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Ce blog voudrait vous permettre de vivre un chemin spirituel au rythme de la liturgie de l'Eglise catholique.

Les méditations s'appuient soit sur les textes bibliques quotidiens, soit sur la prière de l'Eglise.

Puisque nous sommes tous responsables de la foi des autres, n'hésitez pas à laisser vos commentaires.

Nous pourrons ainsi nous enrichir de la réflexion des autres.







samedi 27 juin 2015

13ème dimanche ordinaire B - 28 juin 2015

Parler de Dieu en temps de guerre !




Avons-nous encore le droit de parler au nom de Dieu après les événements de ces jours-ci ? Vendredi, en un seul jour, dans trois pays différents, des fous de Dieu ont sali son nom, déshonoré toutes les religions et terrifié l’humanité. Comment peut-on s’en prendre ainsi, et de manière aussi barbare, à des innocents ? Comment peut-on semer ainsi la terreur au nom de Dieu ? Comme beaucoup sans doute, je m’interroge : que fait Dieu ? Pourquoi permet-il ainsi que se répande la terreur ? Pourquoi n’intervient-il pas quand son nom est corrompu par les hommes ? J’en veux à ces hommes qui rendent difficile la mission de parler de Dieu et en son nom, de manière juste. En ce temps de guerre qui ne dit pas son nom, il me faut pourtant encore et toujours parler de Dieu. 
 
Il convient donc, et de manière urgente, de redonner de Dieu une image juste. Et l’auteur du livre de la Sagesse nous y aide aujourd’hui. Dieu n’a pas fait la mort, écrit-il de manière assurée, il ne se réjouit pas de voir mourir les êtres vivants. Comme je voudrais que les hommes entendent cela et le méditent profondément. Dieu n’a pas fait la mort : cela signifie que tout ce qui a trait à la mort n’est pas du côté de Dieu. Celui qui répand la terreur, celui qui tue, ne peut en aucun cas prétendre le faire au nom de Dieu. La mort est à l’opposé du projet d’amour qu’il porte depuis les origines pour l’humanité. 
 
Si Dieu n’a pas fait la mort, cela signifie que l’homme n’est pas fait pour la mort. Ce n’est pas dans le projet de Dieu que l’homme meurt. L’homme est fait pour vivre, pour partager la vie même de Dieu, pour toujours. La mort ne peut jamais être le dernier mot de l'histoire d’un homme, parce que Dieu appelle tous les hommes à la vie en plénitude, pour toute éternité. Seul le refus de Dieu peut conduire à la mort éternelle ; seul le refus de Dieu peut conduire l’homme à l’irréparable, à donner la mort. 
 
Il faut donc rappeler aussi que l’homme, créé par Dieu qui n’a pas fait la mort, n’est pas fait pour elle, pas plus que l’homme n’est fait pour donner la mort. Nul ne peut retirer la vie à un autre, pour quelque motif que ce soit. La vie est sacrée parce qu’elle vient de Dieu, et elle se doit d’être protégée envers et contre tout, envers et contre tous. Ceux qui croient qu’ils donnent la mort pour plaire à Dieu se trompent, comme se trompent ceux qui croient qu’on peut donner une belle mort à quelqu’un qui souffre. Il n’est pas du côté de Dieu, d’aucun Dieu, celui qui donne la mort ; il n’est pas du côté de Dieu, d’aucun Dieu, celui qui répand la terreur en son nom. La mort n’est jamais belle, ni glorieuse ; toujours elle doit être combattue ; toujours on doit lui opposer la vie. Dieu n’a pas fait la mort parce qu’il veut la vie pour l’homme, pour tous les hommes : il les a tous créés pour qu’ils subsistent, nous dit encore le livre de la Sagesse. Certes, il nous faut accepter de quitter ce monde passager pour partager pleinement la vie de Dieu et sa gloire ; mais cette mort inéluctable n’est qu’un passage vers plus de vie. Elle n’est pas suppression de vie, elle n’est pas massacre gratuit, elle n’est pas vengeance. Quand Dieu nous invite à quitter cette terre, c’est pour nous appeler à sa vie. 
 
Dieu n’a pas fait la mort. Le Christ en témoigne par sa propre vie, par son enseignement, par ses actes. Regardez ce qu’il fait pour la fille de Jaïre qui est à la dernière extrémité. Il la relève, il la fait revivre. Il la fait participer à cette force de vie qui est en lui. Elle devient ainsi le signe que le projet de Dieu que l’homme vive est bien toujours d’actualité, et que Jésus est venu pour donner un visage à ce projet. Il est, lui, Jésus, la vie de Dieu qui nous est donnée, la vie de Dieu qui va s’offrir en sacrifice pour nous obtenir la vie en plénitude. Dans chacune de nos eucharisties, nous faisons mémoire de ce don ultime de Jésus à notre humanité et nous goûtons à cette vie lorsque nous communions au corps et au sang du Christ, offerts pour la multitude de ceux qui croient en lui. Quand nous nous approcherons pour communier, souvenons-nous bien que c’est là, dans ce pain rompu, toute la vie de Dieu qui est donnée pour notre vie. C’est toute la vie de Dieu qui nous est donnée pour que nous l’assimilions. C’est toute la vie de Dieu qui est donnée pour que les hommes enfin comprennent que Dieu n’a pas fait la mort, mais qu’avec nous et pour nous il la combat. 
 
Dans les jours terribles que nous traversons, il n’est qu’une parole sur Dieu à faire connaître : celle qui lui rend justice, celle qui rappelle que Dieu est du côté de la vie, du côté des hommes donc. Dieu n’a pas fait la mort, il ne veut la mort de personne, mais la conversion de tous. Et il l’obtiendra, non par la peur de la mort ou de l’enfer, mais par l’amour qu’il ne cesse de nous témoigner et qu’il nous demande de vivre avec chacun, toujours et encore, que ce chacun soit croyant ou mécréant, blanc ou noir, homme ou femme, jeune ou vieux. L’amour sera toujours la seule parole autorisée sur Dieu, quand bien même les hommes se font la guerre. Amen.

(Dessin de Jean-Yves DECOTTIGNIES, in Mille dimanches et fêtes, Année B, éd. Les presses d'Ile de France)

samedi 20 juin 2015

12ème dimanche ordinaire B - 21 juin 2015

Qui est-il donc, celui-ci ?




Qui est-il donc, celui-ci, pour que même le vent et la mer lui obéissent ? Si nous avions été dans la barque, cette fameuse journée-là, sans doute aurions-nous posé la même question. Personne, jusqu’à présent, n’avait réussi à faire ce que Jésus venait de faire : calmer la mer qui battait de ses flots la pauvre embarcation des disciples. 
 
Qui est-il donc, celui-ci ? La question des disciples semble donc légitime. Pourtant, les multiples guérisons qu’il a opéré jusqu’ici et l’enseignement qu’il a donné aux foules auraient, petit à petit, dû les mettre sur la bonne piste. De plus, avec la culture qui est la leur et la connaissance qu’ils ont nécessairement des textes sacrés, ils devraient conclure, par eux-mêmes, que Jésus est Dieu. Le rapprochement que la liturgie de ce dimanche fait avec le livre de Job est éclairant. Le Seigneur s’adressa à Job du milieu de la tempête et dit : « Qui donc a retenu la mer avec des portes, quand elle jaillit du sein primordial (…), quand je lui imposai ma limite, et que je disposai verrou et portes ? Celui qui est avec eux dans cette barque, c’est certes Jésus, leur maître ; mais il se révèle aussi chaque jour davantage Dieu. Cette autre rive sur laquelle il les a invités à passer quand ils sont montés dans la barque, c’est bien la rive de la foi. En nous embarquant avec lui, il veut nous faire découvrir qu’au-delà de l’homme Jésus, il est Dieu, vainqueur de toutes les forces qui s’opposent à la vie. En montrant son autorité sur la mer, il annonce déjà sa victoire sur la mort, puisque pour l’homme biblique, la mer est bien le lieu où résident les forces du Mal et de la Mort, toutes choses que seul Dieu maîtrise. Ce signe, loin de les effrayer, devraient, au contraire, les rassurer. 
 
Qui est-il donc, celui-ci ? Si les disciples s’interrogent sur Jésus, nous pouvons constater aussi que Jésus s’interroge sur ses disciples. Si les hommes sont étonnés par Dieu, il nous faut remarquer dans le même temps que Dieu est étonné par les hommes : Pourquoi êtes-vous si craintifs ? N’avez-vous pas encore la foi ? Nous pouvons entendre, en sourdine, cette autre question : que faudra-t-il que je fasse pour que vous croyiez en moi ? Les nombreuses guérisons, les esprits impurs eux-mêmes qui criaient que Jésus est le fils de Dieu (Mc 3, 11) devaient suffire pour que ceux qu’il a appelés à le suivre comprennent déjà qu’il est plus qu’un homme, qu’il est bien du côté de Dieu. Oui, les hommes sont étonnants de lenteur, peut-être d’abord parce qu’ils sont étonnamment centrés sur eux-mêmes. Ceux que Jésus a appelés à le suivre ne se rendent sans doute pas compte, là tout de suite, de l’expérience spirituelle qu’il leur fait vivre. Ils suivent un maître, mais sans savoir ; ils regardent leur maître, mais sans voir ; ils écoutent son enseignement, mais sans entendre vraiment. Ils en restent à la surface des choses. 
 
Ne sommes-nous pas comme eux, bien souvent ? Nous allons à la messe, nous écoutons Dieu nous parler, nous recevons de lui le pain qui nous fait vivre ; et pourtant, nous sommes par moment si éloignés de lui, si difficiles à convaincre que Jésus est là, au cœur même de notre vie, nous appelant à de grandes choses ! Quand surgissent les difficultés, ne sommes-nous pas remplis de crainte devant l’avenir incertain ? Cette page d’évangile vient nous rappeler que là où Jésus est présent, rien ne peut détruire ce que l’amour a saisi, pas même la tempête, pas même les forces de mort. Puisque Jésus est avec nous et en nous depuis notre baptême, nous avons tout pour tenir bon dans les épreuves, pour affronter la tempête de la mort ; notre barque ne saurait chavirer, les flots de la mer ne sauraient nous submerger. Ecoutons à nouveau Paul redire aux Corinthiens : Frères, l’amour du Christ nous saisit quand nous pensons qu’un seul est mort pour tous, et qu’ainsi tous ont passé par la mort. Car le Christ est mort pour tous, afin que les vivants n’aient plus leur vie centrée sur eux-mêmes, mais sur lui, qui est mort et ressuscité pour eux.  En Jésus, nous avons déjà notre victoire ; en Jésus, nous sommes déjà sauvés ; en Jésus, nous pouvons croire et espérer. Il ne nous abandonnera jamais. Il nous invite passer sur les autres rives en embarquant avec nous. 
 
Qui est-il donc, celui-ci ? Si nous reconnaissons que cette question peut être légitime dans la bouche des Apôtres s’interrogeant sur Jésus, reconnaissons aussi que cette question est légitime dans la bouche de Jésus, s’interrogeant sur notre foi, sur notre fidélité à son œuvre d’amour pour nous. Accueillons-le vraiment dans notre vie, pour qu’il puisse nous accueillir vraiment dans la vie de Dieu. Amen.


(Dessin de Jean-Yves DECOTTIGNIES, in Mille dimanches et fêtes, Année B, éd. Les Presses d'Ile de France)

samedi 13 juin 2015

11ème dimanche ordinaire B - 14 juin 2015

Voici revenu le temps de l'espérance !



Depuis le mardi qui a suivi la Pentecôte, nous sommes rendus au temps ordinaire. Certes, nous avions encore deux dimanches festifs, qui pouvaient faire illusion. Mais avec ce dimanche, c’est sûr, la longue succession de fêtes depuis Pâques est achevée : nous sommes, dimanche compris, rendus au temps ordinaire, pour de bon et pour un moment. Les vêtements du prêtre sont passés du blanc (ou de l’or) couleur de la fête, au vert, couleur de l’espérance. Et les textes de ce 11ème  dimanche du temps ordinaire nous y invitent justement, à l’espérance. 
 
Voyez Ezéchiel. Vous aurez senti, à la lecture de sa prophétie, que le peuple d’Israël n’est pas vraiment à la joie. Il est cet arbre renversé dont parle le prophète. En fait, il ne reste rien d’Israël, si ce n’est ces habitants exilés. Plus de terre, plus de Loi, plus de Dieu : ce qui faisait la fierté d’Israël et sa grandeur, a été anéanti. Certains se demandent même où est Dieu ? A-t-il été vaincu comme eux ont été vaincus ? Est-il ce grand Dieu en qui leurs pères avaient foi ? Est-il ce grand Dieu qui jadis les avait libérés d’Egypte, terre d’oppression ? Et s’il l’est, comment se fait-il qu’Israël connaisse à nouveau l’oppression, et pire encore, la déportation ? On comprend alors mieux la force de la prophétie d’Ezéchiel. Il annonce un avenir possible, grâce à Dieu. Dieu va relever cet arbre renversé, il va replanter une jeune pousse et elle portera des rameaux, et produira du fruit, elle deviendra un cèdre magnifique. Ce n’est pas une parole en l’air, ce ne sont pas des mots prononcés parce qu’il ne sait pas dire autre chose ; c’est une promesse de Dieu. Je suis le Seigneur, j’ai parlé, et je le ferai. Voilà sur quoi appuyer l’espérance d’Israël. Ezéchiel a foi en Dieu, il sait qu’il n’a pas abandonné son peuple ; il sait que Dieu fera revivre ceux qui sont comme morts. 
 
C’est à la même espérance que Jésus invite ses auditeurs. Et il le fait à partir d’une image de plantation. Un grain de blé, une graine de moutarde ; autant dire trois fois rien. Et pourtant, l’homme qui sème espère en la puissance de vie contenue dans ces petites graines. Une fois qu’il a planté la graine, il ne peut plus qu’espérer que la nature fasse son travail. Il ne peut plus rien faire, si ce n’est arroser et éviter les mauvaises herbes. Il a prise sur des choses extérieures, mais sur la graine, plus aucune. Dès qu’elle est semée, elle a sa propre vie. L’homme ne peut qu’espérer la fécondité de ce qu’il a semé. Et le grain de blé pousse, simple herbe, puis épi, puis grains plein l’épi. De même pour la graine de moutarde : un petit rien deviendra une grande plante potagère : elle étend de longues branches, si bien que les oiseaux du ciel peuvent faire leur nid à son ombre. 
 
Avons cette espérance d’Ezéchiel ? Partageons-nous l’espérance du semeur en la force de vie contenue dans ces petites graines que Dieu plante en nos cœurs ? La semence que Dieu plante, c’est d’abord sa Parole de vie ; c’est aussi sa grâce, sa présence agissante en nous. Avons-nous assez confiance en Dieu pour espérer que, de sa grâce et de sa Parole, de grandes choses peuvent surgir dans nos vies ? Avec Ezéchiel, avec le semeur, croyons-nous suffisamment que Dieu n’abandonne pas ce qu’il a semé, qu’il veille sur nous, quelles que soient les épreuves de notre vie ? La foi et l’espérance vont de pair, si bien qu’il est impossible de les séparer. Une foi sans espérance n’est rien : à quoi bon croire s’il n’y a pas d’avenir ? Une espérance sans foi ne sert à rien : à quoi bon espérer si je ne crois pas que quelqu’un rendra mon espérance vraie ?
 
Avec le temps pascal, nous avons célébré le cœur de notre foi : un Dieu plus fort que la mort même et qui nous invite à partager sa vie. Durant ce temps ordinaire retrouvé, célébrons notre espérance en l’appuyant sur cette foi au Christ ressuscité. Et nous deviendrons capables de grandes choses ; et nous verrons de grandes choses advenir. Dans l’ordinaire de nos vies, laissons le Ressuscité grandir encore, laissons sa puissance de vie nous envahir, et nous porterons fruits dans l’attente du temps de la moisson. Amen.
 
(Dessin de Jean-Yves DECOTTIGNIES, in Mille dimanches et fêtes, Année B, éd. Les presses d'Ile de France)

samedi 6 juin 2015

Fête du Corps et du Sang du Christ B - 07 juin 2015

Devenons ce que nous recevons : le Corps du Christ !



Fête Dieu. Fête du Corps et du Sang du Christ. Fête du Saint Sacrement. Des appellations diverses pour nous faire approcher le même mystère : la présence de Dieu à son peuple d’une manière inouïe à travers l’Eucharistie. Avec la fête de Pâques célébrant la mort et la résurrection de Jésus, et la fête de la Trinité célébrant l’unité indéfectible de Dieu, la fête d’aujourd’hui est certainement la plus fondamentalement chrétienne. Nous célébrons aujourd’hui ce qui, depuis 20 siècles fait courir les chrétiens du monde entier. L’occasion est trop belle pour ne pas s’interroger sur le pourquoi la messe ? Pourquoi être encore fidèle à ce rassemblement ? 

La réponse nous vient de la Tradition. Nous nous rassemblons le dimanche parce que depuis les origines, les chrétiens ont eu le sentiment de répondre ainsi de manière parfaite à la demande du Christ : Faites cela en mémoire de moi ! Puisque avant de mourir, le Christ avait souhaité prendre un dernier repas avec ses disciples, et qu’au cours de ce repas, il leur a laissé un mémorial, les chrétiens ont ressenti le besoin de revivre ce dernier moment fort de la présence du Seigneur. N’a-t-il pas dit lui-même qu’il serait présent chaque fois que ces gestes seraient refaits ? Faire mémoire, c’est bien plus que simplement se souvenir de ce que Jésus nous a dit. Faire mémoire, c’est véritablement revivre, de manière mystérieuse mais réelle, cette présence de Jésus. Lorsque le prêtre refait les gestes de Jésus, lorsqu’il redit ses paroles, c’est véritablement le Christ qui se rend présent au milieu de nous. Alter Christi, ipse Christi : autre Christ, mais le seul et même Christ, présent dans son Corps et dans son Sang, à travers le pain et le vin consacré. Nous vivons là le face-à-face véritable avec notre Dieu ; nous avons là une proximité inouïe avec celui qui a tout donné par amour pour nous. Jamais Dieu ne se fait si proche de l’homme que lorsqu’il s’offre ainsi dans le Corps et le Sang de son Fils. 
 
Cette présence du Christ dans le morceau de pain partagé n’est pas sans conséquence pour moi. Lorsque je communie, c’est-à-dire lorsque je mange ce morceau de pain, que se passe-t-il ? Qu’est-ce qui se joue ? Il se passe simplement que je reçois le Christ en moi, de manière intime. La communion, reçue dans la foi au Christ ressuscité, entraîne en moi un bouleversement inouï. Recevant Dieu lui-même, je deviens un porteur de Dieu, je deviens, selon le mot de Saint Augustin, ce que je reçois, à savoir : le Corps du Christ. Cela signifie que lorsque je communie, tout mon corps est concerné, tout mon corps est comme transformé. Et mes yeux deviennent le regard du Christ, capable de poser sur le monde et sur les hommes le regard d’amour de Dieu. Et ma bouche devient la bouche  du Christ, annonçant aux hommes les merveilles de Dieu pour l’humanité. Et mes mains deviennent les mains du Christ, tendues en geste d’amitié vers tous les frères. Et mon cœur bat au rythme de l’amour de Dieu pour tous les hommes. Et mes pieds deviennent les pieds de Dieu, allant à la rencontre de tous les hommes, ne laissant personne sur le bord du chemin. Oui, l’enjeu de nos rencontres dominicales se situe bien à ce niveau : devenir de plus en plus, par l’écoute de la Parole et par la communion au Christ vivant présent dans l’Eucharistie, des hommes et des femmes porteurs de Dieu, respirant Dieu par toute leur vie, agissant comme Dieu pour le salut du monde, pour construire déjà, peu à peu, ce Royaume dont nous attendons la réalisation totale au dernier jour. 
 
Chaque fois que nous mangeons ce pain consacré, nous communions donc à la vie du Christ. Le pain et le vin offert deviennent, par l’imposition des mains du prêtre et l’appel de l’Esprit Saint, le Corps et le Sang du Christ. Et tous ceux qui y communient deviennent le corps du Christ, chacun un membre, tous ensemble le même corps. Ce devrait être pour tous un grand moment de joie, parce que Dieu est là, que nous l’accueillons, et que nous participons à sa vie. Le prêtre, lorsqu’il donne la communion ne fait que reconnaître que chacun fait partie de ce Corps unique du Christ. Alors, il est vrai que quelquefois, on vient à la messe triste, avec un nœud sur l’estomac, parce que l’on est fâché. Quelques uns peuvent même être fâchés avec le prêtre qui célèbre : ça arrive ! Mais même dans ces moments-là, même face à ces gens-là, le prêtre est heureux au fond de lui, parce Dieu vient rappeler qu’au-delà des difficultés, au-delà des disputes ou des divergences d’opinion, il y a la rencontre possible autour de lui ; il y a un pardon possible : non pas parce que les hommes le veulent, mais parce que Dieu vient le réaliser en son Fils Jésus. Je ne connais pas de joie plus grande que celle-là, je peux en témoigner. 
 
Participer à l’Eucharistie, reconnaître que le Christ vient à ma rencontre est tout, sauf un acte banal, parce qu’il bouleverse trop de chose en moi et autour de moi. Participer à l’Eucharistie reste le plus beau geste que nous puissions poser parce qu’il nous engage sur la route d’un mieux-vivre, d’un mieux être, même avec ceux que l’on ne peut voir en peinture. C’est une route exigeante, parce que c’est la route de l’amour donné sans compter, de l’amour toujours à vivre, de la fraternité toujours à construire. Seul Dieu peut nous permettre de réaliser cette route en vérité, pour peu que nous le laissions nous rencontrer véritablement. Un petit morceau de pain y suffit si nous savons y reconnaître la présence réelle et agissante de Celui qui peut tout. Oui, devenons ce que nous recevons : Le corps du Christ. AMEN.
 
(Hortus Deliciarum, La Cène)