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Ce blog voudrait vous permettre de vivre un chemin spirituel au rythme de la liturgie de l'Eglise catholique.

Les méditations s'appuient soit sur les textes bibliques quotidiens, soit sur la prière de l'Eglise.

Puisque nous sommes tous responsables de la foi des autres, n'hésitez pas à laisser vos commentaires.

Nous pourrons ainsi nous enrichir de la réflexion des autres.







samedi 27 juin 2020

13ème dimanche ordinaire A - 28 juin 2020

De l'urgence d'accueillir toujours.






            Voilà un dimanche qui ne plaira pas à ceux qui trouvent qu’il y a vraiment trop d’étrangers chez nous. Voilà un dimanche qui ne plaira pas davantage aux champions du chacun chez soi et du chacun pour soi. Car voilà un dimanche qui nous parle de l’urgence d’accueillir toujours. 

            L’extrait du deuxième livre des Rois nous parle expressément de l’accueil que reçoit le prophète Elisée chez une femme riche du pays de Sunam. Elle insiste, nous dit l’auteur du livre, pour qu’il vienne manger chez elle à chacun de ses passages, et finit même par lui installer une petite chambre. Certains diront alors : elle est riche, elle peut se permettre ces aménagements. C’est facile d’être accueillant quand on en a les moyens. Est-ce si sûr ? D’autres diront : elle a conscience qu’Elisée est un homme de Dieu ; son accueil, c’est juste intéressé ! Ah bon ? En principe, les hommes de Dieu, les gens les évitent. C’est bien connu, quand tu veux passer une bonne soirée, tu évites d’inviter ton curé, ton rabbin ou ton imam. Y’a pas pire rabat-joie ! Quant à cette femme riche, remarquez bien qu’elle ne demande jamais rien en échange de son accueil. C’est le prophète qui décide de faire quelque chose pour celle qui a déjà tant fait pour lui. L’accueil volontaire, gratuit, n’est jamais déçu ; un bienfait donné n’est jamais perdu. L’homme de Dieu récompensera celle qui l’accueille ainsi. Elle aura ce qu’elle désire le plus : un enfant. 

            Dans l’Evangile, Jésus va donner du sens à l’accueil : Qui vous accueille, m’accueille ; et qui m’accueille, accueille Celui qui m’a envoyé. Derrière celui qui est accueilli, il y a le Christ ; derrière le Christ, il y a Dieu. Pourrait-il en être autrement depuis que Dieu s’est fait homme en Jésus ? Pourrait-il en être autrement avec un Dieu qui a pris le parti de l’homme ? Puisque Dieu est présent en chaque homme, accueillir quelqu’un, c’est accueillir la part de Dieu qui est en lui. Aime Dieu et ton prochain se traduit bien dans l’accueil du prochain qui devient l’accueil de Dieu. Certains diront alors : quand Jésus parle de l’accueil dans cet évangile, il ne parle pas de l’accueil de tous, mais de l’accueil que les gens réserveront à ses Apôtres. C’est à eux seuls qu’il s’adresse dans ce passage ! Certes, mais cela ne signifie pas que cela ne s’étend pas à tous. Qui prendrait le risque de laisser Dieu et le Christ devant sa porte parce qu’il ne connaît pas a priori la qualité de disciples de celui qui frappe à sa porte ? N’est-ce pas là un risque trop grand ? Dans le doute, abstenons-nous de nous abstenir d’accueillir ! Il vaut mieux être généreux dans notre accueil, plutôt que de laisser le Christ à la porte de notre vie. Ce serait bien plus grave que d’accueillir tout le monde, non ? Et pouvons-nous honnêtement, sans danger pour nous, refuser d’accueillir alors que nous sommes reconnus comme disciples du Christ ? Ne donnerions-nous pas l’impression, qu’à travers nous, c’est le Christ qui refuse d’accueillir, que c’est le Christ qui rejette ? Ce serait pire que tout, non ? Souvenons-nous de l’avertissement de Jésus : J’étais un étranger, et vous m’avez accueilli… Chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces petits qui sont mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait. 

            Que cette femme de Sunam nous inspire l’attitude juste et nous partage son sens de l’hospitalité. Que l’enseignement du Christ nous stimule à accueillir sa présence en tout homme, et à témoigner de sa présence en nous. Il a livré sa vie pour tous les hommes ; nous ne saurions faire moins de notre capacité d’accueil. A cause de Jésus et de son amour pour tous les hommes, il y a urgence d’accueillir. Amen.

(Tableau d'Yvette Metz, Série Les enfants d'Abraham)

samedi 20 juin 2020

12ème dimanche ordinaire A - 21 juin 2020

Ne craignez pas !





            Avez-vous remarqué comme Jérémie est confiant alors même qu’il doit affronter la rage de ses ennemis ? Bien qu’il soit attaqué de toute part, il garde une grande confiance en Dieu, en qui il a mis toute son espérance et de qui il attend le salut. Si on rapproche alors ce texte de l’Evangile de ce dimanche, il devient évident qu’un mot d’ordre se dégage qui doit nous inspirer aujourd’hui : Ne craignez pas ! Autrement dit : N’ayez pas peur ! 

            En trois mots, voilà plus qu’un slogan ; en trois mots, voilà donné pour nous et les hommes de notre temps, une vraie règle de conduite. Après le temps du confinement, après les temps un, puis deux du déconfinement, voilà un appel qu’il nous faut entendre comme étant vraiment Parole de Dieu pour nous aujourd’hui, Parole qui nous sauve, Parole qui nous libère. Je peux comprendre la prudence ; je peux entendre et accepter la nécessité de gestes barrières, de mesures de distanciation physique, toutes choses utiles. Mais je ne peux accepter que l’on ait plongé des contingents entiers de nos compatriotes dans une peur telle que, même lorsqu’ils ne font pas partis des personnes fragiles ou à risque, les voilà auto-confinés, prisonniers volontaires et apeurés, ne se risquant même plus à faire les courses élémentaires, par peur de… Vous comprenez, même si je sais être très prudent, je peux être contaminé par l’insouciance d’un autre ; donc je reste chez moi, je ne vois personne, je n’accueille personne. Je me replie, je m’enferme, je me protège. J’ai déjà eu l’occasion de le dire : peur et prudence sont aussi éloignées l’une de l’autre que peuvent l’être le ciel et la terre. Il est vrai que les discours des politiques, les positions souvent contradictoires des scientifiques et l’égrenage quotidien du nombre de morts durant cette pandémie, sans donner en contrepartie le nombre de guéris et maintenant les plaintes en justice parce qu’il faut bien un ou des coupables, ont contribué à distiller la peur. Le problème c’est que cet instrument de gouvernement par défaut qu’est la peur, s’est installé durablement dans l’esprit de certains et nous sommes bien en peine d’en mesurer les dégâts aujourd’hui. Mais je crains bien qu’ils ne soient pires que ceux du virus dont nous cherchons tous à nous protéger. 

            Ne craignez pas ! Il nous faut accueillir cette parole du Christ comme une vraie libération. Elle n’est pas une invitation à faire n’importe quoi, ni à ignorer les règles d’hygiène de base. Elle est une invitation à ne pas oublier que nous sommes dans la main de Dieu et nous avons du prix pour lui : Soyez sans crainte, vous valez plus qu’une multitude de moineaux. En ces temps difficiles, il nous faut retrouver la confiance d’un prophète Jérémie qui savait encore se confier à Dieu alors que, tout autour de lui, tous cherchaient à lui nuire, amis comme ennemis. En ces temps difficiles, il nous faut avoir la confiance du psalmiste qui chante la tendresse et la miséricorde de Dieu à son égard : Dans ta grande tendresse, regarde-moi ; il est bon ton amour. En ces temps difficiles, il nous faut avoir la confiance que le Christ nous demande de vivre, confiance qu’il a vécu le premier lorsqu’il était cloué en croix : Père, en tes mains, je remets mon esprit. La foi en Dieu, qui a livré son Fils pour notre salut, nous ouvre à cette confiance essentielle et primordiale ; elle nous redit que Dieu veut notre bien ; elle nous dit que Dieu veut notre vie marquée du sceau de l’éternité. Foi et confiance ont d’ailleurs la même racine, de sorte qu’on ne peut avoir l’une sans vivre l’autre. L’expérience de Jérémie, l’expérience du Christ lui-même, nous disent que Dieu ne veut pas notre malheur et qu’en conséquence notre confiance en lui doit être totale. Comment vaincre le mal si nous ne lui accordons pas cette confiance ? Comment accueillir son Esprit en nous, si nous ne lui accordons pas cette confiance ? La peur et la foi, c’est comme l’huile et l’eau : ça ne va pas ensemble ! La peur est la négation de la confiance ; la confiance est le remède à la peur. 

            Ne craignez pas ! Plus que jamais, il nous faut entrer dans cette confiance primordiale si nous voulons vaincre le Mal. Plus que jamais, il nous faut entrer dans cette confiance essentielle si nous ne voulons pas voir notre vie sociale complètement détruite. Plus que jamais, il nous faut entrer dans cette confiance absolue en Dieu qui veut pour nous la vie si nous ne voulons pas nous enfermer davantage dans des postures mortifères. Le Seigneur écoute les humbles, il n’oublie pas les siens emprisonnés. Que cette parole du psalmiste nous inspire et nous guide. Amen.

 

(Photo de Bertrand Wittmann & Jean-Michel Duband, Chemin de croix, Station 1, réalisé par Francis Schneider, église de Fort-Louis - Bas Rhin)

samedi 13 juin 2020

Fête du Corps et du Sang du Christ A - 14 juin 2020

L'eucharistie, un sacrement à vivre.







            Après la Trinité, fête éminemment chrétienne, voici la fête du Corps et du Sang du Christ, éminemment catholique. S’il n’y avait pas les restrictions sanitaires, nous aurions tous été à Mommenheim pour ce qui est pour beaucoup le point d’orgue de cette fête : la procession du Saint Sacrement dans toute la cité, avec des haltes de prières réparties judicieusement sur le parcours. Authentiquement catholique, parce qu’elle met en lumière ce que nous disons de la présence réelle et permanente du Christ dans l’hostie consacrée. L’eucharistie n’est pas un « prêt à consommer » ; l’eucharistie est un « prêt à vivre et à adorer ». C’est tout le sens de ces antiques processions qui retrouvent une nouvelle jeunesse depuis quelques années. En cette année où nous en sommes privés, nous pouvons nous interroger sur le sens de cette démarche. Est-elle vraiment l’affirmation de la présence du Christ au milieu de nos cités et de notre union intime à lui, ou n’est-elle qu’une forme d’idole, à laquelle nous sacrifions par habitude, plus occupés à échanger les nouvelles qu’à vraiment adorer le Christ, présent dans l’eucharistie, quand il passe devant nous ? 

            L’extrait de la première lettre aux Corinthiens que nous avons entendu nous permet d’approfondir notre réflexion. Voyez-vous, ces deux versets sont tirés d’un passage plus grand consacré à l’idolâtrie, et plus particulièrement aux repas pendant lesquels on consommait les viandes qui venaient d’être offertes en sacrifice. Dans les versets qui suivent ceux que nous avons entendu, Paul dit clairement que lorsqu’on mange le sacrifice offert, on communie à l’autel sur lequel cette viande a été offerte. Il y a un lien intime entre ce que l’on offre, celui à qui on offre et ce qui est offert. Offrir un sacrifice à une idole, c’est s’unir à cette idole ; manger de la viande qui lui est offerte, c’est s’unir à l’idole. C’est le même phénomène qui joue pour les chrétiens lorsqu’ils communient au pain et au vin consacrés. Les questions posées par Paul n’appellent qu’une réponse : Si, bien sûr. La coupe de bénédiction que nous bénissons, n’est-elle pas communion au sang du Christ ? Si, bien sûr ! Le pain que nous rompons, n’est-il pas communion au corps du Christ ? Si, bien sûr ! 

                Nous ne pouvons donc pas séparer le pain et le vin offerts, du sacrifice que le Christ a réalisé une fois pour toutes pour notre salut. Refaire les gestes qu’il a fait et redire les paroles qu’il a dites au soir du Jeudi Saint, parce qu’il nous a dit de faire ainsi (Faites cela en mémoire de moi), c’est nous unir au Christ Sauveur, c’est communier à sa vie. Ayant fait le choix du Christ d’une manière aussi radicale et intime, nous ne pouvons que rejeter tous les autres sacrifices, toutes les idoles que notre monde affectionne. Amour, gloire et beauté ne nous rapprochent pas du Christ et ne nous unissent pas à lui. Le pain et le vin partagés, eux le font ; ils nous rapprochent du Christ, ils nous unissent à lui, et ce faisant, nous unissent les uns aux autres : Puisqu’il y a un seul pain, la multitude que nous sommes est un seul corps, car nous avons tous part à un seul pain. Et voilà que l’eucharistie n’est plus le sacrement où je reçois mon doux Jésus à moi tout seul et pour moi tout seul ; mais je le reçois avec les autres, pour les autres, pour n’être qu’un avec les autres, que je les aime ou pas ! Le Christ ne s’étant pas offert pour moi tout seul en sacrifice, mais pour tous les hommes, partager son pain et son vin, c’est m’unir à lui et à tous ceux pour qui il s’est donné. Là est la raison pour laquelle les prêtres, même confinés seul, ont continué fidèlement à célébrer l’eucharistie : non pas parce qu’ils en ont le pouvoir, mais pour rester unis et au Christ qu’ils ont choisi de servir, et au peuple vers lequel ils ont été envoyés. A travers eux, chacun de vous était présenté au Christ, uni au Christ par le prêtre célébrant. 

       Alors certes, et beaucoup de chrétiens l’ont exprimé durant le confinement, nous pouvons nous unir au Christ autrement. Tous ceux qui ont été au service des plus fragiles étaient unis au Christ d’une manière particulière. Tous ceux qui ont renforcé leur vie de prière étaient unis au Christ d’une manière particulière. C’est vrai. Mais l’eucharistie nous unit à lui d’une manière plus intensive : elle est la source et le sommet de notre foi. Il n’y a pas de moyen plus fort pour nous unir à lui, parce que quand il se livre ainsi, c’est lui qui s’unit à nous totalement. Il nous donne tout de lui, toute sa vie, pour faire grandir la nôtre. Et cela ne se joue que là, dans ce pain et ce vin partagés. Un dimanche pour louer le Christ qui se livre ainsi à nous n’est pas de trop ; en fait, c’est toute notre vie qui doit devenir, à la suite du Christ, eucharistie, c’est-à-dire vie donnée, vie offerte pour la gloire de Dieu et le salut du monde. Amen.


samedi 6 juin 2020

Sainte Trinité A - 07 juin 2020

Une fête pour redonner du sens à un monde en crise.








            Maintenant que les rassemblements des croyants sont à nouveau autorisés, même si c’est encore en nombre restreint, nous pouvons nous interroger sur cette période étrange que nous venons de vivre et tenter de comprendre mieux ce qui s’est joué durant ce temps pour les croyants en général, et pour les chrétiens en particulier. 

            Ce qui m’a le plus frappé, c’est la subite envie des hommes et des femmes de retrouver rapidement le chemin des lieux de culte. Car enfin, reconnaissons-le, nos contemporains ne sont pas vraiment, du moins en Europe, des coureurs d’Eglise. Qu’est-ce qui a ainsi mobilisé bien au-delà de notre cercle habituel pour un retour rapide du culte public dans une France tellement marqué par la laïcité, qu’elle entend bien faire de l’expression religieuse une dimension purement personnelle ? Si nous relisons l’histoire de ces derniers mois, il faut bien constater que ce ne sont pas nos évêques qui se sont mobilisés le plus. Le recours devant le Conseil d’Etat, ce sont des groupes de laïcs, voire des politiques, qui l’ont porté ; et une fois le jugement rendu, ce ne sont toujours pas les responsables religieux qui ont le plus sauté de joie. Certains en étaient même gênés, invitant encore à la plus grande des prudences, alors que le peuple de Dieu ne cessait de dire : enfin ! Enfin était reconnu ce besoin essentiel des hommes de se rassembler ; enfin était reconnu ce besoin essentiel des hommes de célébrer, de donner sens à ce qu’ils vivent. Enfin était reconnue l’importance de la dimension spirituelle de toute vie humaine, dimension justement niée lors de ces obsèques en catimini que de trop nombreuses familles ont connu en ce temps de confinement. 

            Si je parle de cela aujourd’hui, en cette fête de la Trinité, c’est parce que cette solennité toute chrétienne rejoint l’expérience de ces hommes et de ces femmes qui ont attendu de pouvoir se rassembler à nouveau, dans la joie et l’espérance d’un monde meilleur. Cette fête redonne du sens à un monde en crise. Ou pour le dire autrement, les chrétiens ont compris, durant ce temps de disette liturgique, que la foi chrétienne avait nécessairement une dimension communautaire parce que Dieu lui-même, s’il est Un et Unique, n’en est pas pour autant un isolé, ni un solitaire. En proclamant Dieu Trinité, les chrétiens disent fondamentalement que Dieu en lui-même est relation d’amour vitale. Qui dit relation, qui dit amour, dit nécessairement la pluralité des personnes engagées. Dieu n’étant ni solitaire, ni isolé, ceux qui croient en lui ne peuvent être ni solitaires, ni isolés. Dieu étant en lui-même relation d’amour, ceux qui croient en lui ne peuvent que vivre de cette relation et vivre cette même relation avec Dieu et avec les autres. Et une relation d’amour ne peut pas être durablement virtuelle. Quand l’Apôtre Jean affirme que Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, il nous dit la réalité de l’œuvre de Dieu. Le Fils ne s’est pas livré virtuellement, mais réellement. De même, il n’est pas présent virtuellement dans la vie du croyant, mais réellement. Ce que proclame l’oraison de la messe de cette solennité, n’est pas davantage virtuel : Dieu notre Père a [bien] envoyé dans le monde [sa] Parole de vérité et [son] Esprit de sainteté. La Parole de Dieu n’est pas une parole virtuelle ; l’Esprit de sainteté n’est pas davantage un Esprit virtuel. Puisque Dieu est un, tout en étant Père et Fils et Saint Esprit, les croyants ne sauraient s’abstenir longtemps de participer à ce mouvement d’amour et d’unité en étant éloignés les uns des autres. Le besoin de rassemblement naît, me semble-t-il, de ce que nous disons de Dieu lui-même. Puisqu’il est, avec [son] Fils unique et le Saint Esprit, un seul Dieu, un seul Seigneur, dans la trinité des personnes et l’unité de leur nature (préface du jour), les croyants eux-mêmes ne peuvent faire qu’un, qu’en entrant à leur tour dans ce mouvement de diversité et d’unité. Les chrétiens n’adorent pas trois dieux, mais un seul, unique, qui est un Père qui nous livre sa Parole et son Esprit, autrement dit un Père qui se livre tout entier pour ses enfants. Et pour faire corps, les croyants ont besoin de se rassembler dans leur diversité pour vivre cette unité en Dieu, un et trine. La fête de la Trinité nous rappelle, plus que toute autre fête, que nous ne pouvons pas nous faire un Dieu à notre mesure, un Dieu pour nous tout seul, un Dieu tout personnel, mais que nous avons à nous retrouver, dans notre diversité, dans la célébration de ce Dieu unique qui nous aime tous. Le don de son Fils et le don de son Esprit Saint sont les signes de cet amour unique de Dieu pour chacun de nous, amour qui nous unit dans une même foi, partagée et célébrée ensemble.  

            Il me reste alors à faire un rêve, le rêve que ce que les croyants ont ainsi senti de la nécessité de se rassembler devienne réalité et que l’abondance revenue, ils ne reviennent pas à la situation d’avant et ne s’installent pas davantage dans les habitudes prises d’une messe virtuelle le dimanche. Le rassemblement dominical est de l’ordre du vital si nous ne voulons pas finir par célébrer chacun son petit Dieu personnel, inconnu des autres. Et si nos hommes politiques prenaient l’habitude de fréquenter quelque peu nos églises, ils ne les auraient sans doute pas fermées, mais simplement limitées. Des rassemblements à cinq milles, on peut en rêver, mais ils sont très loin de nos réalités. Quelques mesures de prudence et de distanciation physique auraient bien suffit, comme aujourd’hui, pour lutter contre la propagation du virus, sans engendrer peur, dépression et angoisse chez les plus fragiles, qui n’avaient même plus le secours de la religion pour trouver une espérance. Quand on enferme les gens chez eux, on les enferme dans leur fragilité en les coupant des autres, en les coupant de l’amour tellement nécessaire en temps de crise. Que le Dieu Trinité qui se donne à nous, nous accorde de nous donner à lui et aux autres, dans un unique mouvement d’amour. Nous pourrons ainsi retrouver la paix et l’espérance qui nous ont tant fait défaut. Amen.


(Colijn de COTER, La Sainte Trinité, (1510-1515), Musée du Louvre, Lens)