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Ce blog voudrait vous permettre de vivre un chemin spirituel au rythme de la liturgie de l'Eglise catholique.

Les méditations s'appuient soit sur les textes bibliques quotidiens, soit sur la prière de l'Eglise.

Puisque nous sommes tous responsables de la foi des autres, n'hésitez pas à laisser vos commentaires.

Nous pourrons ainsi nous enrichir de la réflexion des autres.







samedi 29 octobre 2016

31ème dimanche ordinaire C - 30 octobre 2016

Zachée, celui qui s'étant élevé a été abaissé, et s'étant abaissé a été élevé.




Qui s’élève sera abaissé ; qui s’abaisse, sera élevé. Qui ne connaît pas cette affirmation de Jésus. Elle n’est certes pas prononcée aujourd’hui, mais elle est mise en œuvre dans cette rencontre entre Zachée et Jésus, dans les deux sens. Voilà une rencontre que nous ne connaissons que trop. Et parce que nous ne la connaissons que trop bien, nous risquons bien de ne l’écouter plus qu’à moitié.  Je vais donc la relire à l’aune de cette citation de Jésus.

 Qui s’élève sera abaissé. C’est vrai pour Zachée, dans sa vie quotidienne. Il s’est élevé socialement en devenant chef des collecteurs d’impôts. Ah, ce n’est pas n’importe qui ! Aux yeux de l’Etat, il compte, le petit Zachée. Il n’est peut-être pas très grand par la taille, mais son travail, ce n’est pas rien. Il travaille au service de la puissante Rome. Il commande ces collaborateurs ; ceux qui l’ont embauché ont reconnu en lui les qualités d’un chef et d’un homme de confiance. Il manipule l’argent qui revient à l’empereur. Non, décidément, il n’est pas rien, Zachée. Le seul problème, c’est que ces contemporains, ceux issus du même peuple que lui, ne l’entendent pas ainsi. Pour eux, il est un traître, un collabo, un pécheur public. Et certainement, pensent-ils tous, il en profite pour les dépouiller sous couvert d’impôts à prélever. Zachée qui voulait s’élever est rabaissé bien violemment par ses compatriotes. Pour eux, il est sans intérêt. Ce n’est pas le genre de personnes qu’on fréquente quand on est quelqu’un de bien, quelqu’un de pieux, quelqu’un de droit. 
 
Qui s’élève sera abaissé. La vie de Zachée va prendre un nouveau tournant, sans qu’il s’y attende, à cause de Jésus. Il est de passage à Jéricho. Tous veulent voir Jésus, Zachée aussi. Et ce n’est ni la rumeur publique à son sujet, ni sa petite taille qui vont l’en empêcher. Comme personne ne lui fait de place, le voici qui grimpe dans un arbre. Pas très sérieux pour un chef des collecteurs d’impôts. Mais peut-être le signe que le Royaume n’est pas loin pour Zachée. Jésus n’a-t-il pas dit que le Royaume de Dieu est aux petits enfants et à ceux qui leur ressemblent ? En grimpant aux arbres malgré son âge, Zachée manifeste là une curieuse disposition pour le Royaume. Dans cet homme bat un cœur d’enfant, curieux de Jésus au point d’oublier qui il est et de grimper aux arbres. A moins que ce ne soit encore sa manie de vouloir s’élever, d’être au-dessus des autres et de tout contrôler. Il voulait voir Jésus, et voilà que c’est lui qui est vu par Jésus. Vu et appelé : Zachée, descends vite : aujourd’hui il faut que j’aille demeurer dans ta maison. Et le voilà « abaissé » par Jésus, obligé de quitter son arbre. 
 
Qui s’élève sera abaissé. Il nous faut remarquer ici que Zachée n’est pas le seul à être abaissé. Il y a la foule de tous ceux qui récriminent. Ils se croyaient meilleurs que Zachée, plus dignes que lui d’inviter Jésus pour un repas. Se comparant à Zachée, ils se sont élevés au-dessus de lui. En ne s’invitant pas chez eux, les bien-pensants, les bien-vivants, les bien-pratiquants, Jésus remet tout le monde à sa place, et lui le premier. Le Fils de l’homme est venu chercher et sauver ce qui était perdu. Voilà qui ressemble étrangement à cette autre parole de Jésus, prononcée dans des circonstances assez similaires (un repas avec des publicains et des pécheurs) : Je ne suis pas venu pour les bien-portants ni pour les justes, mais pour les malades et les pécheurs. Et toc pour ceux qui voulaient une place d’honneur ! 
 
Qui s’abaisse sera élevé. Ça a dû lui faire tout drôle, à Zachée, d’entendre quelqu’un s’inviter chez lui, devant tout le monde. Sait-il seulement à quand remonte la dernière fois que quelqu’un, que les autres tiennent pour important, s’est invité chez lui, publiquement ? Tout se passe alors très vite, et il reçoit Jésus avec joie. Je suis toujours impressionné par l’absence totale d’hésitation de la part de Zachée. A moins qu’il ne soit déjà « contaminé » par l’absence d’hésitation de Jésus : c’est chez Zachée qu’il doit aller aujourd’hui. A croire qu’il n’est venu à Jéricho que pour cette rencontre. C’est sûr ; avec toute cette histoire, avec cette priorité brûlée aux gens qui se croient bien, la cote de popularité de Zachée ne va pas remonter : les autres récriminent déjà. Déjà, on ne parle plus que de cela ! On peut déjà imaginer la une du Pharisien libéré : Jésus se commet avec un pécheur ! Et c’est là que l’incroyable se produit. Zachée ne se gonfle pas d’orgueil ; il ne joue pas à celui qui a reçu Jésus chez lui. Mais devant l’amour manifesté par Jésus, Zachée s’abaisse : Voici, Seigneur, je fais don aux pauvres de la moitié de mes biens, et si j’ai fait du tort à quelqu’un, je vais lui rendre quatre fois plus. Ce qui lui vaut cette indulgence plénière de la part de Jésus : Aujourd’hui, le salut est arrivé pour cette maison. Le Fils de l’homme ne se commet pas avec des pécheurs pour le plaisir d’être avec des pécheurs, mais pour assouvir son désir de sauver tous les hommes. Il manifeste ainsi qu’il est bien de Dieu, né du vrai Dieu, celui-là seul qui aime passionnément l’homme au point de le sauver, toujours. Nous pouvons alors comprendre que ce désir est profond en Dieu, bien ancien puisque déjà chanté par l’auteur du livre de la Sagesse quand il médite, au regard de l’histoire d’Israël, sur qui est Dieu et comment il agit avec son peuple. Tu aimes en effet tout ce qui existe, tu n’as de répulsion envers aucune de tes œuvres… En fait, tu épargnes tous les êtres, parce qu’ils sont à toi, Maître qui aimes les vivants, toi dont le souffle impérissable les anime tous. Ceux qui tombent, tu les reprends peu à peu, tu les avertis, tu leur rappelles en quoi ils pèchent, pour qu’ils se détournent du mal et croient en toi, Seigneur. 
 
Qui s’abaisse sera élevé. C’est l’effet de la miséricorde divine, et il ne se dément jamais. Ce qui était vrai jadis de Zachée est vrai de nous aujourd’hui. Si nous reconnaissons nos limites, nos faiblesses, notre péché, si nous prenons la résolution de changer parce que nous avons accueilli Jésus dans notre vie, nous serons sauvés, nous serons élevés pour vivre à la hauteur de Dieu, pour vivre de son amour et dans son amour pour toujours. Réveillons le Zachée qui dort en nous, laissons-nous visiter par Jésus et avec empressement, accueillons-le dans la joie. Osons nous abaisser devant sa tendresse et nous serons élevés par son amour. Amen.

samedi 22 octobre 2016

30ème dimanche ordinaire C - 23 octobre 2016

Un pauvre crie ; le Seigneur entend.




Un pauvre crie ; le Seigneur entend. L’antienne du psaume de ce dimanche donne le ton et nous fait comprendre, dans le foisonnement des paroles entendues, ce qui est utile, ce qu’il est bon de retenir. Au cœur de la foi biblique, il y a bien cette certitude, profondément ancrée, que Dieu ne reste pas sourd à celui qui crie vers lui.  
 
Ben Sirac le Sage proclame aussi cette certitude : le Seigneur est un juge qui se montre impartial envers les personnes. Il ne défavorise pas le pauvre, il écoute la prière de l’opprimé. Voilà prévenus celles et ceux qui ne respectent pas la justice, celles et ceux qui oppriment, celles et ceux qui exploitent les hommes. Les pauvres, les opprimés, les exploités ont un défenseur puissant, un protecteur qui veille. Quand bien même Dieu voudrait rester sourd à leurs appels, la prière du pauvre traverse les nuées… il persévère tant que le Très-Haut n’a pas jeté les yeux sur lui, ni prononcé la sentence en faveur des juste et rendu justice. Il nous faut alors nous souvenir de la parole de Jésus entendue dimanche dernier : Dieu ne ferait pas justice à ses élus qui crient vers lui jour et nuit ? Les fait-il attendre ? Je vous le déclare : bien vite, il leur fera justice. Si donc tu veux que ta prière soit entendue, présente-la à Dieu comme un pauvre, comme quelqu’un qui attend tout de lui. Crie vers lui sans cesse. 
 
N’est-ce pas cette même certitude que Jésus lui-même enseigne encore ce dimanche lorsqu’il raconte la parabole du pharisien et du publicain qui montent au Temple pour prier ? Pourquoi l’un est-il entendu et rendu juste et pas l’autre ? Ils se tournent pourtant tous deux vers le même Dieu, dans le même lieu, le Temple, demeure du Très-Haut au milieu des hommes. Parce que l’art et la manière de présenter à Dieu leur prière n’est pas identique. Il y a le pharisien qui est plein de lui, plein des bonnes actions qu’il réalise assurément. Et il y a le publicain qui se sait pauvre et pécheur ; il sait qu’il n’égalera jamais Dieu. Il n’a rien d’autre à mettre en avant que ses limites, ses faiblesses, attendant de Dieu un signe, un geste, un pardon, un amour renouvelé. Il est un pauvre, y compris dans sa foi, y compris dans sa manière de la vivre et il attend de Dieu sa miséricorde. Comment Dieu, source de toute miséricorde, pourrait-il rester sourd à cet appel au secours ? 
 
Cette certitude que Dieu répond au cri du malheureux est celle qui remplit l’Eglise lorsqu’elle célèbre le sacrement du baptême. Elle ne baptise pas des gens parfaits ; elle ne réserve pas seulement son accueil à ceux qui croient parfaitement. Elle ouvre les portes de son Eglise à ceux qui savent que Dieu est tout, que tout vient de lui, et que devant lui, nous ne sommes que petits, pécheurs, faibles. Le baptême est donné pour la rémission des péchés. C’est le premier sacrement du pardon. L’enfant que nous accueillons au cours de cette eucharistie et qui passera tout à l’heure par les eaux baptismales sera ainsi libéré du péché, du Mal et de la Mort. Par ce bain d’eau, il sera reconnu enfant de Dieu et Dieu l’adoptera comme sien pour une vie sans fin. Nous ne le présentons pas parce que nous sommes de bons chrétiens ; nous le présentons parce que nous savons que Dieu peut tout pour lui et qu’il marchera à ses côtés, veillant sur lui, pour le conduire à la vie éternelle. Le baptême n’est définitivement pas un sacrement pour les parfaits, mais pour celles et ceux qui ont besoin de Dieu, qui ont le désir de Dieu. Et parce que Dieu entend la prière de ceux qui le désirent, il répond favorablement à cette demande. L’eau de la vie jaillira au milieu de nous, Dieu s’engagera envers cet enfant, il fera alliance avec lui. 
 
Cette alliance, nous l’avons tous vécu. Sans doute, si nous avons été baptisés bébé, ne nous en souvenons-nous pas. Mais nous avons grandi sous le regard de Dieu. Nous ne sommes ni pires, ni meilleurs que les autres : certains jours un peu plus pharisien, certains jours un peu plus publicain. Souvenons-nous tout au long de notre vie de ce que le psalmiste nous a fait chanter : un pauvre crie, le Seigneur entend. Gardons au cœur le désir vrai de Dieu ; que le baptême que nous allons célébrer renouvelle la source vive qui coule en nous. Et nous saurons nous situer en fils devant Dieu qui nous aime ; et nous saurons rendre grâce à Dieu, non de ce que nous sommes ou faisons, mais de ce que Dieu réalise pour nous, jour après jour. Qu’il soit le Maître de notre vie, aujourd’hui et toujours. Amen.

(Dessin de Jean-Yves DECOTTIGNIES, in Mille dimanches et fêtes, Année C, éd. Les Presses d'Ile de France)

samedi 15 octobre 2016

29ème dimanche ordinaire C - 16 octobre 2016

Proclame la Parole, interviens à temps et à contretemps !




Dans un monde en perte de sens et de repères, dans lequel même l’action politique semble vaine tant le discours est bas, il est des gestes qui redonnent un peu d’espoir et de hauteur de vue. Tel a été le cas, le 08 octobre dernier, dans notre diocèse. Ce jour-là, en la cathédrale, l’Enseignement catholique a reçu des mains de Mgr Grallet, un nouveau projet diocésain. Non pas un truc en plus, avec des choses à faire, mais d’abord un texte qui rappelle le sens profond de notre agir et les moyens que nous voulons mettre en œuvre pour réaliser la mission que l’Eglise confie à son école : annoncer le Christ à tous les hommes. 
 
Dans ce texte, qui est ainsi devenu fondamental pour tous nos établissements scolaires catholiques en Alsace, trois axes sont déployés. Ils annoncent l’œuvre immense à accomplir pour réenchanter l’école (premier axe), pour accompagner la personne (deuxième axe), pour s’ouvrir au monde (troisième axe). Ils sont l’ADN de l’Enseignement catholique parce qu’ils reprennent l’ADN de l’Evangile. Peut-on annoncer le Christ sans redonner du sens ? Peut-on annoncer le Christ sans mettre la personne humaine au cœur de notre agir ? Peut-on annoncer le Christ sans être ouvert à tous ? Non, non, et non. Notre horizon, c’est le Christ ; ce avec quoi nous travaillons, c’est l’humanité dans laquelle le Christ s’est incarné ; ce pour quoi nous travaillons, c’est faire connaître le Christ dans le respect de tous. Et comment faire connaître le Christ et son œuvre de salut sans d’abord former des garçons et des filles à appréhender intellectuellement le monde dans lequel ils vivent, avec le regard de notre foi ? La foi chrétienne n’est pas imposée dans nos écoles, elle est proposée comme un chemin de compréhension, éclairant notre raison. Il arrive que la raison, éclairée par la foi, laisse un peu de place à un cheminement spirituel et à un désir de marcher avec Dieu. J’en veux pour preuve qu’au lendemain de cette proclamation du projet diocésain, j’ai ainsi eu la joie de baptiser trois adolescents dans un de nos établissements scolaires, comme pour marquer que l’œuvre que nous accomplissons, si elle semble souvent obscure et cachée, aboutit quand même à des conversions et à un désir sincère de marcher avec le Christ. 
 
Je comprends d’autant mieux alors l’insistance de Paul à annoncer le Christ, à proclamer la Parole, à intervenir à temps et à contretemps. C’est un devoir inlassable pour chaque croyant, pour l’école catholique en particulier. Cette Parole donne du sens à une existence, nous le savons. Paul insiste et précise que cette Parole est utile pour enseigner, dénoncer le Mal, redresser, éduquer dans la justice ; grâce à elle, l’homme de Dieu sera accompli, équipé pour faire toute sorte de bien. Ce n’est donc pas une parole à réserver au dimanche matin, lorsque les croyants se rencontrent. C’est une parole à adresser à tous, croyants ou non, pour qu’elle puisse faire son chemin dans le cœur des hommes. Ne nous étonnons pas devant la baisse de la foi si la Parole n’est plus annoncée à tous, si elle ne mène plus nos existences ! Comment un homme pourrait-il se convertir si la Parole ne lui était jamais adressée, annoncée dans toute sa grandeur et toute son exigence ? Comment le croyant pourrait-il rester un homme de bien si la Parole de Dieu n’éclairait pas son quotidien, ne nourrissait pas ses actes et ses propres paroles ? Nous n’avons, et nous n’aurons que cette seule Parole pour convaincre les hommes, les inviter à changer de vie et à suivre le Christ ; nous n’avons, et nous n’aurons que cette seule Parole et ce qu’elle produit dans notre propre vie pour attirer les hommes au Christ. Proclamer la Parole revient à la dire et à la vivre. Parce que cette Parole ne peut rester de simples mots ; elle est Parole vivante, Parole qui engage, Parole qui transforme. 
 
Nous pouvons être surpris par le fait que Paul ne précise pas que cette Parole, qui vient de Dieu, conduit à Dieu ! Fallait-il le préciser ? Depuis que Dieu s’est fait homme en Jésus Christ, nous savons que l’homme est chemin vers Dieu et que notre manière d’agir avec les hommes reflète notre manière d’agir avec Dieu. Ce que vous avez fait à l’un de ces petits qui sont mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait ; cette parole de Jésus doit plus que jamais nous habiter et nous pousser à mettre l’homme au cœur de nos préoccupations, car seulement ainsi Dieu sera lui-même au cœur de nos préoccupations. Je me demande même si, en nous tournant vers les hommes pour leur parler de Dieu, nous ne nous tournons pas en même temps vers Dieu pour lui parler des hommes dont nous avons le souci. L’œuvre d’évangélisation devient ainsi œuvre de prière, seule manière pour l’homme de s’ouvrir à Dieu, moyen par excellence pour Dieu d’ouvrir le cœur des hommes à sa Parole. Nous rejoignons ainsi la pensée de Paul qui dit bien que c’est la Parole de Dieu et non notre parole qui a le pouvoir de transmettre la sagesse. En mettant Dieu en présence des hommes par sa Parole, nous mettons bien les hommes en présence de Dieu ; nous aurons ainsi fait notre part du travail. Le reste relève de ce qui se jouera, ou pas, entre Dieu et ceux à qui nous avons parlé de lui. Le résultat ne dépend pas de nous ! 
 
Ne nous lassons pas de nous mettre personnellement à l’écoute de la Parole de Dieu. Ne nous lassons pas de proposer cette Parole à nos contemporains en manque de repères. Nous ne la gâchons pas à la proposer largement ; c’est même le seul moyen de la faire vivre vraiment. Amen.

(Dessin de Coolus, Blog du lapin bleu)

samedi 8 octobre 2016

28ème dimanche ordinaire C - 09 octobre 2016

Naaman, une certaine idée de la religion.




Désormais, je le sais : il n’y a pas d’autre Dieu, sur toute la terre, que celui d’Israël ! » Cette belle profession de foi nous vient d’un païen, un non juif, à une époque où on ne parlait pas encore de Jésus, ni même d’un messie à venir. Elle pourrait induire en erreur celui qui n’entendrait que ce passage lu ce matin, et faire croire que Naaman, le païen, parvient à la foi facilement. Son désir de ne plus offrir ni holocauste ni sacrifice à d’autres dieux qu’au Seigneur Dieu d’Israël a bien failli n’être jamais exprimé. Car l’histoire commence bien mal. 
 
Naaman est un général du roi d’Aram, un peuple souvent en guerre contre Israël. Il a une servante, capturée lors d’une razzia en territoire d’Israël. Lorsque Naaman devient lépreux, c’est cette jeune servante qui parle à sa maîtresse du prophète Elisée, en Samarie, qui pourrait le délivrer de la lèpre. La lecture de ce dimanche permet désormais de recoller les morceaux : Naaman vient en Israël, se rapproche d’Elisée qui l’envoie se baigner sept fois dans le Jourdain pour être guéri. Les versets 14 à 17 nous ont donné à voir Naaman descendre jusqu’au Jourdain et s’y plonger sept fois, pour obéir à la parole d’Elisée, l’homme de Dieu. Alors sa chair redevint semblable à celle d’un petit enfant : il était purifié ! Le problème, c’est que le passage de la liturgie nous cache la résistance de Naaman. Il ne suffit pas que le prophète lui fasse dire de se baigner pour qu’il y aille. Bien au contraire ! Pour ce général, aller se baigner est une chose trop simple ! A croire qu’on le prend pour un imbécile. De plus, Elisée ne l’a même pas rencontré ; il a envoyé un serviteur dire au général ce qu’il aurait à faire. Une fois la consigne passée, Naaman se met en colère en disant : Je m’étais dit : Sûrement il va sortir, et se tenir debout pour invoquer le nom du Seigneur son Dieu ; puis il agitera sa main au-dessus de l’endroit malade et guérira ma lèpre. Il attendait autre chose, Naaman ; il voulait un magicien, un guérisseur, quelqu’un qui s’agite au-dessus de ses plaies. Il n’a qu’un ordre, simple au demeurant : va te baigner dans le Jourdain. Il s’attendait à un spectacle religieux, à quelque chose de grandiose ; il n’a qu’une prescription de bain, rapportée de seconde main. Il faudra la sagesse de ses propres serviteurs pour que Naaman, enfin, s’applique à respecter la consigne donnée. Si le prophète t’avait ordonné quelque chose de difficile, tu l’aurais fait, n’est-ce pas ? Combien plus lorsqu’il te dit : « Baigne-toi, et tu seras purifié ». La suite, nous la connaissons. On peut dire que Naaman est passé d’une certaine idée de la religion à la foi en apprenant l’obéissance à la parole de Dieu. 
 
Comprenez-vous ce qui est en jeu ? Naaman, comme beaucoup de nos contemporains, veut une religion spectacle. Avec Dieu, il faut que ça swingue ! Avec Dieu, il faut du fun ! Avec Dieu, il faut des étoiles pleins les yeux ! Combien de fois ai-je entendu : moi je vais à la messe une fois par mois, à la messe des familles ou lors du dimanche autrement, parce que là, tu comprends, c’est mieux, il se passe des choses, ça bouge, c’est créatif…. Je ne nie pas l’importance de ces rendez-vous ; j’en ai fait moi-même, avant même que ce ne soit la mode dans les paroisses. Le problème, c’est qu’on ne doit pas faire de spectacle, n’est-ce pas ! La simplicité convient bien mieux à Dieu et à sa manière de nous respecter. Pas besoin de tambour, ni de trompette, ni de feux d’artifices pour le rencontrer. Pas besoin de grandes manifestations, de grands efforts pour le suivre. Il suffit de s’attacher à sa Parole et de la suivre. Va te baigner, et tu seras purifié !
 
C’est la même parole qui a été adressée à Emma, Anastasia et Stan et qui va se concrétiser dans un instant pour eux. Le bain de Naaman qui le purifie de sa lèpre annonce déjà le bain du baptême dans lequel nous plongeons pour être purifié de la lèpre du péché. Par ce simple bain, nous sommes reconnus comme fils et filles de Dieu, désireux de marcher à la suite du Christ, libérés de tout ce qui nous empêche d’être pleinement libres et heureux. Je ne ferai pas de magie ce matin ; je ne m’agiterai pas au-dessus ou à côté d’Emma, d’Anastasia et de Stan : je leur verserai juste un peu d’eau sur la tête, les oindrai avec un peu d’huile, et ils seront fils et filles de Dieu, frères et sœurs du Christ. Un peu d’eau et un peu d’huile suffisent pour revêtir le vêtement de ceux qui ont déjà, en Jésus, remporté la victoire sur toutes les forces du Mal et de la Mort. Un peu d’eau, un peu d’huile, un vêtement blanc, c’est tout ce qu’il faut pour marcher à la lumière du Christ. Un peu d’eau, un peu d’huile, un vêtement blanc et un cierge, c’est tout ce que vous aurez et c’est tout ce qu’il vous faudra pour avancer à la suite du Christ et vous approcher un jour, que j’espère prochain, de la table où Dieu nous rassemble pour nous donner son corps et son sang, offerts pour la vie du monde. Oui, vous n’aurez qu’un peu d’eau, qu’un peu d’huile, qu’un vêtement blanc et un cierge, et une parole. La Parole du Christ lui-même qui vous a déjà séduit puisque vous êtes là, ce matin, pour dire votre désir de le suivre. Une parole qui vous entrainera encore et toujours à la rencontre de vos frères et donc du Christ, qui vit en chacun d’eux. Il y a des jours comme aujourd’hui où cette parole vous semblera belle et grande, capable de vous mettre en route ; il y aura des jours où cette parole vous semblera fade et faible. Mais ce sera toujours la même parole, la seule et unique parole de Dieu qui vous appellera, qui vous invitera à aller de l’avant, à poursuivre votre chemin de foi, à poursuivre votre chemin d’humanité. Plus vous grandirez en humanité, plus vous grandirez en sainteté. Plus vous grandirez en sainteté, plus vous grandirez en humanité, devenant homme et femme à la mesure de Dieu, comprenant que rien ne vaut plus que l’amour offert. 
 
Emma, Anastasia Stan, vous avez magnifiquement exprimé cette simplicité qui sied à Dieu en nous rappelant, au début de cette célébration, comment Jésus était déjà votre lumière et comment a grandi en vous le désir du baptême. Il n’y avait pas de manifestation extraordinaire ; juste la présence et le témoignage de gens qui vous sont proches, juste ce désir de vivre de celui dont vivent les chrétiens. Gardez toujours cette simplicité ; et vous serez, à votre tour pour d’autres, témoins de ce Dieu qui appelle tous les hommes à la vie et à la joie. Oui, devenez désormais pour d’autres, ce que ces autres dont vous avez parlé ont été pour vous : des témoins, des porteurs d’une parole qui donne envie de vivre en plus grand. Amen.

samedi 1 octobre 2016

27ème dimanche ordinaire C - 02 octobre 2016

Fidélité dans la foi.





Qui ne s’est jamais senti comme le prophète Habacuc, à crier vers Dieu avec ce sentiment étrange de n’être pas entendu ? Qui n’a jamais désespéré devant le Mal et la violence qui semblent s’aggraver chaque jour ? Où est Dieu ? Que fait-il ? Pourquoi permet-il ? Il suffit d’ouvrir un journal pour constater les multiples occasions que nous avons ainsi de crier vers Dieu… y compris au sein de l’Eglise ! Combien de temps aurons-nous à supporter ce triomphe insupportable du Mal ? 
 
Pour trouver une issue, il nous faut déjà entendre la réponse de Dieu lui-même à son prophète. Face au Mal qui règne, il faut rester fidèle au Dieu de l’Alliance : le juste vivra par sa fidélité, affirme le prophète. Dieu n’oublie donc pas son peuple ; Dieu n’oublie pas le droit et la justice. Il interviendra, certainement et sans retard, assure encore le prohpète. Celui qui est révolté par le Mal doit entrer en résistance et espérer contre toute espérance. Le Mal ne peut avoir le dernier mot que si les hommes lui laissent le dernier mot. Avec son Alliance, Dieu a donné aux hommes la capacité à lutter contre le Mal. Les commandements du Seigneur sont autant de voies pour résister au Mal, pour l'empêcher de gouverner le monde. Mais peut-être faut-il d’abord à l’homme écarter le Mal de sa propre vie. Il n’y a pas de grand Mal et de petit Mal ; il n’y a que le Mal, quelle que soit son intensité. Ce qui fait que nos petites mesquineries, nos petites querelles, nos petits mensonges sont tous aussi néfastes que les attentats, la guerre, les violences institutionnelles. La fidélité du croyant à Dieu va lui permettre de lutter contre le Mal, d’abord dans sa propre vie. Tout commence là, chez nous, dans notre propre existence, dans nos propres relations, dans nos propres manières d’être. Il ne sert à rien d’être impatient face au Mal qui ronge le monde si je ne suis pas prêt à chasser le Mal de ma propre vie. Il ne sert à rien d’attendre que Dieu intervienne si je ne veux rien changer dans ma propre manière de faire. Tout commence par moi, ou pas ! 
 
Cette analyse est renforcée par le psalmiste. La clé de la fidélité, c’est l’écoute du Seigneur : Aujourd’hui, ne fermez pas votre cœur, mais écoutez la voix du Seigneur ! Ce psaume 94 qui a servi de réponse à la première lecture nous invite à la joie, à l’action de grâce car Dieu est notre Rocher, notre salut. Il n’y a pas à en douter ! Il est celui qui nous a faits… nous sommes le peuple qu’il conduit. La part de Dieu dans l’Alliance est donc pleinement respectée. Il veille sur nous. Jamais le Mal ne pourra avoir de prise sur nous. Nous ne pourrons peut-être pas toujours éviter le Mal que l’on nous fait, mais nous pouvons toujours éviter que le Mal se fasse par nous ! A condition d’être attentifs à sa parole : Aujourd’hui écouterez-vous sa Parole ? Ne fermez pas votre cœur comme au désert ! L’homme sait, par son expérience, par l’histoire du peuple auquel il appartient, ce qu’il peut vivre selon qu’il soit attentif à Dieu et fidèle à sa parole ou pas. Ce qui arrive au temps d’Habacuc n’est pas nouveau ; ce n’est pas la première fois que le Mal semble triompher. Ceux qui suivent Dieu savent comment, par le passé, leur peuple s’en est sorti. Pourquoi aujourd’hui cela serait-il différent ? L’homme ne peut pas à la fois se détourner de Dieu et attendre de lui qu’il règle tous ses problèmes ! La seule réponse à la permanence du Mal, c’est la permanence de la foi. 
 
D’ailleurs, dans l’Evangile, Jésus ne rappelle-t-il pas à ses disciples que la foi vient de Dieu et qu’à témoigner de lui, on ne fait que notre « travail de disciple ». Dieu donne la foi à qui la demande ; il la donne entièrement, pas par petit bout. De même qu'il n'y a pas de grand Mal et de petit Mal, il n'y a pas de grande foi ou de petite foi, il n'y a que la foi. Il n’est donc pas besoin de la faire grandir. Il faut juste oser la demander, oser l'accueillir, oser ce saut dans la foi qui change une vie, ce saut dans la foi qui permet de croire que l’impossible est possible : si vous aviez de la foi, gros comme une graine de moutarde, vous auriez dit à l’arbre que voici : ‘Déracine-toi et va te planter dans la mer’, et il vous aurait obéi, nous assure Jésus. Cette foi que nous avons reçue, cette foi qui nous a été transmise, peut-être l’avons-nous oubliée, perdue dans les sables mouvants de notre histoire, de nos faiblesses, de nos manquements. Mais nous pouvons toujours la demander, nous pouvons l’accueillir à nouveau et renouveler sa puissance dans le sacrement du pardon et de la réconciliation. Nous pouvons toujours refaire le choix de Dieu, refaire le choix de la foi accueillie, vécue et partagée. 
 
Alors, certainement, le Mal sera battu en brèche. Alors, certainement, Dieu répondra à notre appel. Il ne fera rien sans nous ; il ne fera rien contre nous. A nous de savoir ce que nous voulons. A nous de lutter contre le Mal, et Dieu nous aidera, Dieu nous favorisera, Dieu nous sauvera. Arrêtons donc de rêver un monde d’où le Mal serait absent et commençons à le construire, ici et maintenant, dans la force de l’Esprit Saint. Amen.