Bienvenue sur ce blog !

Ce blog voudrait vous permettre de vivre un chemin spirituel au rythme de la liturgie de l'Eglise catholique.

Les méditations s'appuient soit sur les textes bibliques quotidiens, soit sur la prière de l'Eglise.

Puisque nous sommes tous responsables de la foi des autres, n'hésitez pas à laisser vos commentaires.

Nous pourrons ainsi nous enrichir de la réflexion des autres.







vendredi 25 novembre 2011

1er dimanche de l'Avent B - 27 novembre 2011

Attendre le Messie avec Isaïe


Nous voici donc au début du temps de l’Avent qui nous prépare aux fêtes de Noël qui approchent. Déjà nos rues sont parées et illuminées et peut-être chez vous, avez-vous commencé à confectionner ces petits « bredele » qui font la joie de tous au temps des fêtes. Mais le temps de l’Avent est d’abord un temps pour nous permettre une nouvelle démarche spirituelle. Si j’étais curé de paroisse, je proposerais de vivre ce temps de l’Avent en suivant 4 personnages : Isaïe, Pierre, Jean le Baptiste & Marie. Ils ne sont pas pris au hasard. Ils marquent, en cette année liturgique nouvelle, chacun un dimanche, nous apprenant à attendre comme eux ont attendu. Aujourd’hui, donc, nous apprenons à attendre avec Isaïe ou comme Isaïe.

Le prophète Isaïe a vécu à une époque difficile de l’histoire du peuple que Dieu s’est choisi. Une époque faite d’incertitudes, de conflits, de déportation, de malheurs, et de manque de foi. Le passage que nous avons entendu appartient à la fin du livre du prophète Isaïe. Le peuple qui avait été déporté à Babylone est de retour sur sa terre. Mais Jérusalem est détruite, ce n’est plus qu’une terre désolée. Partout la misère. C’est dans ce contexte qu’Isaïe s’adresse à Dieu dans cette belle prière. Elle nous dit comment Isaïe attend son Dieu.

Ce qui me frappe d’emblée, c’est la certitude d’Isaïe vis-à-vis de Dieu. « Tu es notre Père, notre Rédempteur ». Celui dont il attend quelque chose n’est pas un inconnu pour lui. Il s’en reconnaît fils, il le proclame son Sauveur. Voici donc qui précise dès le début ce qu’attend Isaïe : un geste de salut de la part de Celui à qui il se confie. En appelant Dieu « Père de son peuple », Isaïe place aussi le rapport à Dieu sur le terrain de l’amour et non de l’obligation ou d’une quelconque servitude. Il rappelle que, par le passé déjà, Dieu s’était souvenu de son peuple et était intervenu en sa faveur. Il ne lui demande donc ni plus, ni moins que de faire ce qu’il a déjà fait.
C’est pour moi la première marque de l’attente d’Isaïe : que Dieu soit maintenant celui qu’il est depuis toute éternité : un Père qui aime et qui sauve. Attendre le Messie avec Isaïe, c’est oser nous tourner vers Dieu, oser l’interroger comme le fait Isaïe, oser reconnaître en lui celui qui peut quelque chose pour nous. C’est reconnaître que c’est Dieu qui vient à notre rencontre et non pas nous qui allons à la rencontre de Dieu. Son engagement est premier.

Dans un deuxième temps, Isaïe confesse pourquoi il a besoin de Dieu. « Nous étions semblables à des hommes souillés, et toutes nos actions étaient comme des vêtements salis ». Le péché a envahi la vie et le cœur des hommes. Il a obscurci en l’homme la capacité de reconnaître Dieu, de le rencontrer. « Tu nous avais caché ton visage, tu nous avais laissés au pouvoir du péché ». Non pas que Dieu punisse l’homme, mais plutôt il tire les conséquences des actes de l’homme. Celui-ci ne se fie plus à Dieu ; et bien Dieu se retire. Ou plutôt : l’homme a l’impression que Dieu s’en est allé. Mais Isaïe sait bien que Dieu est toujours présent, attendant un mot de l’homme pour revenir dans sa vie.
Attendre le Messie avec Isaïe, c’est opérer ce retour sur soi, sur sa vie pour y démasquer le péché et se confier à Dieu, qui seul peut laver nos vêtements, qui seul peut nous rendre une figure humaine, à son image et à sa ressemblance. Ce temps de l’Avent, même s’il n’est pas un temps de pénitence, pourra être un temps de retour à Dieu, un temps de vérité pour chacun de nous. Le sacrement du pardon vous sera certainement proposé à l’approche de Noël pour que votre cœur puisse véritablement reconnaître en Celui qui va venir, celui que vous attendez et qui vous redonnera vie.

Enfin, Isaïe, au nom de son peuple, crie vers Dieu sa souffrance d’être éloigné de lui : « Ah si tu déchirais les cieux ! » Il attend, il espère la venue de Dieu de toute son âme. Il en est rempli d’impatience. Mais une impatience saine : celle qui habite celui qui a vraiment faim et qui attend d’être nourri, ou celui qui est assoiffé et qui attend l’eau qui le fera revivre.
Attendre le Messie avec Isaïe, c’est creuser en nous ce désir de Dieu, cette saine impatience que Dieu soit le tout de notre vie ; c’est être habité du désir vrai de rencontrer Celui qui vient, du désir vrai de l’accueillir au plus profond de nos vies pour qu’il nous transforme et nous sauve, et qu’il nous ouvre à la vraie vie.

Puissions-nous exprimer, durant cet Avent, le même désir de Dieu et la même impatience devant sa venue ! Puissions-nous aussi, comme Isaïe, crier vers Dieu pour ceux qui ne le peuvent plus ou qui ne reconnaissent plus en eux ce désir d’être sauvés. Le vrai sens de notre attente, la vraie joie de Noël, c’est aussi cette ouverture aux autres en qui Dieu se manifeste. Qu’il en soit pour nous comme il en fut jadis pour Isaïe. Amen.








(Dessin de Coolus, Blog du lapin bleu)

samedi 19 novembre 2011

Christ, Roi de l'univers A - 20 novembre 2011

Que signifie accueillir le Christ, Roi de l'univers ?





C’est une bien belle manière de terminer l’année liturgique que de la consacrer au Christ, Roi de l’univers. Comme le chantera la préface tout à l’heure, nous reconnaissons, au terme d’un parcours avec l’évangéliste Matthieu, que Jésus est bien celui que Dieu a envoyé pour établir un règne de vie et de vérité, un règne de grâce et de sainteté, un règne de justice d’amour et de paix, dans lequel l’homme et Dieu vivront réconciliés. Mais qu’est-ce que cela signifie concrètement pou nous ? Qu’est-ce que cela veut dire d’avoir le Christ pour roi de l’univers ?

Accueillir le Christ comme roi de l’univers dans ma vie, c’est d’abord me laisser chercher par lui. Nous considérons souvent que la vie spirituelle consiste à chercher Dieu. Mais la Bible nous apprend que c’est Dieu qui cherche l’homme. Relisez la Genèse, quand l’homme et la femme ont désobéi à Dieu. Ils se cachent devant sa face et Dieu se met à leur recherche : homme, où es-tu ? Relisez le prophète Ezéchiel que nous avons entendu en première lecture : Maintenant, j’irai moi-même à la recherche de mes brebis et je veillerai sur elles… la brebis perdue, je la chercherai ; l’égarée, je la ramènerai. Celle qui est blessée, je la soignerai. Celle qui est faible, je lui rendrai des forces. Relisez aussi les évangiles et contemplez Jésus allant à la rencontre des hommes et des femmes de son temps, et particulièrement vers celles et ceux qui sont blessées, exclues, pour leur dire qu’ils sont du peuple que Dieu se donnent, qu’est venu le temps de la délivrance, le temps du salut. Oui, reconnaître le Christ comme Roi de l’univers, c’est accepter qu’il nous trouve, qu’il entre dans notre vie pour y faire son œuvre de salut. C’est accepter que lui seul puisse redresser en nous ce qui est courbé, que lui seul puisse guérir en nous ce qui est malade. C’est accepter que Dieu m’aime et qu’il peut et veut faire quelque chose pour moi.

Accueillir le Christ comme roi de l’univers, c’est aussi reconnaître que c’est sur la croix qu’il manifeste le mieux sa royauté. C’est bien en livrant sa vie sur la croix qu’il réalise ce que personne n’a jamais fait et ne fera plus jamais pour nous : il livre sa vie en échange de la nôtre ; il livre sa vie pour que nous puissions vivre. Là, sur la croix, il détruit l’ultime ennemi de l’humanité : la mort elle-même. Plus rien désormais ne peut nous tenir éloignés de Dieu, si ce n’est nous-mêmes et notre liberté. Dans sa mort et résurrection, le Christ est ce pasteur qui est allé à la rencontre de ses brebis, qui s’est livré pour elles, qui a pris soin d’elles. Seul notre refus de Dieu peut désormais nous tenir éloignés de lui. D’où la nécessité d’un jugement que le Christ devra prononcer lors de son retour, non pour punir, mais pour unir en Dieu celles et ceux qui se seront laissés sauver.

Accueillir le Christ comme roi de l’univers, c’est nécessairement alors vivre de telle manière que nous manifestions, dès maintenant, par nos actes que le Christ nous déjà trouvé et sauvé. Le récit du jugement dernier que nous avons entendu est intéressant. Il nous montre le Christ revenant dans sa gloire et séparant les hommes, les uns des autres. Deux groupes distincts, mais à qui sont faites les mêmes réflexions : J’avais faim, j’avais soif, j’étais un étranger, j’étais nu, j’étais malade, j’étais en prison. En un mot, les grands besoins fondamentaux de tout humain : nourriture, boisson, accueil (logement), vêtement, compassion et miséricorde. Et un constat : tu l’as fait pour moi ou tu ne l’as pas fait pour moi. La même surprise, des deux côtés : quand t’avons-nous vu, Seigneur ? Quand avons-nous fait (ou pas fait) cela pour toi ? Et la même réponse : chaque fois que vous l’avez fait (ou pas fait) à l’un de ces petits qui sont mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait (ou pas). Ceux qui auront choisi et accueilli le Christ comme leur roi, en toute chose, durant leur vie, seront accueillis par lui pour avoir vécu selon son unique commandement : Aime Dieu et tes frères. Nous reconnaissons le Christ comme notre roi lorsque, comme lui, nous servons nos frères. Si nous ne le faisons pas pour eux, faisons-le au moins parce qu’à travers eux, nous rencontrons le Christ et nous nous laissons rencontrer par lui. Le visage du Christ est imprimé en chacun de nous depuis que Dieu s’est fait homme, depuis qu’il s’est irrémédiablement lié à nous.

Sachant que nous sommes tous le pauvre de quelqu’un et le riche d’un autre, nous avons tous à servir et à nous laisser servir pour construire ce monde, ce règne de justice, d’amour et de paix. Ainsi nous correspondrons toujours mieux à ce que Dieu a voulu faire de nous lorsque, au commencement, il nous a créés dans son amour. Et nous entendrons notre roi nous dire, à son retour : Venez, les bénis de mon Père, et recevez en héritage le Royaume préparé pour vous depuis la création du monde. Quel beau retour à la maison que ce jour-là ! Amen.



(Photo de Quentin Urlacher)

samedi 12 novembre 2011

33ème dimanche ordinaire A - 13 novembre 2011

Faire fructifier ce que le Christ nous a confié.




Après avoir entendu Jésus parler de sa venue dimanche dernier à l’aide de la parabole des vierges sages et des vierges folles, le voici, poursuivant sa réflexion avec une nouvelle parabole : celle du maître qui part en voyage. Une parabole qui peut nous sembler difficile puisqu’elle s’achève par la condamnation et le renvoi d’un serviteur qui semble n’avoir rien fait de mal. Essayons de mieux comprendre.

Le maître de la parabole, c’est Jésus ; son voyage, c’est sa mort, son départ de ce monde ; les serviteurs, c’est nous, membres de l’Eglise ; le retour du maître, longtemps après, c’est le retour du Christ dans la gloire, à la fin des temps ; le temps intermédiaire, pendant lequel les serviteurs s’occupent diversement des biens reçus, c’est le temps de l’Eglise, le temps où nous sommes. C’est donc l’histoire d’un maître qui part en voyage et qui confie ses biens à ses serviteurs. Remarquez bien ceci : ses biens et non des biens. Il leur donne ce qu’il a de plus précieux, ce qui est à lui et dont il veut que les serviteurs s’occupent. Ce qu’il donne, ce ne sont pas des qualités humaines, ni des conseils ; non, il leur donne de l’argent, beaucoup d’argent, à chacun selon ses capacités. Il n’est pas injuste en distribuant inéquitablement ses biens : au contraire, il donne à chacun selon ses capacités. Il n’y a là rien de discriminant ; il tient compte des capacités de chacun : c’est dire le respect qu’il a pour eux. Il sait qu’ils seront capables de faire quelque chose de ce qu’ils ont reçu. Et il part.

Aussitôt, dit Jésus dans la parabole, les serviteurs s’occupent de leur capital. Ils ne trainent pas, ne se reposent pas en disant : j’aurai bien le temps ! Chacun à sa manière s’occupe de ce qu’il a reçu. Des deux premiers, on ne sait pas ce qu’ils ont fait au juste ; nous savons juste que leur capital a fructifié et doublé. Le troisième serviteur, par contre, a pris peur, il a enfoui le bien reçu ; il le restituera tel quel à son Maître le moment venu. Tout semble aller bien jusqu’au retour du maître.

C’est l’heure des comptes à rendre : les deux premiers rendent ce qu’ils ont reçu avec le surplus qu’ils ont gagné et ils sont invités à entrer dans la joie du maître. Le troisième rend ce qu’il avait reçu, avec un discours curieux sur ce qu’il croyait savoir du maître : je savais que tu es un homme dur ; tu moissonnes là où tu n’as pas semé, tu ramasses là où tu n’as pas répandu le grain. J’ai eu peur et je suis allé enfouir ton talent dans la terre. Le voici. Tu as ce qui t’appartient. Ce serviteur n’avait rien demandé quand il a reçu son talent ; il n’en a donc rien fait et maintenant il se contente de le rendre. Tout devrait aller bien. Ce maître qu’il a jugé dur va se montrer dur sur la base de ses propres paroles. Et le serviteur se fait jeter dehors, parce qu’il n’a rien fait !

Ceci nous oblige donc à comprendre que sont ces talents que le maître distribue au moment de son départ. Ce qu’il distribue, c’est ce qui était à lui. Et qu’est-ce qui était au Christ, qu’est-ce qui lui tenait à cœur au moment de son départ, si ce n’est son désir de sauver tous les hommes ? Qu’est-ce qui était au Christ, qu’est-ce qui lui tenait à cœur, si ce n’est que tous les hommes vivent dans l’amour et dans la fraternité ? Qu’est-ce qui était au Christ, qu’est-ce qui lui tenait à cœur, si ce n’est que tous les hommes connaissent son nom et se tournent vers Dieu ? Oui, ce que ce maitre a confié à ses serviteurs, ce que le Christ a confié à son Eglise, c’est ce désir de salut, ce désir que tous les hommes vivent dans la connaissance de son nom. C’est le bien confié à l’Eglise tout entière. C’est le bien dont nous sommes redevables. Avons-nous, par notre vie, par nos actions, contribué à augmenter le nombre des fils et filles de Dieu ? Avons-nous, par notre vie, nos actions et nos paroles, contribué à faire connaître le vrai visage de Dieu et de son Christ ? Ou avons-nous pris peur ? Avons-nous annoncé ce Dieu qui nous invite à la joie ou avons préféré annoncer un Dieu rabat-joie ? Avons-nous participé à la vie de l’Eglise par peur de Dieu (comme cela, s’il existe, au moins nous aura-t-il vu dans son église !) ou par amour de Dieu, avec au cœur l’urgence de le faire connaître par le plus grand nombre ?

Le troisième serviteur n’a rien fait, par peur. Il a cru que son maître était un comptable qui ne lui passerait rien ; il n’a eu confiance ni en son maître, ni en lui-même. Il a eu peur de risquer le don qui lui a été fait ; il a sous-estimé le don et sa puissance. L’aurait-il au moins mis en banque, que ce don aurait généré par lui-même des intérêts ? Combien plus aurait-il pu produire s’il s’en était servi !

Nous sommes toujours dans ce temps de l’attente du retour du Christ dans sa gloire. Nous sommes toujours les héritiers des dons que Dieu nous fait par son Christ. Que faisons-nous du désir de Dieu de sauver tous les hommes ? Avec quelle urgence annonçons-nous ce désir ? Quel visage de Dieu donnons-nous à voir ? Sommes-nous déjà habités de la joie qui sera celle du Christ à son retour ? Ou avons-nous tout enterré, tout oublié, même que le Christ reviendra et que avons à l’attendre, activement, proclamant son nom et ses merveilles afin que le monde croit ? Qu’avons-nous fait de la Parole qu’il nous a confiée ? Qu’avons-nous fait des sacrements de son Eglise ? Qu’avons-nous fait des frères qu’il nous a confiés ?

La parabole d’aujourd’hui veut réveiller notre foi et nous faire prendre conscience de l’urgence à annoncer le vrai Dieu, à faire entrer les hommes et les femmes de notre temps dans sa joie. Si nous y travaillons déjà, poursuivons avec courage et confiance. Si nous avons baissé les bras et tout enfouit quelque part dans la terre, dépêchons-nous de creuser, dépêchons-nous de récupérer ce bien confié et de le faire fructifier. Le Christ ne se contentera pas d’un « j’avais peur ». Nos peurs, il a fait mourir avec lui sur la croix. Faisons-lui confiance à nouveau et construisons ce monde d’amour qu’il a inauguré dans sa mort et sa résurrection, et nous serons appelés à partager sa joie, pour toute éternité. Amen.

(Dessin de Coolus, Blog du lapin bleu)

samedi 5 novembre 2011

32ème dimanche ordinaire A - 06 novembre 2011

Avoir toujours le désir de voir le Christ !





Elles sont méchantes, elles ne partagent pas ! C’est le cri du cœur d’un enfant à qui les catéchistes ont sans cesse parlé de l’importance du partage et qui entend cette page d’évangile ; il y a bien cinq jeunes filles qui ont de l’huile en réserve et qui refusent de la partager avec les cinq autres qui n’ont pas pris de réserve. Et en plus, celles qui ne sont pas partageuses sont invitées par l’époux alors que les autres sont jetées dehors ! Notre brave petit y perd sa religion. S’il faut partager avec ceux qui n’ont rien, y aurait-il malgré tout des choses qui ne se partagent pas ?

Ce que cet enfant n’a pas compris, c’est le contexte de l’histoire, sans lequel rien n’est clair. Jésus, en racontant cette parabole, parle de son retour. Au moment où l’évangéliste écrit ces lignes, la jeune communauté s’inquiète : Jésus est mort et ressuscité, il est retourné vers son Père, il a transmis l’Esprit… mais il tarde à revenir ! Qu’en est-il de cette dernière promesse ? Beaucoup pensaient qu’ils verraient ce retour de leur vivant ; mais cela ne semble plus être le cas. La parabole de Jésus rapportée par Matthieu vient alors leur redire que ce retour aura lieu, à un jour et à une heure que nul ne connaît et qu’il nous faut donc patienter, nous tenir prêt.

La noce de la parabole, c’est le jour du retour du Christ ; l’Epoux, c’est le Christ ; les jeunes filles, les insensées comme les prévoyantes, ce sont les membres de l’Eglise. Le temps de l’Epoux qui tarde à venir, c’est le temps où nous sommes ; les lampes d’huile, notre capacité à attendre, notre capacité à veiller dans la nuit. Lorsque, devant l’arrivée repoussée de l’Epoux, les jeunes filles s’endorment, leur capacité à veiller est manifestée par ces lampes à huile qui brillent. Les cinq prévoyantes ont des réserves de patience : quoi qu’elles fassent, qu’elles soient éveillées ou endormies, elles sont en veille, elles ont le désir de rencontrer l’Epoux et de ne pas le manquer. Les cinq insensées, au contraire, n’ont pris que ce qui leur semblait utile ; on n’a jamais vu un Epoux tarder à venir à sa propre noce. L’attendre n’est qu’une question de principe. Elles s’endorment comme les autres, et leurs lampes avec elles. Elles n’ont plus le désir d’attendre. Si les premières s’endorment avec le désir de la rencontre, les secondes s’endorment, fatiguées d’attendre ; il ne viendra plus !

Ainsi va la vie de l’Eglise et des croyants. Il y a ceux qui croient vraiment et qui attendent encore le retour du Christ sauveur, qui l’attendent avec la certitude qu’un jour ils verront Dieu, un jour, ils seront pour toujours avec le Seigneur. Et il y a ceux qui n’y croient plus vraiment, dont le désir de rencontre s’est affadi, perdu dans les sables de l’histoire. Ils sont croyants sans être vraiment pratiquants. Que le Christ vienne ou pas ne change rien à leur vie. Nous comprenons alors ce que le petit garçon n’avait pas compris. Les cinq prévoyantes ne peuvent pas donner de leur huile de réserve, parce que personne ne peut donner à un autre une part de son désir de voir Dieu. Si ce désir se perd et que la foi n’est qu’un ornement de notre vie, personne ne pourra nous donner un morceau de sa foi, un morceau de son désir.

Attendre Dieu, attendre le retour du Christ se fait de manière active, avec la certitude chevillée au cœur, que je dorme ou sois éveillé, qu’un jour, il viendra et que je dois être prêt pour ce jour. Si je me laisse surprendre parce que j’ai perdu l’envie de la rencontre, je resterai dehors de la salle du festin. Je m’entendrai dire, comme aux cinq insensées : Vraiment, je vous le dis : je ne vous connais pas.

La célébration eucharistique qui nous rassemble est un moyen de recharger l’huile de nos lampes pour ne jamais en manquer. Nous venons ici écouter la Parole de Dieu qui nous encourage à tenir bon ; nous venons recevoir le Pain consacré, signe de la présence du Christ au milieu de nous ; et nous chanterons, dans l’anamnèse, notre désir de son retour. Nous repartirons dans notre quotidien, forts de ce que Dieu lui-même nous aura partagé, capables de transformer notre monde et notre vie pour qu’ils correspondent toujours plus à ce que Dieu en attend. Pour attendre le retour du Christ, il ne s’agit pas de rester bloquer dans cette église, il s’agit d’y venir puiser à la source ce qu’il nous faut pour accomplir notre tâche d’homme et de chrétien au milieu de ce monde. Et si le sommeil de la mort s’empare de nous avant le retour du Christ, il s’agit de nous endormir encore avec le désir de voir Dieu : Dieu prendra avec lui ceux qui se sont endormis en Jésus.

Elles ne sont donc pas méchantes, les cinq jeunes filles qui avaient pris de l’huile en réserve ; elles sont juste habitées par un désir plus grand de voir l’Epoux venir, par le désir de l’accompagner et de le suivre. Qu’elles soient notre modèle pour réveiller en nous ce même désir de voir le Christ et nous rendre attentif à toujours avoir un peu d’huile de réserve. Qui sait : il pourrait venir aujourd’hui ! Amen.





(Dessin de Jean-Yves DECOTTIGNIES, in Mille Dimanches et fêtes, Année A, éditions Les presses d'Ile de France)