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Ce blog voudrait vous permettre de vivre un chemin spirituel au rythme de la liturgie de l'Eglise catholique.

Les méditations s'appuient soit sur les textes bibliques quotidiens, soit sur la prière de l'Eglise.

Puisque nous sommes tous responsables de la foi des autres, n'hésitez pas à laisser vos commentaires.

Nous pourrons ainsi nous enrichir de la réflexion des autres.







vendredi 27 avril 2012

04ème dimanche de Pâques B - 29 avril 2012

En Jésus ressuscité, nous voici Bien-aimés !


Mes bien-aimés : ainsi Jean appelle-t-il ceux à qui il adresse sa lettre. Mes bien-aimés : ainsi Dieu lui-même nous appelle-t-il tous. Sans doute faut-il être Dieu pour parler encore ainsi. Qui d’entre nous utilise encore cette expression ? Mêmes les fiancés, voire les époux, ne s’appellent plus ainsi entre eux : ils préfèrent de loin des expressions plus triviales, plus colorées. Et pourtant, aujourd’hui, c’est à nous que Dieu redit : Mes bien-aimés. Entrons donc dans ce vocabulaire pour essayer de mieux en comprendre la portée.

Puisque l’expression est d’abord de saint Jean, commençons donc par lui. Dans sa lettre, il essaie de faire comprendre ce qui change dans la vie d’un homme dès lorsqu’il devient chrétien. Vous pouvez ainsi, chez vous, reprendre les passages de la première épître de Jean que nous lisons depuis trois semaines maintenant. Et vous découvrirez que ce qui change dans la vie, c’est que le croyant au Christ est appelé à aimer Dieu et ses frères, à rejeter toute forme de Mal parce qu’il est lui-même enfant de Dieu : Voyez comme il est grand l’amour dont le Père nous a comblés : il a voulu que nous soyons appelés enfants de Dieu, et nous le sommes. Ce n’est pas une vue de l’esprit ; ce n’est pas une belle phrase : c’est notre condition ; c’est la condition de toute personne qui reçoit le baptême. Et c’est en Jésus, mort et ressuscité que nous le devenons puisque notre baptême nous fait participer à sa Pâques. Puisque, selon la parole de Dieu lui-même au moment du baptême de Jésus, celui-ci est son Bien-aimé, nous sommes les bien-aimés de Dieu, nous qui devenons des autres Christ par notre plongée dans les eaux baptismales. Je reconnais, qu’à nous regarder, cela peut quelquefois sembler encore bien obscur ; nos attitudes, nos comportements sont plus souvent très terrestres que divin. Viendra le jour où cela éclatera à la face du monde : Lorsque le Fils de Dieu paraîtra, nous serons semblables à lui parce que nous le verrons tel qu’il est. Peut-être notre foi en Jésus doit-elle encore être approfondie pour que nous devenions capables de vivre comme lui, comme les bien-aimés de Dieu !

Dans son discours au Grand Conseil, après la guérison d’un infirme, n’est-ce pas ce que Pierre essaie de faire comprendre à ses auditeurs ? Quelque chose peut changer dans la vie d’un homme dès lors qu’il accueille le nom de Jésus, le seul nom qui puisse nous sauver. L’amour de Dieu pour les hommes s’est manifesté en Jésus, celui-là qui a été rejeté, crucifié et mis à mort, dans l’acte même de la résurrection. Et cette résurrection ouvre à tous, y compris à ceux qui ont condamné Jésus, le chemin du pardon et du salut accordé par Dieu aux hommes qu’il aime. Quelle plus grande preuve de l’amour de Dieu pour nous pourrions-nous exiger ? Que nous faut-il de plus pour enfin comprendre que nous sommes les bien-aimés de Dieu ? Si la résurrection de Jésus ne saurait suffire à nous en convaincre, alors la guérison de cet infirme, par le seul nom de Jésus, devrait nous y aider.

Il est heureux alors que l’Eglise nous fasse entendre le discours de Jésus au sujet du Bon Pasteur au moment du temps pascal. Car c’est bien Jésus ressuscité qui peut nous dire en vérité : Je suis le Bon Pasteur. Le vrai berger donne sa vie pour ses brebis. Malgré le mauvais procès que nous lui avons fait, malgré notre abandon, malgré notre faiblesse, malgré notre reniement, malgré notre trahison, il continue d’être pour nous celui qui rassemble autour de lui le peuple de Dieu, faisant de nous les bien-aimés de Dieu, ceux sur qui Dieu veille tout particulièrement. Comme elles sont vraies, les paroles de saint Basile de Séleucie (Vème siècle) : Regardons notre Pasteur, le Christ. Voyons son savoir-faire plein d’humanité et de tendresse, sa douceur envers ses brebis. Il se réjouit de celles qui sont présentes et va chercher aussi celles qui s’égarent… Il parcourt les ravins pour arriver jusqu’à la brebis perdue. Même s’il la trouve en piteux état, il ne se met pas en colère ; mais touché de compassion, il la prend sur ses épaules et, de sa propre fatigue, guérit la brebis fatiguée… Bien plus, « le Bon Pasteur donne sa vie pour ses brebis ». C’est ainsi qu’il se propose de gagner l’affection de ses brebis. Celui qui sait entendre sa voix aimera le Christ.

En Jésus, mort et ressuscité, nous ne sommes pas seulement les aimés de Dieu ; nous sommes ses bien-aimés parce que Dieu ne saurait mal aimer ceux que le Christ attire à lui. A quiconque veut apprendre à aimer, il n’est donné d’autre exemple que Jésus, le Bon Pasteur qui donne sa vie pour ses brebis. Si nous sommes aimés ainsi, comment pourrions-nous ne pas apprendre à bien aimer celui qui est la source de tout amour ; comment pourrions-nous ne pas apprendre à bien aimer ceux que Dieu met sur notre route ? Nous sommes les bien-aimés de Dieu : c’est là notre identité et la source de notre joie pour toute éternité. Amen.


(Dessin de Jean-François KIEFFER, in Mille images d'Evangile, éd. Les Presses d'Ile de France)

vendredi 20 avril 2012

03ème dimanche de Pâques B - 22 avril 2012

En Jésus ressuscité, nous voici témoins !








Ils sont nombreux, les discours de Pierre dans les Actes des Apôtres ; ils sont fait à des occasions et devant des personnes fort différentes ; mais tous mentionnent la même évidence : Pierre et les Apôtres sont témoins de quelque chose, de quelqu’un et ils ne peuvent le taire. Ils doivent témoigner. Ce dont ils sont témoins, c’est la mort / résurrection du Christ. C’est cet événement, fondamentalement nouveau, qui a bouleversé leur vie et qui, maintenant, les pousse à aller à la rencontre de leurs contemporains pour dire cette nouveauté. Après eux, chaque chrétien est appelé à être témoin de cet événement fondateur de notre foi. Mais quelles sont les caractéristiques du témoin authentique ? Pour ma part, j’en relève trois dans les lectures de ce troisième dimanche de Pâques.

Le témoin, selon la parole de Pierre lui-même, est d’abord quelqu’un qui se convertit, quelqu’un qui vient – ou revient – à Dieu. Il a compris, à travers l’événement de la Pâque, de quel amour Dieu aime l’homme, et il choisit de répondre à cet amour. Le témoin est donc quelqu’un qui aime Dieu, quelqu’un qui ne conçoit pas sa vie sans Dieu. Nous dépassons largement le cadre du simple fait d’être chrétien. Il ne suffit pas d’être baptisé pour être un témoin. Chaque baptisé est appelé à témoigner de ce que Dieu réalise pour lui, mais tous n’en ont peut-être pas la capacité. Si le baptême n’est pas vraiment reçu dans la foi, si le côté religieux d’une vie d’homme tient d’abord du folklore familial, il y a peu de chance de pouvoir témoigner de quelque chose, et encore moins de quelqu’un ! La conversion est nécessaire car elle seule me remet en phase avec Dieu ; elle seule me replace dans l’Alliance primordiale que Dieu a conclue avec moi au moment de mon baptême. La conversion peut être un moment précis, un moment déclencheur ; mais elle est surtout l’œuvre de toute une vie si l’on considère que l’on évolue toujours dans notre relation à Dieu, et qu’il faut, chaque jour, refaire le choix de vivre avec Dieu, pour Dieu.

Cette conversion permanente – ce choix permanent de Dieu – se prolonge dans cette deuxième caractéristique du témoin que souligne l’Apôtre Jean dans la seconde lecture entendue. Le témoin authentique, s’il choisit Dieu, renonce au péché. C’est une conséquence logique, mais il faut ici la rappeler. Choisir Dieu, c’est faire de sa vie une lutte contre tout ce qui empêche l’homme de vivre libre et heureux. C’est lutter dans sa propre vie d’abord, puis autour de soi, contre le péché ; contre le refus de Dieu ; contre la possibilité de faire le mal ; contre la possibilité de rendre le mal pour le mal ; contre la possibilité de contrôler la vie d’autrui. Lutter contre le péché, c’est rendre à l’homme sa liberté primordiale, celle que Dieu lui a donné au moment de la création, et que le Christ lui a rendu dans l’événement de sa Pâque. Le Christ est mort pour nous libérer du péché et de la mort. Celui qui est témoin de cela ne peut plus vivre sous le règne de l’Adversaire, sous le règne du péché ou de la mort. Renoncer au Mal en toute circonstance : voilà le grand combat que nous avons à mener. Nous avons déjà notre part à la victoire du Christ si nous lui accordons foi et confiance : mais il faut que cette victoire devienne définitive en nous ! Elle le sera lorsque nous aurons dit OUI à Dieu en toutes choses.

La troisième caractéristique du témoin authentique nous est donnée dans l’Evangile. Le témoin véritable est un homme ou une femme eucharistique, c’est-à-dire qui vit aujourd’hui encore de cette présence unique du Christ dans le sacrement de l’Eucharistie. Cette présence se décline sous deux formes : l’écoute de la Parole et le partage du Pain, devenu Corps et Sang du Christ. Le passage d’Evangile entendu est sans appel à ce sujet. Lorsque les disciples d’Emmaüs retrouvent les autres, ils leur disent comment ils ont reconnu le Seigneur lorsqu’il leur a rompu le pain. Ce premier mode de présence nous renvoie à l’ordre du Christ au soir du Jeudi Saint : Faites cela en mémoire de moi ! Chaque fois que vous le ferez, je serai au milieu de vous. Le témoin authentique ne peut se passer de cette nourriture céleste sans cesse offerte par Dieu. Elle fait grandir l’Eglise ! Elle nourrit la foi, maintient l’espérance, rend active la charité.


Mais le partage du pain ne peut se faire qu’après avoir entendu la Parole de Dieu. L’Evangile d’Emmaüs nous le démontre. Jésus explique en quoi les événements qui ont eu lieu étaient conformes aux Ecritures, puis il partage le pain. Quand le Christ se présente à ses disciples, après sa résurrection, c’est cela aussi qu’il leur redit : Rappelez-vous les paroles que je vous ai dites quand j’étais encore avec vous : il fallait que s’accomplisse tout ce qui a été écrit de moi dans la Loi, les Prophètes et les Psaumes. Alors il leur ouvrit l’esprit à l’intelligence des Ecritures. Nous sommes ainsi renvoyés à ce deuxième mode de présence du Christ, qui nous oblige à la scrutation des Ecritures, à un perpétuel approfondissement de notre foi par la méditation et l’écoute de cette Parole. Le concile Vatican II dit, à juste titre, que la célébration de l’Eucharistie se fait autour de deux Tables : celle de la Parole entendue et expliquée, celle du Pain partagé, Pain devenu Corps et Sang du Christ. Le témoin authentique ne peut se passer d’entendre cette Parole ; il ne peut se passer d’en entendre l’explication autorisée donnée par les ministres que Dieu s’est choisi pour faire retentir cette Parole. Elle est le lieu de vérification de ma foi ; elle est le lieu où ma foi se trouve consolidée parce que mon intelligence comprend mieux l’amour de Dieu pour moi et pour tout homme.

Entendant la Parole, partageant le Pain de Vie, le témoin devient authentique parce qu’il connaît toujours mieux le Christ, celui dont il doit témoigner. Comment, en effet, annoncer quelqu’un que je ne connais pas ? Comment parler en profondeur et en vérité de quelqu’un dont je ne sais que des bribes ? Comment être vraiment le frère du Christ, le Fils du Dieu vivant et vrai, si jamais je ne mets les pieds à la maison, si jamais je ne participe au repas de l’amour de cette grande famille ? Qui sera encore témoin lorsque les églises seront vides ? Quels témoins le Ressuscité enverra-t-il dans le monde ?

La parole de Jésus ressuscité à ses disciples (c’est vous qui en êtes les témoins) vaut encore pour nous aujourd’hui. Nous ne pouvons pas nous dire chrétiens de manière authentique si, par notre vie et par notre parole, nous ne rendons pas compte de l’espérance qui est la nôtre. En ces temps que de nombreux politiques qualifient de temps de crise, le monde a besoin de témoins d’une autre manière de vivre ensemble, de témoins qui lui rendent courage et espérance. Qui peut le faire mieux, si ce n’est ceux et celles qui ont conscience d’appartenir à un monde nouveau où tous les hommes sont frères en Christ ? Notre monde a soif de liberté ? Le Christ ressuscité nous l’offre par sa victoire sur le Mal et la Mort. Notre monde a besoin d’égalité ? Le Christ ressuscité fait de nous les membres de son Corps. Notre monde veut plus de fraternité ? Le Christ ressuscité nous invite à répandre les valeurs de l’Evangile. Osons être ses témoins pour que notre monde change, en mieux. Amen.




(Dessin de Coolus, Blog du lapin bleu)

vendredi 13 avril 2012

02ème dimanche de Pâques B - 15 avril 2012

En Jésus ressuscité, nous sommes vraiment heureux !






A quoi aura servi la résurrection du Christ ? Vous êtes-vous déjà interrogé à ce sujet ? Car enfin, l’événement fondamental de notre foi, la mort et la résurrection du Christ, doit bien servir à quelque chose, non ?!

Certes, nous avons tous appris au catéchisme que le Christ est mort pour nos péchés. Mais à une époque où le sens du péché se perd, à une époque où même les croyants ne sont pas nombreux à courir le sacrement du pardon, ça veut dire quoi : il est mort pour nos péchés ? Quand l’homme n’a plus l’impression de faire des choses vraiment mal qui le coupent de l’amitié avec Dieu, à quoi cela sert-il que Dieu donne son Fils sur la croix pour libérer l’homme de ses péchés ? Peut-il libérer quelqu’un qui n’a pas l’impression d’être prisonnier ? Alors à quoi peut servir la résurrection du Christ ?

Nous avons encore appris qu’en donnant sa vie, Jésus nous offre la vie de Dieu. Mais à une époque où Dieu lui-même est remis en cause, où son existence semble niée quotidiennement, ça veut dire quoi : il nous offre la vie de Dieu ? Quand l’homme ne veut plus d’alliance avec Dieu, quand l’homme ne semble plus se préoccuper de sa relation d’amour avec Dieu, à quoi cela sert-il que Dieu nous offre sa vie ? Quand des enfants sont accueillis dans l’Eglise par le sacrement du baptême et deviennent ainsi fils de Dieu, pour aussitôt ne plus être conduit dans une communauté, que signifie : entrer dans la vie de Dieu ? Dieu peut-il donner sa vie à quelqu’un qui n’en veut pas ? Alors à quoi peut servir la résurrection du Christ ?

Nous avons encore appris que le Christ, par sa mort et sa résurrection, nous sauve de la mort. Mais à une époque où, en France, une majorité de personne ne croit plus en la résurrection, et pour certains ne croient même pas qu’il y a quelque chose après la mort, ça veut dire quoi : il nous sauve de la mort ? Quand l’homme se ferme son propre avenir, quand il refuse même la perspective d’un salut après sa mort, à quoi cela sert-il que Dieu meurt pour qu’un avenir s’ouvre à l’homme ? Dieu peut-il donner la vie à quelqu’un qui ne veut pas vivre d’une vie marquée du sceau de l’éternité ? Alors à quoi peut servir la résurrection du Christ ?

La première lecture que nous avons entendue nous montre les effets de la résurrection sur les premiers croyants. Ils sont un seul cœur, une seule âme. Ils mettaient tout en commun ; ils témoignaient de la résurrection du Christ. En lisant les Actes des Apôtres, nous sentons bien qu’ils sont profondément heureux de ce qui leur arrive ; ils vivent de la résurrection du Christ. Demandez-leur à quoi sert la résurrection ? Elle est toute leur vie, le moteur de leurs actions, ce qui donne sens à leur manière de vivre. C’est parce que Jésus ressuscité les sauve du péché qu’ils sont un cœur et une âme ; c’est parce que Jésus ressuscité les sauve de la mort et inaugure ainsi un monde nouveau qu’ils mettent tout en commun ; c’est parce que Jésus ressuscité les a libérés du mal qu’ils ne se disent propriétaire de rien et partagent tout, de telle sorte que personne ne vivait dans la misère ; c’est parce que Jésus ressuscité leur offre la vie même de Dieu qu’ils sont assidus à la prière et à la fraction du pain. Cette vie, qui nous semble idyllique, est le fruit de la résurrection du Christ prise au sérieux dans le quotidien d’une existence humaine.

Alors à quoi sert la résurrection du Christ ? Aujourd’hui comme hier, le Christ ressuscité est la vie et le bonheur de ceux qui croient en lui : à nous de le montrer si telle est notre foi. Aujourd’hui comme hier nous pouvons trouver, dans le don du Christ sur la croix, la force nécessaire pour vivre l’Evangile et transformer notre vie et notre monde pour qu’ils soient à l’image et à la ressemblance de Dieu : à nous d’agir si telle est notre foi. Aujourd’hui comme hier, nous pouvons témoigner fièrement de ce que le Christ ressuscité continue de faire dans le cœur des croyants : à nous de parler si nous vivons du Christ. Oui, la résurrection du Christ nous sauve de la mort et du péché ; oui, le Christ ressuscité nous offre la vie de Dieu et nous ouvre un avenir. Oui, avec le Christ ressuscité, nous pouvons être vraiment heureux, vraiment libres, vraiment vivants aujourd’hui et toujours. Nous n’avons pas vu le Christ ressuscitant, mais nous pouvons, avec Thomas, le reconnaître comme notre Seigneur et notre Dieu. Nous ne nous demanderons plus à quoi peut bien servir la résurrection puisque nous en vivrons. N’est-ce pas la meilleure réponse à la question posée ? Croire ce que nous entendons, proclamer ce que nous croyons et vivre ce que nous proclamons : et si c'était là, la recette du vrai bonheur vécu en Jésus ressuscité ? Pour être heureux, rien ne vaut une vie unifiée par la foi. Puisse-t-il en être ainsi pour le plus grand nombre. Amen.






(Image de Jean-François KIEFFER, in Mille images d'Evangile, éd. Les Presses d'Ile de France)

dimanche 8 avril 2012

Saint Jour de Pâques - 08 avril 2012

En Jésus ressuscité, nous voici vivants !



Quelle nuit que celle que nous venons de vivre ! Dans le monde entier, les chrétiens se sont réunis pour relire la longue histoire d’amour de Dieu avec les hommes et entendre la nouvelle inouïe : le tombeau de Jésus est vide ; il est vivant, il est ressuscité ! Qui aurait pu penser qu’une telle chose soit possible ? Jusqu’à présent, la mort était le dernier mot de la vie d’un homme, et voilà qu’avec les événements de cette nuit, tout ce que nous pensions savoir de la vie et de la mort est remis en question. Jésus est désormais le premier-né d’entre les morts. La mort que nous croyons toute puissante a été vaincue ; elle n’a pu retenir sans ses liens celui qui vient d’auprès de Dieu, celui qui est la Vie. Une nouvelle page a été écrite cette nuit ; une nouvelle alliance a été scellée dans le sang de Jésus. Dieu a pris le parti de la vie ; Dieu a pris le parti de la justice ; Dieu a pris le parti des petits.

Ne croyons pas que cet événement ne concerne que Jésus. La résurrection de Jésus change tout. Elle nous ouvre une nouvelle espérance, à nous qui croyions être limités par la mort. Si Jésus est le Premier-né, cela signifie qu’en lui, nous sommes appelés à vivre pour toujours ; qu’en lui, nous entrons dans la vie de Dieu. En lui, nous aussi désormais, nous pouvons vaincre la mort. Cette victoire, il ne l’a pas obtenu pour lui seul. Ce combat, il ne l’a pas mené pour lui seul. C’est pour nous qu’il est allé à la mort ; c’est pour nous qu’il a livré bataille ; c’est pour nous tous qu’il a vaincu la mort. C’est pour nous qu’il a fait triompher la vie. Tout homme qui s’attache à Jésus et le reconnaît Christ et Seigneur participe à sa victoire et partage déjà cette vie nouvelle que le Christ nous a obtenue.

Le sacrement du baptême que nous avons majoritairement reçu lorsque nous étions encore bébé, est le sacrement qui nous permet de traverser la mort avec Jésus en plongeant dans les eaux baptismales ; il est le sacrement qui nous configure au Christ, nous identifie à lui. Par le baptême, nous vivons en Christ et le Christ vit en nous. Puisqu’il est plus fort que la mort, nous le sommes aussi. Puisqu’il vit désormais en Dieu, nous aussi, nous vivons en Dieu. Puisqu’il est vivant pour toujours, nous le sommes, en lui, aussi. Oui, en Jésus ressuscité, nous sommes vraiment et pleinement vivants. Nous n’avons plus à craindre la mort ; elle ne peut plus nous retenir dans ses liens. Elle n’est désormais plus qu’une étape, un passage obligé pour profiter pleinement de cette victoire qui est déjà nôtre, à cause de Jésus. Comme le dit l’Apôtre, nous devons désormais tendre vers les réalités d’en-haut ; ce que nous pourrions traduire par vivre en ressuscités. Vivre en rejetant toute forme de Mal comme nous l’avons promis au cœur de cette nuit ; vivre de l’esprit même du Christ. Tout ce qu’il nous a enseigné est à mettre en pratique : ce n’était pas que des belles paroles ; c’était un chemin de vie, c’était Le chemin vers la vie en plénitude.

Pour ceux qui pensaient que la croix écrivait le mot fin à l’histoire de Jésus, voici que la nouvelle de sa résurrection leur fait prendre conscience que tout, au contraire, commence. Il nous faut apprendre à vivre autrement ; il nous faut apprendre de nouvelles relations entre les hommes. Il nous faut relire l’enseignement de Jésus, le méditer et l’appliquer ! Puisque Jésus est vivant pour toujours, il nous apprendra, il nous enseignera encore. Et nous pourrons marcher à sa suite, sans crainte. Depuis cette nuit, l’histoire de Jésus se poursuit en nous ; depuis cette nuit, Jésus continue d’animer l’Histoire à travers nous. Nous ne pouvons pas perdre ; nous ne pouvons pas nous perdre si nous regardons vers lui et marchons à sa suite. Le chemin vers la Vie, il l’a tracé pour nous, il l’a ouvert pour nous.

Il n’est pas de nouvelle meilleure que celle-là ; il n’est pas de jour plus grand que celui-là ; il n’est pas de bonheur plus parfait que celui des croyants en Christ, mort et ressuscité. Ne boudons pas notre plaisir. Christ est ressuscité et nous vivons désormais en lui. Alléluia !



(Image de Jean-François KIEFFER, in Mille images d'Evangile, éd. Les Presses d'Ile de France)

samedi 7 avril 2012

Vigiles de Pâques - 07 avril 2012

Jésus, Premier-né d'entre les morts.



Le sabbat est terminé. Le jour se lève sur Jérusalem, mais pas sur le cœur des disciples de Jésus. Quelques femmes vont, de grand matin, au tombeau pour embaumer le corps de Jésus. Elles ont tout prévu, sauf d’inviter un homme fort pour les aider à rouler la pierre qui ferme l’entrée du tombeau. Elles ont tout prévu, sauf que le tombeau puisse être vide ! Imaginez leur surprise et vous comprendrez aussi la peur qui les envahit lorsqu’elle voit quelqu’un qui n’est pas Jésus, quelqu’un qui n’a rien d’un cadavre, même s’il est vêtu de blanc ! Mais que s’est-il passé ?

Ce qui s’est passé, c’est que Dieu est intervenu dans l’histoire des hommes, une fois de plus, comme il l’a si souvent fait dans le passé. La longue histoire d’amour entre Dieu et son peuple que nous avons relue ce soir en témoigne. Dieu ne peut jamais se résoudre à laisser l’homme aller à sa perte. Depuis l’aube de la création jusqu’au retour d’exil, dans les moments heureux comme dans les moments difficiles, Dieu accompagne l’histoire des hommes, les invitant sans cesse à voir plus grand, à se dépasser, à espérer et à croire qu’en Dieu tout est possible, qu’en Dieu le pardon a toujours le dernier mot, qu’en Dieu l’amour est plus fort, qu’en Dieu, la vie triomphe toujours, qu’en Dieu se trouve le bonheur véritable de l’homme.

En cette nuit, c’est tout cela qui s’est passé. Et bien plus encore. Si Dieu ne peut jamais se résoudre à abandonner l’homme, comment imaginer qu’il aurait pu abandonner son Fils unique ? Ce soir, Dieu a pris le parti de l’innocent injustement condamné. Ce soir, Dieu se rappelle au bon souvenir d’une humanité qui a cru parler en son nom, qui a cru défendre sa sainteté, mais qui de fait n’a fait que se tromper. Il a pris le parti de tous les opprimés de la terre, leur ouvrant une nouvelle espérance, leur offrant de vivre d’une vie nouvelle, la vie même de Dieu. Tous ceux qui, à travers le temps et l’Histoire, se reconnaîtront frères et sœurs de Jésus, et le confesseront comme Christ, feront partie du peuple des sauvés, du peuple des vivants. Jésus, celui que nous confessons Christ et Seigneur, est le Premier-né d’entre les morts. Dieu lui-même lui a rendu la vie après qu’il ait affronté et vaincu la mort, car rien n’est impossible à Dieu. La croix n’était pas le dernier mot de Dieu au sujet de Jésus. La croix ne sera jamais le dernier mot d’une histoire humaine quelle que soit cette croix. Désormais, personne ne pourra plus arrêter la vie. Désormais, personne ne pourra plus arrêter l’espérance d’une vie meilleure pour tous. Désormais, personne ne pourra plus dire que le pardon est une illusion, puisque Dieu a pardonné l’ignominie, écoutant ainsi la supplique de son Fils en croix : Père, pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu’ils font. En rendant la vie à son Fils unique, Dieu pardonne bien à tous les hommes le Mal qu’ils ont commis en chargeant l’innocent pour le faire mourir. En rendant la vie à son Fils unique, Dieu donne un nouvel horizon à toute vie, à toute l’humanité.

Dans un instant, nous allons bénir l’eau ; elle deviendra semblable à celle dans laquelle nous avons été plongés au jour de notre baptême, et nous proclamerons notre foi en Dieu, Père, Fils et Saint Esprit. Nous redirons notre volonté de suivre Jésus, le Ressuscité et notre volonté de résister au Mal et à tout ce qui y conduit. Ce faisant, nous nous souviendrons qu’au jour de notre baptême, nous avons été plongés dans la mort de Jésus pour revivre avec lui. Cette vie nouvelle, qui est celle de Jésus ressuscité, fait de nous d’authentiques disciples, appelés à vivre selon l’esprit du Christ et à rendre réelle sa présence au milieu de son peuple. Nous sommes désormais qualifiés pour lutter contre tout ce qui détruit l’homme, tout ce qui opprime l’homme, tout ce qui s’oppose à la vérité, à la justice, à la charité, à la sainteté. Nous sommes désormais qualifiés pour une vie menée sous le signe de l’amour et du pardon. Oui, la lutte contre le mal et le péché commence d’abord en nous. Comme le dit l’Apôtre, baptisés dans le Christ, nous passons la mort avec lui pour vivre par lui, avec lui et en lui. Dieu a fait le choix de l’homme en ressuscitant Jésus ; de même, nous faisons le choix de Dieu en passant par les eaux du baptême. Il est juste qu’en cette nuit où nous célébrons la mort et la résurrection de Jésus, nous renouvelions nos promesses baptismales et redisions notre désir de vivre selon la volonté de Dieu, quelle qu’elle puisse être. Il est juste que nous fassions à nouveau le choix de vivre comme Jésus, entièrement donnés à Dieu et à nos frères et sœurs en humanité.

Vous comprenez alors que ce qui s’est passé en cette nuit, nous ne pouvons le taire. Comme les femmes près du tombeau, nous sommes envoyés dire aux hommes l’inouïe de la présence de Dieu au cœur même de notre vie, l’inouïe d’une vie qui n’a plus de fin dès lors qu’elle est ancrée solidement en Jésus. Au contraire des femmes qui ne dirent rien à personne car elles avaient peur, nous sommes invités à proclamer à temps et à contre temps cette grande nouvelle : Dieu sauve son peuple en lui donnant la vie ; Dieu sauve chaque homme en Jésus, mort et ressuscité. Premier-né d’entre les morts, Jésus ouvre à tous les portes de la vraie Vie. Sœurs et frères, en Jésus, vivons, pleinement, en ressuscités. Accueillons la vie qu’il nous offre et rendons-lui gloire, alléluia !


(Photo : Matthias Grünenwald, La Résurrection, Retable d'Issenheim, Musée Unterlinden, Colmar - 68)

vendredi 6 avril 2012

Vendredi Saint : 06 avril 2012

Jésus, l'Agneau de Dieu.







Le repas est fini, les Apôtres sont fatigués, le traître a vendu son ami, Pierre a renié, tous (ou presque) se sont enfuis. Les adversaires complotent, manipulent et obtiennent ce qu’ils voulaient : la mort de l’empêcheur de croire en rond. Pilate n’est guère mieux malgré sa rencontre avec Jésus et sa conviction que celui-là est innocent. Il est d’abord politicien, et un politicien se doit de plaire au plus grand nombre. Ils veulent la peau de cet homme ; qu’à cela ne tienne, ils l’auront ! Si cela peut leur faire plaisir et lui assurer un peu de tranquillité…



Et Jésus dans tout cela ? Jésus se laisse mener, promener d’un endroit à un autre ; il ne dit presque rien et, devant Pilate, décide même de se taire. Il semble déjà ailleurs. Puisqu’il devient évident qu’il n’échappera ni à ses adversaires, ni à la mort, il fait silence ; il ne répond plus rien. Comme l’écrivait le prophète de la Première Alliance : Maltraité, il s'humilie, il n'ouvre pas la bouche : comme un agneau conduit à l'abattoir, comme une brebis muette devant les tondeurs, il n'ouvre pas la bouche. Jésus est l’Agneau que Dieu recevra en sacrifice d’expiation. Il faut bien que quelqu’un paie tout ce désordre.



Mais que va-t-il expier ? Il n’a rien de fait de mal. Pilate lui-même le reconnaît : Je ne trouve en lui aucun motif de condamnation ! Il va expier pour nous, pour notre péché, nos lâchetés, nos trahisons. Il va prendre sur lui tout ce que l’humanité a de plus sombre. Il va emporter dans la mort tout ce qui défigure le visage de l’homme, tout ce qui étouffe en nous l’image et la ressemblance de Dieu. C’est la bonne vieille recette du bouc émissaire. Comme le disait Caïphe : il vaut mieux qu’un seul meurt. Si la Mort savait qu’elle aussi va mourir en croix, avec lui, elle y réfléchirait sans doute à deux fois. Mais voilà, la mort est aveugle ! Pas grave, c’est bon pour l’humanité, même si elle ne le sait pas au moment où Jésus meurt.

Jésus ne se défend pas ; non pas qu’il n’ait pas d’argument à opposer, mais parce qu’il est entré dans un projet qui le dépasse. Son but n’est pas de rester en vie, mais que nous soyons vivants. Son but n’est pas de se défendre, mais de nous défendre. Son but n’est pas de se justifier, mais de nous justifier, de nous rendre justes aux yeux de Dieu. Son but n’est pas de faire ce qu’il veut, mais de faire ce que Dieu veut. Et ce que Dieu veut, c’est notre salut. Comme jadis, en Egypte, on avait immolé un agneau et répandu son sang sur le linteau des portes pour que l’ange du Seigneur reconnaisse les lieux où habitait son peuple, et les préserve de la dernière plaie (la mort des premiers-nés), de même Jésus est-il aujourd’hui l’Agneau dont le sang est répandu pour que notre vie soit préservée et même augmentée. En effet, grâce au sacrifice de Jésus, nous pouvons prétendre à la vie éternelle.



La mort de Jésus prend dès lors une double signification. Elle signifie d’abord qu’il y a quelque chose de cassé en l’homme pour qu’il accepte qu’un innocent paie pour lui. Même si la mort de Jésus est rédemptrice, il y a quand même quelque chose de révoltant dans cet acte. Ne croyons surtout pas que, pour Jésus, c’était une partie de plaisir. Il n’y va pas la fleur au fusil ; il lutte au Mont des oliviers pour rester fidèle à Dieu, fidèle à sa mission. En ce sens, lorsque notre vie s’éloigne de ce que Dieu attend de nous, nous sommes autant coupables que ceux qui ont manigancé pour que Jésus meure. Mais la mort de Jésus signifie aussi que Dieu fait du neuf. Ce qui se passe est si terrible que nécessairement, il y aura un après la mort de Jésus différent de l’avant la mort de Jésus. Rien ne sera plus pareil, justement parce qu’un innocent a dû payer la dette. L’Agneau sans tache, l’Agneau que Dieu avait envoyé dans le monde inaugure, en sa mort, un nouveau rapport entre l’humanité et Dieu. Il n’est pas possible qu’il en soit autrement ; comment ceux qui l’ont condamné ont-ils pu croire, ne serait-ce qu’un instant, que leur félonie n’aurait aucune conséquence ? Comment ont-ils pu croire que Dieu ne réagirait pas ? Comment pouvons-nous aujourd’hui encore croire que Dieu ne réagira pas devant le Mal commis envers les petits de ce monde ? Comment pouvons aujourd’hui encore croire que Dieu reste sourd aux appels de ceux qui crient vers lui du plus profond de leurs angoisses et de leur détresse ?



Jésus, l’Agneau de Dieu, ne se défend pas, parce qu’un Autre va prendre sa défense le moment venu. Jésus, l’Agneau de Dieu, ne se défend pas parce qu’il a à cœur de nous sauver, puisque nous ne pouvons nous sauver nous-mêmes. Jésus, l’Agneau de Dieu, se laisse tondre et sacrifier, parce que c’est pour cette heure qu’il est venu. Ecoutons encore le prophète : s'il fait de sa vie un sacrifice d'expiation, il verra sa descendance, il prolongera ses jours : par lui s'accomplira la volonté du Seigneur. À cause de ses souffrances, il verra la lumière, il sera comblé. Parce qu'il a connu la souffrance, le juste, mon serviteur, justifiera les multitudes, il se chargera de leurs péchés. C'est pourquoi je lui donnerai la multitude en partage, les puissants seront la part qu'il recevra, car il s'est dépouillé lui-même jusqu'à la mort, il a été compté avec les pécheurs, alors qu'il portait le péché des multitudes et qu'il intercédait pour les pécheurs.



En cette heure, laissons le silence régner et unissons notre cœur au cœur du Christ qui répand l’eau et le sang, signes du baptême et de l’eucharistie, sacrements offerts pour notre salut. C’est pour cette heure qu’il est venu, c’est pour cette œuvre qu’il est devenu l’Agneau de l’Alliance nouvelle. Amen.









(Photo : Matthias Grünenwald, Détail du Retable d'Issenheim, Musée Unterlinden, Colmar - 68)












mercredi 4 avril 2012

Jeudi Saint - 05 avril 2012

Jésus, le Serviteur.









Elles sont loin les acclamations de la foule lorsque Jésus entrait à Jérusalem, tel le Messie. Elle est bien loin, la capacité à reconnaître en Jésus, le Messie de Dieu, alors que nous le voyons quitter son vêtement, se ceindre d’un linge et laver les pieds de ses disciples, tel un esclave. Et pourtant, c’est bien le Messie que nous acclamions ce dimanche qui nous invite ce soir à sa table et qui se présente à nous avec son baquet, sa cruche et sa serviette pour nous laver les pieds. Ce soir, Jésus se fait serviteur.

Ne condamnons pas trop vite Pierre qui, une fois de plus, n’a rien compris et qui fait la grosse voix pour dissuader Jésus de lui laver les pieds. Nous en ferions sans doute autant. Deux éléments pour preuve : le premier, la difficulté que nous avons dans de nombreuses paroisses pour mettre ce signe en œuvre dans notre liturgie ; le second, les réflexions, durant cette campagne présidentielle, au sujet d’un président qui a revendiqué le droit d’être comme les autres hommes, comme avant qu’il ne soit président – il oublie qui il est, il ne sait pas habiter la fonction. Nous nous faisons une idée précise de qui doit faire quoi, et qi quelqu’un sort de son rôle, nous le lui rappelons avec force, parfois jusqu’à l’excès. Pierre est comme nous : il a une idée de ce que doit être et de ce que doit faire le Messie, son Maître. A peu près tout, sauf ça, sauf laver les pieds de ses disciples. Parce qu’en faisant ainsi, il n’assume plus son rôle de Maître, il prend la place de l’esclave ! Inadmissible, tout simplement !

Ce geste surprenant est l’occasion, pour Jésus, de donner encore un enseignement à ses disciples : Vous m’appelez « Maître » et « Seigneur », et vous avez raison, car vraiment je le suis. Si donc moi, le Seigneur et le Maître, je vous ai lavé les pieds, vous aussi vous devez vous lavez les pieds les uns les autres. C’est un exemple que je vous ai donné afin que vous fassiez, vous aussi, comme j’ai fait pour vous. Et voilà le service élevé au rang de ‘sacrement’, de signe de la présence de Jésus en nous. Les actes de charité ne sont plus facultatifs ; ils font partie de l’être chrétien ! Si Jésus l’a fait pour nous, comment ne pas le faire pour les autres ! Si Jésus s’est fait serviteur pour ses disciples, et à travers eux, pour nous tous, comment ne pas apprendre de lui à nous mettre au service les uns des autres ? Ce soir, le Christ prend la dernière place, celle que personne ne lui prendra : ce faisant, il ouvre un chemin nouveau. Pour être quelqu’un dans le monde de Dieu, il ne faut pas briller par sa gloriole, ni par ses beaux vêtements, ni par sa richesse matérielle. Pour être quelqu’un dans le monde Dieu, il faut briller par son esprit de service, il faut briller par son vêtement de travail au service des autres, il faut briller par la richesse de celles et de ceux qui ont eu besoin de nous. Ce que vous avez fait à l’un de ses petits qui sont frères, c’est à moi que vous l’avez fait.

Le service de Jésus ne se limite pas au lavement des pieds. Il pose encore un autre geste en ce soir : il s’offre sous le pain et le vin, qui deviennent le sacrement de sa présence perpétuelle au milieu de son peuple. En se faisant notre nourriture pour la vie éternelle, il nous sert encore plus grandement que par le lavement des pieds. En nous lavant les pieds, il se faisait esclave, volontairement ; mais l’homme peut apprendre à s’en passer ; ne l’a-t-il pas déjà appris et ne s’en accommode-t-il pas finalement, avec bonheur ? Mais, dans le même temps, il a appris à se passer de Dieu. Et depuis, il oublie de se mettre au service des autres. Pas trop grave, diront certains ! Progrès extraordinaire, diront d’autres. En se faisant nourriture, par contre, Jésus se fait notre indispensable ! Qui pourrait se passer de manger ? Personne, à moins de vouloir mourir ! Ce soir, Jésus non seulement se fait serviteur et nous dresse la table, mais en plus il se fait nourriture, il s’offre lui-même à nous pour que sa vie puisse grandir en nous. L’Eucharistie est ainsi certainement le sacrement de la charité de Dieu envers nous. Un repas, deux signes, une même réalité : Dieu se donne à son peuple pour qu’il puisse vivre. Dieu fait tout pour nous faciliter la vie éternelle : il nous sert et s’offre à nous en nourriture. N’avons-nous pas la belle vie finalement ? Tout nous est donné, gratuitement. Un vrai service digne d’un paradis : Dieu nous sert, Dieu nous nourrit, Dieu nous fait vivre.

Alors, que demander de plus ? Pour reprendre une citation de l’Ecriture : Nous sommes des dieux ! Soit, mais souviens-toi : Dieu sert, Dieu nourrit, Dieu fait vivre ! Qu’attends-tu pour exercer à ton tour ta charité envers les autres, toi qui es désormais, en Jésus, comme Dieu ? Il s’est fait serviteur, tu seras serviteur, toi le frère ou la sœur de Jésus ! Ce sera ton titre de gloire ! Pour toute éternité. Amen.








(Image de Jean-François KIEFFER, in Couleurs d'Evangile, éd. Siloé)