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Ce blog voudrait vous permettre de vivre un chemin spirituel au rythme de la liturgie de l'Eglise catholique.

Les méditations s'appuient soit sur les textes bibliques quotidiens, soit sur la prière de l'Eglise.

Puisque nous sommes tous responsables de la foi des autres, n'hésitez pas à laisser vos commentaires.

Nous pourrons ainsi nous enrichir de la réflexion des autres.







vendredi 31 mai 2013

Fête du Corps et du Sang du Christ C - 02 juin 2013

Quand Dieu se donne...

Mais qui va bien pouvoir manger tout ça ? Imaginez-vous : douze paniers pleins. Et dire qu’au départ, il n’y avait que cinq pains et deux poissons ! Certes, nous ne connaissons ni la taille des paniers, ni leur contenance réelle ; mais quand même, ça en fait des restes. Que voulez-vous : quand Dieu se donne, il donne à profusion. C’est peut-être là, le sens de cette fête : avec Dieu, nous n’en avons jamais fini. Avec Dieu, nous ne manquons de rien. Il pourvoit en temps voulu. 
 
Cette fête du Corps et du Sang du Christ vient à un moment précis de l’année liturgique : nous venons de vivre le temps pascal avec ferveur, de Pâques jusqu’à Pentecôte. Nous avons célébré le Dieu Trinité, qui est relation d’amour partagé. Dans nos paroisses, l’année pastorale touche à sa fin. Les premières communion sont passées ou sont justement célébrées encore en ce jour. Cette fête eucharistique vient alors nous rappeler que le don que Jésus fait de lui-même, don qu’il renouvelle pour nous en chaque eucharistie, ce don-là n’est pas un coup pour rien. Ce don est permanent. Il manifeste la présence réelle de Dieu et de son Christ au milieu de nous. A nous qui croyons en lui, il dit sa présence permanente et l’urgence pour nous de le reconnaître, de l’accueillir et de l’adorer. A ceux qui ne croient plus, ne croient pas ou croient autrement, nos processions peuvent ouvrir leur cœur à ce Dieu qui vient visiter chacun de nous et qui attend de nous une porte ouverte, une main tendue pour le recevoir et le partager. Il ne s’agit pas de nous imposer dans le paysage socio-politique, mais de redire une présence aimante, respectueuse, attentive. L’homme a si vite fait d’oublier Dieu, d’oublier qu’il est à son image et à sa ressemblance. En portant le Christ présent dans l’Eucharistie dans nos cités, nous permettons une rencontre, nous éveillons peut-être un souvenir, quelquefois un espoir. L’homme n’est pas seul, il est accompagné par la source de la vie et de l’amour. 
 
A ceux qui font leur première communion aujourd’hui, les douze paniers pleins à la fin du repas viennent redire la possibilité toujours offerte d’y revenir : la première communion ne peut jamais être la dernière. Lorsqu’on a goûté au Christ, goûté à sa Parole, goûté à sa vie donnée en partage, comment ne pas y revenir ? Comment ne pas vouloir y goûter encore ? Une première communion qui serait une dernière communion n’aurait aucun sens et ne prendrait au sérieux ni l’amour de Dieu pour nous, ni notre devoir de reconnaissance envers celui qui est allé jusqu’au don de sa propre vie. Ce serait être bien ingrat, non ? 
 
A cause de l’amour de Dieu qui jamais ne nous fait défaut, à cause de ce don sans cesse renouvelé, nous avons un devoir incontournable : celui de faire connaître cet amour et de partager ce don. Nous ne pouvons pas garder Jésus pour nous tout seul ; nous ne pouvons pas l’enfermer dans nos tabernacles sans porter devant lui la prière des hommes et des femmes qui souffrent, se sentent abandonnés ou rejetés. C’est pourquoi nous sommes invités, en cette année de la foi, à nous unir à la prière silencieuse du pape François, ce dimanche soir, à 17h. Le Christ est présent au milieu de son peuple pour, aujourd’hui comme jadis, prendre soin de lui, guérir les cœurs malades, soulager les esprits abattus, nourrir les affamés d’amour et de tendresse. 
 
Devant tant d’amour et de prévenance, n’ayez qu’une réponse en ce jour de fête : venez et adorez. Venez redire votre reconnaissance pour ce que Dieu réalise en vous et par vous ; venez lui confiez celles et ceux que vous aimez, même (et surtout) s’ils sont loin de Dieu. Venez prendre du temps auprès de lui, puisqu’il s’est fait proche de vous, en Jésus. Ne restez pas seul, approchez, il est là qui vous attend, avec douze corbeilles remplies de son amour. Il y en aura pour tous ; jamais vous ne l’épuiserez. Il se donne, sans réserve, avec profusion, pour le salut de tous. Amen.

(Dessin de Jean-François KIEFFER, Mille images d'Evangile, éd. Presses d'Ile de France)

dimanche 26 mai 2013

Fête de la Très Sainte Trinité C - 26 mai 2013

Au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit.


En cette fête de la Trinité, je voudrais vous permettre de redécouvrir un geste que nous faisons quelquefois machinalement, sans trop y penser, sans même faire attention à la manière dont nous le faisons. On le fait deux fois à chacune de nos eucharisties ; certains le font peut-être chez eux, le matin au réveil et à nouveau le soir au coucher ; d'autres en sèment peut-être tout au long de la journée. Certains sportifs, sans qu'on sache trop s'ils sont croyants ou non, en saupoudrent même nos arènes sportives. Il s'agit, bien sûr, du signe de la croix. C'est le premier geste tracé sur nous lorsque nous devenons chrétien, puisqu'avant même que nous entrions dans l'enceinte religieuse, le prêtre, au pas de la porte, le trace sur nous, en signe d'accueil. Ce geste simple nous fait affirmer, chaque fois que nous le posons, notre foi en la Sainte Trinité.
 
Au nom du Père. En prononçant ces premiers mots, nous portons notre main à notre front. Le Dieu Père, qui entre en alliance avec nous, nous demande de faire effort d'intelligence pour le découvrir, le comprendre et le suivre. Il ne veut pas que nous soyons comme des serpillières étalées au sol, nous trainant devant lui comme des esclaves devant leur Maître. Non, le Dieu qui se révèle à nous comme Père, attend de nous que nous soyons des fils et des filles, conscients de la grâce qu'il nous fait, conscients de ce que signifie pour nous cette adoption. N'en déplaise à certains, la foi requiert un peu d'intelligence. Il ne s'agit pas tant d'être savant, mais plutôt d'être capable d'entrer dans la manière de penser de Dieu ; il s'agit bien d'accueillir le projet d'amour qu'il porte pour nous, et de le mettre en pratique, de lui donner vie. C'est ainsi que nous entrerons vraiment en alliance avec lui ; c'est ainsi, dans l'obéissance à sa Parole, que nous deviendrons authentiquement ses fils et ses filles. Au nom du Père, nous avons à approfondir notre foi, à l'entretenir, pour découvrir toujours plus et toujours mieux quel est ce Dieu qui vient à notre rencontre et qui nous offre son amour inconditionnel.
 
Au nom du Père et du Fils. Ayant affirmé notre désir de comprendre le projet de Dieu pour nous, nous descendons notre main sur nos entrailles, manifestant ainsi que ce Fils, Jésus, est bien devenu l'un de nous. Il est sorti des entrailles de la Vierge ; il est comme nous. Mais ce faisant, nous pouvons encore aller plus loin. Ce Fils Jésus, nous le savons depuis le Jeudi Saint, s'est fait nourriture pour nous. Lorsque nous communions à son Corps, c'est bien Jésus que nous sommes appelés à "digérer" dans notre vie. En se donnant en nourriture, en devenant un "homme mangé" par les siens, Dieu devient quelqu'un qui ne concerne pas que notre intelligence ; il vient nous provoquer dans nos tripes. Si ce Fils doit nous sauver et nous libérer de tout mal, il doit connaître ce que nous portons en nous, au plus profond de nous. La foi demande ce courage élémentaire de ne rien cacher à Dieu. Dans le langage courant, un homme qui n'a pas de tripes est un homme qui manque et de courage et de convictions profondes. Or, le Dieu qui vient à nous attend que nous soyons des hommes de convictions, des croyants non pas d'un moment mais de toute une vie. Quand Dieu nous saisit, quand il entre dans notre vie en Jésus, c'est toute notre vie qui en est transformée ; c'est tout ce que nous croyons qui en est bouleversé ; c'est tout ce que nous renfermons au plus profond de nous qui est sauvé, transfiguré par la puissance du Ressuscité. Dieu, en Jésus, vient combattre le Mal jusqu'au plus profond de nous pour nous en libérer définitivement. Au nom du Fils, nous avons à nous laisser libérer totalement par ce Dieu qui nous fait grâce, par amour.
 
Au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit. Après avoir porté notre main au front puis à nos entrailles, voici que nous la remontons pour en marquer successivement chaque épaule. Ce Dieu Père qui se révèle à nous, ce Dieu qui en Jésus va chercher le Mal au plus profond de nous pour nous en libérer, ce Dieu ne nous laisse jamais seul. Il est avec nous, à chaque instant de notre vie, par son Esprit. Il porte avec nous le poids du jour, les peines et les joies de notre monde. La ligne horizontale tracée par nos épaules marque bien notre humanité qui porte sur ses épaules le joug d'une vie humaine pas forcément choisie, quelquefois subie, et assumée avec plus ou moins de bonheur. Cette vie-là, qu'elle soit belle ou difficile, riche ou pauvre, est assumée par Dieu. C'est dans le concret de notre existence, quelle qu'elle soit, qu'il nous accompagne et nous protège. Puisque en Jésus, même nos tripes ne lui sont pas étrangères, comment pourrait-il ne pas nous accompagner et nous supporter dans le quotidien qui est le nôtre ? Jésus ne nous a-t-il pas dit, dimanche dernier, qu'il nous donnerait un Défenseur ? Et c'est l'Esprit Saint qui est venu et qui a lancé les Apôtres sur les routes du monde pour poursuivre la mission du Fils et amener notre humanité vers Dieu. Au nom de l'Esprit Saint, nous avons à permettre à Dieu de nous accompagner chaque jour ; il nous permettra de rester fidèles à notre foi.
 
En traçant sur nous le signe de la croix, nous nous enveloppons de Dieu pour qu'il vive avec nous selon sa propre promesse, chaque jour, jusqu'au jour où nous le verrons face à face. Puisque ce signe résume si bien notre foi, faisons attention à la manière dont nous le traçons sur nous. Fait trop à la hâte, marquant mal ou si peu les différentes stations sur notre corps, nous avons vite fait de ne dire qu'une partie de notre foi en ce Dieu qui veille sur nous, qui nous a fait, qui pense à nous et qui prend souci de nous (psaume 8). Puisqu'il est le signe de notre foi et que nous n'avons pas à rougir de celui en qui nous croyons, posons ce signe avec tout le sérieux, toute la beauté et toute la fierté que nous procure notre foi en Dieu Père, + Fils et Esprit Saint. Amen.
 
 
(Croix offerte à Mgr KRATZ, à l'occasion de son ordination épiscopale)

vendredi 17 mai 2013

Pentecôte - 19 mai 2013

Avec les Apôtres, accueillir l'Esprit Saint.



La longue séquence de Pâques s’achève aujourd’hui, avec la fête de la Pentecôte. Jésus est mort et ressuscité, il s’en est retourné vers le Père et aujourd’hui, il réalise sa promesse de ne pas nous laisser seul. Aujourd’hui, il envoie au monde et à son Eglise le don de l’Esprit Saint, le Défenseur, celui qui nous rend capables de Dieu, capables de comprendre Dieu, capables de vivre selon l’évangile. Aujourd’hui, Dieu nous fait un cadeau : mais nous, qu’en faisons-nous ? Savons-nous au moins à quoi il peut bien servir ? 
 
La scène décrite dans les Actes des Apôtres a un je-ne-sais-quoi de merveilleux. Les Apôtres sont réunis, l’Esprit Saint vient et tout est transformé. Cela n’a peut-être l’air de rien, mais les Apôtres se mettent à parler et tous ceux qui sont réunis à Jérusalem pour la fête les comprennent. La longue énumération des peuples présents laisse clairement entendre que l’Esprit Saint est donné aux Apôtres, non pour eux, non pour qu’ils le gardent, mais pour qu’ils en usent et en abusent par la mission auprès de tous. Car l’Esprit est donné pour cela ; pour que les Apôtres puissent accomplir fidèlement la demande de Jésus : Allez, de toutes les nations faites des disciples, les baptisant au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit.  C’est une des demandes qu’il leur a faite après sa résurrection. Ce qui leur semblait impossible, paralysés qu’ils étaient un temps par la peur, devient possible et devient réalité. Tous les peuples de la terre, réunis à Jérusalem, entendent proclamer dans leur langue les merveilles de Dieu. L’Esprit Saint  qui est donné par Dieu est à accueillir et à utiliser. 
 
S’il sert à la mission, l’Esprit Saint a encore d’autres usages. Il permet de comprendre mieux qui est Jésus, de comprendre mieux son message, de comprendre mieux ce qu’il attend de nous. Paul l’affirme dans sa première lettre aux Corinthiens : Sans l’Esprit Saint, nul ne peut dire : Jésus est le Seigneur. Avant de partir en mission, avant d’annoncer quoi que soit ou qui que ce soit, il faut entrer dans une connaissance vraie de l’Envoyeur. Avant d’évangéliser, il faut se laisser évangéliser et toucher par le message du Christ Sauveur. La docilité à l’Esprit Saint doit être au cœur de notre agir chrétien. Sans l’Esprit Saint, toutes nos missions ne sont que vaines agitations ; sans connaissance vraie de celui qu’il faut annoncer, nos enseignements ne sont que belles paroles, sans prise sur la vie des gens. Grâce à l’Esprit Saint, entrons dans une connaissance meilleure de Jésus, de son Père, de l’amour qu’il nous porte, des œuvres qu’il réalise pour nous. Laissons-nous enseigner par l’Esprit Saint ! 
 
Une troisième caractéristique de l’Esprit Saint : il construit l’Eglise ! Si, si, c’est bien lui qui construit l’Eglise et non pas nous avec nos programmes, nos conseils, nos gesticulations liturgiques et que sais-je encore !  Et dans cette Eglise qu’il construit, chacun a sa place, mais pas la même. Chacun doit donc trouver sa place pour pouvoir la tenir, totalement mais seulement selon l’adage liturgique, sans empiéter sur celle de son voisin, sans vouloir se prendre pour plus que les autres. Il ne sert à rien de faire peur aux autres avec les relations que nous pourrions avoir au sein de l’Eglise ; ça marche un temps et après ? Ceux qui agissent ainsi vivent les rapports ecclésiaux sous le mode du pouvoir et non pas du service. Ils se font mousser, paradent devant les autres pour se mettre en valeur et en oublient l’Eglise qu’ils piétinent souvent de leur suffisance. Ecoutons ce qu’en dit Paul : Les dons de la grâce sont variés mais c’est toujours le même Esprit. Les fonctions dans l’Eglise sont variées, mais c’est toujours le même Seigneur. Les activités sont variées, mais c’est partout le même Dieu qui agit en tous. Chacun reçoit le don de manifester l’Esprit en vue du bien de tous. Le bien de tous : voilà qui devrait faire réfléchir. Ce n’est pas mon Eglise que je construis, mais celle du Christ, qui est la seule tête. Ce n’est pas mon esprit qui doit l’animer, mais l’Esprit Saint qui seul peut transformer les cœurs. J’ai pu me rendre compte, ces derniers jours, que certains l’oublient bien vite, le bien commun. La docilité à l’Esprit Saint devrait permettre de résoudre ce petit souci. Si nous le voulons bien ; si nous le laissons agir ! Laissons-nous convertir par l’Esprit Saint. 
 
En ce jour où Dieu envoie son Esprit, accueillons ce don et acceptons d’en vivre pour le bien de l’Eglise, pour le bien du monde qui a tant besoin qu’on lui rappelle l’immense amour de Dieu pour lui. A la suite des Apôtres, soyons d’authentiques témoins du Christ, vivants de la force de l’Esprit Saint. Amen.
 
 
(Dessin de Coolus, Blog du lapin bleu)

vendredi 10 mai 2013

07ème dmanche de Pâques C - 12 mai 2013

Avec les Apôtres, oser prendre des risques.


On aurait tort de croire que ce dimanche n’est qu’un petit dimanche. Coincé entre l’Ascension et la Pentecôte, il fallait un dimanche de plus pour passer de 40 jours à 50 jours. Il n’a donc pas grand intérêt. D’ailleurs, certaines revues liturgiques conseillaient en leur temps d’y aller mollo en ce 7ème dimanche. Pas la peine de trop déployer la liturgie : les gens sortent à peine d’un long pont de l’Ascension et se dirigent vers un week-end prolongé à l’occasion de la Pentecôte. Faisons vite, court et bien. C’est oublier, me semble-t-il, que chaque dimanche de Pâques a une particularité et ce 7ème dimanche n’est pas moins important que les 6 précédents. Il a quelque chose d’important à nous dire concernant notre foi. A la suite des Apôtres, il nous invite à prendre des risques.
 
Contrairement à ce que certains peuvent penser, croire n’est pas un acte reposant. La foi est un acte qui nous engage, qui engage notre vie. D’abord parce que croire, avant d’être une morale à appliquer, est d’abord un art de vivre, conforme à la parole de Jésus. L’unité parfaite dont il nous parle dans l’Evangile de ce dimanche, l’amour parfait dont il nous parlait les dimanches précédents, ce n’est pas qu’une manière de parler. Jésus ne fait pas de belles phrases ou de bons mots, histoire de combler le vide de nos conversations. Les paroles qu’il nous a laissé depuis quelques semaines maintenant, sont des paroles à vivre, donc à prendre au sérieux. Le premier risque que nous prenons, c’est bien celui de prendre Jésus et son enseignement au sérieux ! Nous prenons le risque de voir notre vie changer, en profondeur, en mieux. L’unité parfaite dont parle Jésus nous l’entendons d’abord comme l’unité entre nous : et c’est bien ainsi que Jésus veut que nous le comprenions. Mais nous pouvons entrer dans une lecture plus profonde, plus spirituelle de cette demande et comprendre la demande d’unité comme concernant notre vie personnelle. Que notre vie soit unifiée autour de la personne de Jésus. Que notre bouche ne dise pas A quand notre cœur pense B. Notre profonde unité intérieure nous permettra de vivre l’unité avec les autres frères que Jésus place sur ma route.
 
Mais ce n’est pas le seul risque que nous prenons à croire en Jésus. Dans nos pays de vieille chrétienté, la foi a semblé durant des siècles comme allant de soi. Celui qui se faisait remarquer n’était pas tant celui qui allait à la messe, mais plutôt celui qui n’y allait pas. Les plus anciens le savent bien, eux qui allaient encore à la messe avant d’aller à l’école chaque matin. Et il valait mieux ne pas rater ce rendez-vous ! Certains ont expérimenté le courroux curial lorsqu’ils s’affranchissaient de ce « devoir » ou s’y comportaient mal. Aujourd’hui, alors que la foi ne va plus de soi, alors que l’on n’est plus forcément catholique parce que français, pour reprendre le cardinal Vingt-trois, la foi peut redevenir un risque : risque d’être moqué, risque d’être pris pour un demeuré parce qu’on croit encore à ces fadaises, risque aussi de perdre la vie en certaines régions du monde. Les statistiques du Saint Siège montrent qu’il y a plus de martyrs aujourd’hui que lors des grandes persécutions au début du christianisme. Oui, croire est un risque pour de nombreux chrétiens dans le monde contemporain. En ce sens, la lecture du martyre d’Etienne prend un relief particulier. Ce n’est pas qu’une histoire édifiante : elle est le rappel que le serviteur n’est pas au-dessus du Maître, et si Jésus, en son temps, fut crucifié, ses disciples peuvent l’être aussi, eux qui sont appelés à mettre leurs pas dans les pas de Jésus. Et la mort physique n’est pas toujours la plus douloureuse. Interrogez ceux qui sont humiliés, maltraités, ignorés, rejetés à cause de leur foi. Et cela arrive quelquefois chez nous, même ici, en Alsace, même à l’intérieur de nos communautés.
 
Oui, croire est un risque que nous devons, que nous pouvons assumer. Parce que nous ne risquons pas en vain ; nous risquons avec et pour Jésus. Les fêtes de Pâques nous font célébrer sa victoire sur toutes formes de Mal et de Mort, et nous rendent déjà participant à sa victoire. Cela ne diminue pas le risque, mais cela donne un horizon aux risques que nous prenons. Cet horizon, c’est de faire partie de ceux qui lavent leurs vêtements pour avoir part aux fruits de l’arbre de la vie ; cet horizon, c’est de pouvoir franchir les portes de la cité où Dieu nous attend. Il n’y a pas de Pâques sans Vendredi Saint ; il n’y a pas de Vendredi Saint sans Pâques depuis que Jésus est ressuscité. Il ne s’agit pas de risquer idiot ; il s’agit de risquer avec et pour le Christ. Ainsi seulement la victoire est au bout, assurément. Amen.
 
(Dessin de Gustave DORE, Le martyre d'Etienne)

mercredi 8 mai 2013

Ascension du Seigneur - 09 mai 2013

Avec les Apôtres, apprendre à vivre l'absence.



Un même auteur, Saint Luc, deux versions d’un même événement, et surtout deux réactions de la part des Apôtres. Voilà le mystère de ce jour de l’Ascension, ce jour où le Christ rejoint son Père dans la gloire du Royaume. Deux versions sensiblement identiques : une dernière rencontre avec Jésus, les dernières paroles de Jésus et son départ définitif. Désormais les Apôtres doivent vivre cette absence de Jésus, dans l’attente de son retour. 
 
L’absence : voilà bien la nouveauté de ce jour. Jésus, qui était mort, qui est ressuscité, qui a passé 40 jours à se montrer à ses disciples, va disparaître. Cela valait bien la peine de ressusciter si c’est pour disparaître encore, et un peu plus que trois jours cette fois-ci ! A croire que le jeu de cache-cache a été créé pour l’occasion. Bref, voilà Jésus absent, et cette absence est nécessaire. Nécessaire pour que l’Esprit Saint puisse être donné. Nécessaire pour que le Père accomplisse ainsi toutes ses promesses. Si nos frères orthodoxes ne nous avaient pas appris que l’Esprit Saint est le lien d’amour qui unit Jésus à son Père, on pourrait croire que ces deux-là (l’Esprit Saint et Jésus) ne peuvent pas cohabiter : pour que l’Esprit Saint descende, il faut que Jésus remonte ! Pourquoi ne pourrions-nous pas avoir les deux ?
 
Jésus s’en va donc, et, pour les Apôtres, s’ouvre le temps de l’absence. L’Esprit Saint, ce n’est pas pour aujourd’hui : il faut attendre sa venue comme il a fallu attendre la venue du Messie. Il faut être patient avec Dieu comme lui est patient avec nous. Il donne les choses au temps voulu. Et là, ce n’est pas encore le temps. L’absence a ceci de bon qu’elle creuse en nous le désir et l’attente. Non pas l’attente impatiente, mais l’attente qui nous prépare à un don toujours plus grand. Dieu ne cesse de se donner. Il s’est donné en son Fils : nous l’avons mis à mort. Il nous l’a rendu ressuscité : nous avons du mal à le croire. Il nous promet son Esprit Saint : sommes-nous impatients de le recevoir ? Le temps de l’absence n’est pas un temps vide ou creux. C’est un temps qui nous prépare à la suite. 
 
Si la venue de Jésus n’était déjà pas de tout repos (demandez donc à Marie, si elle a pu se reposer avec ce gentil petit Jésus !), imaginez ce que sera le temps de l’Esprit Saint, dont Jésus lui-même nous dit que, l’ayant reçu, nous serons ces témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu’aux extrémités de la terre ! Pour ceux qui pensaient se reposer maintenant que Jésus est parti, la désillusion est grande. Ce temps de l’absence devient un temps de préparation à la mission. Quand l’Esprit Saint viendra, il faudra être prêt. Quand l’Esprit Saint viendra, nous irons par les chemins témoigner de ce Christ que nous confessons comme Messie et Sauveur. Jamais il n’aura été autant présent que depuis qu’il est absent ! 
 
Aujourd’hui encore, Jésus est présent, plus que jamais présent ; il est présent dans le pain consacré, présent dans la Parole proclamée, présent dans le prêtre qui le représente, présent dans l’assemblée réunie en son nom. On ne le voit plus, mais il est partout ! Et nous comprenons alors la joie des Apôtres au départ de Jésus. Ce n’est pas la joie d’en être enfin débarrassé ; non, c’est la joie de le savoir toujours présent, malgré son absence physique. Si avant l’Ascension, Jésus était là où il était physiquement, désormais, il est là où se réunissent ses disciples, même en petit nombre : là où deux ou trois sont réunis en mon nom, je suis au milieu d’eux ! Je vous le redis : jamais un absent n’aura été autant présent que Jésus. 
 
A la manière des Apôtres, vivons cette absence de Jésus avec la même joie : même si nous ne le voyons plus comme les Apôtres jadis, il est toujours avec nous. A la manière des Apôtres, vivons cette absence de Jésus avec le même désir d’accueillir celui qu’il nous envoie : l’Esprit Saint qui nous fera tout comprendre et qui nous guidera chaque jour, dans la fidélité à Jésus. A la manière des Apôtres, vivons cette absence dans l’espérance de son retour, ce jour où il nous prendra avec lui et où nous le verrons pour toujours, face à face. Jésus est absent, mais nous le rendrons présent par toute notre vie. Amen.
 

(Dessin de Coolus, Blog du lapin bleu)

samedi 4 mai 2013

06ème dimanche de Pâques C - 05 mai 2013

Avec les Apôtres, chercher les chemins d'unité.


Je ne suis pas sûr que nous mesurions bien les enjeux de la controverse qui amène les Apôtres à se réunir à Jérusalem, tant cela nous paraît loin de nos préoccupations aujourd’hui. Mais à l’époque, la question soulevée par certains croyants issus du judaïsme aurait pu faire couler l’Eglise ; elle aurait pu ne pas s’en remettre. Car ce qui est en cause, c’est bien la foi et ce qui est nécessaire à la foi. 
 
Faut-il donc ou non circoncire ceux qui viennent au Christ alors qu’ils ne sont pas juifs de naissance ? Faut-il que les païens fassent le même parcours que les Apôtres, qui étaient tous juifs, ou pouvaient-ils être admis dans la communauté chrétienne naissante sans passer par la case circoncision ? Voilà posée la question. Elle peut nous sembler dérisoire, et pourtant ! Pour Paul qui venait de rentrer de sa première mission, il faut admettre tout homme qui croit au Christ, sans exiger de lui autre chose que l’affirmation que Christ est sauveur. L’obliger à passer par la circoncision, ce serait reconnaître que le Christ ne suffit pas pour être sauvé. Il serait donc mort pour rien, et notre foi ne reposerait pas vraiment sur lui. Les discussions ont dû être tendues entre les diverses parties. Mais ce qui nous importe, c’est la manière dont l’Eglise s’en est sortie. Les Apôtres se sont réunis, ont écouté chacun et ont pris une décision qui s’imposerait alors à tous. Cette décision a permis de sauvegarder l’Eglise et son unité. 
 
Quelle est-elle, cette décision ? Elle s’énonce ainsi : l’Esprit Saint et nous avons décidé de ne pas faire peser sur vous d’autres obligations que celles-ci qui s’imposent : vous abstenir de manger des aliments offerts aux idoles, du sang ou de la viande non saignée, et vous abstenir des unions illégitimes. En évitant tout cela, vous agirez bien. Courage ! La question initiale (celle de la circoncision) a été totalement évacuée ; il ne reste que des choses de bons sens. On pourrait les résumer ainsi : ne pas imposer des choses impossibles. Il y a des choses importantes et d’autres qui ne le sont pas. Et manifestement, la circoncision n’était pas importante pour manifester son appartenance au Christ. Elle marquait l’appartenance au peuple de la première alliance ; mais si le Christ nous sauve par sa mort et sa résurrection, si la foi en lui est première, alors ce signe de la première alliance devient secondaire. Par contre, ce qui reste interdit est, à l’époque du moins, considéré comme important. Ne pas manger les aliments offerts aux idoles marque bien notre désir de n’appartenir qu’au Christ et de ne communier qu’à lui. Même si Paul dira que cette viande n’est que de la viande, pour ne pas choquer un plus faible, pour ne pas induire en erreur quelqu’un qui reste convaincu que manger la viande consacrée aux idoles revenait à adorer cette idole, désormais, on s’abstiendra. De même pour le sang ou la viande non saignée : le sang, c’est le siège de la vie ; or Dieu seul est maître de la vie. Personne ne peut le répandre sans se prendre pour Dieu, qui seul fait mourir et vivre. On s’abstiendra donc de se prendre pour Dieu en ne touchant pas au sang. De même pour les unions illégitimes : déjà dans l’Ancien Testament, l’union de l’homme et de la femme avait quelque chose à voir avec l’alliance que Dieu scellait avec l’humanité. C’est encore vrai pour le chrétien qui reconnaît dans le mariage une image de l’union du Christ et de son Eglise. L’union illégitime reviendrait à remettre en cause cette image et l’alliance de Dieu avec son peuple ; on s’en abstiendra donc. 
 
Cette décision des Apôtres est placée sous l’autorité de l’Esprit Saint : c’est avec lui qu’ils ont décidé. Il a donc fallu le temps de la prière pour parvenir à une décision qui semble juste à tous, et qui soit accepté par tous. Ne l’oublions-nous pas trop souvent, l’Esprit Saint ? Pourtant, Jésus lui-même nous avait dit que c’est bien lui, l’Esprit, qui nous permettrait de comprendre ce que le Christ a dit, que c’est bien l’Esprit qui nous enseignerait. En se plaçant sous son autorité, la première communauté croyante a resserré les rangs et sauvegardé l’unité. Seul l’Esprit peut procurer cette joie et cette paix. Seul l’Esprit peut maintenir l’Eglise dans la foi véritable ; seul l’Esprit peut éviter à l’Eglise le naufrage. C’est donc bien lui qu’il nous faut invoquer lorsque nous traversons des moments difficiles ; c’est donc bien lui qu’il faut demander pour continuer à marcher dans les pas du Christ et sauvegarder l’unité de nos communautés. Sans l’Esprit Saint, que resterait-il de notre Eglise ? 
 
En prenant le temps de l’échange et de la prière, en reconnaissant à l’Esprit Saint une place particulière dans tout ce processus, les Apôtres nous apprennent le chemin à suivre pour maintenir l’unité et la retrouver lorsqu’elle est menacée ou perdue. Lui seul, présence de Dieu à notre monde, peut nous indiquer la voie à suivre pour que se réalise en nous et à travers nous le Royaume de Dieu. Osons l’invoquer et nous mettre à son écoute. Amen.

(Dessin de Jean-François KIEFFER, Mille images d'Evangile, Les Presses d'ile de France)