Bienvenue sur ce blog !

Ce blog voudrait vous permettre de vivre un chemin spirituel au rythme de la liturgie de l'Eglise catholique.

Les méditations s'appuient soit sur les textes bibliques quotidiens, soit sur la prière de l'Eglise.

Puisque nous sommes tous responsables de la foi des autres, n'hésitez pas à laisser vos commentaires.

Nous pourrons ainsi nous enrichir de la réflexion des autres.







samedi 28 juillet 2018

17ème dimanche ordinaire B - 29 juillet 2018

Quand la foule a faim…





            On mangera et il en restera. Cette affirmation du Seigneur donnée par le prophète Elisée traduit tout l’amour de Dieu pour son peuple, sa grande bonté et sa générosité sans limite. C’est cette même générosité, cette même bonté, ce même amour qui sont à l’œuvre en Jésus, des siècles plus tard, lorsqu’il nourrit une foule immense avec seulement cinq pains et deux poissons. Un signe donné pour que le peuple comprenne que Dieu ne saurait ignorer ceux qui se tournent vers lui. Au-delà du signe que Jésus avait accompli, ce qui me frappe dans l’évangile de ce dimanche, c’est la faim de ce peuple qui se presse par milliers autour de Jésus. 

            Même si nous avons changé d’évangéliste, passant de Marc à Jean, le contexte reste le même. Souvenez-vous : dimanche dernier, Jésus avait invité ses disciples à l’écart à leur retour de mission. Déjà les foules se pressaient, au point qu’ils n’avaient même pas le temps de manger. Jésus avait embarqué avec les siens pour traverser le lac, mais la foule, comprenant leur intention, [courut] là-bas, sur l’autre rive et [arriva] avant eux. Peut-on souligner davantage la faim de cette foule d’une parole vraie ? Peut-on faire mieux pour dire l’impact de Jésus sur ces hommes et ces femmes qui courent après lui ? C’est de cette foule qu’il voulait éloigner ses disciples ; c’est cette foule qui les rattrape ; c’est cette foule qui en oublie jusqu’à l’essentiel (un casse-croûte pour la route) pour être avec Jésus. Il y a un lien fort entre cette foule et Jésus, et ce ne sont pas seulement les signes qu’il opère qui peuvent expliquer cela. Je pense qu’il y a plus ; il y a quelque chose de vital qui semble les attacher ainsi à la personne de Jésus. 

            A force de courir d’une rive du lac à l’autre, à force de ne plus prendre le temps de rentrer chez eux, il semble normal, au bout d’un moment que la faim se fasse sentir. Il y a là environ cinq mille hommes, et seulement cinq pains d’orge et deux poissons. André a bien raison d’interroger : qu’est-ce que cela pour tant de monde ? Et pourtant, nous l’avons entendu, non seulement chacun mange à sa faim, mais il reste encore de quoi remplir douze paniers à la fin du repas. Comment ne pas entendre en écho la parole rapportée par le prophète Elisée : on mangera et il en restera ? Au temps de Jésus comme au temps d’Elisée, quand Dieu donne, il donne avec largesse, il donne au-delà du raisonnable. Dieu n’est pas radin en amour ; il ne donne pas sous condition. Il donne ce qu’il faut et même plus. La foule n’est pas dupe : à la vue du signe que Jésus avait accompli, les gens disaient : « c’est vraiment lui le prophète annoncé, celui qui vient dans le monde. Les journées passées à courir après Jésus sont ici récompensées et reconnues comme un temps de grâce, un temps de rencontre avec celui que Dieu envoie. 

Chaque fois que j’entends cette page d’évangile, je ne peux empêcher une pointe d’envie de monter en moi : comme j’aurais aimé être de cette foule. Comme j’aurais aimé courir à la suite de Jésus pour l’écouter, le voir et goûter à ce pain partagé. Je me souviens alors que je peux encore le faire aujourd’hui. Je peux me presser autour de Jésus ; je peux le suivre ; je peux l’entendre me parler comme il a parlé à ces foules ; je peux même goûter ce pain partagé jadis sur la montagne. Il me suffit de venir à l’eucharistie. Ici, je rencontre Jésus ; ici Jésus me parle ; ici Jésus partage encore le pain. Mais ma faim de lui est-elle aussi grande que la faim de cette foule qui se pressait autrefois ? Irai-je courir de l’autre côté du lac pour cette rencontre ou est-ce que j’attends tranquillement qu’il vienne de ce côté-ci ? Mon lien à Jésus est-il traditionnel ? culturel ? personnel ? vital ? Est-ce que je rends grâce à Dieu comme la foule pour ce signe fondamental de notre foi ou est-ce que je considère cela comme normal ? Si je ne sais plus lire les signes que Dieu pose, comment pourrais-je rendre grâce à Dieu ? Comment pourrais-je me réjouir de ce que Dieu intervient encore dans la vie des hommes, dans ma vie ? 

Nous l’avons vu : quand la foule a faim, Jésus la nourrit ; mais il ne la nourrit pas seulement de pain, il la nourrit aussi de sa parole. Elle a faim des deux, la foule. Et moi, quelle est ma faim aujourd’hui ? Quel est mon désir de Jésus et comment le creuser encore ? Avec l’Eglise, nous pouvons redire cette prière qui a ouvert notre eucharistie : elle nous permet de confesser la sollicitude de Dieu qui donne plus que ce dont nous avons besoin en même temps que notre faim de lui et notre confiance en lui. Tu protèges, Seigneur, ceux qui comptent sur toi ; sans toi, rien n’est fort et rien n’est saint. Multiplie pour nous tes gestes de miséricorde afin que, sous ta conduite, en faisant un bon usage des biens qui passent, nous puissions déjà nous attacher à ceux qui demeurent. Que cette prière de l'Eglise devienne authentiquement nôtre. Amen.

 
(Dessin de M. Leiterer)
 

 

 

vendredi 20 juillet 2018

16ème dimanche ordinaire B - 22 juillet 2018

Quand Jésus nous invite au repos.




           Je ne sais pas si c’est l’effet vacances, mais reconnaissons que cette page d’évangile a une saveur particulière en ce dimanche d’été, au moins pour celles et ceux qui ont la chance d’être au repos. Sans le vouloir, sans le savoir peut-être, ils répondent à l’invitation faite par Jésus : venez à l’écart dans un endroit désert, et reposez-vous un peu ! 

Cette invitation est faite par Jésus à ses disciples au moment où ils reviennent de leur première mission. Rappelez-vous : dimanche dernier, l’évangéliste nous racontait comment Jésus les avait envoyés proclamer la Bonne Nouvelle et guérir les malades. Aujourd’hui, les voilà de retour. Nous ne saurons pas ce qu’ils ont fait et dit. Seul Jésus, l’envoyeur, aura ce privilège. Ce que nous savons par-contre c’est que leur mission semble être un succès. Des gens viennent de partout, si bien qu’ils n’ont même pas le temps de manger. L’invitation de Jésus tombe donc à pic. 

Venez à l’écart dans un endroit désert, et reposez-vous un peu ! C’est l’invitation qui nous est faite depuis que les syndicats ont, à juste titre, lutté pour l’obtention des congés payés. Une revendication sociale juste qui nous rappelle que l’homme n’est pas une machine à produire, que sa vie personnelle est importante, qu’il a le droit de se réaliser et de s’épanouir ailleurs que sur son lieu de travail. L’homme a ainsi droit au repos, droit à une vie dont il reste le maître. L’homme n’est pas l’esclave du travail. Dans une société de plus en plus dure, il semble bon et utile de le rappeler. Rien ne justifie l’exploitation de l’homme par l’homme ; rien ne justifie que certains s’enrichissent sur le dos des autres. Pas même la production ou les carnets de commandes ! L’homme n’est pas fait pour le travail ; c’est le travail qui est fait pour l’homme ! Cette invitation de Jésus nous provoque alors à réfléchir à ce droit au repos, à ce temps de vacances que nous connaissons. Est-ce un temps simplement vide, où l’homme ne fait rien ? Est-ce un temps futile ou un temps utile ? Les vacances sont-elles autres choses qu’un temps où l’on bronze idiot ? D’ailleurs pouvons-nous vraiment nous reposer lorsque l’on fait des heures de route pour nous serrer, comme des sardines dans leur boite, sur une plage loin d’être abandonnée ? Poser la question, c’est déjà y répondre. Peut-être pouvons-nous envisager ce temps de relâche autrement. Il n’est pas qu’une simple parenthèse ! Les vacances, même vécues à la maison, peuvent être autre chose qu’un temps de vide et de paresse ! 

Depuis quelques années, de nombreuses personnes ont découvert la nécessité de faire, durant une partie de leurs vacances, une pause pour se retrouver, pour redonner un sens à leur vie, à leurs engagements. Les nombreux monastères affichent souvent complets durant la période estivale, prouvant cette nécessaire prise de distance avec la vie ordinaire. Les vacances peuvent être vécues comme un temps de reprise, de retraite, de face à face avec Dieu et avec soi, pour mieux repartir, pour mieux s’engager, pour mieux se donner. Prendre le temps d’une retraite comme on prend le temps d’une rencontre amoureuse avec celui qui donne sens à notre vie. Prendre le temps d’une retraite pour prendre de la hauteur avec le Christ sur ce qui fait notre vie, pour sortir du discours trop bien compris du « tout est foutu ! ». Prendre le temps d’une retraite pour se reposer en Christ et l’écouter nous dire qu’il nous aime, qu’il a encore besoin de nous. Prendre le temps d’une retraite pour chanter avec le psalmiste : Le Seigneur est mon berger, je ne manque de rien ; sur des prés d’herbe fraîche, il me fait reposer. Prendre le temps d’une retraite pour réapprendre à vivre, tout simplement. 

Tout le monde n’a certes pas cette possibilité. C’est pourquoi ce temps à l’écart auquel Jésus nous invite, peut se vivre aussi hors d’un monastère. Les vacances ne sont-elles pas le moment idéal pour retrouver le chemin d’une vie de prière personnelle ? Il ne s’agit pas d’y consacrer forcément des heures, mais de retrouver le plaisir d’un cœur à cœur avec Celui qui nous aime et qui veut nous redire chaque jour combien nous sommes aimés de lui. Même très courte, la prière nous permet d’entrer dans notre jardin intérieur, ce jardin des origines dans lequel Dieu cherche l’homme. Ne nous mettons pas en vacances de Dieu ; ne mettons pas Dieu hors de nos vacances. Avec lui, réapprenons à prendre en main notre quotidien ; de lui, recevons le repos qui refera vraiment nos forces. En lui, reposons-nous quotidiennement pour qu’il puisse nous mener vers les eaux tranquilles et nous faire revivre.

Encore une fois entendons l’appel du Christ : Venez à l’écart dans un endroit désert, et reposez-vous un peu ! Entendons-y l’appel à une présence renouvelée au Christ. Entendons-y aussi l’appel à une présence renouvelée à nos familles et à nos amis que l’ordinaire de nos vies nous fait quelquefois côtoyer sans vraiment les rencontrer. Que ce temps de vacances et de repos nous fasse retrouver le chemin vers Dieu, vers nos amis et vers nous-mêmes. Amen. 

(Dessin de M. Leiterer)

samedi 14 juillet 2018

15ème dimanche ordinaire B - 15 juillet 2018

Avec Amos, avec le Christ et ses disciples, annonçons le règne de Dieu !






Amos et Jésus, même combat : c’est ce qui ressort d’une lecture rapide des textes liturgiques de ce dimanche. Ce combat, c’est celui de la Parole de Dieu à annoncer toujours, à temps et à contre-temps. Une annonce qui ne souffre ni retard, ni obstacle. Dieu envoie, l’homme annonce. Ecoutons à nouveau ces textes et comprenons. 

Va-t-en d’ici ; fuis au pays de Juda ; c’est là-bas que tu pourras gagner ta vie en faisant ton métier de prophète. Pauvre Amos ! Les temps sont durs pour les prophètes. Imaginez-vous qu’il est tiraillé entre ce que Dieu lui demande de prophétiser et ce que les gens ont envie d’entendre. Il ne faut pas être soi-même grand prophète pour comprendre qu’Amos ne plaît guère, pas davantage que son message. C’est un empêcheur de tourner en rond ! Avec lui, plus de passe-droit ; avec lui, finie l’injustice sociale ; avec lui, voilà qu’il faudrait respecter les pauvres, et les riches devraient éviter le luxe tapageur. Alors que le peuple de Samarie connaît une période faste, voilà que le prophète annonce des malheurs immenses : le peuple sera ruiné, il sera déporté. Même si le peuple se repentait, le Seigneur Dieu ne pourrait plus retenir le bras prêt à frapper. Il ne restera pas pierre sur pierre dans le royaume. Vous comprenez dès lors l’intervention du prêtre Amazias : laisse-nous tranquille ! Va-t-en jouer au prophète de malheur ailleurs ! Mais ici, à Béthel, arrête de prophétiser. 

C’était sans compter sur qui avait envoyé Amos. Dans une courte réponse au prêtre, le prophète dit avec force qu’il ne peut se taire. Lui le gardien de troupeau et le tailleur de sycomores, lui qui n’appartient pas à une caste de prophète, lui l’homme de la terre, a été saisi par Dieu et sommé par lui d’aller prophétiser. Il ne prophétise pas pour gagner sa vie ; il ne prophétise pas par plaisir ; il ne prophétise pas pour se faire un nom ; il prophétise parce que Dieu l’a envoyé ! Alors, que cela plaise ou non, il dira ce qu’il a à dire ; après il partira. Il reprendra sa petite vie de berger. Mais pour l’heure, place au Seigneur Dieu et à sa Parole ! 

Quelques siècles plus tard, Jésus lui-aussi viendra annoncer la Parole du Seigneur Dieu. Il ne se contentera pas de remplir sa mission en solitaire. Il va associer ses disciples à sa mission. Nous l’avons entendu dans l’Evangile : alors il commença à les envoyer en mission deux par deux. Le contexte est certes différent de celui d’Amos, mais Dieu parle encore et toujours à son peuple. Par Jésus donc, qui vagabonde sur les routes de Palestine ; ce Jésus, que les siens croyaient connaître et ne veulent pas entendre ; ce Jésus, qui vient d’essuyer un échec dans son village, et qui transfère ses compétences à ses disciples. Il les envoie en mission, deux par deux. Il les envoie faire à leur tour ce pourquoi il est venu : annoncer la Bonne Nouvelle et la concrétiser en manifestant leur pouvoir sur les forces de mort, sur les esprits mauvais. Les disciples sont appelés à poursuivre l’œuvre du maître ; ils sont appelés à marcher sur ses traces, avec des consignes très claires. 

Il leur prescrivit de ne rien prendre pour la route, si ce n’est un bâton. Ils partent, totalement désarmés, dépourvus de tout : ni vêtement de rechange, ni monnaie, ni même un en-cas pour la route. Juste un bâton. Ils ne feront pas découvrir aux autres la route du bonheur s’ils s’encombrent de choses inutiles. La route du bonheur se découvre lorsque l’on n’a plus rien que la seule force d’aimer ; lorsque les seuls arguments sont une vie heureuse, respirant le bonheur et la joie de vivre, libérée de toute peur, de tout attachement excessif. Le bâton est plus utile qu’un vêtement de rechange : il permet de s’appuyer sur lui lorsque la route est trop dure. Il est le symbole de celui qui se met en marche et accepte de se dépayser pour entrer dans le monde de Dieu que se proposent de faire découvrir les Apôtres. Ils se mettent en route avec un bâton, des sandales aux pieds, et un compagnon de voyage. A deux, on se réconforte, on s’encourage, on essaie de vivre ce que l’on prêche ! 

A la suite d’Amos et des Apôtres, nous sommes appelés à témoigner à notre tour de tout ce que Dieu réalise pour nous. A la suite d’Amos et des Apôtres, nous sommes envoyés proclamer au monde la Bonne Nouvelle. Par notre baptême, nous sommes faits fils de Dieu ; par notre baptême, nous sommes chargés de dire par toute notre vie cette Bonne Nouvelle qui nous a tourné vers le Christ. Nous devenons les porte-parole de Dieu parce qu’il nous a prédestinés à être, pour lui, des fils adoptifs par Jésus le Christ. Les ministres ordonnés le sont d’une manière particulière, certes ; mais tous, nous avons mission de les aider et de dire à ceux que nous rencontrons que Dieu les aime, qu’il les veut libres et heureux et qu’il est LE chemin de salut et de libération. Par notre baptême, nous participons tous à la mission prophétique du Christ. Chaque baptisé est envoyé lutter contre les forces du mal ; chaque baptisé est appelé à faire de sa vie un chemin de sainteté quotidien. C’est en devenant saints dans l’ordinaire de notre vie que nous gagnerons nos frères et sœurs à la foi au Christ ; c’est en devenant toujours plus saints comme Dieu est saint que nous construirons le Royaume de Dieu, dès ici-bas. 

Dans sa très belle exhortation Gaudete et exsultate, publiée au mois de mars dernier, le pape François nous invite à rester fidèles à notre baptême, premier jour de notre engagement à la sainteté. En renonçant au Mal, en proclamant notre foi, nous avons fait le choix de Dieu, le choix du Christ, le choix des frères. Plongés dans la mort de Jésus, saisis par son Esprit, nous marchons à sa suite et faisons nôtre l’Evangile du Salut. A la suite d’Amos, à la suite de Jésus et de ses disciples, devenons ces annonceurs d’un monde plus grand et plus humain, parce que plus saint. Amen.

 
(Dessin de M. Leiterer)
 

 

 

samedi 7 juillet 2018

14ème dimanche ordinaire B - 08 juillet 2018

Ma grâce te suffit !





Qu’y a-t-il de commun entre Ezéchiel, Jésus et Paul de Tarse ? Ils vivent à des époques différentes, ne se sont jamais rencontrés, et pourtant, ils partagent la même réalité : à un moment ou à un autre de leur mission, bien qu’envoyés par Dieu, ils ont échoué. Les hommes ne les ont pas suivis ; les hommes ne les ont pas écoutés. Il serait alors facile d’accuser les autres, ceux qui n’ont pas voulu écouter. Pour Ezéchiel, accuser le peuple, sourd à toute parole venant de Dieu ; pour Jésus, accuser ceux de son village qui ne l’accueillent pas comme il se doit ; pour Paul, accuser les chrétiens de Corinthe qui contestent son autorité. Nous pourrions le faire, mais cela nous amènerait quoi, à nous qui écoutons ces textes des siècles plus tard ? Et pourquoi la liturgie nous fait-elle lire ces récits d’échecs ? 

La réponse se trouve dans la deuxième lecture. C’est le Christ qui parle à Paul : Ma grâce te suffit, car ma puissance donne toute sa mesure dans la faiblesse. Paul nous invite ainsi à nous tourner d’abord vers le Crucifié, signe suprême de la faiblesse humaine. Là sur la croix, il ne peut plus rien ! Et pourtant, c’est bien là, sur la croix, que Dieu va manifester sa puissance. Il se sert de cet échec apparent pour faire triompher la vérité. Celui qui est crucifié, exposé aux moqueries, celui-là est plus puissant que la mort même. Le Dieu auquel nous croyons n’est pas le Dieu des forts et des puissants, il est le Dieu des humbles, le Dieu chanté par Marie dans le Magnificat ; il est le Dieu qui prend en pitié l’humanité pécheresse pour lui faire découvrir son amour, son pardon et la puissance de sa bonté. 

Ma grâce te suffit ! Voilà qui vaut encore pour nous aujourd’hui. C’est une invitation à découvrir que le salut est un don qui nous est fait et non le résultat de nos vertus, de nos efforts, de nos prières. Si la grâce de Dieu suffit, si le salut est offert, alors il nous faut accueillir cette grâce, nous ouvrir au don du salut. Il n’y a pas d’orgueil à en tirer. Accueillir la grâce, s’ouvrir au salut, c’est reconnaître que j’ai besoin d’être sauvé ! Reconnaître que, sans l’aide de Dieu, je suis faible, démuni. C’est reconnaître, comme Paul, notre faiblesse. Accueillir le salut, accueillir la grâce de Dieu, c’est accepter de n’être pas parfait et d’avoir besoin de Dieu : une attitude à mille lieux de ce que prône notre société moderne. 

Ma grâce te suffit ! Dans sa grande bonté, Dieu a disposé dans son Eglise les sacrements qui la font vivre et progresser dans la connaissance de Dieu. Le sacrement qui dit le mieux la nécessité pour l’homme d’accueillir la grâce de Dieu, est certainement le sacrement de la réconciliation. N’est-ce pas dans la confession que je reconnais le mieux mes limites, mes travers, mes manques ? N’est-ce pas dans la confession que je reconnais ce que Dieu fait pour moi, jour après jour ? N’est-ce pas dans la confession que je m’ouvre le mieux à cette grâce qui vient me remplir de Dieu pour laver en moi ce qui était souillé par le péché et rétablir en moi l’image et la ressemblance de Dieu que le péché avait obscurci ? La grâce de Dieu, c’est bien de nous aimer encore alors que, sans cesse, nous nous éloignons de lui ! La grâce de Dieu, c’est bien de nous aimer à cause de notre péché. Parce que, sans lui, nous risquons de nous soumettre aux forces du Mal qui nous traversent, Dieu vient nous dire son amour au cœur même de notre détresse, au cœur même de nos faiblesses, pour que, même là, sa puissance puisse agir en nous. 

Ma grâce te suffit ! C’est aussi cette parole que nous devons garder à l’esprit lorsque les difficultés de la vie semblent s’acharner sur nous. Aucune épreuve ne peut nous écraser si nous la vivons avec Dieu ! Sa grâce, c’est justement de veiller sur nous en tout temps : si nous affrontons nos épreuves avec lui, nous trouverons en lui notre victoire puisque, en Jésus, mort et ressuscité, Dieu a vaincu tous les obstacles qui nous tenaient éloignés de lui. Même notre mort n’est plus un obstacle à la rencontre avec Dieu si nous la vivons dans la foi au Christ crucifié et ressuscité. Rien ne peut plus nous séparer de l’amour de Dieu qui est en Jésus. 

Ma grâce te suffit ! En ces temps difficiles où nous sommes, il nous est bon d’entendre Dieu nous dire qu’il est ainsi toujours avec nous. Nous n’avons pas à craindre nos échecs, ni les difficultés de la vie, mais à redécouvrir, à l’école de Paul, que notre force est en Dieu. Comme lui, nous pouvons reconnaître que c’est lorsque je suis faible, c’est alors que je suis fort ! Amen.