gestes posés par cet Enfant quand il sera grand ne sont-ils pas d’abord des gestes d’humanité envers ceux qui viennent vers lui ? Son refus de juger, de coller des étiquettes sur les gens, tout cela ne devrait-il pas être le comportement normal d’un humain ? L’attention bienveillante aux pauvres, aux malades, aux étrangers, aux exclus… n’est-ce pas une caractéristique de notre humanité ? Si les hommes et les femmes de notre temps ne sont pas humains, si nous ne sommes pas humains, à quoi servons-nous ? Si les hommes et les femmes de notre temps ne sont pas humains, si nous ne sommes pas humains, comment notre monde deviendra-t-il meilleur ? Si nous, qui croyons en Dieu, ne sommes pas humains, comment pouvons-nous nous plaindre de la dureté de notre monde ? Seule l’humanité des hommes pourra adoucir ce monde que l’humanité de Dieu est venue sauver. 

Dieu, quand son Fils est entré dans le monde, a trouvé porte close et s’est réfugié dans une étable. Il aurait pu déclencher le feu du ciel pour se venger ; il est resté humain. Il a trouvé quelques bergers à qui la nouvelle de la naissance a été transmise ; et ils sont venus, eux les exclus, les sans domiciles, rendre visite à ce petit d’homme, à ce petit de Dieu. C’est même par son humanité qu’il nous dit le mieux qu’il est le seul Dieu, le vrai Dieu. Toutes les divinités qui, à l’époque de Jésus, exigeaient des sacrifices humains, exigeaient donc l’inhumanité, ont disparu. Seul est resté et reste le Dieu qui s’est fait homme, le Dieu qui a pris part à notre humanité, le Dieu qui a refusé l’inhumanité et la violence. Tu sais donc maintenant ce qu’il te reste à faire pour partager son éternité : Fais comme Dieu, deviens humain ! Amen.



[1] Les indications entre () sont pour la messe du jour de Noël

samedi 19 décembre 2020

4ème dimanche de l'Avent B - 20 décembre 2020

 Notre Dieu est Dieu-avec-nous.



(Tableau d'Arcabas, l'Annonciation, Source internet)


               S’il est une conviction qui ne doit jamais nous quitter, pas seulement en temps de crise comme c’est le cas actuellement, mais en tout temps, c’est cette conviction rappelée par l’ange Gabriel à Marie dans sa salutation : Le Seigneur est avec toi. Le Dieu qui se révèle dans la Bible, de sa première à sa dernière page, est Dieu-avec-nous. C’est pour cela que l’histoire que nous vivons est une histoire sainte, car marquée par la présence de Dieu à nos côtés, toujours. 

            Cette conviction est l’expérience fondatrice de notre foi. Elle est à la fondation même de l’humanité. Dieu crée l’homme pour être avec lui. Nous le voyons dès la Genèse, lorsque le Seigneur fait le tour de son jardin et n’y trouve plus l’homme, celui-ci s’étant caché de lui après avoir découvert qu’il était nu. La question de Dieu, adressée à chacun de nous, résonne encore à nos oreilles : Homme, où es-tu ? Comprenons dans cette question toute la surprise de Dieu, son étonnement, (sa déception ?) devant l’absence de l’homme qu’il est venu visiter. Le Dieu-avec-nous se retrouve seul, dans ce jardin planté pour l’homme. Depuis ce jour, il n’est pas un homme, une femme, un enfant de la Bible, qui n’ait pas fait cette expérience de Dieu-avec-nous. 

            David, le grand roi, l’a fait dans sa vie depuis que Dieu est allé le prendre pour en faire un roi pour Israël, le peuple que Dieu s’est choisi. Il a connu cette présence de Dieu alors même que Saül était encore roi et cherchait à lui nuire. Il est devenu ce grand roi grâce à la présence de Dieu dans sa vie. C’est moi qui t’ai pris au pâturage, derrière le troupeau pour que tu sois le chef de mon peuple Israël. J’ai été avec toi partout où tu es allé… le Seigneur t’annonce qu’il te fera lui-même une maison. Même quand David ne sera plus de ce monde, Dieu sera toujours Dieu-avec-lui et continuera d’agir pour lui : Quand tes jours seront accomplis et que tu reposeras auprès de tes pères, je te susciterai dans ta descendance un successeur, qui naîtra de toi, et je rendrai stable sa royauté. Cette présence de Dieu au cœur de la vie de l’homme n’est pas la présence d’un instant, c’est une présence pour toute éternité. 

            En ce sens, la finale de la salutation adressée par l’ange à Marie n’a donc rien d’exceptionnelle. Elle pourrait nous être adressée à tous puisque Dieu est avec nous depuis le jour où il nous appelé à la vie. Ce qui est particulier à Marie, c’est le nom que l’ange lui adresse : Comblée-de-grâce. Non seulement Marie peut avoir la certitude, comme tout un chacun, que Dieu est avec elle, mais en plus elle est la Comblée-de-grâce. En elle, la présence de Dieu-avec-nous atteint des sommets parce que le cœur de Marie est tout entier en Dieu. En fait, l’annonce de l’ange est possible, non parce qu’il a été envoyé par Dieu pour la faire, mais parce que là, devant lui, se tient l’humanité-avec-Dieu. Dans cette scène de l’Annonciation, Dieu-avec-nous se lie avec l’humanité-avec-Dieu. La naissance de l’Enfant-Dieu peut être annoncée parce que chacune des parties concernées (Dieu et l’humanité) sont l’un avec l’autre. Le « Oui » de Marie vaut pour elle bien sûr, mais il vaut aussi pour toute l’humanité qui, reconnaissant que Dieu est Dieu-avec-nous, choisit à son tour d’être humanité-avec-Dieu.

            Notre Dieu est Dieu-avec-nous. La liturgie nous le rappelle quatre fois au cours de l’Eucharistie qui nous rassemble, avec cette salutation adressée par le prêtre à l’assemblée : le Seigneur soit avec vous. Elle n’est rien d’autre que cette affirmation de la présence du Seigneur à l’assemblée des fidèles. Elle redit aussi que nous ne nous rassemblons pas en vain, mais bien pour être en présence du Ressuscité qui nous livre sa Parole et son Pain, et pour vivre de Lui et avec Lui jusqu’à notre prochain rassemblement. C’est un prêtre qui vous adresse cette salutation, sous forme de souhait, pour vous rappeler que c’est le Christ qui vous rassemble, vous enseigne, vous nourrit et vous renvoie chez vous. Et votre réponse, sous forme de souhait également (Et avec votre esprit) renvoie au prêtre cette même certitude dont il doit vivre aussi et qui le met en attitude de service : que le Seigneur soit avec le souffle qu’il t’a donné et qui fait de toi un prêtre pour l’accomplissement de ton service. A chacun est rappelé l’unique essentiel : le Christ, que l’assemblée est venue entendre et recevoir, et que le prêtre doit veiller à servir au mieux dans le peuple qui lui est confié. 

            Le Seigneur est avec toi. Comme Marie, accueillons cette salutation. Comme Marie, soyons attentifs à ce que Dieu attend de nous. Comme Marie, sachons répondre et dire notre désir d’être humanité-avec-Dieu. Alors tout peut advenir selon la parole du Seigneur. Amen.

samedi 12 décembre 2020

3ème dimanche de l'Avent B - 13 décembre 2020

Notre Dieu est le Dieu qui nous invite à la joie véritable.


(Tableau de Sieger Köder)


Soyez toujours dans la joie ! Cette invitation de Paul aux chrétiens de Thessalonique prend une coloration toute particulière, me semble-t-il, en cette année où nos vies sont bouleversées par la pandémie qui met nos vies entre parenthèses depuis neuf mois déjà et sans doute encore pour quelques temps. Les recommandations faites pour les fêtes de Noël, fêtes heureuses par essence, contrarient cet appel à la joie, du moins la restreignent aux quelques heureux que nous aurons le droit d’inviter. La déprime et l’angoisse grandissante qui gagnent une part non négligeable de la population ne favorisent guère ce sentiment de joie profonde. Bien au contraire ! 

Pourtant, nous devons plus que jamais faire entendre cet appel. Il est fondamental, parce qu’il est l’appel de Dieu adressé à toute l’humanité. La Bonne Nouvelle qui est au cœur de notre foi est une Nouvelle heureuse, une Nouvelle qui rend la joie au peuple qui marchait dans les ténèbres.  Quand Dieu vient à la rencontre de l’homme, ce n’est pas pour être un embêtement de plus. Quand Dieu vient à la rencontre de l’homme, c’est pour le conduire à cette joie que nul ne pourra lui enlever. La joie de Dieu n’est ni une mièvrerie, ni un peu d’eau sucrée pour faire passer la potion amère de nos vies atrophiées. Non, la joie de Dieu pour nous est la joie véritable, celle qui fait exulter le psalmiste. L’origine de cette joie, c’est la reconnaissance de tout ce que Dieu a fait et ne cesse de faire pour l’homme. Le Magnificat, dont nous avons chanté un extrait après la première lecture, est un bel exemple de cette joie qui prend aux tripes et qui jaillit comme un cri de bonheur à la face du monde. Dans son cantique, Marie n’a rien inventé ; elle se situe simplement mais réellement, dans l’expérience millénaire de son peuple, avec une conscience aigüe que c’est Dieu qui mène la barque, Dieu qui veille sur chacun, en particulier les plus petits, les plus pauvres. La Bonne Nouvelle du Salut, c’est la Justice restaurée, c’est l’homme, tout homme, rendu à sa dignité. 

En ces jours difficiles que nous vivons, c’est toujours de cette même joie que nous devons témoigner. Pour la partager, il faut d’abord peut-être en être habité. La Bonne Nouvelle de Jésus Christ venu dans le monde pour notre salut, est-elle une vraie Bonne Nouvelle pour nous ? Nous ouvre-t-elle à cette joie, même en ce temps particulier de restrictions sociales ? La prudence dont nous devons faire preuve pour lutter contre le virus et éviter sa propagation n’a rien à voir avec la peur panique qui a envahi certains de nos contemporains ; la prudence n’a rien à voir non plus avec le fait de s’isoler, de se couper du monde. Prendre de la distance, ce n’est pas couper les ponts. Chrétiens, héritiers de cette joie libératrice qu’annonçait déjà le prophète Isaïe, nous ne pouvons nous laisser aller à la désespérance devant l’incertitude de notre époque. Plus que jamais, nous devons demander à Dieu la grâce de tenir fermes dans la foi, la grâce de savoir reconnaître encore les signes de sa venue et de sa présence au milieu de nous, la grâce d’en témoigner résolument et joyeusement. Plus que jamais, nous devons être les relais de cette présence auprès des plus fragiles pour qui ce Noël risque d’être encore plus triste et plus difficile que les précédents. 

Nous pouvons prendre exemple sur le prophète Isaïe. En l’écoutant parler de la mission qui lui est confiée en un temps difficile pour son peuple, nous pouvons ressentir chez lui une joie contagieuse. Ce qu’il doit annoncer le rend lui-même profondément heureux d’abord : je tressaille de joie dans le Seigneur, mon âme exulte en mon Dieu. La joie de Dieu, ce n’est pas quelques bons mots ; la joie de Dieu à transmettre, c’est une vie transformée : les cœurs brisés seront guéris, les captifs délivrés, les prisonniers libérés, une année de bienfait accordée. N’est-ce pas ce dont nous avons le plus besoin aujourd’hui ? Nous entendre dire que notre vie sera transformée pour quelque chose de mieux ? La joie que Dieu nous invite à vivre, a quelque chose à voir avec la confiance que nous plaçons en lui. Si nous ne croyons plus qu’il puisse toujours quelque chose pour nous, alors le Salut annoncé n’est plus une Bonne Nouvelle, et la joie à venir loin d’être une réalité. Comme Isaïe, nous avons été saisis par l’Esprit de Dieu. Cet Esprit fait de nous des prêtres, des prophètes et des rois. En célébrant notre foi, en proclamant la Bonne Nouvelle du Salut, en la vivant au quotidien, nous accueillerons toujours plus cette joie de Dieu et nous en serons les témoins auprès de tous. 

En cette période particulière de notre vie, soyons pour nos proches, en famille, au travail, dans notre quartier, de ceux qui rayonnent de cette joie de Dieu. Soyons les témoins et les relais de la Bonne Nouvelle du Salut que Dieu réalise en son Fils Jésus Christ. Il a fait des merveilles pour nous ; il en fera encore. Isaïe, Marie et Jean le Baptiste en ont été les témoins pour leur époque ; soyons-en les témoins authentiques pour aujourd’hui. Amen. 

samedi 5 décembre 2020

2ème dimanche de l'Avent B - 06 décembre 2020

 Notre Dieu est le Dieu qui nous conduit.


(Source internet)




          Préparez le chemin du Seigneur ! C’est chaque année le mot d’ordre de ce temps de l’Avent. Nous l’avons entendu par la bouche d’Isaïe dans la première lecture ; Jean, dans l’évangile, a confirmé la prophétie et lui donnait même un caractère urgent avec son activité de baptiste ; enfin Pierre nous a rappelé, dans la seconde lecture, qu’en effet le Seigneur viendra. Quant à savoir quand, cela ne nous est pas connu. Il nous reste donc cet ordre à mettre en œuvre : Préparez le chemin du Seigneur. Mais alors se pose une question : pourquoi ? Question à entendre dans un double sens. D’abord, puisque personne ne peut me dire quand il viendra, puisque pour le Seigneur, un seul jour est comme mille ans, et mille ans sont comme un seul jour, pourquoi semble-t-il plus urgent aujourd’hui qu’hier de préparer le chemin du Seigneur ? Et surtout pour quelle raison ai-je à préparer ce chemin ? 

            La question de l’urgence, introduite par le ministère de Jean le Baptiste, se comprenait à son époque. Nous qui savons toute l’histoire, nous n’oublions pas que Jésus vient juste derrière lui. Jésus est celui dont Jean a dit : Voici venir derrière moi celui qui est plus fort que moi. A l’époque de la prédication de Jean, le temps n’était plus une affaire. Jésus est déjà né ; Jean le Baptiste annonce le début prochain de son ministère. Mais alors aujourd’hui, qu’en est-il ? Nous préparons-nous juste à cause du souvenir de cette première venue ? Autrement dit, l’Avent est-il le temps anniversaire du ministère de Jean le Baptiste ou a-t-il une réelle signification pour moi, pour chacun de nous ? Puisque la force de la liturgie est de rendre actuelle, contemporaine l’œuvre éternelle de Dieu en faveur des hommes, la préparation du chemin du Seigneur ne peut pas être de l’ordre de la commémoration. Nous ne vivons pas le temps de l’Avent dans le souvenir de Jean le Baptiste. Nous vivons ce temps de l’Avent avec Jean le Baptiste qui nous dit à nous aujourd’hui qu’il vient, Celui que nous attendons. Oui, puisque notre Dieu est le Dieu de la rencontre (c’est ce que nous rappelait la liturgie de dimanche dernier), il vient bien à notre rencontre aujourd’hui. Dieu ne cesse de venir à la rencontre des hommes. Il est le bon berger qui rassemble son troupeau. Il l’a fait au temps d’Isaïe ; il l’a fait au temps de Jean le Baptiste et de Jésus ; il le fait encore aujourd’hui. Cette urgence est perpétuelle parce que personne ne sait quand, mais nous savons qu’il va venir. 

            Alors reste la question de savoir pour quelle raison nous nous devons de préparer aujourd’hui le chemin du Seigneur ? Est-ce pour qu’il puisse venir ? Autrement dit, si nous ne préparons pas le chemin du Seigneur, il ne pourra pas venir ? Dieu, le tout-puissant, ne saurait tracer droit une route, combler un ravin, abaisser une montagne ou une colline ? Préparer le chemin du Seigneur ne serait rien d’autre que de déployer un tapis rouge pour qu’il puisse marcher dessus ? En spiritualisant un peu plus, puisque nous pouvons comprendre que les montagnes à abaisser, les ravins à combler, c’est en nous qu’il faut le faire (c’est de notre péché qu’il faut nous débarrasser), cela signifie-t-il que le Christ ne reviendra que lorsque les hommes seront parfaitement saints ? Freud nous expliquerait que le traumatisme de la croix était tel que désormais Jésus attendrait que nous soyons tous beaux et gentils et bien disposés à son égard pour revenir. Je ne veux effrayer personne, mais, dans ce cas, nous risquons d’attendre encore ! Et longtemps ! Nous comprenons bien que cela n’est pas la raison ; il ne faut pas envisager le retour du Christ de notre perspective, mais de celle du Christ lui-même. 

            Pourquoi le Christ est-il venu dans le monde ? Pourquoi le Christ vient-il toujours dans le monde ? Pourquoi le Christ reviendra-t-il dans le monde ? Pour sauver les hommes. C’est là sa grande mission ; c’est là son grand amour : notre salut ! Notre sainteté n’est pas le préalable à sa venue, mais la conséquence de sa venue. C’est parce que le Christ vient à nous, chaque jour, que nous pouvons devenir saints ; et non pas parce que nous sommes saints que le Christ vient à nous ! Pierre l’assure dans sa deuxième lettre : le retour du Christ est une certitude comme est une certitude sa première venue dans le monde, jadis au temps du roi Hérode. Puisque Jésus est déjà venu, comme en atteste les évangiles qui nous redisent sa vie et son ministère, nous voyons quels hommes nous [devons être] en vivant dans la sainteté et la piété. Non pas une sainteté que nous forgerions à la force de nos poignets, mais la sainteté que le Christ, mort et ressuscité a manifesté et offert à tous. Nous devons vivre du Christ, de son enseignement, de sa charité, de sa sainteté, pour hâter l’avènement du jour de Dieu. Je dois préparer le chemin du Seigneur non pas pour lui, pour qu’il ne s’écorche pas le pied, mais pour moi, pour que, quand il viendra, je ne trébuche pas sur le chemin qu’il m’invitera à prendre à sa suite. Parce que le retour du Christ sera bien ce jour où il rassemblera tous les hommes et les conduira vers son Père. Le Péché, la source du Mal, Jésus l’a vaincu une fois pour toutes sur la Croix, mais je dois me joindre à sa victoire en luttant avec le Christ contre les péchés qui peuvent envahir ma vie. Je rends droit le chemin, j’abaisse collines et montagnes, je comble les ravins, pour accueillir la grâce du Salut dans ma vie. Car le Christ ne forcera pas le passage dans ma vie. Le Salut, il me le propose, inconditionnellement ; mais il me revient de l’accepter, librement. 

            Notre Dieu est le Dieu qui nous conduit, qui nous propose un chemin ; mais nous seuls pouvons choisir de le suivre ou non. Nous seuls pouvons choisir d’accueillir sa gloire dans notre vie quand elle rayonnera sur le monde. Ecoutons l’appel d’Isaïe ; accueillons le baptême de conversion proposé par le Baptiste ; et l’Esprit Saint pourra agir en nous pour faire toute chose nouvelle. Quand le Christ paraîtra, nous pourrons aller à la rencontre de Celui qui ne cesse de venir pour nous conduire vers son Père. Amen.