Bienvenue sur ce blog !

Ce blog voudrait vous permettre de vivre un chemin spirituel au rythme de la liturgie de l'Eglise catholique.

Les méditations s'appuient soit sur les textes bibliques quotidiens, soit sur la prière de l'Eglise.

Puisque nous sommes tous responsables de la foi des autres, n'hésitez pas à laisser vos commentaires.

Nous pourrons ainsi nous enrichir de la réflexion des autres.







samedi 30 octobre 2010

Toussaint - 01er novembre 2010

Pouvons-nous nous passer des saints ?



La question, certes provocante, a hanté ma préparation de cette fête. Car, au premier abord, les saints restent des personnages inaccessibles, lointains, qui nous renvoient trop souvent à nos limites et nos faiblesses. Que voulez-vous : nous ne sommes pas saints, nous ! Alors souvent, nous sommes comme ces enfants à qui l’on montre ce qu’ils pourraient être et qui se découragent, soit par paresse, soit parce que le but proposé leur semble impossible à atteindre. C’est certes une belle perspective d’avenir, mais ce n’est pas pour nous. Les saints sont-ils là alors pour nous renvoyer l’image de notre imperfection ? Bien sûr que non.

Pouvons-nous nous passer des saints ?
La question mérite une réponse plus précise. Il nous faut la décliner en trois temps, car les saints sont des personnages d’hier, qui nous ouvrent à demain en nous invitant à vivre l’aujourd’hui de Dieu.

Les saints, des personnages d’hier. C’est une évidence. Pour figurer sur le calendrier liturgique, il faut quand même être mort. Les saints sont donc ceux qui nous précèdent dans le Royaume. Ils nous sont donnés en exemple, non pour nous rabaisser, mais pour nous rappeler qu’il est toujours possible de décider de marcher à la suite de Dieu, quelque soit l’époque, quelque soit notre situation de vie. Le pape Jean-Paul II, par ses multiples canonisations, nous rappellent que les saints ne sont pas élevés dans les monastères uniquement : il a proclamé saint des pères et des mères de familles, des enfants, des hommes et des femmes qui ont essayé de suivre le Christ dans le quotidien de leur vie et qui ont témoigné d’une manière particulière de la foi qui les faisait vivre. Les saints sont des personnages d’hier qui nous tirent vers le haut, sans nous faire évader de notre présent. Ils sont les fondations de notre foi quotidienne : nous pouvons nous appuyer sur eux, suivre à notre tour le chemin qu’ils ont emprunté. Nous pouvons surtout apprendre d’eux comment rendre aujourd’hui encore notre foi vivante et active. Le passé n’est pas une époque dorée où croire était plus facile : les saints martyrs nous le rappellent. Proposés à notre vénération, les saints nous plongent dans notre aujourd’hui en nous invitant sans cesse, là où nous vivons, tenant compte de notre époque et de ses contingences, à suivre l’appel de Dieu adressé à tous à vivre de sa Parole, à lui faire confiance et à construire un monde plus juste et plus humain. Les saints nous invitent aujourd’hui encore à vivre de l’esprit des béatitudes en aimant comme le Christ a aimé.

Les saints, des personnages qui nous tournent vers demain. Tout le sens de la Toussaint réside dans cette ouverture temporaire au monde de demain que nous espérons. Célébrer en une seule fois tous les saints nous fait participer par anticipation, à la vie du Royaume. La première lecture levait le voile sur cette liturgie céleste à laquelle seront conviés ceux qui auront le suivi le Christ sauveur. S’il est bon de s’appuyer sur nos aînés dans la foi pour progresser et approfondir notre propre manière d’être chrétien aujourd’hui, nous ne devons pas oublier à quel avenir nous sommes destinés. Nous sommes faits pour vivre, aujourd’hui certes, mais aussi demain, avec Dieu et en Dieu. Nous sommes de ces gens vêtus de blancs dont parle l’Apocalypse : mais il nous faut encore traverser la grande épreuve et laver notre vêtement dans le sang de l’Agneau. Ne perdons pas de vue cet avenir glorieux ; Dieu est fidèle à sa promesse, il ne rejette pas l’alliance qu’il a conclu avec nous. Nous faisons fausse route chaque fois que nous limitons notre vie à notre aujourd’hui : l’homme est plus grand que ce qu’il fait et ce qu’il vit. L’homme vaut plus que ce qu’il possède. La Toussaint, en nous rappelant notre avenir, nous le redit avec force.

Les saints, des personnages qui nous renvoient à notre aujourd’hui. Parce que c’est aujourd’hui qu’il nous faut tendre vers la sainteté. Etre Saint n’est pas une récompense pour l’avenir, c’est un art de vivre aujourd’hui notre foi. C’est croire que Dieu est présent au cœur de notre vie ; c’est essayer, toujours et encore, de vivre des béatitudes ; c’est mettre l’amour de Dieu et des autres au cœur de notre vie. C’est être artisan de paix et de réconciliation dans un monde de plus en plus divisé. C’est agir pour que tous aient une vie meilleure avec les moyens qui sont les nôtres. Il ne s’agit pas de faire de grandes choses : il s’agit de faire bien ce que nous avons à faire et de toujours recommencer et nous relever lorsque le péché nous domine. Les saints n’étaient pas exempts de faiblesses : ils se sont montrés plus forts, à cause de leur foi en Christ, vainqueur de toutes nos faiblesses, passées, présentes et à venir. Si nous pouvons nous appuyer sur les saints d’hier, nous avons à être ceux qui entraîneront aujourd’hui et demain les croyants vers le Dieu vivant et vrai. Il y a certainement des saints au milieu de nous, càd des personnes qui nous renvoient à l’amour de Dieu pour nous.

Alors, pouvons-nous nous passer des saints ?
Non, bien sûr. Nous ne pouvons ni nous passer d’eux, ni nous passer de le devenir. C’est à nous d’écrire aujourd’hui les pages de l’histoire de l’Eglise, les pages de l’histoire d’amour de Dieu avec l’humanité. Ils sont l’héritage que nous devons assumer et faire fructifier. Pour que demain encore se lève cette foule qui marchera à la suite du Christ. Par notre baptême, nous appartenons au Peuple saint ; par notre vie, nous le deviendrons, avec la grâce de Dieu, le seul Saint véritable. Que notre eucharistie, en ce jour de fête, ravive en nous le désir de sainteté, le désir d’être toujours au côté de Dieu. Amen.



(Photo de Quentin Urlacher, prise à Salta, Argentine)

31ème dimanche ordinaire C - 31 octobre 2010

Seigneur, tu fermes les yeux sur les péchés des hommes pour qu’ils se convertissent.



Cette phrase, extraite de la première lecture, aurait dû empêcher toute mauvaise interprétation au sujet de la bonté de Dieu et du pardon que Dieu accorde, ainsi que toute mauvaise interprétation au sujet du péché de l’homme. Avec vous, je voudrais essayer de remettre un peu d’ordre dans tout cela.

Commençons par le plus désagréable : le péché de l’homme. Si nous sommes heureusement sortis d’une période où tout était péché, nous sommes malheureusement entrés, dans le même mouvement, dans une période où plus rien n’est péché. Il n’y a que l’homme et ses actes, plus ou moins bon. Mais de péché, plus de trace ! Or, autant il est malsain de voir du péché partout, autant il est malsain de n’en plus voir du tout ! Supprimer la notion de péché, c’est supprimer aussi à Dieu, et aux frères, la capacité d’exercer le pardon. S’il n’y a plus de péché, il n’y a plus de pardon possible.

La Bible nous apprend que le péché existe. Il se manifeste à travers des actes individuels et collectifs ! Devant Dieu, tous les hommes sont pécheurs. Parce que tous les hommes sont capables de ne pas ou de ne plus aimer ; parce que tous les hommes sont capables de se détourner de Dieu, voire de se prendre pour Dieu. Mais lorsque la Bible pose cette affirmation de la présence du péché dans la vie de tout homme, elle ne verse pas dans le pessimisme, car elle rappelle de suite combien l’amour de Dieu est plus grand que le péché, combien sa miséricorde est patiente et efficace. Et si quelques textes bibliques donnent l’impression que Dieu comptabilise les péchés de l’homme comme une caissière de supermarché, ce n’est pas pour lui présenter l’addition, mais pour lui montrer toute la force de son amour divin. Tu fermes les yeux sur les péchés des hommes pour qu’ils se convertissent ! Plus le péché est grand, plus l’amour de Dieu est grand ! Plus le péché est grave, plus l’amour de Dieu est puissant ! Car l’homme de la Bible, qui se sait pécheur comme les autres, ne désespère pas de lui et se souvient toujours de l’immense amour de Dieu pour lui. Cet amour est allé jusqu’au sacrifice du Fils unique de Dieu pour que les hommes comprennent jusqu’où Dieu est prêt à aller, par amour, pour le salut de sa création. L’homme expérimente l’amour de Dieu lorsque le péché des hommes est à son comble dans le meurtre de l’innocent. Même là, Dieu est encore prêt à pardonner si l’homme se convertit. Le péché n’est pas la fin de l’homme ; c’est le début de l’expérience de l’amour de Dieu à son égard.

Tu fermes les yeux sur les péchés des hommes pour que les hommes se convertissent. Ainsi donc Dieu est prêt à pardonner, toujours. Mais il faut que l’homme se montre désireux d’être pardonné, désireux de changer de vie. C’est cela la conversion ! Comment un médecin pourrait-il soigner un malade qui refuse de reconnaître son mal ? Ainsi, Dieu ne peut pas pardonner celui qui est persuadé qu’il n’a rien à se faire pardonner. L’amour de Dieu ne peut s’exercer qu’en face de la négation de son amour. L’amour de Dieu ne peut soigner que celui qui se reconnaît pécheur et faible devant Dieu. Souvenez-vous de l’évangile de la semaine passée : le publicain est reconnu juste parce qu’il a reconnu sa faiblesse et demandé l’aide de Dieu !

Pour chacun de nous vient le moment où nous sommes comme Zachée, perché sur notre arbre à certitude, mais dérangé par Dieu qui s’invite dans notre vie. Voilà quelqu’un (Zachée) qui est qualifié par la rumeur publique de grand pécheur. Son envie de voir Jésus lui vaudra la vie. Sans doute ne demandait-il pas tant. Mais voilà, Jésus s’invite chez cet homme et cet homme en est profondément bouleversé. Aujourd’hui devient pour lui le jour de sa rencontre avec l’amour de Dieu à l’œuvre. Aujourd’hui devient pour lui le jour de son salut, … s’il le veut ! Face à l’amour de Dieu exprimé dans cette invitation un peu forcée, Zachée soudainement prend conscience qu’il doit changer de vie. Il s’engage au partage en faveur des plus pauvres et à réparer jusqu’à quatre fois le mal qu’il aurait pu faire ! Jésus peut alors proclamer le salut de cet homme parce que Zachée a pris la décision de modifier ses valeurs, son comportement. La bonté de Dieu est toujours liée à la bonne volonté de l’homme. Si Zachée était resté perché sur son arbre sans accueillir Jésus, jamais le salut n’aurait pu lui être manifesté.

A ceux qui croient qu’il suffit d’affirmer : « Dieu pardonne toujours ! », l’histoire de Zachée vient redire que le pardon de Dieu n’est efficace qu’accompagné d’un radical et profond changement de vie. Il n’y a rien d’automatique ou de systématique ! Dieu pardonne toujours à ceux qui se convertissent, qui s’engagent résolument sur la voie du pardon, sur la voie d’une vie meilleure, au service de Dieu et des frères. Ceux qui n’en ressentent pas la nécessité, n’ont que peu de chance de sentir la miséricorde à l’œuvre. Le pardon précède toujours la conversion, mais il lui reste subordonné : celui qui refuse de se reconnaître pécheur, refuse de reconnaître que Dieu peut quelque chose pour lui, refuse de reconnaître que Dieu l’aime malgré son péché.

Soyons comme Zachée, curieux de Dieu et de son amour. Laissons-nous envahir par cet amour et accueillons le salut qu’il nous offre. Aujourd’hui, le Seigneur ferme les yeux sur nos péchés pour que nous nous convertissions ! Aujourd’hui, le salut est arrivé pour nous, si nous le voulons ! AMEN.


(Dessin de Coolus, voir blog du lapin bleu dans les liens)

samedi 23 octobre 2010

30ème dimanche ordinaire C - 24 octobre 2010

Du pharisien ou du publicain, qui sera sauvé ?


Deux hommes montèrent au Temple pour prier. L’un était pharisien et l’autre, publicain. Cette parabole de Jésus, qui ne l’a jamais entendue ? Elle commence sur la présentation de deux hommes, dont nous ne saurons pas le nom mais la qualité : l’un est pharisien, l’autre publicain. S’il fallait la retranscrire avec des mots d’aujourd’hui, nous dirions ainsi : deux hommes allèrent à l’église pour prier. L’un était croyant et pratiquant et l’autre avait mauvaise réputation et profitait de tous. Ainsi mis sous notre microscope, nous pouvons nous demander ce qui a pris Jésus de mettre en concurrence deux hommes, deux mondes, qui ne se rencontraient guère, deux hommes, deux mondes qui ne partageaient pas du tout les mêmes valeurs. Dans le cœur des auditeurs de Jésus, le match commençait en faveur des pharisiens. Ils sont les gens respectables que tous admirent, capables de nous tourner vers Dieu, tandis que les publicains sont méprisés, évités, presque sans Dieu, tant leur vie est mauvaise. Pharisiens 1 : Publicains 0.

Jésus poursuit sa parabole : Le pharisien priait en lui-même : « Mon Dieu, je te rends grâce parce que je ne suis pas comme les autres hommes : voleurs, injustes, adultères, ou encore comme ce publicain. Je jeûne deux fois par semaine et je verse le dixième de tout ce que je gagne. » Quel curé n’aimerait pas avoir des paroissiens de cette trempe ? Voilà un homme attaché sincèrement à sa foi et au respect des pratiques cultuelles. Il mène une vie saine et… sainte. Ce qu’il dit, il le fait ! Il est l’exemple à suivre pour connaître Dieu. Sans doute, les pharisiens vont-ils marquer là un deuxième point. Pharisiens 2 : Publicains 0 ? Pas si vite, semble dire Jésus. Regardons d’abord l’autre, celui que personne ne veut voir.

Le publicain, lui, se tenait à distance et n’osait même pas lever les yeux vers le ciel. Il n’ose pas s’approcher ; il semble craindre celui qu’il est venu rencontrer dans sa prière. Certains diraient sans doute : avec raison, au vu de la vie qu’il mène. Pour d’autres, il n’a certainement pas sa place ici ; il souille le Temple par sa seule présence ! Comme pour leur donner raison, le publicain se frappait la poitrine, en priant : « Mon Dieu, prends pitié du pécheur que je suis ! » Si même lui ne trouve pas grâce à ces yeux ! On ne peut pas le suivre ; on s’éloignerait bien trop de Dieu en vivant comme lui ! Il fait moins le fanfaron, là, dans le Temple, les yeux baissés, l’air tout déconfit et contrit. Pharisiens 3 : Publicains 0 ? Tout doux, tout doux ; ne nous emballons pas ! Regardez mieux et écoutez ce que dit Jésus : Quand ce dernier (le publicain, l’homme de mauvaise vie) rentra chez lui, c’est lui, je vous le déclare, qui était devenu juste, et non pas l’autre (à savoir le pharisien). Pour Jésus, le score est : Pharisien 0 : Publicain 1. Que s’est-il passé pour que nous en arrivions là ?

Il s’est passé un temps de prière, c’est-à-dire un temps qui devait être une rencontre avec Dieu, à l’écoute de Dieu, un temps pendant lequel Dieu pouvait être Dieu, et manifester quelque chose de son amour, de sa tendresse, de sa miséricorde à ceux qui s’adressaient à lui. Le pharisien a visiblement raté sa rencontre : il ne parle que de lui à Dieu, de ce qu’il fait de bien, de sa manière de vivre sa foi. Ce n’est pas que cela n’intéresse pas Dieu ; mais que voulez-vous que Dieu fasse pour lui à part, éventuellement, l’admirer ? Il n’a besoin de rien ; il n’attend rien de Dieu ; il se décerne à lui-même les bonnes notes de conduite. A quoi lui sert de rencontrer Dieu ? A quoi lui sert sa prière ? Elle n’est que tournée vers lui, vers sa satisfaction personnelle. Dieu n’est là que pour l’écouter parler de lui et non pas pour lui parler. Il a oublié qu’il est aussi une créature de Dieu et que celui-ci est plus grand que tout, plus grand que lui.

Le publicain, au contraire, dans sa crainte de Dieu et dans la reconnaissance de sa petitesse et de ses limites, se présente devant Dieu dans toute sa pauvreté et attend de Dieu qu’il le prenne en pitié. Il a besoin de Dieu ! Il a besoin que l’amour de Dieu lui soit manifesté, puisque les autres ne lui en manifestent guère. Il sent bien que le seul qui pourrait quelque chose pour lui, c’est Dieu. Alors il vient, doucement, prudemment, humblement vers Dieu et confesse ses faiblesses, son vide, son besoin urgent de compter pour quelqu’un. S’il devient juste, c’est parce qu’il a frappé à la bonne porte. Dieu n’attendait que lui pour lui dire qu’il est aimé, pardonné, élevé. Elevé, c’est justement le mot que nous utilisons à Pâques pour parler de Jésus qui, s’étant abaissé jusqu’à la mort, et la mort de la croix, a été élevé d’entre les morts par la toute-puissance d’amour de Dieu le Père.

Le pharisien était trop plein de lui, de ses bonnes actions, pour se rendre compte qu’il avait toujours et encore besoin de Dieu pour être sauvé. Lui seul sauve, lui seul rend juste. Le publicain s’est fait petit devant Dieu, reconnaissant que Dieu seul pouvait encore quelque chose pour lui. Il n’a rien à présenter à Dieu, il a tout à recevoir de lui. Vide de tout, il peut être comblé par Dieu, et donc sauvé. Apprenons de ces deux hommes le sens de la vraie prière : c’est celle qui nous détourne de nous pour nous tourner vers Dieu. Ainsi seulement, Dieu pourra-t-il nous attirer à lui et nous sauver. Jésus a bien raison quand il nous avertit ainsi : Qui s’élève, sera abaissé ; qui s’abaisse, sera élevé. Amen.




(Dessin : Editions CRER, 2005 - B. Debelle)

samedi 16 octobre 2010

29ème dimanche ordinaire C - 17 octobre 2010

Le Fils de l’homme, quand il viendra, trouvera-t-il la foi sur terre ?



Je me garderai bien de répondre à cette question, car elle n’a que deux réponses possibles : oui ou non. Mais est-ce si simple que cela ? Comment savoir ce qui est indispensable pour appartenir au peuple croyant ? Comment pouvoir dire en vérité : je crois ? Les textes proposés par la liturgie de ce jour nous indiquent trois réalités qui permettent de vivre un chemin de Foi. Ces trois réalités ne sont pas à opposer, à mettre en concurrence, mais à tenir ensemble, dans un même mouvement.

Première réalité : la foi, c’est une question de confiance en Dieu. C’est Moïse qui nous le rappelle dans la première lecture. Avec le peuple libéré d’Egypte, il erre dans le désert et doit faire aux attaques des tribus nomades. Le passage du Livre de l’Exode que nous avons entendu, nous livre le récit d’une de ces batailles. Elle symbolise la lutte du bien contre le mal. La victoire finale est obtenue non par les armées, mais par Dieu qui assiste son peuple tant que Moïse tend les bras vers lui. Et quand la confiance baisse, quand la fatigue et le découragement gagnent, ceux qui accompagnent Moïse sur la montagne l’aident à garder les bras levés, témoignant ainsi aux combattants la présence de Dieu à leurs côtés. L’acte de confiance de Moïse et de tout le peuple, en la puissance du Dieu qui les a tirés d’Egypte, leur accorde la victoire.
La foi ne commence-t-elle pas par un acte de confiance au Dieu qui nous fait vivre ? Il nous a promis sa présence au cœur de notre vie ; en donnant son fils, il nous redisait son engagement au service du bonheur et de la vie des hommes. Avons suffisamment confiance en Dieu pour croire qu’il nous accompagne et qu’il veille sur chacun de nous ?

Deuxième réalité : la prière, la prière insistante. Si Dieu accompagne chaque instant de notre vie, comment ne pas croire qu’il répondra à nos appels ? Comment douter de la bonté de Dieu envers ceux qui crient vers lui ? Vous pourrez me dire que ce serait plus simple s’il intervenait seul, sans que nous ayons besoin de l’appeler ! C’est vrai. Mais Dieu ne s’impose pas à l’homme, et la prière vient nous rappeler la nécessité de bien savoir ce dont nous avons besoin pour progresser en justice, en charité, en fraternité. Dieu ne vend pas la paix, ni la justice, ni la compassion : il nous en offre les graines. Il nous offre les moyens de devenir plus juste, plus aimant, plus fraternel. La prière, c’est l’art de demander à Dieu de changer notre cœur en profondeur pour que nous soyons capables de vivre selon son Evangile, et non demander à Dieu de faire le travail à notre place. La première des choses à demander à Dieu, c’est le don de l’Esprit Saint, seul capable d’éclairer nos intelligences et de transformer nos cœurs.
Osons-nous encore prier Dieu de nous transformer en profondeur ? Osons perdre un peu de temps quotidiennement, pour l’œuvre de la prière ? Croyons-nous encore que la prière de la communauté rassemblée vient renforcer et purifier notre prière personnelle ?

Troisième réalité : l’Ecriture Sainte à garder, à méditer et à partager comme un trésor. L’Ecriture Sainte comme lieu de vérification de notre foi et de la volonté de Dieu pour chacun de nous. Cette Parole est à garder telle qu’elle a été transmise. On ne transige pas avec elle ; on ne l’accommode pas au goût du jour ; on ne la trafique pas. Paul souligne l’importance de la Parole dans la vie du croyant : elle sert à l’enseignement, à l’éducation à la justice, à la dénonciation du mal sous toutes ses formes. Elle est l’arme par excellence du croyant qui pourra toujours y puiser la vérité ultime sur l’homme et sur Dieu.
Qu’avons-nous fait de cette parole ? Aimons-nous y puiser notre chemin de vie ? Avons-nous l’habitude en famille de la lire, de la méditer ? Osons-nous en parler et la répandre autour de nous ?

Avoir confiance en Dieu, prier avec insistance – seul et en communauté – se nourrir de l’Ecriture sainte : voilà des caractéristiques du croyant. Elles ne sont pas les seules, certes : mais elles sont indispensables, car ce sont ces trois réalités-là qui, bien vécues, nous permettront ensuite une vie conforme à l’esprit de l’Evangile. Que cette eucharistie nous permette de nous situer en vérité devant notre Dieu : qu’elle soit l’occasion de lui redire notre confiance, de lui confier notre vie et d’accueillir sa Parole, pour repartir plus fort dans notre quotidien. Amen.


(Photo prise en Roumanie)

samedi 9 octobre 2010

28ème dimanche ordinaire C - 10 octobre 2010

Si nous sommes infidèles, lui, il restera fidèle !

Voilà une bonne nouvelle pour le monde de ce temps. Voilà de quoi raviver notre espérance ! Voilà de quoi redonner du corps à notre foi ! Dieu est fidèle, Dieu reste fidèle même dans notre infidélité.

Regardez les lépreux dans l’Evangile. Ils ne sont pas des malades parmi d’autres. Jésus n’est pas un simple médecin qui nous guérirait d’une grippe saisonnière. Jésus est LE médecin qui nous libère de ce mal qui nous ronge tous, de cette lèpre qui nous coupe des autres, que nous en soyons conscients ou non. Et ce mal, cette lèpre, c’est le péché ! La lèpre, à l’époque de Jésus, n’était pas une maladie comme les autres ; elle était une maladie qui mettait à part, qui excluait, comme le péché nous exclut de l’alliance avec Dieu. Cette maladie avait, jadis, une forte signification religieuse. Les prophètes n’annonçaient-ils pas la venue du Messie par ce signe, entre autres : les lépreux seront guéris ?

Jésus, face à ces lépreux qui crient vers lui, ne réagit pas comme auraient réagi tous ceux de son époque. Il ne les éloigne pas, il s’adresse à eux ; il établit une nouvelle communion avec eux et les réintègre dans la communauté humaine et dans la communauté croyante. Allez vous montrer aux prêtres : c’est-à-dire allez faire valider votre guérison, allez et réintégrez la communauté à laquelle vous appartenez. Ces lépreux guéris sont le signe du pouvoir de Dieu sur le Mal et la mort. Ils sont le signe que Dieu aime tous les hommes, même (et faut-il préciser surtout) ceux que la lèpre du péché défigure et exclut.

Le dixième lépreux, tout comme Naaman le Syrien dans la première lecture, nous montre que l’amour de Dieu ne se limite pas au peuple qu’il a choisi et élu. Non, l’amour de Dieu est pour tous, et la libération annoncée et réalisée en Jésus concerne tous les hommes. L’amour de Dieu, la fidélité de Dieu à sa création, vont jusque là. Nul n’est exclut de cet amour. Le sacrifice de Jésus sur la croix est pour tous, pas seulement pour les disciples.

Nous comprenons alors mieux l’affirmation de Paul : Si nous sommes infidèles, lui (Jésus), restera fidèle, parce qu’il ne peut se renier lui-même. Comment donc celui qui est allé jusqu’à la mort ignominieuse sur la croix pourrait-il soudain dire : pour celui-là, je ne donnerai pas ma vie ? Le sacrifice du Christ est unique, il est pour tous, une fois pour toutes. Et quelle que soit notre vie, quelle que soit la « monstruosité » de notre péché, nous serons toujours accueillis par Dieu, lorsque nous crierons vers lui.

Jésus, maître, prends pitié de nous ! Ce cri des lépreux est à lui seul un acte de foi et une reconnaissance de leur imperfection. Un acte de foi puisqu’ils reconnaissent Jésus comme Maître, comme leur Maître. Ils se font ses disciples. Mais en même temps, ils reconnaissent, ils confessent qu’ils ont besoin de lui : prends pitié de nous ! Notre eucharistie ne s’ouvre-t-elle pas sur ces mêmes mots après la salutation liturgique ? Nous savons que le péché ronge notre vie, mais nous savons surtout que Jésus est plus fort que notre péché, que son amour est plus grand que notre mal, et que son alliance, scellée dans son sang, est pour toujours. En criant vers lui, nous lui redisons notre désir d’être ses disciples, notre désir d’être libérés de toutes ces lèpres qui nous éloignent de lui. Avec Naaman le Syrien, avec ce dixième lépreux, nous pouvons rendre grâce à Dieu pour son œuvre d’amour et pour sa fidélité à son peuple, à nous, même et surtout lorsque nous sommes infidèles.

Si nous sommes infidèles, lui, il restera fidèle. Puisse chacune de nos eucharistie être à la fois le signe de notre désir de voir Dieu présent au cœur de notre vie et le signe de notre reconnaissance pour sa fidélité sans faille. Puisse chacun de nos dimanches devenir le jour où nous nous souvenons de Jésus Christ, et de ce que son amour réalise pour nous. Amen.


(Photo d'un ami voyageur, Quentin Urlacher. Voir son blog dans les liens)

dimanche 3 octobre 2010

27ème dimanche ordinaire C - 03 octobre 2010

Quelconque, inutile, bon à rien !



Quelconque, inutile, bon à rien ! Suivant les traductions, c’est ainsi qu’il faut comprendre la parole de Jésus. Et reconnaissons-le d’emblée : cela ne fait plaisir à personne de s’entendre dire : tu es quelconque, inutile ou bon à rien, surtout à une époque où le paraître a tellement d’importance pour nous. Nous voulons bien agir, intervenir, servir, à condition que cela soit reconnu, proclamé et mille fois remerciés, et de préférence nommément, individuellement et en public ! Même en Eglise, nous n’échappons pas à cette règle.

Quelconque, inutile, bon à rien ! Ces paroles font partie alors de la longue série de paroles dures de Jésus que nous entendons depuis quelques semaines déjà. Jésus nous rappelle aujourd’hui à l’humilité, à la discrétion, à l’urgence du service, sans rien attendre en retour. Simplement parce que nous sommes disciples de Jésus, et que nous avons à imiter le divin Maître dans cette voie du service à tout prix, sauf celui de la reconnaissance ! C’est le travail du disciple de Jésus que de servir, toujours et encore. Le service est devenu le sacrement de l’être chrétien, depuis qu’au soir du jeudi saint Jésus lui-même a pris la place du dernier des serviteurs en lavant les pieds de ses disciples. Si le Maître est allé jusque là, n’est-ce pas pour nous obliger ? Que faisons-nous d’extraordinaire en suivant le chemin que Jésus a inauguré pour nous ? Nous savons que la « suivance » de Jésus nous mènera au Royaume, à la Béatitude éternelle, à la claire vision de Dieu. Elle nous y mène non pas par nos efforts, mais parce que Jésus lui-même a ouvert la voie par sa mort et sa résurrection et que, désormais, rien ne pourra fermer cette brèche de vie au cœur d’un monde marqué par la souffrance, le mal, le péché. Suivre le Christ, c’est faire œuvre de vie : c’est être capable de faire se planter un arbre, symbole de vie, au milieu de la mer, symbole du monde mauvais et de la mort.

Quelconque, inutile, bon à rien ! Voilà alors des qualificatifs qui nous renvoient plus largement à notre manière d’être disciples de Jésus. Sommes-nous, comme les premiers disciples de Jésus, à demander à Dieu d’augmenter en nous la foi ? Parce que, ne nous y trompons pas, c’est bien cette demande qui déclenche tout ! Comme si Dieu ne donnait pas tout quand il nous fait le don de la foi ! Comme s’il était parcimonieux dans sa distribution ! Jésus ne répond pas à la demande des disciples en augmentant leur capital foi : il répond par la nécessité du service. C’est un peu comme s’il leur disait : mais la foi vous l’avez ! Dieu vous a tout donné ; il vous revient de l’exercer dans le service gratuit, désintéressé. Dieu a semé dans le cœur des disciples la foi : sinon comment pourraient-ils suivre ce Jésus sans s’interroger sur la pertinence de son enseignement, sur le bien-fondé de ses actes ? Peut-être ont-ils l’impression que leur foi est faible, vacillante au gré des événements : mais cela ne signifie pas qu’ils n’ont pas la foi. Comment d’ailleurs la mesurer ? Non, il nous faut sortir de cette catégorie de pensée, et croire que Dieu nous éveille à la foi, une fois pour toutes, mais que la manière dont nous ressentons notre foi dépend peut-être de la manière dont nous en vivons.

Nous voici donc renvoyés à notre manière d’être chrétien, à notre manière de former communauté. Jésus, en liant la foi au service, semble dire qu’il n’y a qu’ainsi que l’on passe d’une foi proclamée à une foi vécue, une foi agissante. Avoir la foi ne servirait à rien s’il elle ne se faisait pas agissante, si elle ne se mettait pas au service de tout homme dans la construction d’un monde plus juste, plus humain, un monde où les arbres iraient se planter dans la mer, un monde où la vie jaillirait de la mort, un monde où la vie serait toujours la plus forte. L’on comprend alors la recommandation de Paul à son ami Timothée : « n’éteints pas l’Esprit : mais au contraire réveille ce don que Dieu t’a fait ». N’est-ce pas notre urgence aujourd’hui ? Réveiller le don de la foi pour le rendre contagieux, agissant, vivant ! Nous avons tous et chacun une place à tenir, un rôle à jouer, en harmonie avec les autres. Nous avons tous à rendre compte de l’espérance qui est en nous. Nous avons tous à faire œuvre de vie, dans la fidélité au Christ et à son Eglise, pour que le monde parvienne au Royaume promis. Nous avons chacun à devenir quelconque, inutile, bon à rien d’autre qu’à ce que Dieu attend de nous : être de vrais serviteurs de la vie, des guetteurs de l’aurore de ce temps nouveau inauguré par le Christ, en sa mort et sa résurrection. La fraternité universelle est au prix d’une dépossession de soi pour laisser à l’autre et au Tout Autre la première place.

Quelconque, inutile, bon à rien ! En utilisant ces qualificatifs, Jésus ne déprécie pas ce que nous sommes, ni ce que nous faisons. Il resitue simplement notre action dans le projet d’amour de Dieu pour nous. En nous faisant le don de la foi, il nous met en route, il nous met à l’œuvre dans la réalisation de ce grand projet de salut. Nous avons une place à tenir, mais elle sera toujours à la suite du Christ. Nous profitons largement de la puissance de vie qui est en lui et par notre engagement et notre témoignage, nous rendons cette grâce accessible à ceux que nous rencontrons et qui ne connaissent pas ou connaissent mal le Christ Sauveur. Puisse la célébration de cette eucharistie donner à chacun de nous, prêtres et fidèles laïcs du Christ, la grâce de redécouvrir où Dieu nous veut, et la force de tenir notre place pour cette année pastorale. Pour la gloire de Dieu et le salut du monde. Amen.